Page images
PDF
EPUB

Ces États étaient représentés dans chaque province par une fraction de la noblesse, par une fraction du clergé et un certain nombre de villes et de bourgs.

Les États avaient des réunions périodiques, une ou deux fois par an. Dans l'intervalle ils étaient représentés par une députation permanente prise parmi les membres des trois ordres et qui expédiaient les affaires courantes.

Les États provinciaux étaient chargés de la conservation des droits de la Province et de la gestion de ses intérêts. En fait ils n'étaient guère convoqués que pour voter des aides ou subsides.

Mais ils avaient une tendance naturelle à empiéter sur l'autorité du souverain et subordonnaient le vote des subsides à certaines conditions sur les matières de police et de justice.

Les membres des États jouissaient du privilège du saufconduit et d'immunité d'arrêt, ainsi que de la liberté de manifester leurs opinions.

CHAPITRE V

DES ÉTATS GÉNÉRAUX

31. Convocations et attributions. Délibérations. Caractères. Les délégués des États provinciaux convoqués par le gouverneur général constituaient les États généraux. Ils n'étaient associés à l'exercice de la souveraineté que d'une manière intermittente et précaire. Ils aspiraient à devenir une représentation nationale régulière, ayant le droit de se réunir à des époques fixes et sans convocation. Mais à partir de la fin du xvi siècle leur importance alla sans cesse en déclinant.

Le prince choisissait la ville où devaient se tenir les États généraux et, sur convocation, les États provinciaux y envoyaient des députés tirés des trois ordres.

La proposition admise par la majorité des provinces ne liait pas celles qui avaient refusé d'y adhérer.

Les États généraux ne représentaient pas la nation consi

dérée collectivement, mais seulement les individualités provinciales; ils n'avaient donc pas le caractère de représentation de nos chambres modernes. Leur fonction essentielle et presque unique était le vote des subsides.

La vie nationale n'existait qu'en germe. Aujourd'hui le Gouvernement central résume en lui l'unité de la nation.

CHAPITRE VI

LE POUVOIR JUDICIAIRE

32. Justice haute, moyenne et basse. Justice féodale. Il y avait, comme en pays féodal, trois juridictions.

La haute justice connaissait des crimes entraînant des condamnations corporelles.

La justice moyenne jugeait les délits punis d'amende, les actions personnelles ou réelles, la voirie et la police.

La basse justice accomplissait surtout les œuvres de loi requises pour opérer le transfert des droits réels.

Dans les villes jouissant du droit de commune et dans les villages érigés en commune les échevins, en Belgique, ont conservé jusqu'à la fin du siècle dernier l'exercice de la haute, de la moyenne et de la basse justice. Ils étaient les juges ordinaires dans leur ressort respectif.

Dans les villages non érigés en communes et soumis à la puissance du seigneur féodal, le droit de rendre la justice appartenait à ce dernier ou à son délégué. En fait, beaucoup de seigneurs vendaient le droit d'administrer la justice.

Il y avait en outre dans les villes principales des justices royales inférieures dont la justice s'étendait au plat pays ou banlieue de chaque ville.

Enfin dans plusieurs provinces, un officier royal (grand drossart ou souverain bailli) avait mission de parcourir les campagnes pour saisir et punir les malfaiteurs et les vagabonds.

Un conseil supérieur de justice siégeait dans la plupart des provinces.

Ceux de Malines, de Brabant, de Gueldre, de Hainaut et de Luxembourg étaient érigés en conseils souverains.

33. Le grand Conseil et les Conseils provinciaux. Compétence. Nomination. Inamovibilité. Privilèges. -Le grand conseil de Malines, institué en 1474 par Charles le Téméraire, était le premier corps de justice du pays. Il jugeait en dernier ressort toutes les causes qui y étaient appelées de toutes les provinces des Pays-Bas y compris la Bourgogne.

Le conseil de Brabant était dans l'origine un conseil d'État ambulant attaché à la personne du prince. Mais depuis 1531 il n'eut plus que des attributions judiciaires. Le conseil de Gueldre, institué en 1547 par Charles Quint, siégea d'abord à Arnheim; il fut transféré en 1579 à Ruremonde où il siégea jusqu'à la fin du siècle dernier. Le conseil souverain de Hainaut fut institué en 1611 par Albert et Isabelle. Son ressort embrassait tout le comté de Hainaut. Le conseil de Luxembourg fut établi par Charles Quint en 1531. Il fut élevé au rang de conseil souverain en 1782. Les conseils provinciaux de Flandre et de Namur furent toujours subordonnés au grand conseil de Malines. Le duché de Limbourg avait une cour de justice des décisions de laquelle il y avait appel au conseil de Brabant.

Les conseils de justice jugeaient en degré d'appel les causes jugées par les échevinages. Ils statuaient en outre sans appel sur certaines causes privilégiées. Ils pouvaient réformer même d'office les règlements émanés des magistrats locaux.

Les membres des conseils de justice étaient nommés par le prince sur une liste de trois candidats présentés par les conseils eux-mêmes. Ce droit de représentation devint une des prérogatives constitutionnelles des Belges.

Les magistrats de l'ordre judiciaire étaient inamovibles; ils ne pouvaient être privés de leur office que par jugement et pour cause d'indignité. La charge de président d'un conseil de justice conférait la noblesse héréditaire. Près de chaque con

seil de justice un ou plusieurs officiers, nommés par le prince, étaient chargés de veiller à la conservation de ses domaines et au maintien de son autorité.

Les conseils de justice étaient les délégués du prince qui se réservait le droit d'évoquer les affaires civiles ou criminelles. Il intervenait aussi dans l'administration de la justice en accordant des lettres d'abolition, de rémission et des saufconduits.

Les conflits de juridiction entre tribunaux ressortissant à une même cour de justice étaient faciles à résoudre. Entre deux conseils souverains ils étaient sans issue. Depuis 1509 ils étaient vidés par le conseil privé du prince.

34. Juridictions ecclésiastiques. Officialités et compétence. Recours au prince. Les officialités étaient des juridictions ecclésiastiques parallèles aux juridictions laïques; l'administration de la justice en matière spirituelle appartenait à l'évêque. Les officiaux connaissaient de toutes les actions pénales dirigées contre les clercs. Leur juridiction, importante au moyen âge, fut considérablement réduite au siècle dernier.

Le Pape déléguait des conservateurs apostoliques pour juger certains corps privilégiés. Au siècle dernier deux de ces conservateurs subsistaient dans les Pays-Bas ; l'un au profit de l'Université de Louvain, l'autre au profit de l'ordre des Jésuites.

Le recours au prince était adressé aux juges temporels supérieurs pour faire cesser les entreprises commises par les autorités ecclésiastiques sur les droits des particuliers ou des autorités séculières.

Il était également admis contre les censures et les excommunications et donnait lieu à un conflit de souverainetés, c'est-à-dire sans issue parce que, dit-on, celle qui aurait cédé serait devenue esclave de l'autre.

On allègue que le principe moderne de la séparation de l'Église et de l'État a rendu ces conflits impossibles. C'est une erreur puisqu'il existe des matières mixtes où les deux pouvoirs sont intéressés.

On a proposé par exemple de supprimer les voeux de chasteté. S'il arrivait que le pouvoir civil voulût déférer à ce vou, le conflit serait-il impossible?

« PreviousContinue »