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testait quelqu'un de ses droits, c'était à ses engagements seulement que les États-Unis en pouvaient appeler comme la règle pour la solution de la question de droit. Si cet appel était rejeté, ce n'était plus une question de droit; et cette observation s'appliquait avec autant de justesse et de force à la reconnaissance d'indépendance et aux limites, dans le traité de 1783, qu'à la pêche. Il fut, à la vérité, observé dans la note anglaise que dans ce traité l'indépendance des États-Unis ne fut pas accordée mais reconnue; et il y fut ajouté qu'elle aurait pu être reconnue sans aucun traité, et que la reconnaissance, quel qu'en soit le mode, aurait été irrévocable. Mais l'indépendance des États-Unis était précisément la question sur laquelle une guerre antérieure avait été engagée entre eux et la GrandeBretagne. D'autres nations pouvaient sans traité reconnaître l'indépendance de ces derniers, parce qu'elles n'avaient aucun droit à réclamer pour la contester; mais cette reconnaissance, pour obliger la Grande-Bretagne, n'aurait pu être faite que par traité, parce qu'elle renfermait la dissolution d'un contrat social entre les parties aussi bien que la formation d'un autre contrat. La paix ne pouvait cxister entre les deux nations que par leur foi mutuelle aux nouvelles relations sociales établies entre elles. Il résultait de là que les stipulations de ce traité avaient le caractère d'obligation perpétuelle et n'étaient pas susceptibles d'être détruites par une guerre subséquente ou quelque déclaration que ce soit de la volonté de l'une des parties sans l'assentiment de l'autre 1.

L'analyse ci-dessus de la correspondance qui eut lieu à ce sujet a été insérée ici comme éclaircissant la question générale de savoir jusqu'à quel point les traités sont abrogés par la guerre entre les parties qui les ont contractés. Quant à la controverse particulière elle-même, elle fut

1 M. J. Q. Adams à Lord Castlereagh, 22 janv. 1816. American State Papers. fol. edit., 1834, vol. IV, p. 356.

définitivement terminée entre les deux pays, sur la base d'un compromis, par la convention de 1848, dans laquelle la liberté revendiquée par les États-Unis relativement à la pêche dans la juridiction et le territoire anglais fut restreinte à certaines limites géographiques 1.

Les traités proprement dits, ou fœdera, sont ceux d'amitié et d'alliance, de commerce, et de navigation. Bien que perpétuels dans leurs termes, ils expirent naturellement: 4o Dans le cas où l'une ou l'autre des parties contractantes perd son existence comme État indépendant.

2o Quand la constitution intérieure de l'un ou de l'autre des États est tellement changée, qu'elle rende le traité inapplicable dans des circonstances différentes de celles en vue desquelles il a été conclu.

Ici la distinction exposée par les publicistes entre les traités réels et personnels devient importante. Les premiers obligent les parties contractantes indépendamment de tout changement dans la souveraineté, ou des chefs de l'État. Par les autres on entend seulement les traités de pure alliance personnelle, expressément faits en vue de la personne qui dirige actuellement l'État, ou du souverain régnant. Quoiqu'ils obligent l'État pendant l'existence de cette personne, ils expirent par sa mort ou sa connexion publique avec l'État 2.

3o En cas de guerre entre les parties contractantes; à moins que de telles stipulations ne soient faites expressément en vue d'une rupture, comme la période accordée aux sujets respectifs de se retirer avec leurs effets, ou autre limitation aux droits généraux de la guerre. Telle est la stipulation contenue dans l'article 10 du traité de 1794 entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, établissant que les créances privées, les parts ou les sommes d'argent dans les fonds publics ou dans les banques pu

1 Vide supra, pt. II, chap. IV, § 8, p. 227. 2 Vide ante, pt. 1, chap. 1, § 11, p. 62,

$10. Traités; cessation de leur effet dans certains cas.

$ 11.

Traités remis en vigueur

au retour

de la paix.

bliques ou particulières, appartenant à des individus privés, ne devraient jamais en cas de guerre être séquestrées ou confisquées. Il n'est pas douteux que l'obligation de cet article ne saurait être altérée par l'intervention d'une guerre, circonstance même à laquelle on a voulu pourvoir, et qu'il resterait en pleine vigueur jusqu'à ce qu'il plaise mutuellement aux parties de l'annuler1.

4o Les traités expirent par leur propre limitation, s'ils ne sont renouvelés par un accord exprès, ou quand leurs stipulations sont remplies par les parties respectives, ou bien quand un changement total de circonstances ne les rend pas plus longtemps obligatoires.

La plupart des conventions internationales, et spécialeet confirmés ment les traités de paix, ont un caractère mixte et renferment des articles de deux sortes. Ce caractère les rend souvent difficiles à distinguer de ces stipulations perpétuelles de leur nature et de celles qui s'éteignent par la guerre entre les parties contractantes ou par un changement de circonstances touchant à l'existence de l'une des parties, et rendant par là le traité inapplicable au nouvel état de choses. C'est pour cette raison et par abondance de précautions qu'on insère souvent dans des traités de paix des stipulations qui remettent en vigueur et confirment expressément des traités antérieurement existants entre les parties contractantes, et contenant des stipulations de caractère permanent, ou qui repoussent de quelque autre manière l'intention que pourrait avoir l'une ou l'autre des parties de ne pas exécuter les obligations contenues dans de pareils traités antérieurs. Les confirmations réitérées des traités de Westphalie et d'Utrecht dans presque tous les traités subséquents de paix ou de commerce entre les mêmes parties, constituèrent une sorte de code écrit de droit public par lequel la distribution des territoires parmi

1 VATTEL, liv. III, chap. x, § 175. American law, vol. I, p. 175. 5th edit.

KENT'S Commentaries on

les principaux États de l'Europe fut établie d'une manière permanente jusqu'au moment où elle fut violemment rompue par le partage de la Pologne et les guerres de la révolution française. Les arrangements de territoire et de relations politiques substitués par les traités de Vienne à l'ancienne loi conventionnelle de l'Europe, et établis sans aucun doute sous le même caractère de permanence, ont déjà subi, en conséquence des révolutions de 1830 de la France, de la Pologne, et de la Belgique, de très-importantes modifications, dont nous avons rendu compte dans un autre ouvrage 1.

$ 12. Traités de

Le traité de garantie est un des contrats internationaux les plus usuels. C'est un engagement par lequel un État garantie. promet d'en aider un autre si cet autre est interrompu ou menacé d'être troublé dans la jouissance paisible de ses droits par une troisième puissance. Il est applicable à toute espèce de droit et d'obligation pouvant exister entre nations; à la possession et aux limites des territoires; à la souveraineté de l'État; à la constitution de son gouvernement; aux droits de succession, etc.; mais on l'applique le plus communément aux traités de paix. La garantie peut aussi être contenue dans une convention distincte et séparée, ou comprise dans les stipulations annexées au traité principal qu'on veut garantir. Elle devient alors une obligation accessoire 2.

La garantie peut être stipulée par une troisième puissance qui n'est point partie dans le traité principal, par l'une des parties contractantes en faveur d'une autre, ou mutuellement entre toutes les parties. Ainsi dans le traité de paix conclu à Aix-la-Chapelle en 1748, les huit grandes parties contractantes se sont mutuellement garanti les unes aux autres toutes les stipulations du traité.

WHEATON, Histoire du droit des gens, t. II, p. 122, 219.

2 VATTEL, Droit des gens, liv. II, chap. xvi, § 235-239.

KLÜBER,

Droit des gens moderne de l'Europe, pt. II, tit. II, sect. 1, chap. 11, $ 157 et 458. MARTENS, Précis, etc., § 63.

La partie qui garantit n'est obligée à rien autre chose qu'a prêter l'assistance stipulée. Si celle-ci est prouvée insuffisante, la partie susdite n'est pas obligée à indemniser la puissance à laquelle elle a promis son aide. Elle n'est pas obligée non plus à s'interposer au préjudice des justes droits d'une partie tierce ou en violation d'un traite antérieur rendant la garantie inapplicable dans un cas particulier. Les garanties s'appliquent seulement aux droit et aux possessions existant au moment où elles sont stipulées. Ce fut sur ce fondement que Louis XV se déclara. en 1744, en faveur de l'électeur de Bavière contre MarieThérese, l'héritière de l'empereur Charles VI, quoique la cour de France eût antérieurement garanti la pragmatique sanction de cet empereur réglant la succession à ses États héréditaires. Ce fut encore sur un pareil fondement que la France refusa de remplir le traité d'alliance de 1756 avec l'Autriche, relativement aux prétentions de cette dernière puissance sur la Bavière en 1778, qui menaçaient d'amener une guerre avec la Russie. Quelques doutes qui puissent naltre quant à l'application de ces principes aux cas que nous venons de citer, il ne peut y en avoir aucun relativement aux principes eux-mêmes, qui sont textuellement reconnus par tous les publicistes 1.

Ces écrivains font une distinction entre une caution et un garant. Ainsi Vattel expose que quand l'objet se rapporte à des choses qu'un autre peut faire ou donner aussi bien que celui qui a fait la promesse originelle, comme, par exemple, le payement d'une somme d'argent, il est plus sûr de demander une caution qu'un garant. Car la caution remplit la promesse à défaut du promettant, tandis que le garant est seulement obligé de faire tous ses efforts pour obtenir l'exécution de la promesse de celui qui l'a faite 2.

1 VATTEL, liv. II, chap. xvI. § 238. matie française, t. VII. p. 495.

2 VATTEL, § 239.

FLASSAN, Histoire de la diplo

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