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nients. Les poils passent successivement à travers huit machines cardeuses, renfermées dans une longue caisse en bois dont la face supérieure est formée par une toile métallique serrée. La plus grande partie des bourres et poussières se fixe dans le treillage, qu'on nettoie de temps en temps. Une certaine proportion de poussière se répand bien encore dans l'atelier, mais elle est infiniment moindre que par le procédé ordinaire, et, en outre, se trouve bien plus éloignée des ouvriers. L'opération suivante, ou soufflage des poils, qui a pour objet de les emmêler et de produire un commencement de feutrage, a lieu à l'aide d'une ventilation énergique qui s'exerce dans une gaîne horizontale en bois, de 80 centimètres de large, 12 à 15 centimètres de haut et 10 à 12 mètres de long. Les poils refoulés dans ce canal y subissent le mélangeage et sortent, à l'extrémité, par une cheminée verticale qui débouche dans une caisse suivie de trois autres. La dernière est fermée par un grillage métallique serré qui retient les poils et laisse échapper la poussière, dont une partie se fixe, comme dans l'appareil précédent, entre les mailles de la toile. Cette poussière est, du reste, en faible proportion, par suite du nettoyage préalable, et, en tous cas, se forme à une grande distance de l'ouvrier qui charge la machine à l'entrée.

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Nettoyage des chiffons. Cette opération, pratiquée en grand dans les papeteries, donne lieu à un fort dégagement d'impuretés, qui, à la longue, agissent sur les organes respiratoires des ouvrières. On a imaginé divers appareils pour améliorer cet état de choses. Ainsi la machine connue en France sous le nom de loup ou diable, accolée à un blutoir mécanique, a pour objet de les dégager dans des locaux séparés. Nous n'insisterons pas sur ce progrès, de date déjà ancienne, et qui d'ailleurs a besoin d'être complété par des dispositions additionnelles, telles que le jeu d'un ventilateur en dehors du blutoir. Nous n'avons pas rencontré, soit en Belgique, soit en Prusse, d'appareil

de ce genre suffisamment perfectionné. Mais la papeterie de MM. Godin, à Huy, offre une solution basée sur d'autres principes et qui paraît tout à fait radicale. On remplace le nettoyage mécanique par des opérations à voie humide. Les chiffons, triés d'abord à la main, comme partout ailleurs, sont mis à digérer dans des cuves pleines d'eau claire, où on les abandonne un jour ou deux, selon la qualité. On les passe ensuite sous une machine dite effilocheuse, qui travaille dans un lait de chaux et dont l'action correspond assez bien à celle du loup, avec cet avantage que les impuretés sont retenues dans la liqueur. Enfin a lieu le lessivage à la chaux, tel qu'il se pratique dans la plupart des papeteries. La manufacture de MM. Godin se recommande d'ailleurs par la bonne installation des ateliers, par la propreté qui y règne et par l'attention qu'on donne à tous les détails intéressant la salubrité (*).

Fermentation de la bière. On laisse ordinairement fermenter la bière dans des caves basses et peu aérées. L'acide carbonique qui se dégage forme au-dessus du sol une couche plus ou moins épaisse dans laquelle peut se trouver l'ouvrier qui vient inspecter les bassins. Il est vrai de dire que la cave n'est pas tout à fait fermée pendant que cette réaction a lieu, et que même, si la température n'est pas trop basse, on laisse un libre accès à l'air. Mais cette précaution est de peu d'effet, à cause de la pesanteur spécifique de l'acide carbonique. On a essayé de la ventilation artificielle, mais on a dû y renoncer parce que les courants d'air empêchent ou troublent la fermentation. Voici une bonne disposition prise dans une des principales brasseries de Louvain. Le local destiné à la fermentation des bières blan

(*) Nous devons signaler pourtant l'atelier de fermentation de la colle, où il serait nécessaire d'installer des moyens de dégagement pour l'acide carbonique dont les ouvrières ont assez souvent à souffrir.

ches est très-spacieux et très-élevé, ce qui est déjà une bonne condition de salubrité. En outre, entre les diverses rangées de tonneaux existent des couloirs dans lesquels s'épanche le jet et se réunit l'acide carbonique. Ces couloirs ont pour profondeur toute la hauteur des tonneaux, et au niveau de l'extrémité supérieure de ceux-ci, règne une espèce de plancher destiné à l'ouvrier chargé de l'inspection des bières. La tête de celui-ci se trouve donc au-dessus de la zone dangereuse de toute la hauteur de son corps. Dans la grande brasserie centrale de Mayence on a également adopté de bonnes dispositions pour éloigner l'ouvrier de la couche d'acide carbonique.

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Filatures de lin, de coton et de laine. Le travail de ces matières, des deux premières surtout, présente une grande insalubrité par suite des poussières et des filaments végétaux qui se dégagent dans les ateliers aux diverses périodes de la fabrication. Le moyen général employé dans les trois branches d'industrie consiste dans la ventilation artificielle. Celle-ci s'exerce d'ailleurs de deux manières différentes, selon qu'on l'applique aux ateliers eux-mêmes ou directement aux machines qui accomplissent les travaux préliminaires. Souvent les deux modes sont cumulés dans les manufactures bien installés. La Belgique en offre divers exemples; la Prusse rhénane en présente aussi, à Aix-la-Chapelle et à Cologne, mais moins dignes d'être mentionnés.

La filature de lin de la Lys, à Gand, est ce qu'on peut voir de mieux en ce genre. Ce magnifique établissement possède 30.000 broches et occupe 1.700 ouvriers. On s'est préoccupé tout particulièrement de la question du cardage qui, dans la généralité des fabriques, laisse tant à désirer. Nous ne parlons pas du teillage et du foulage, qui se font dans la campagne par les soins des cultivateurs eux-mêmes. Naguère encore le cardage était installé à la Lys dans les mêmes conditions déplorables qu'ailleurs. Aujourd'hui, les vingt-cinq machines à carder sont réunies dans une salle

de grandes dimensions, percée de croisées sur les deux longs côtés. Pendant l'été, les cardes fonctionnent à l'air libre, les croisées étant large ouvertes. Mais pendant l'h ver, elles sont recouvertes d'une enveloppe bien close communiquant à un large carnau souterrain qui longe l'atelier et dans lequel agit un ventilateur puissant. Les débris sont expulsés dans cinq puits de 1,80 de diamètre ouverts dans la cour. Indépendamment de cette disposition, il existe près de chaque machine un tuyau vertical de 15 centimètres de diamètre et d'un mètre de haut qui communique au même carnau et dont le rôle est d'aspirer les poussières qui voltigent auprès de la carde. Enfin, un autre ventilateur moins puissant, situé entre le plafond et les combles, aspire l'air dans la région supérieure de la salle et le lance au-dessus du toit. Il est même question en ce moment d'installer deux petits ventilateurs supplémentaires, aux extrémités de l'atelier, pour compenser la diminution d'effet qui résulte de l'éloignement. Le seul détail qui laisse à désirer est relatif à l'évacuation des poussières dans les puits. Elles n'y sont pas suffisamment arrêtées et quand le vent souffle, elles sont emportées à travers les orifices ouverts des salles voisines. La crainte des incendies empêche de les lancer dans la grande cheminée.

C'est à Gand également que se trouve la filature de coton la plus importante et la mieux combinée, celle de M. Parmentier, qui possède 80.000 broches et occupe 1.100 ou vr.ers. On ne peut s'empêcher d'y admirer la salle de tissage, qui ne renferme pas moins de 700 métiers à tisser. Les précautions prises contre les poussières, bien que satisfaisantes, sont moins remarquables qu'à la Lys. en ce qu'elles sont d'une application beaucoup plus répandue. C'est en quelque sorte pour mémoire que nous citons les ventilateurs des machines batteuses, car ces appareils se retrouvent aujourd'hui dans toutes les fabriques bien montées. La filature de laine de MM. Hauzem, Gérard et Cic, à

Verviers, est dans d'excellentes conditions. Les machines échardonneuses, qui produisent toujours d'abondantes poussières, sont placées dans un local séparé et sont pourvues de ventilateurs. Ces machines, du système Houget et Teston, constructeurs dans la même ville, ne tarderont pas, il faut l'espérer, à remplacer celles de M. Amouroux, dont beaucoup d'industriels de Verviers font encore usage, et qui permettent aux impuretés de se dégager dans l'atelier. La salle de filage, largement conçue, ne mesure pas moins de 100 mètres de long sur 45 mètres de large. Deux ventilateurs puissants aspirent l'air aux extrémités, tandis que plusieurs bouches distribuées sur le plancher permettent l'introduction de l'air frais. Aussi n'aperçoit-on ni filaments ni poussières voltiger autour des machines. Une particularité que nous ne pouvons nous empêcher de signaler, quoique moins importante pour la salubrité, est relative au séchage. Les laines sont étendues sur une claire-voie formant la face supérieure d'une vaste caisse close de tous les autres côtés. Un ventilateur aspire énergiquement dans l'intérieur de la caisse, tandis qu'un courant d'air chaud est amené contre le plafond du local. Par cette ingénieuse disposition les ouvriers sont soustraits à l'atmosphère toujours un peu malsaine qui règne dans les séchoirs où les vapeurs se dégagent à l'intérieur même de la salle.

Aux filatures de coton et de laine se rattache le tondage des toiles et des draps, qui présente, à un degré moindre, les inconvénients des opérations préliminaires. Le mouvement rapide du cylindre qui porte les tranchants en spirale répand dans l'air le duvet enlevé. Chez MM. Desmet et Lousberg, à Gand, pour absorber la poussière provenant du tondage des toiles, on a introduit des ventilateurs qui ressemblent beaucoup à ceux du batteur. Dans les fabriques de drap, où le désagrément est moins sensible, on se passe de ventilateurs, mais la machine travaille de manière à rejeter la bourre du côté opposé à l'ouvrier.

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