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Quelques-uns opposent l'esprit moderne au catholicisme et les déclarent inconciliables.

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Cela est absolument vrai si, par esprit moderne », entend la révolution qui veut l'affranchissement absolu des hommes vis-à-vis de Dieu et surtout la destruction de l'Église. Cela est absolument faux si, par esprit moderne, on entend les légitimes aspirations des multitudes qui veulent avancer dans la voie du progrès et de la liberté civile et politique.

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Pie VI disait en 1791: " Nous devons avertir que notre intention n'est pas d'attaquer les nouvelles lois civiles auxquelles le roi a pu donner son consentement, ri de provoquer le rétablissement de l'ancien régime de France: le supposer serait renouveler une calomnie qu'on n'a affecté jusqu'ici de répandre que pour rendre la religion odieuse. » Les Papes condamnent l'athéisme d'État; mais la société moderne ne le demande pas. L'Angleterre, les États-Unis, l'Espagne ne le réclament pas. Aux États-Unis, il y a partout un culte social sans qu'il y ait pour cela de religion d'État.

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Les Papes ne condamnent pas la liberté de conscience et des cultes au sens où le demande la société moderne, c'està-dire comme une incompétence d'un gouvernement qui n'est plus chrétien et comme le résultat d'une nécessité sociale.

Ce qu'ils condamnent, c'est le caractère absolu qu'on veut donner à cette liberté de conscience, qui se dit de droit divin, antérieure et supérieure à toute loi religieuse; c'est cette liberté des cultes, fille de l'athéisme social, qui prétend que toutes les religions doivent être honorées, protégées également parce qu'elles sont toutes d'égale valeur.

Ce qui est condamné, c'est la liberté dogmatique de conscience et des cultes impliquant que, toutes les religions étant également vraies ou également fausses, l'homme est absolument libre de choisir celle qu'il veut ou de n'en pas choisir du tout.

Et la preuve, c'est que l'Église a toujours permis le serment de fidélité aux constitutions proclamant la liberté de con

science et des cultes comme un droit relatif et contingent résultant des nécessités sociales.

Pie VI (1791) blâme l'assemblée nationale d'avoir établi comme un droit de l'homme en société cette liberté absolue qui non seulement assure le droit de n'être pas inquiété pour ses opinions religieuses, mais qui accorde encore cette licence. de penser, de dire, d'écrire et même de faire imprimer impunément, en matière de religion, tout ce que peut suggérer l'imagination la plus déréglée, droit monstrueux, qui paraît cependant à l'assemblée résulter de la liberté et de l'égalité naturelle à tous les hommes.

N'est-ce pas ce que dit la Constitution belge (art. 14): « La > liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la » liberté de manifester ses opinions en toute matière sont garanties, sauf la répression des délits commis à l'occasion. » de l'usage de ces libertés. »

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Pie VII (29 août 1814) dit : « L'expérience (1791-1793) a montré que cette liberté de la presse, sans limites et sans frein, a été l'instrument principal de la dépravation des » mœurs, de la corruption de la foi et des soulèvements, des séditions, des troubles et des révoltes. Ces malheureux » résultats seraient encore actuellement à craindre, vu la méchanceté si grande des hommes, si, ce qu'à Dieu ne plaise! on accordait à chacun la liberté d'imprimer tout ce qu'il lui plairait.

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Faites des cœurs vicieux et vous n'aurez plus de catholiques, disait une autorité maçonnique, et quel père de famille laisserait aux mains de ses enfants le journal du Pèré Duchêne ou les livres obscènes dont les tribunaux ordonnent la destruction en condamnant ceux qui les propagent?

Grégoire XVI (15 août 1832) dit : « Cette aberration » désastreuse est favorisée d'ailleurs par la liberté totale et » démesurée des opinions qui portent partout le ravage dans l'Église et dans l'État aux applaudissements de plusieurs,

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qui osent prétendre qu'il en résulte quelque avantage pour la religion... Là se rapporte cette liberté funeste et dont > on ne saurait avoir assez d'horreur, cette liberté de la presse » pour publier quelque écrit que ce soit. »

Les Papes condamnent donc la liberté illimitée, sans frein, absolue, sans contrôle; la liberté de manifester ses pensées quelles qu'elles soient, sans que nulle autorité puisse imposer une limite.

Est-ce celle-là que demande la société moderne? Les constitutions de 1789 à 1880 (sauf celle de 1793) proclament une liberté sage, modérée, contenue par les freins nécessaires. Or, jamais les Papes n'ont condamné cette liberté-là.

Le Pape Paul V défendit aux catholiques anglais le serment d'allégeance parce qu'il contenait des choses opposées à la foi et au salut. Plus tard, le Pape défendit le serment à la constitution civile du clergé parce qu'elle était schismatique. Mais, en revanche, les Papes ont permis, après enquête sérieuse, le serment aux constitutions de la société moderne parce qu'ils ne les considéraient pas comme opposées à la foi catholique.

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Le serment de Napoléon Ier portait entre autres : « Je jure de faire respecter la liberté des cultes. - Si ce respect tombait sur la substance même des cultes et emportait l'acte intérieur d'approbation et de croyance à leur vérité dogmatique, Pie VII déclarait le sacre impossible. Mais, sur l'affirmation officielle que ce serment ne visait que la tolérance et la protection civile des personnes, sans aucune approbation des doctrines, ni affirmation de la vérité, le Pape consentit à sacrer l'empereur.

En 1815, le Pape autorisa le serment à la constitution de Louis XVIII, assurant la liberté des cultes, parce qu'il fut entendu que ce serment ne portait aucune atteinte ni aux dogmes, ni aux lois de l'Église et qu'il n'était relatif qu'à l'ordre

civil.

En 1817, il fut déclaré par le Pape que les évêques et les prêtres ne devaient faire aucune difficulté de prêter serment à la constitution hollandaise, les termes où il est question de la liberté des cultes étant parfaitement établis et le serment n'ayant pour objet que la protection civile qui regarde les personnes et non la tolérance dogmatique, laquelle concerne les doctrines.

Lorsque les nations se sont donné successivement des constitutions analogues, les Papes n'ont plus même demandé d'explications pour permettre le serment au clergé. Il est admis par tous que, en jurant fidélité aux constitutions qui garantissent aux personnes la liberté de leur culte, on n'approuve pas pour cela les doctrines erronées qu'elles professent et on ne s'oblige à rien qui soit contraire aux lois de Dieu et de l'Église.

TITRE Ier

INVIOLABILITÉ DE LA VIE HUMAINE

165. De la peine de mort. Des armées permanentes. L'inviolabilité de la vie humaine est sanctionnée par le décalogue (non occides).

Caïn ne peut cacher, et nul âge n'efface,

Le signe que la main de Dieu mit à sa face.

Mais cette inviolabilité doit-elle s'étendre aux assassins mêmes? Grave question que la plupart des nations civilisées ont résolue en appliquant ces mots devenus célèbres : « Supprimons la peine de mort, mais que MM. les assassins commencent. Elles ont maintenu la peine de mort pour les grands criminels, estimant que trop d'indulgence était l'arrêt de mort de beaucoup d'innocents.

En Belgique, la peine de mort est abolie en fait, bien que maintenue en droit conflit peu rationnel entre le législatif, qui la maintient, et l'exécutif, qui l'abroge.

Dans tous les cas, il faut applaudir à la suppression des mutilations corporelles. La torture a été abolie par Joseph II et par Louis XVI.

Quelques-uns tirent argument de l'abolition de la peine de mort pour vanter l'adoucissement des mœurs et glorifier notre époque.

Cet éloge serait mieux mérité si l'on commençait par

supprimer la peine de mort pour les innocents en faisant trêve de la guerre.

La Revue de Belgique (15 février 1888, p. 125) affirme que les armées permanentes, les flottes de guerre et les citadelles coûtent à l'Europe quarante et un millions par jour.

Qui pourrait justement admirer une civilisation où les haines de race et la folie humaine font augmenter chaque jour le nombre des armées permanentes et où quatorze pour cent de la population valide n'attend qu'un signal pour s'entr'égorger?

C'est la cause certaine de la misère et de la ruine générales qui doivent amener de prochains et lamentables boulever

sements.

On a fait et on fait encore des tentatives pour créer un tribunal d'arbitrage entre les peuples. Puisse-t-on aboutir!

Le comte de Maistre a écrit des pages célèbres sur l'honneur attribué partout et toujours à la profession des armes. Cet honneur, qui s'applique non pas à l'homme qui tue, mais à celui qui sait mourir, explique en partie le maintien des armées permanentes.

Voici, au surplus, comment une revue rationaliste analyse la situation ... La ligue pour la paix torture les nations et » les épuise jusqu'aux moelles; plonge dans les réservoirs de

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l'épargne européenne ses pompes aspirantes et desséchantes; > transforme la science, mère du progrès, en pourvoyeuse de roburite; enlève au travail et à la famille cent quarante hommes par mille habitants; impose, aux États désunis du vieux continent, des armées cent cinquante-quatre fois plus > nombreuses que celles des États-Unis d'Amérique; et se tient prête le jour où retentira le signal des nouvelles batailles prédites à faire de tant de peuples épris de civilisation et de travail des bandes furieuses de cinq millions de bêtes féroces se ruant les unes sur les autres, courant aux massacres par les express de toutes les voies ferrées, se tuant, par centaines de mille, à deux lieues de distance, et arrachant les milliards aux écoles, aux églises, aux > machines agricoles, aux industries, aux maisons péniten

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