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dans 2166 kilogrammes de froment avec sa paille, et un peu moins pour le chêne pédonculé.

Sous un massif bien venant et par conséquent suffisamment serré, les feuilles ne se décomposent que lentement, en 6 ans pour le hêtre ordinairement, et forment par leur accumulation une épaisse couverture sur le sol. Sous l'abri du massif, le terreau ne se conserve pas moins bien que les feuilles mortes qui le couvrent et le produisent; c'est pourquoi, dans une forêt nouvellement défrichée, M. Berthier a pu, à l'hectare, constater la présence de 120.000 kilogrammes de matières organiques.

Outre les éléments de fertilité qu'il reçoit des feuilles, le terreau forestier, sous la double protection du massif et du tapis de feuilles qui en tombe, s'enrichit encore de l'azote des engrais atmosphériques paraissant versé annuellement par les pluies à raison de 9 kilogrammes par hectare.

Ainsi le sol d'une forêt à l'état de massif est, à la surface, très-riche en matières carbonées et azotées, tandis qu'à l'intérieur il est appauvri par

la succion des racines qui l'ont épuisé.

§ 2.

Il faut le plus tôt possible enterrer la couverture du sol forestier.

Si sous le massif le sol s'enrichit, il s'appauvrit plus vite encore dès qu'on lui enlève les arbres qui l'abritaient, et qu'on le livre, sans protection, à l'action volatilisante du soleil et du vent. Alors les feuilles mortes et le terreau se décomposent rapidement en acide carbonique et ammoniaque se dissipant dans l'atmosphère, et ne laissent guère que quelques débris charbonneux et dépourvus de fertilité. Aussi, lors du défrichement, est-il très-urgent d'enterrer les feuilles mortes et le terreau, de manière que, soustraits à l'action trop vive de l'air et de la chaleur, et maintenus à une humidité convenable, ils puissent, par la catalyse, transformer leurs substances ternaires, le ligneux, la cellulose et la fécule, en matières sucrées alimentaires pour les végétaux et dissolvant les substances minérales; et qu'en même temps ils puissent fixer leur azote sous forme d'am

moniaque dans l'argile du sol et dans le terreau devenu plus durable.

Mais s'il faut immédiatement enterrer l'engrais forestier, il ne faut pas le cacher à une profondeur où les plantes agricoles ne puissent l'atteindre. Ordinairement il semblerait avantageux de ne l'enterrer qu'à une profondeur moyenne de 10 à 20 centimètres, à moins qu'il ne s'agisse de cultiver des plantes à racine profondes, telles que la luzerne.

§ 3.

Plâtrage.

L'enfouissement de l'engrais forestier ne suffit pas ordinairement pour conserver sa richesse, parce que les cultures viennent ensuite exposer à l'air cet engrais qui alors exhale dans l'atmosphère ses éléments azotés, sous forme principalement de carbonate d'ammoniaque. Mais comment enchaîner dans le sol ce principe si rebelle? C'est par le plàtrage. Répandu sur la couverture du sol forestier et dissout par la pluie, le sulfate de chaux, en présence du carbonate

d'ammoniaque, donnera lieu à une double décomposition. Il se formera du carbonate de chaux insoluble et du sulfate d'ammoniaque soluble et non volatil. Ainsi transformés en sulfate d'ammoniaque, les principes azotés ne pourront plus se perdre que par infiltration, et encore ordinairement nous échapperont peu par cette voie, retenus qu'ils seront au passage par l'argile du sol actif ou au moins du sol inerte où nous pourrons les retrouver en cultivant des végétaux à racines plongeantes.

Pour que le plâtre soit en contact avec l'engrais, et partant plus efficace, il faut en saupoudrer le sol avant le défrichement. La dose de plâtre à employer variera évidemment avec la richesse de l'engrais forestier qu'on voudra fixer, plus encore avec la nature du sol, et enfin avec la composition du plâtre. Dans un sol léger, l'engrais se décompose et disparaît rapidement; au contraire, dans un sol compacte, l'engrais se décompose lentement et trouve pour ses gaz ammoniacaux un gardien assez fidèle dans l'argile alors abondante. La composition du plâtre n'est pas non plus indifférente. Il n'agit que par son sulfate de chaux dont 1000 kilogrammes peuvent fixer

205 kilogrammes d'azote. On comprend ainsi qu'avant de se décider sur la quantité de plâtre à employer, il faut connaître sa teneur en sulfate de chaux. Incidemment, nous ne pouvons nous défendre d'exprimer notre étonnement sur l'incurie des propriétaires qui, avant de couper leurs taillis, négligent de les plâtrer et laissent la volatilisation dévaster périodiquement leurs forêts, mille fois plus que tous les délinquants.

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