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connaît qu'un exploit n'est pas nul par cela seul que l'officier constitué, quoique étant avoué, y est désigné comme avocat (Limoges, 30 décembre 1812, J. A., t. 13, p. 205); qu'il y`a constitution suffisante lorsqu'il est donné assignation à comparaître à l'effet de, par le ministère de tel avoué, voir conclure, etc., ou que l'on déclare que tel avoué occupera pour le demandeur (Bruxelles, 21 février 1814, J. A., t. 13, p. 221); que l'erreur de nom dans la constitution d'avoué n'opère pas la nullité, si, d'ailleurs, il est impossible de se méprendre sur la personne du véritable constitué (Angers, 2 janvier 1824, J. A., t. 26, p. 311, el Bourges, 10 février 1825, Journ. de cette Cour, e année, p. 231); à moins que ce nom soit tellement altéré, qu'on ne puisse pas le déchiffrer (Rennes, 23 juin 1820, J. A., t. 3, p. 459), et qu'alors même qu'on a complétement omis le nom de l'avoué constitué, l'exploit est valable si l'on y a indiqué la rue et le numéro où il demeure, et s'il n'y a pas plusieurs avoués logés dans cette maison (Bordeaux, 1er juin 1831, J. A., t. 41, p. 686).

La Cour de Rennes, le 20 janvier 1813 (J. A., t..3, p. 380, et la Cour de cassation, le 21 décembre 1831 (J. A, t.44, p. 224, ont même été jusqu'à admettre que la constitution ne doit pas nécessairement se trouver dans le corps de l'exploit, qu'elle peut être suppléée par la signature qu'un avoué aurait mise en marge de la copie, ou par une réquisition d'appel qui serait signifiée en tête de l'acte, qui contiendrait ces mots : A la requête d'un tel, avoué, vous permettrez d'assigner, et qui porterait la signature de cet officier.

« Mais ces deux dernières décisions nous paraissent excéder les bornes de l'indulgence et contrarier les vrais principes de la matière. Leur résultat serait de donner à l'avoué le pouvoir de se constituer lui-même, et l'on sent que c'est à la partie à le faire; que, tout le temps qu'elle ne l'a point chargé par un acte éinané d'elle, de sa défense, l'avoué n'a point qualité pour la représenter : la partie adverse n'est pas obligée de le reconnaître. Nul ne peut se donner qualité à lui-même; et c'est pourtant ce qui arriverait, si l'on admettait le système consacré dans les deux espèces dont nous parlons. En effet, la signature de l'avoué sur la copie, une réquisition d'appel faite par lui, sont des actes qui lui sont personnels, qui sont étrangers au demandeur; l'exploit seul fait foi des intentions de celui-ci, parce que l'huissier, qui en est l'auteur, est seul chargé par la loi de les con

stater. »

COUR ROYALE DE Toulouse.

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Compétence. Tribunal civil. - Compte. Lettre de change.

Lorsqu'une assignation est donnée en restitution de quatre leures

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de change et en même temps afin de règlement de compte entre les parties, la contestation est du ressort du Tribunal civil: le Tribunal de commerce est incompétent.

(Descouens C. Anglade.) — ARRÊT.

LA COUR ;- Attendu que l'appelant ne se borne pas, dans l'exploit de citation, à une demande en restitution des quatre lettres de change dont s'agit, mais qu'en résumé cette demande tend à un règlement de compte dont le résultat pouvait aboutir, ou à une solde desdits effets, ou à des actes d'offre à l'effet de compléter sa libération ; que cette action offre en soi un caractère mixte, en ce qu'elle participe de la jurisprudence commerciale par la restitution des lettres de change et de la juridiction ordinaire civile par la liquidation réclamée; que dès lors c'est devant cette dernière juridiction que l'instance doit être introduite;

PAR CES MOTIFS, démet de l'appel.

Du 6 juillet 1841.1 Ch.

COUR ROYALE DE TOULOUSE.

Reprise d'instance. Décès. Défaut-profit-joint.

Lorsqu'un arrêt de défaut-joint a été obtenu contre une partie qui était sans intérêt dans le procès, quoique y ayant figuré en première instance, et que celle partie vient à décéder avant d'avoir constitué avoué, il n'est pas nécessaire de reprendre l'instance, et l'on peut passer outre au jugement de la cause.

(Rodière C. Rodière.)—ARRÊT.

LA COUR; Attendu que la femme Combret n'est pas partie essentielle dans la cause, d'après les faits et circonstances du procès, n'ayant pas appelé principalement du jugement; qu'absente ou présente elle n'aurait rien à demander aux parties d'Esparbié ni à celles de Marion; que, son décès intervenu dans ces circonstances, on ne saurait considérer la cause comme hors de droit, et, par cet ordre, dans la nécessité d'être reprise ;

Attendu que l'arrêt de défaut-joint n'est pas un obstacle au jugement du fond, en ce que ledit arrêt n'est qu'un acte d'instruction pour mettre la cause en règle; que, s'il est incontestable qu'avant le défaut-joint obtenu la cause pouvait être évacuée en l'état, elle n'a pas changé de nature par l'effet dudit arrêt.

Attendu, relativement audit Joseph Rodière, qu'il résulte de la production de l'original de l'exploit représenté par les parties d'Esparbié, que ledit Joseph Rodière a été également réassigné en exécution de l'arrêt de défaut-joint, et, qu'en supposant que dans la copie dudit exploit il se fût glissé quelque irrégularité, ce serait à Joseph Rodière seul à s'en prévaloir, et non à Frédéric Rodière qui est, à cet égard, sans qualité ;

PAR CES MOTIFS, déclare la cause en état d'être jugée; référant, la renvoie à quinzaine pour être plaidée au fond.

Du 7 juillet 1844. - 1re Ch.

COUR ROYALE DE BIOM.

Enquête. Délai, Augmentation à raison des distances.

a

double.

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En matière d'enquête, le délai de trois jours accordé par l'article 261 C. P. C. à la partie assignée au domicile de son avoué pour étre présente à l'audition des témoins, doit étre augmenté à raison des distances, mais ne doit pas étre DOUBLE à raison de l'envoi et du

retour.

(Defrance C. Bertrand.)

Le 9 juin 1840, dans une contestation soumise au Tribunal de Saint-Flour, entre François Defrance, négociant au Puy, et Armand Bertrand, un jugement ordonna une enquête.

Le 2 novembre 1840, Bertrand fit notifier à Defrance, au domicile de son avoué à Saint-Flour, la liste des témoins qu'il voulait faire entendre, et lui donna assignation au 9, jour fixé pour l'enquête.

Le 9 novembre, l'avoué du sieur Defrance vint assister à l'enquète, mais il se réserva d'en demander la nullité pour cause d'insuffisance du délai entre la notification du 2 et la séance du 9. Il devait communiquer cet acte à son client au Puy, et recevoir ses instructions à Saint-Flour; c'était l'envoi et le retour prévu par l'art, 1033 C. P. C.; et il fallait, suivant cet article, doubler l'augmentation à raison des distances du délai de trois jours donné par l'art. 260.

Le 16 décembre 1840, le Tribunal a condamné cette proposition et rejeté la demande en nullité, en ces termes :

« Attendu que quand même il serait possible que l'art. 261 C. P. C., restreint dans ses termes rigoureux, présentât quelque difficulté dans son application à des cas rares, il est certain que les auteurs ont généralement décidé qu'il n'y avait pas lieu à augmentation de délai pour retour; qu'un arrêt de la Cour de Nimes l'a jugé in terminis; que divers arrêts de cassation l'ont jugé implicitement, ou tout au moins l'ont supposé ;

« Attendu que l'art. 1033 ne se prête pas à cette augmentation en effet, il ne l'accorde qu'en cas de voyage, et en cas d'envoi et retour; or, il n'y a pas voyage; il faudrait donc qu'il y eût lieu à envoi et retour, c'est-à-dire nécessité d'envoyer une pièce et de la faire revenir, comme, par exemple, dans le cas des art. 563 et 541 ;

« Attendu que cette difficulté levée, l'assignation a été donnée dans le délai. »

Appel.

Le sieur Defrance, appelant, n'a pas été plus heureux en la Cour qu'au Tribunal de première instance.

ARRÊT.

LA COUR; Adoptant les motifs exprimés au jugement dont est appel, rendu par le Tribunal de Saint-Flour, le 19 décembre 1840, dit qu'il a été bien jugé, mal et sans cause appelé'; ordonne que ledit jugement sortira son plein et entier effet.

Du 13 juillet 1841.3 Ch.

OBSERVATIONS.

La jurisprudence n'est pas fixée sur cette question délicate, néanmoins nous croyons que l'opinion adoptée par la Cour de Riom n'est pas celle qu'il faut préférer. On reconnaît généralement aujourd'hui, quoiqu'il y ait eu quelque dissidence sur ce point, que le délai fixé par l'art. 261 C. P. C. doit être augmenté à raison des distances. Telle est notamment la doctrine de la Cour de cassation consacrée par plusieurs arrêts. (V.J. A., t. 11, p. 141 1; t. 26, p. 264; t. 30, p. 352, et CHAUVEAU Sur CARRÉ, t. 2, p. 568, no 1020.) Cette doctrine du reste est parfaitement raisonnable, car elle est basée sur cette considération décisive, que l'avoué à qui l'assignation est remise a besoin de recevoir les instructions de sa partie pour pouvoir récuser les témoins et assister utilement à l'enquête. Or il faut bien qu'un délai suffisant soit accordé pour que ces communications reconnues indispensables entre l'avoué et son client puissent avoir lieu. Qu'importe en effet que l'avoué habite le lieu où doit se faire l'enquête, si la partie en est à deux cents lieues? Il faut leur laisser le temps de correspondre et de s'entendre, sans quoi la voie de l'enquête ne serait qu'un moyen d'instruction dangereux, qu'une déception.

Ce point admis, il n'y a plus qu'un pas à faire pour arriver à la solution rationnelle de la question jugée par la Cour de Riom. Faut-il que le délai soit double? - Non, dit-on, parce qu'il n'y a lieu ni à voyage, ni à envoi et retour. . C'est ici qu'est l'erreur. En effet, la Cour de Riom n'a pas remarqué qu'on était précisément dans les termes de l'art. 1033 C. P. C., et qu'il y avait lieu à envoi et retour. Qu'on se pénètre bien de la position des parties et des besoins de la défense. Que veut la loi? que l'avoué à qui l'assignation est donnée puisse la transmettre à son client et recevoir ses instructions: or comment le pourra-t-il si l'augmentation du délai n'est pas double, si elle n'est pas calculée de manière à ce que l'envoi puisse avoir lieu et la réponse revenir. Est-ce que l'avoué abandonné à luimême pourra deviner quelles sont les causes de récusation qui peuvent exister contre tel ou tel témoin qu'il ne connaît pas, qu'il n'a jamais vu? Est-ce qu'il pourra savoir quelles sont les ques

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tions à adresser aux déposants? etc... etc... Or cela est nécessaire, indispensable pour que l'enquête soit efficace et que la position des parties devant la justice soit égale. Il faut donc se décider pour l'opinion qui tend à accorder une augmentation double du délai des distances, dans le cas qui nous occupe. Aussi est-ce dans ce sens que M. BONCENNE se prononce dans sa Théorie de la procédure civile, t. 4, p. 280 (1).

Le jugement du Tribunal de Saint-Flour, confirmé par la Cour de Riom, s'appuie sur un arrêt in terminis de la Cour de Nimes (11 janvier 1832, J. A., t. 42, p. 163); mais s'il fallait se décider par des arrêts, combien la réponse serait facile! sans parler de l'arrêt de la Cour de Limoges du 22 juillet 1837 qui juge le contraire (J. A, t. 55, p. 621), sans parler de l'arrêt de la Cour de cassation du 28 janvier 1826, rapporté J. A., t. 30, p. 352, nous opposerious la Cour de Nîmes à elle-même, et son arrêt du 18 juillet 1838 à celui qu'on invoque. Voici en effet les motifs qui ont déterminé la Cour de Nîmes à changer sa jurisprudence:

«Attendu que, d'après l'art. 261 C. P. C., la partie doit être assignée pour être présente à l'enquête, au domicile de son avoué; que cette assignation ne doit pas être considérée comme un simple acte d'avoué, mais comme un véritable ajournement; qu'elle a été en effet prescrite pour donner à la partie la faculté de se présenter à l'enquête pour reprocher les témoins et leur adresser les interpellations nécessaires ; Attendu que cette faculté serait illusoire si, aux jours portés par l'article cité, il n'était ajouté, lorsque la partie habite au delà de trois myriamètres du domicile de l'avoué ou de l'endroit où doit avoir lieu l'enquête, la double augmentation dont parle l'art. 1033 C. P. C.; qu'il faut évidemment que l'avoué ait le temps de faire parvenir la liste des témoins à la partie, et que celle-ci puisse les lui transmettre avec les renseignements nécessaires, ou se rendre elle-même au lieu de l'enquète, et que la simple augmentation serait insuffisante ; — Attendu, dans l'espèce, que, dans les assignations signifiées au sieur Abran, au domicile de Me Lamarche, son avoué, la double augmentation prescrite par l'article précité n'a pas été accordée; -Par ces motifs, annule l'enquête du sieur Valgulier.» (Affaire Valgulier C. Abran.)

M. SOUQUET, dans son Code des temps légaux, partage cette opinion, qui, nous en avons le pressentiment, finira par prévaloir.

(1) Il y a lieu à envoi, dit-il, puisque l'avoué doit envoyer à son client l'assignation et la liste des témoins; il y a lieu à retour, puisqu'il faut que ces pièces retournent à l'avoue avec les notes du client, ou que celui-ci les apporte lui-même. L'augmentation sera donc du double. »

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