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Il faut enfin fe tirer de l'angoiffe alarmanté du momene préfent.

Voilà l'expofé des trois parties que je dois traiter; elles ont entr'elles un lien intime. Ce n'eft que par la perf pective d'un ordre ftable à l'avenir l'on pourra confentir aux facrifices néceffaires pour fuffire aux befoins extraordinaires; ce n'eft enfin qu'en remplifsant ces deux vues, que par un effort particulier on parviendra peut-être à fortir de la fituation fans exemple où nous nous trouvons pour le moment.

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LA fituation n'eft plus la même qu'à l'époque de l'ouverture des Etats-Généraux. L'ordre dans la perception des droits & des impofitions étoit parfaitement établi l'on n'en prévoyoit pas l'interruption, & l'on pouvoit. prudemment compter parmi les reffources de l'Etat, les améliorations furvenues dans le produit de ces droits & celles dont on étoit moralement certain. Une telle reffource n'a plus dans l'état actuel le même degré de réalité puifque les recouvremens font troublés, & qu'on eft en doute fur la continuation de plufieurs de ces revenus. Enfin, l'on ne peut plus, dans un temps de défiance, raffurer les efprits par des bonifications diverses, divisées en plufieurs articles, qui exigent toutes un examen

attentif, & dont le Public n'eft pas à portée de juger d'un coup-d'œil. C'est donc tout un autre compte qu'il faut présenter aujourd'hui pour rétablir la tranquillité. Il est de plus néceffaire que vous-mêmes, Meffieurs fans être obligés à aucune recherche ni à aucune étude approfondie qui prolongeroient infiniment vos déterminations, vous puiffiez adopter des bafes d'améliorations dans les Finances fufceptibles d'être ap rouvées ou rejetées au milieu même de votre nombreuse Affemblie Ce n'eft pas, je fuis bien loin de le penfer, ce n'eft pas qu'il faille négliger aucune bonification partielle, mais on peut les réferver, foit pour accroître le fonds d'une Caiffe d'amortiffement, foit pour remplacer quelques droits onéreux, foit pour fatisfaire à des accroiffemens de dépense que la fuite de vos difpofitions pourra rendre néceffaires.

Je vous rappellerai d'abord, Meffieurs, que le déficit, felon le compte qui vous a été présenté à l'ouverture de l'Affemblée Nationale, fe montoit à environ cinquante-fix millions.

Toutes les pièces juftificatives de ce compte ont été remises aux Députés qui compofent le grand Comité des Finances; & je crois qu'ils font en état de vous dire que s'ils n'ont pas tout examiné dans le plus grand détail, l'exactitude qu'ils ont apperçue jufqu'a préfent, donne lieu de préfumer que cet ouvrage a été fait avec beaucoup de foin & de régularité.

Le chapitre des anticipations dans le compte des Finances dont il eft ici queftion, comprenoit en dépenfe

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environ cinq millions pour l'intérêt de quatre-vingts millions qu'on fuppofoit néceffaires pour finir l'année; mais comme le dernier Emprunt, en y ajoutant le fonds destiné aux remboursemens, a produit une nouvelle charge, pendant dix ans, de dix millions, c'est environ cinq millions à ajouter au déficit de cinquante-fix millions, ce qui l'élève à foixante-un.

Le dernier Emprunt, il eft vrai, n'eft pas rempli, mais il le fera fucceffivement dans un temps donné; ainfi il faut mettre en ligne de compte les intérêts & les rembourfemens auxquels il engagera, puifqu'il eft quef. tion ici d'un état futur & permanent.

Je paffe fous filence quelques petites augmentations de dépenfes & de revenus, afin de ne point détourner Votre attention par des bagatelles.

Voici maintenant les reffources majeures qui pourroient balancer ce déficit, fi vous jugiez à propos de les adopter.

1o. Vous pourriez déterminer que les fonds deftinés au département de la guerre, feroient diminués de quinze à vingt millions, en améliorant cependant le fort du foldat; & vous demanderiez au Roi que les nouveaux plans fuffent formés fur cette bafe.

2o. Le Roi & la Reine font difpofés à n'avoir qu'une feule & même maison; & en ordonnant les retranchemens les plus rigides, Leurs Majeftés guidées par le plus vif defir de contribuer au rétablissement de l'ordre, efpèrent pouvoir réduire à vingt millions les dépenfes comprises fous la dénomination générale de

Maifon du Roi; ce qui produiroit une nouvelle économie de cinq millions.

3. Les fommes fournies aux Maifons des Princes fe montent à 8,240,000 liv. indépendamment du produit des apanages; il ne m'appartient pas de déterminer le retranchement dont cet article feroit susceptible.

49. En refferrant chaque article, le Miniftre des Affaires Etrangères propofera encore fucceffivement une réduction d'un million fur le fonds très-modéré destiné à fon département.

5°. Les penfions s'élèvent encore à près de vingt-cinq millions, non-obftant les dernières retenues : ce fera peu, felon votre opinion déjà connue, que de fixer ici à cinq ou fix millions l'économie dont cette dépenfe feroit fufceptible; mais ne voulant indiquer en ce moment que des réductions auxquelles on puiffe avoir confiance, je ne crois pas devoir aller plus loin. Vous verrez que les petites pensions, celles qui méritent des égards à tant de titres, forment la grande maffe.

6o. La dépense des haras que vous êtes dans l'intention de fupprimer, fe monte à huit cents mille livres.

7°. Le Roi paye annuellement au Clergé deux milfions cinq cents mille livres pour augmenter le fonds de fes rembourfemens: ce fupplément pourroit être retranché fans inconvéniens.

8°. Les extinctions viagères pendant le cours de l'ananée fuivante, pourroient au moins êrre mifes ici en ligne de compte ; elles fe monteront probablement à quinze cents mille livres.

9. Si l'on a recours à une taxe momentanée pour fubvenir à l'embarras préfent, & fauver entièrement les Finances, il eft probable qu'avec fon produit on poutra diminuer les anticipations qui le font déjà beaucoup aujourd'hui par la force du difcrédit; ainfi l'on doit raisonnablement s'attendre à une réduction fur cette partie de dépenfe, & je l'eftimerai, quoique vagnement encore en ce moment, à près de huit millions.

10". Vous pourriez convenir en dernier terme, qu'a près avoir réuni enfemble, fous le nom d'Impôt territorial, la taille & les vingtièmes, la fomme totale exiftante aujourd'hui feroit augmentée de quinze millions; & les contribuables trouveroient le dédommagement de cet accroiffement par l'affujettissement à l'Impôt territorial de toutes les perfonnes & de toutes les terres privilégiées, & par la ceffation de tous les abonnemens particuliers qui exiftent pour les vingtièmes. Enfin, fi vous le préfériez, au-lieu de l'accroiffement pofitif fur l'Impôt territorial dont je viens de parler, vous pourriez feulement déterminer qu'il feroit pourvu dans chaque Province, par une addition d'impôt, aux diverfes remises, réductions & modérations que le Roi accorde fur la Taille, les Vingtièmes & la Capitation, foit à la décharge effective des contribuables, foit pour être destinées à des travaux de charité & à diverses dépenfes particulières à chaque Province. Ces différens objets forment précisément, dans le compte général des dépenfes, une fomme de quinze millions; favoir :

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