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TROISIÈME PARTIE

Annexion de la Belgique à la France.

La Constitution française de 1791 défendait aux Français de faire des conquêtes et de tourner leurs armes contre la liberté des autres peuples. Les Belges, confiant dans ces promesses, ne redoutaient pas l'invasion française, mais ils furent les premières victimes de la révolution. La victoire de Jemmapes ouvrit la Belgique à Dumouriez ; il annonçait aux Belges que les Français entraient chez eux comme frères et amis, qu'ils leur apportaient une liberté entière et qu'ils les laissaient les maîtres de se donner telle constitution qu'ils voudraient. Un décret prescrivit l'ouverture de l'Escaut.

Mais l'armée victorieuse manquait de tout à cause du désordre inouï qui avait envahi l'administration française. Les soldats pillaient partout. Sur les plaintes du généralissime la Convention chargea quatre commissaires de constater l'état des choses. Les deux premiers, Danton et Lacroix, se compromirent gravement par leurs concussions qu'ils s'efforçaient de dissimuler par leur exagération révolutionnaire.

Les habitants des principales villes, confiants dans les promesses de Dumouriez, nommèrent leurs représentants provisoires qui demandèrent à la Convention de garantir l'indépendance des Belges et des Liégeois. La réponse (4 décembre 1792) portait que les députés de la Belgique ne devaient pas douter de cette garantie; les Français ayant proclamé le dogme de la souveraineté des peuples.

Barrère ajoutait cependant qu'il ne pouvait leur dissimuler que les Belges ne fussent encore asservis à des préjugés qui pouvaient être dangereux pour la liberté.

Et la majorité de la Convention, pour réaliser ses projets, devait considérer les Belges comme indignes d'aspirer au rang des peuples libres. Elle les traita en conséquence.

Voici le programme de la conquête (Cambon, 15 décembre): « Il faut nous déclarer le pouvoir révolutionnaire..... il faut que nos généraux proclament la souveraineté du peuple..... » l'abolition de la féodalité..... des abus..... que sur le champ » les biens de nos ennemis, des nobles, des prêtres, des com»munautés laïques ou religieuses, des églises soient séquestrés > et mis sous la sauvegarde de la nation française..... Tout peuple qui ne voudra point ce que nous proposons sera notre » ennemi............ guerre aux châteaux, paix aux chaumières ».

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La Convention consacra ces propositions par un décret, pour révolutionner les Provinces Belges, pour les spolier, les appauvrir et les contraindre ensuite à demander comme une grâce leur annexion à la République.

Les délégués de l'Assemblée et les commissaires nationaux se partagèrent la Belgique; à coups de sabre et de fusil ils. forçaient les habitants à demander l'annexion.

Ils dépouillaient les églises, ruinaient les châteaux, pillaient les caisses, vendaient à l'enchère les meubles de tous ceux qui leur portaient ombrage et envoyaient en France comme otages, des pères de famille, des vieillards, des femmes et des enfants. Et pour perpétuer leur domination ils empêchèrent par la force la tenue des assemblées primaires et de la convention nationale belge.

35. Convention nationale. Ils exercèrent en Belgique une dictature sans limites. Point de demi-révolution! disaientils; il fallait élever la Belgique au niveau de la République. Ils multiplièrent les clubs, créèrent des légions de sans culottes choisis dans la lie de la populace et continuèrent ces opérations fraternelles en forçant les notables de chaque ville à demander l'annexion. A Bruxelles le commissaire de la

Convention avait ordonné l'établissement de la guillotine sur la place publique.

Dans toutes les villes les commissaires jacobins remplissaient leur mission avec le plus insolent despotisme et une cupidité insatiable.

Un régime marqué par une tyrannie brutale et des exactions inouïes pesa sur notre malheureux pays.

Le total du numéraire extrait de la Belgique en cinq mois s'éleva à 30,336,000 livres, indépendamment de 1,676,000 livres provenant de recettes extraordinaires et d'une autre somme de 1,461,000 livres perçues sur les impositions ordinaires en assignats. Et après ces exactions la Belgique restait encore débitrice de 20,365,000 livres en numéraire. (Voyez Juste, II, pages 352 et seq.)

Tels furent les bienfaits de la Révolution française et de la fraternité républicaine. Le vol, le pillage, la ruine, le massacre, la suppression de toutes nos libertés séculaires.

Mais ici comme toujours la révolution a bien haï l'Église. Dès lors elle doit être glorieuse et bienfaisante. Vivent les géants de 93 et guerre à la croix et à l'Évangile !

36. Annexion. - Le 9 vendémiaire an IV la Convention. vota la réunion à la France de tous les pays en deçà du Rhin étant avant la guerre sous la domination de l'Autriche.

Elle accorda aux Belges et aux Liégeois la jouissance de tous les droits de citoyens français à charge par eux de payer très promptement les contributions extraordinaires imposées par les commissaires français. La réunion de la Belgique à la France fut décidée dans une conférence générale des commissaires tenue à Bruxelles le 3 février 1793. Le vote du citoyen Chaussard Publicola mérite surtout d'être noté on m'oppose (contre la réunion) le vœu du peuple le vœu d'un peuple enfant ou imbécile serait nul, parce qu'il stipulerait > contre lui-même. » (Juste. Histoire de Belgique, II, page 358.) Celle annexion fut ratifiée par le traité de Campo-Formio (17 octobre 1797).

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37. Constitutions de l'an III et de l'an VIII. La Belgique devint conquête française et les paysans belges conquirent le choix d'aller se faire massacrer sur tous les champs de bataille de l'Europe.

Le territoire français était divisé en départements, en cantons et en communes. Le principe de l'élection était appliqué à toutes les fonctions publiques, notamment aux fonctions municipales et départementales. Le pouvoir exécutif était délégué à un directoire composé de cinq membres.

La loi du 19 brumaire an VIII supprima le directoire et créa provisoirement une commission consulaire exécutive composée de Bonaparte, Sieyès et Roger Ducos.

Une constitution nouvelle fut soumise à l'approbation du peuple (22 frimaire an VIII, 13 décembre 1799).

Celle constitution établissait un Sénat conservateur composé de 80 membres inamovibles et à vie, qui se recrutait luimême et dont la majorité fut nommée pour la première fois par les trois consuls.

Il avait mission d'annuler les actes inconstitutionnels; mais il n'usa jamais de ce droit et ratifia strictement par son inaction les actes les plus arbitraires de l'Empereur.

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Proscrire et conscrire, moissonner chaque année une génération nouvelle, désorganiser les élections publiques et la représentation nationale, annuler des déclarations du jury, anéantir toute résistance au pouvoir absolu, fonder le despotisme, le nourrir et le bénir, se charger de son opprobre et s'enrichir de ses faveurs, voilà le résumé de l'histoire du Sénat. " (Daunou.)

La constitution de l'an VIII confiait le Gouvernement à trois consuls nommés pour dix ans et indéfiniment rééligibles. Les premiers consuls furent Bonaparte, Cambacérès et Lebrun.

Le premier consul avait des fonctions analogues à celles d'un roi constitutionnel.

Napoléon fut proclamé consul à vie par un Sénatus-Consulte du 2 août 1802.

38. L'empire.

Napoléon fut proclamé empereur par un

Sénatus-Consulte du 28 floréal an XII, 18 mai 1804.

des guerres

L'empereur, après avoir dévasté l'Europe par sanglantes qui durèrent jusqu'en 1814 finit par succomber devant la coalition européenne et, le 3 avril 1814, le Sénat conservateur proclama sa déchéance.

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