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L'heure fut donnée et l'Archevêque vint au rendez-vous.

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- Et à ce sujet l'Archevêque ajoutait : « Je me présentai devant le roi, et je » m'entretins avec lui sans aucune gêne; je suis quelquefois un peu » saisi dans les réunions publiques, mais là, seul à seul, je me sentais » aussi à l'aise que maintenant que je parle avec vous..... Le roi » me reçut donc dans son salon', et comme c'était son habitude, il me tira à part et me conduisit dans l'embrasure d'une fenêtre » où il me fit asseoir et s'assit lui même. Là nous fûmes quelque » tems à nous regarder en silence. A la fin je pris la parole et je lui «dis: «Ayant su que le roi désirait me parler, je me suis rendu » avec empressement à son invitation.... Moi, dit le roi, je n'ai >> rien à vous dire, c'est vous, m'a-t-on dit, qui voulez me parler, et je suis prêt à vous écouter. - Eh! bien, le roi doit savoir le sujet de ma visite, comme je ne veux pas m'exposer encore à l'affront qui m'a été fait lors de la dernière présentation, je me propose de >> venir offrir mes vœux pour la santé du roi à la tête de mon clergé, » mais je ne ferai pas de discours. Ah! je vois, c'est une nouvelle attaque que vous dirigez contre moi, je croyais que toutes nos dis>> cussions étaient finies, et il paraît que vous voulez encore recom

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» mencer. Si j'ai empêché que votre discours fût publié, c'est que vous vous étiez permis des conseils inconvenans.

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- J'en demande

bien pardon au roi, mais ni mes intentions, ni mes paroles ne pou» vaient avoir ce sens ; demander la liberté et non la protection, est » peut-être la demande la plus modérée, que puisse faire l'Église. — » Et moi je ne l'entends pas ainsi,.... avec vos demandes et vos jour»naux, vous jettez le trouble partout.... » Et passant de suite à une autre question « Ainsi par exemple, je sais qu'il y a peu tems vous » avez rassemblé un concile à Saint-Germain. Ce n'est point un » concile que nous avons assemblé, mais quelques évêques mes suffragans et mes amis sont venus me voir et nous avons traité de >> différens points de discipline ecclésiastique. - Ah! je le disais bien que vous aviez formé un concile; sachez que vous n'en avez pas le » droit. » Jusqu'à ce moment, nous disait l'Archevêque, j'avais répondu au roi avec beaucoup de déférence, et évitant presque de le regarder, mais à ce mot j'élevai mes yeux et les fixant sur les siens, je lui dis avec fermeté : « Pardon, sire, nous en avions le droit, car

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toujours l'Église a eu le droit d'assembler ses évêques pour régler » ce qui pouvait être utile à leurs diocèses..... Ce sont là vos prétentions, mais je m'y opposerai; d'ailleurs l'on m'a dit aussi que vous aviez envoyé un ambassadeur au pape ; je sais même que c'était pour lui demander la permission de faire gras le samedi. — C'est vrai, sire, nous avons envoyé un ecclésiastique (M. l'abbé Labouillerie) faire quelques demandes au pape; mais cela même est dans » les droits de tous les fidèles et à plus forte raison des évêques. » Et qu'est-ce que vous lui avez demandé encore ? je veux le savoir. >> -Si c'était mon secret, je le dirais tout de suite au roi, mais ce n'est » pas seulement le mien mais encore celui de mes collègues, et je ne puis le dire au roi.....» A ces mots, le roi, rouge de colère, se leva brusquement, me prit par le bras et me dit : « Archevêque, souvenez» vous bien que l'on a brisé plus d'une mitre.... Je me levai à » mon tour en disant : « Cela est vrai, sire; mais que Dieu conserve » la couronne du roi, car on a vu briser aussi bien des couronnes. »

Telle a été ma dernière audience avec Louis-Philippe. Le surlendemain je me présentai avec mon clergé à l'audience, je souhaitai verbalement au roi mes vœux pour sa santé ; puis l'on fit un discours assez long avec mes paroles, et on l'inséra au Moniteur comme si je l'avais prononcé.

Nous finirons ici cette notice que nous pourrions étendre davantage, en disant que Mgr Affre par plusieurs des actes de son épiscopat, et surtout par sa glorieuse mort, est une des gloires de l'Église de Paris, et de l'Église universelle.

A. BONNETTY.

LISTE DES OUVRAGES DE MGR AFFRE.

Nous avons donné dans notre tome 1, p. 395 (3a série), une notice suffisante sur la vie et les ouvrages de Mgr Affre, jusqu'au moment de son épiscopat en 1840; nous allons rappeler ici les ouvrages qu'il a fait paraître depuis cette époque; mais nous n'y faisons pas entrer les mandemens ordinaires de Carème et autres.

1. Lellre pastorale sur les études ecclésiastiques, à l'occasion du rétablisse

ment des conférences et de la Faculté de théologie, in-4° de 80 pages, 1841.Nous en avons donné de longs extraits dans notre tome 1, p. 405 (3a série). 2. Instruction pastorale sur la composition, l'examen et la publication des livres en faveur desquels les auteurs ou éditeurs sollicitent une approbation; in-4° de 11 feuilles, 1842.

3. Observations sur la controverse élevée à l'occasion de la liberté d'enseignement; in-8° de 5 feuilles, 1843.

4. Lettre en réponse à celle de M. le ministre des cultes, de 8 mars 1844 (insérée au Moniteur du 10); in-4° d'une feuille.

5. Memoire sur l'enseignement philosophique adressé à la chambre des pairs; in-8° de 2 feuilles 3/4, 1844.

6. Introduction philosophique à l'élude du christianisme; in-18, de 10 f., - 2a édition, de 8 f., 1845.—3o édition, in-32 de 4 feuilles 3/8, 1815.

1845.

4 édition de 10 f., 1845.

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7. De l'usage et de l'abus des opinions controversées entre les ultramontains et les gallicans; in-8° de 2 feuilles 1/2, 1845.

8. De l'appel comme d'abus, son origine, ses progrès et son état présent; suivi d'un écrit sur l'usage et l'abus des opinions controversées entre les gallicans et les ultramontains, in-8 de 20 feuilles 1/2, 1845.

9. Mandement portant condamnation d'un recueil périodique qui a pour titre le Bien social; in-8° de 2 feuilles 1/2, 1845.

10. Une 5e édition du Traité de l'administration temporelle des paroisses, in-8° de 43 feuilles, 1845.

11. Catechisme du diocèse de Paris, à l'usage des institutions où l'on apprend les langues anciennes, et des écoles de filles où l'on donne l'instruction du premier degré; in-18 de 320 pages, 1846.

12. Observations sur le projet de loi concernant le chapitre de Saint-Denis; in-4° de 2 feuilles, 1847.

13. Observations sur le rapport fail à la chambre des pairs, par M. Portalis, au nom d'une commission spéciale, chargée de l'examen du projet de loi relatif au chapitre royal de Saint-Denis; in-4° d'une feuille, 1847.

14. Memoire sur le projet de loi destiné à rétablir les anciennes exemptions en faveur du chapitre de Saint-Denis; in-8° de 10 feuilles, (1846), déposé en 1847.

15. Chapitre de Saint-Denis. Histoire de sa fondation, des négociations pour obtenir son exemption, discussion de ce privilége; in-18 de 5 feuilles, 1817.

Littérature Orientale.

NOTICE

SUR L'EZOUR - VEDAM

ET SUR LES AUTRES

PSEUDO-VÉDAS.

Etudes que fait le P. Calmette dans les Védas.- Il y trouve la plupart des traditions primitives. Il compose des poèmes à la façon des indiens. — Récit que fait Voltaire de l'envoi de l'Ezour-Vedam en Europe, et de son antiquité qu'il place 400 ans avant Alexandre. Cité aussi par l'abbé de Lamennais. Un anglais découvre l'original. On crie à l'imposture. Examen des ouvrages du P. Calmette.-Raisonnement des Védas.- Extrait de l'Ezour-vedam montrant tout le but du livre.

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Dans une notice précédente, nous avons vu comment un missionnaire du Carnate, après avoir été le premier à découvrir le texte des Védas, en avait envoyé une copie à la bibliothèque royale de Paris. Si le savant P. Calmette n'avait fait autre chose que d'obtenir, à force d'industrie et de zèle, ce résultat inespéré, il mériterait déjà, sous ce rapport, de grands éloges, et la reconnaissance même de tous ceux qui s'intéressent à la célèbre péninsule. Pour avoir fait ainsi une première brèche à la grande muraille brahmanique, son nom ne devrait-il pas être inscrit avec honneur en tête de la liste des indianistes? Il y avait chez les Romains une couronne spéciale pour le soldat qui parvenait le premier sur le rempart d'une ville assiégée. L'œuvre du P. Calmette est plus glorieuse, et sans contredit, plus digne de l'histoire que la prise d'une citadelle.

Mais elle ne s'est pas arrêtée là. Bientôt la connaissance qu'il avait acquise de la langue sacrée lui fit encore soupçonner, derrière ce

Voir Farticle intitulé: Nolice sur la découverte des Vedas, dans notre n° 96, tome xvi, p. 434.

penetralia de la littérature sanscrite, plusieurs autres poèmes, et même, comme il l'annonce avec confiance, de véritables trésors inconnus jusqu'à lui. Ce n'était pas assez; comme missionnaire désirant par dessus tout la conversion des idolâtres auxquels il était envoyé; sachant par expérience combien il était impossible de dissiper les préjugés des Indiens, sans remonter à la source de leurs impressions, voyant d'autre part que l'origine de la plupart des superstitions brahmaniques était l'abus que les Vedas avaient fait des traditions primitives, il s'appliqua d'abord à y puiser des textes pour combattre les Brahmanes par leurs propres armes.

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Depuis que leur Védam est entre nos mains, nous en avons - » extrait des textes propres à les convaincre des vérités fondamentales qui ruinent l'idolâtrie. En effet l'unité de Dieu, les caractères du » vrai Dieu, le salut et la réprobation sont dans le l'édam; mais les » vérités qui se trouvent dans ce livre, n'y sont répandues que comme » des paillettes d'or sur des monceaux de sable car du reste on y » trouve le principe de toutes les sectes indiennes, et peut-être le » détail de toutes les erreurs qui font leur corps de doctrine '.

>>

On lit avec intérêt dans les Lettres édifiantes, le récit de ses luttes avec l'idolâtrie et les étonnants succès que le Christianisme obtint alors dans l'Inde.

Ensuite, non content d'une guerre philosophique et voulant joindre à ses argumentations un autre moyen tout à fait conforme au génie de ces peuples, il conçut un dessein dont aucun autre alors n'était capable car lui seul, depuis le père De'Nobili, s'était occupé sérieusement de la langue sanscrite. On lit dans sa Correspondance qu'il se mit à composer aussi lui-même des poèmes à l'imitation des Brahmanes, pour réfuter leurs erreurs. Chose étonnante qu'un pauvre religieux, sans grammaire, sans dictionnaire, ait fait, il y a plus d'un siècle, assez de progrès dans la langue des Védas pour accomplir une œuvre que n'oseraient guère entreprendre les indianistes d'aujourd'hui; il sera curieux de voir ce qu'a pu produire une si extraor

Lettre au P. Delmas.

2 De'Nobili, et non De Nobilibus. C'est dans les écrivains latins que ce nom propre a été latinisé comme les autres. Il n'y a aucune raison d'employer la désinence latine en français.

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