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pour nous par leur intérêt; j'en fais un foyer de recrutement pour nous, qui s'opposera à celui des Anglais. J'ai pour cela besoin d'un homme habile à Berne.

Sur ce, etc..... (1).

Quelques régiments de dragons des garnisons d'Alsace sont réunis à Strasbourg sous prétexte de manœuvres de brigade.

« Je charge le général commandant la 5e division militaire, dit Berthier dans son rapport du 15 août, de réunir à Strasbourg, d'ici au 15 fructidor, les 22°, 25 et 26o régiments de dragons, dont le premier est à Schelestadt, le second à Belfort et le troisième à Strasbourg. L'intention de Sa Majesté étant que ces trois régiments soient exercés par un général de brigade bon manœuvrier pendant les mois de fructidor et vendémiaire, que durera leur réunion, il me paraîtrait nécessaire de confier le soin de leur instruction à l'un des généraux de brigade qui ont été employés dans la seconde division de dragons à Compiègne, et qui se trouvent par conséquent propres à diriger les manœuvres des dragons, tant à pied qu'à cheval. Je propose, à cet effet, à Sa Majesté le général de brigade Scalfort, qui pourrait être remplacé à la 2o division de dragons par le général de brigade Roget, actuellement employé dans la 25e division militaire.

Je demande les ordres de Sa Majesté.

>>

Le 17 août, Berthier écrit au général Songis, premier inspecteur général de l'artillerie :

« Il importe, général, de s'assurer si les approvisionnements pour l'artillerie sont au complet dans les places de première et de seconde ligne sur le Rhin. Veuillez écrire de suite aux directeurs pour leur demander l'état exact de leur situation, me le faire connaître et me proposer les moyens de suppléer à ce qui pourrait y man

(1) Archives nationales.

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quer. » C'est la première mesure militaire de la campagne de 1805.

C'est donc vers le 17 ou le 18 août que Napoléon révèle ouvertement l'intention où il est d'entrer en campagne au plus tôt. Dès lors, les mesures militaires vont se précipiter, et en moins d'une semaine les ordres seront donnés pour le mouvement vers le Rhin.

Il lui était aisé de suivre, longtemps à l'avance, les préparatifs de l'Autriche, car cette puissance, ruinée par la guerre, et ayant renvoyé ses troupes dans les garnisons de l'intérieur après la paix de Lunéville, avait à reconstituer ses magasins, ses équipages et à concentrer ses armées par une série de mouvements préparatoires. Napoléon, au contraire, avait à Boulogne et dans les camps voisins 170,000 hommes prêts à partir d'un instant à l'autre. Sur les 450,000 hommes que la France avait sur pied, il s'en trouvait encore 170,000 à l'intérieur, 23,000 à bord des escadres ou aux colonies, 15,000 en Batavie, 21,000 dans le Hanovre, 50,000 en Italie, forces auxquelles il convient d'ajouter environ 10,000 hommes de troupes italiennes dans le royaume d'Italie.

La France avait alors dans ses arsenaux ou aux armées 4,506 pièces de gros calibre, 7,366 de petit calibre, 832 obusiers, 1746 mortiers, approvisionnés en moyenne à 500 coups par pièce (les calibres irréguliers de 48, 36, 18 et 3 faisant exception). Outre les armes en service dans les corps, il y avait en magasin 450,000 fusils et 42,000 mousquetons ou carabines en bon état de service, 75,000 armes à feu à réparer, et 131,563,909 cartouches. Les poudrières contenaient 8,608 milliers de poudre (1).

La guerre contre l'Angleterre pouvait servir de prétexte

(1) Voir les différentes situations du personnel et de l'armement aux pièces justificatives.

à toutes les mesures d'augmentation, mais Napoléon était trop habile pour trahir ses projets par une concentration partielle, d'ailleurs sans utilité réelle, sur la frontière du Rhin. La lettre écrite le 4 juin à Laforêt par Talleyrand nous a éclairés sur les véritables préparatifs de l'Empereur.

CHAPITRE III

Attitude de la Prusse

Nous nous sommes attaché exclusivement, jusqu'ici, à faire ressortir l'attitude franchement hostile de l'Angleterre, de la Russie et de l'Autriche vis-à-vis de la France. Nous allons essayer de suivre les fluctuations de la politique prussienne, moins nettement caractérisée, et sur laquelle Napoléon semble s'être illusionné jusqu'au moment de la rupture survenue à la fin de 1805 (1).

On comprendra mieux la conduite du roi de Prusse et l'impossibilité d'arriver à une entente avec lui, si l'on constate avant tout que ce prince, aussi bien que l'empereur d'Allemagne, considérait comme toujours valables les traités d'alliance conclus antérieurement avec la Russie. Le texte des déclarations du 24 mai 1804 va en donner une preuve formelle. Un engagement d'un caractère aussi durable et aussi fondamental devait déterminer l'orientation définitive de la politique prussienne, quoiqu'il arrivât, et prévaloir sur tous les intérêts matériels et les tendances momentanées qui auraient pu rapprocher la Prusse de la France.

(1) Les citations faites dans ce chapitre et le suivant sont empruntées presque toutes au recueil de documents de P. Bailleu: Preussen und Frankreich von 1795 bis 1807. 2o Theil. (Publicationen aus den K. Preussichen Staatsarchiven, t. 29.)

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