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video, comme j'aurai à le raconter plus loin. Les Espagnols ne mirent la main que sur l'instruction générale, que je crois utile de reproduire en entier.

<< M. de Sassenay, y est-il dit, a déjà été << informé de l'objet de la mission que Sa Majesté a daigné lui confier. Il est chargé << de porter à Buenos-Ayres des dépêches « adressées aux autorités de la colonie. Il

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s'embarquera sur le brick de Sa Majesté, le « Consolateur, commandé par M. Dauriac, << lieutenant de vaisseau, qui le conduira à la "côte du Rio de la Plata.

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D'après les renseignements que M. de Sassenay recueillera, et d'après sa propre <«< connaissance du pays, il jugera sur quel

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point il devra débarquer, pour pouvoir se

rendre par terre à Montevideo ou à BuenosAyres. Avant de débarquer, il s'entendra << avec le capitaine sur le port où le navire << devra le rejoindre. Il ne se déterminera à « continuer son voyage sur le brick jusqu'à

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Buenos-Ayres, qu'après s'être assuré de « n'avoir point à craindre d'être pris par les « croiseurs anglais. Il paraît préférable que ale Consolateur attende son retour à Monte« video.

« M. de Sassenay remettra au général de << Liniers les dépêches dont il est chargé. Il sait ce qu'il aura à lui dire de l'état actuel « de l'Espagne, de la France et de l'Europe. « Il lui répétera ce qu'il a vu et entendu à

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Bayonne. Il ne pourra que se faire l'écho « du langage que tiennent actuellement les Espagnols, qui se félicitent d'un changement de dynastie accompli d'une manière si pacifique, qui promet à leur patrie le remède << aux maux dont elle souffrait depuis si longtemps, et qui leur donne l'espoir de voir << renaître son ancienne gloire et son ancienne prospérité. Il annoncera qu'une assemblée

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<< a été convoquée à Bayonne pour s'occuper de la régénération du pays, et il dira quelles

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« dans toute l'Espagne, dont les villes et les

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bourgs appellent de tous leurs vœux le << souverain qui leur a été promis, Joseph

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Napoléon, roi de Naples et de Sicile. M. de

Sassenay fera connaître à l'Amérique quelle

gloire environne la France et quelle influence

<< le puissant génie qui la gouverne exerce

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sur l'Europe à laquelle il dicte ses lois. Il << recueillera tous les renseignements qu'il « pourra obtenir sur l'état de l'Amérique espagnole et en particulier de la viceroyauté de Buenos-Ayres. Il observera, « avec une attention spéciale, l'effet produit << sur les autorités par la nouvelle de l'heu<< reux changement accompli en Espagne. Si << la chose lui est possible, il réunira des renseignements de même nature sur le Pérou « et le Chili. Néanmoins, l'importance des « nouvelles qu'il aura à rapporter en Europe

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<< pourra l'amener à hâter son retour. Ce sera à

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lui à fixer le moment de son départ. Ilse char

« gera des dépêches du général de Liniers et

<< reviendra en France avec le Consolateur(1).:

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Bien que le brick fût un assez bon marcheur, le voyage dura soixante-dix jours. Après avoir eu à lutter contre des vents contraires dans le golfe de Gascogne, il rencontra, par neuf degrés de latitude nord, des vents du sud qui l'obligèrent à louvoyer pendant deux ou trois semaines. La vie à bord d'un voilier au commencement du siècle ne ressemblait guère à celle qu'on mène aujourd'hui sur les magnifiques paquebots qui font le service entre l'Europe et l'Amérique. Il y avait absence complète de confort. La nourriture était exécrable. Les conserves étaient d'invention récente, et leur adoption dans la marine de guerre datait de 1804. On en était réduit les trois quarts du temps au biscuit, aux légumes secs et à la viande salée, qui, à la longue,

(1) Cette instruction signée par M. de Champagny est datée du 29 mai 1808. Le texte que je donne est la traduction de la traduction espagnole qui m'a été communiquée par M. le général Mitre. La minute originale n'a pu être retrouvée aux Affaires étrangères.

donne le scorbut. De plus, on n'avait que de l'eau conservée dans des tonneaux, où elle pourrissait et prenait un goût nauséabond que rien ne pouvait corriger. Si l'on ajoute à ces privations la crainte continuelle de rencontrer un croiseur anglais auquel le petit bâtiment eût été hors d'état de résister, on comprendra que la traversée n'eut rien d'agréable pour Sassenay. Elle finit, du reste, comme elle avait commencé. Le navire eut la malchance de tomber, en arrivant dans les parages du Rio de la Plata, dans un épouvantable pampero. On appelle ainsi des vents terribles qui, après avoir balayé la pampa où rien ne leur fait obstacle, se déchaînent, avec une extrême violence, sur l'Atlantique. Le Consolateur fut rejeté à 600 milles au large. Lorsque la tempête eut cessé, il se rapprocha de la côte et essaya de gagner Montevideo. Des vents contraires l'ayant arrêté cinq jours de suite, Sassenay fit mettre le cap sur Maldonado, petit port fortifié situé à l'entrée du Rio de la Plata,

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