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766. L'énumération des réparations locatives, contenue dans l'article 1754, se rapporte d'une manière plus spéciale aux conditions ordinaires de nos habitations. Elle n'a donc, en matière de baux d'établissements industriels, d'application possible tout au plus qu'aux bâtiments et à l'immeuble proprement dit 1.

767. Mais, quant à la partie de l'immeuble affectée aux travaux industriels, quant aux objets qui de cet immeuble font un établissement industriel, tels que l'hydraulique, les mécanismes, machines et ustensiles d'exploitation, compris dans la délivrance, l'énumération précitée n'y a aucun trait2; c'est à l'usage local, c'est surtout, à défaut d'usage local, à l'appréciation de la nature de la réparation, c'est enfin à la convention qu'il faut se référer.

768. Ainsi, il est généralement d'usage, pour les usines hydrauliques, que le locataire soit tenu de réparer et entretenir les palées et les vannes3, la superficie en madriers (s'ils sont à nu) des ponts en bois *.

Il faut encore regarder comme étant à la charge du locataire « les petits travaux nécessaires pour maintenir les bords d'un canal ou pour préserver la digue d'un étang, quand ces petits travaux rentreront dans les devoirs de surveillance qui sont imposés d'une manière plus spéciale à un fermier à longues années. >>

Après s'être exprimé ainsi, M. Troplong ajoute : « Mais, s'il s'agit d'un ouvrage considérable, si le canal du moulin, les digues, les déversoirs sont endommagés par de graves détériorations, telles que brèches, éboulements, rupture, etc.; s'il faut enlever les atterrissements ou amas de sable et de

'Lepage, t. II,

p. 160.

Jourdheuil, p. 61.

Desgodets et Goupy, p. 479; Lepage, t. II, p. 161.
Jourdheuil, p. 68.

vase qui se forment au-dessus ou au-dessous des moulins, on fausserait l'article 17191, en condamnant le fermier à supporter un tel entretien. Ce serait intervertir les rôles et les obligations". >>

L'annotateur de Desgodets, Goupy, dit aussi que, pour que des réparations de cette sorte soient à la charge du locataire, il faudrait que le bail en fit mention, « comme des bouchis qui se font pour retenir l'eau et la porter en plus grande quantité sur le moulin; comme du coupement des herbes qui croîtraient dans l'eau et qui en retarderaient le cours et la vitesse; comme des gravouillements et enlèvements des attéries 3.>>

Selon Jourdheuil, le locataire est également exonéré des réparations à faire au poutrage de l'usine, au seuil, aux colonnes, au chapeau d'une vanne de décharge ou des roues; aux bronchis et coursiers de décharge; aux huches de tête de biez en bois; aux chevalets et aux sommiers d'un pont en bois; aux madriers qui le couronnent, si ces madriers sont chargés d'une couche suffisante de terre, gravois, pavés; aux fermes de longerons des courants ou coursiers, etc.

Le récepteur hydraulique n'est pas non plus, en général, mis à la charge du locataire. Ce récepteur étant réputé partie intégrante de l'immeuble auquel il donne le caractère d'usine hydraulique, la réparation en est le plus souvent considérée comme étant de gros entretien. M. Daviel note un arrêt inédit de Rouen, du 4 mars 1842, qui l'aurait ainsi jugé 5.

Pour tous ces objets, cependant, qui, en principe, ne tombent pas à la charge du locataire, il peut exister, dans de certaines localités, des usages contraires. C'est ainsi que, dans

1 V. cet article au numéro 688.

2 Louage, n. 178.

Lois des bâtiments, p. 482.

Baux d'usines, p. 67.

5 Cours d'eau, n. 659 d.

TOME II.

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une espèce où il s'agissait de la réparation des trous, entonnoirs et filtrations qui se manifestent annuellement dans les canaux et biefs d'une usine, la Cour de Nancy a jugé que c'était au locataire à les effectuer 1.

Pour celles des usines hydrauliques qui appartiennent à la catégorie des moulins pendants, c'est-à-dire dont la roue est élevée et abaissée suivant les variations du cours d'eau alimentaire, le locataire est chargé de la charpente ou batis, à l'aide duquel s'opère la manœuvre de la roue2.

769. Parlons maintenant des moulins proprement dits. En sus des réparations à faire à l'hydraulique, dans les conditions que nous venons d'indiquer, les locataires des moulins à eau sont encore chargés, par la généralité des usages locaux, d'entretenir les parties de l'usine comprises sous l'une des dénominations génériques suivantes : tournants, mouvants, travaillants, virants, etc.

Les objets qui, dans les localités, sont ainsi désignés, le sont par opposition à d'autres objets que leur fixité et leur situation soustraient aux influences destructrices du frottement et que, pour cette raison, l'on appelle dormants.

Les tournants et travaillants d'un moulin à eau varient suivant le système d'après lequel l'usine a été établie. Cependant, ils consistent généralement en différentes pièces du mécanisme, savoir l'arbre gisant, ou horizontal, ou de couche (tous ces mots sont employés), l'arbre debout, la lanterne, la meule gisante ou immobile, la meule courante, les deux trémions, la trémie, la huche, le baille-blé, l'arbre du tambour, etc.; le tout avec les accessoires 3.

Le locataire doit également l'entretien des ustensiles d'exploitation, tels que câbles à reprendre le hérisson, les verins,

1 Nancy, 8 août 1831 (Gauguier).

2 Desgodets et Goupy, p. 479; Lepage, p. 163. 3 Desgodets et Goupy, p. 481; Lepage, p. 164.

les pinces de fer, le treuil garni de son moulinet, le câble à lever la meule, les vingtaines, les escaliers pour monter à la trémie, les treuils à suspendre le moulin, les corbeilles à engrener, les cribles de fil de fer, une banne de treillis, les marteaux, masses et ciseaux à rhabiller les meules, les échelles à monter la farine 1.

« Dans les moulins à vent, les locataires sont ordinairement chargés de l'entretien des toiles, des volants de dehors, des volants de dedans, de l'arbre tournant, du marbre, du frein, du rouet, des trois paliers, du gros fer, de la lanterne, du câble, des quatre pièces d'archure, des marteaux à rhabiller les meules, d'une pince, des corbeilles, mesures, échelles, de la nille de fer, du moulinet à monter le blé, de la meule courante, de la meule gisante, du babillard, des huches, du blutoir2, etc. >>

En ce qui concerne les moulins sur bateaux, il faudrait ajouter, aux réparations locatives dont l'indication précède, le calfatage de la coque et les enduits de goudron sur les planches et sur le pont 3.

770. Pour les autres usines, on met également les travaillants à la charge du locataire. Par exemple, les presses employées dans les huileries, papeteries, sucreries et autres établissements semblables, font partie des travaillants. Il en est de même, dans les forges, des ourdons, des soufflets, des marteaux, des roues qui font mouvoir ces marteaux, etc.

771. «Tout locataire de haut-fourneau ou de four à réverbère, même celui qui n'est soumis par le bail qu'aux réparations locatives, est tenu de réparer toutes les dégradations dans l'intérieur des masses, des fours et des cheminées, pro

' Vt n. 772.

Desgodels et Goupy, p. 483.

Proudhon, Usufruit, n. 1728; Troplong, n. 181.
Jourdheuil, p. 68 et suiv.

duites par le feu, ou, ce qui est la même chose, par le travail; c'est à lui exclusivement à remonter les parois intérieures, brûlées pendant sa jouissance, de la masse du haut-fourneau et d'une cheminée de four et d'affinerie, et tout l'intérieur d'un four en briques; il est également tenu de toute la maçonnerie de ce dernier, si l'intérieur ne peut se réparer et reconstruire convenablement qu'à cette condition. La cuve tout entière d'un haut-fourneau, le creuset et la tympe de fer, sont à la charge du locataire1. »

Quant à l'intérieur d'un four à réverbère, il faut distinguer entre le cas où, par exception à ce qui a été dit plus haut 2, le propriétaire aurait délivré cette partie de l'usine toute montée, et le cas où, d'après l'usage, il ne l'aurait pas transmise en état de travail. Dans la première hypothèse, le locataire serait tenu des dégradations; il n'en serait pas tenu dans la seconde 3.

772. Enfin, dans toutes les usines, manufactures, ateliers, filatures à la mécanique et autres établissements ou propriétés de l'espèce, il existe des outils et agrès, tels que tenailles, ringards, marteaux, enclumes, ciseaux, manches, ressorts de gros marteaux de forge ou de martinets, frettes, cercles, cames en bois, en fonte ou en fer aciéré, étriers et autres agrès, hurasses, boîtes, tourillons, empoises, poids à peser, meules, nilles, paufers, marteaux à piquer, mesures, modèles de toute espèce, câbles, tours mobiles ou portatifs, fonds, contrevents et autres pièces mobiles servant à établir une chaufferie à affiner le fer, et une immense quantité d'objets divers de même nature et destination. Il est d'un usage général que tous ces objets soient entretenus et réparés par les locataires1.

1 Jourdheuil, p. 245.

2 V. n. 700.

3 Jourdheuil, p. 246.

Ibid., p. 62.

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