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de l'autre. Il obtiendra encore moins que le public le laisse en jouir paisiblement avec aucune. S'il veut l'exploiter avec des royalistes, il aura contre lui les bonapartistes et la nation. S'il veut le faire valoir avec des bonapartistes, il aura contre lui la nation et les royalistes. S'il veut en jouir avec un tiers parti formé de royalistes et de bonapartistes, il aura contre lui les deux factions et le public. Si, pour s'en assurer la possession, il s'arme de lois de terreur, il a recours à des mesures violentes, ces mesures ne serviront qu'à lui rendre encore plus contraires et le parti qui ne sera pas admis à l'exploitation, et le public sur qui elle sera exercée. Il n'a manifestement qu'un moyen de sortir de cet état de lutte et de péril, c'est de faire qu'il n'y ait plus de domaine, d'abandonner ce que les factions se disputent et que le public refuse d'accorder. Ce seul changement dans sa conduite en amènera nécessairement un trèsheureux dans sa situation. Si, au lieu d'enlever une sinécure à un royaliste pour la donner à un bonapartiste, il supprime la sinécure, il est évident qu'aucun des prétendans ne pourra se plaindre, et que le public, en faveur de qui s'opérera la réforme, aura lieu d'être satisfait. C'est donc, non à changer de parti qu'il doit

tendre, mais à supprimer ce qui divise les partis et tient le public éloigné de lui, à supprimer les places inutiles, à baisser les profits des hauts emplois nécessaires,à faire que le pouvoir au lieu de se présenter comme un bénéfice, se présente comme une charge, et change de caractère et de nature. En opérant cette réforme, il s'ôtera sans doute l'appui des partis, mais il se délivrera aussi de leurs attaques; il verra les factions se fondre et le public se rallier à lui, et tandis qu'il acquerra de la force, la nation gagnera de l'aisance et de la liberté.

D....R.

DEUXIÈME PARTIE,

OUVRAGES

SCIENTIFIQUES ET LITTÉRAIRES.

OBSERVATIONS

Sur les dernières élections et sur la situation présente du ministère; par M. le marquis DE VILLENEUVE, ancien préfet des départemens de Tarn-et-Garonne, des Hautes-Pyrénées et du Cher (1).

AVANT de faire aucune réflexion sur cet écrit, nous commencerons par réunir sous un même point de vue quelques-unes des propositions et des phrases les plus remarquables qu'il renferme :

« Le temps est sombre. La tempête s'amoncèle, l'aquilon de la démocratie souffle avec une

(1) Brochure in-8°. de 32 pages; à Paris, au bureau du Conservateur, rue de Seine, no. 8.

impétuosité multipliée par elle-même. Le gouvernail, au lieu de tendre au port, se prête au gré de la tempête. Tout va périr corps et biens: c'est le moment de jeter le cri général d'effroi. — On reconnaît à la lueur des torches que nous marchons sur un terrain miné. Nous sommes dans un système qui nous mène en ligne droite et courte à une révolution nouvelle. A la session prochaine le ministère tombera sans coup férir aux pieds de l'effigie de l'usurpateur ou de la république.

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Le peuple s'inquiéte peu encore au bruit lointain du tonnerre qui gronde ; mais le tourbillon l'entraînera comme les classes supérieures et bouleversera jusqu'au fond de l'abîme ses rapports journaliers, ses travaux, ses ressources, sa famille. C'est alors que du milieu de cette multitude (la classe moyenne) avide de nouveautés, éperdue dans ses désirs, crédule et inflammable, s'élèveront des hommes forts qui, nouveaux Antées, fils de la Terre, recevront d'elle une vigueur irrésistible. Ils demanderont, à leur tour, compte des richesses qu'ils convoitent, et du pouvoir qu'ils ambitionnent. Il se pourrait même que 1820 donnât au monde, plus affligé qu'étonné, une copie trop fidèle de 1792. Hélas! le château

des Tuileries touche à la place Louis XV: l'intervalle n'est qu'un jardin, lieu d'enchantement qu'on parcourt en un quart d'heure à travers les jeux de l'enfance, les pompes du monde et les promenades solitaires de l'homme mûr, tristement pensif entre cette place et ce jardin, etc. >>

Nous devons dire, avant de rien observer sur ce qu'on vient de lire, que des phrases semblables ou peu différentes se retrouvent dans la plupart des écrits ultra-royalistes qui ont paru à l'occasion des dernières élections.

Maintenant, veut-on savoir ce que tout cela signifie? Veut-on savoir pourquoi le temps est sombre, pourquoi la tempête s'amoncèle, pourquoi nous marchons, en ligne droite et courte, à une nouvelle révolution ? Le voici : C'est que le parti ultra-royaliste, qui avait deux cent seize représentans à la chambre de 1815, n'en eut plus que quatre-vingt-cinq à celle de 1816, que soixante-dix à celle de 1817, et qu'il ne lui en reste que soixante cette année. C'est que les nouveaux colléges électoraux paraissent ne devoir plus envoyer aucun ultra connu pour tel à la législature; c'est que la faction ultraroyaliste, déjà réduite de trois cinquièmes, le sera peut-être, dans un an, de quatre cinquiè

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