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çais qui désire répudier cette qualité (C. civ., art. 17 et 19 (1)). La loi du 25 juin 1889 qui portait «< Est Français tout indi«< vidu né en France d'un étranger qui lui-même y est né » a été modifiée par la loi du 26 juillet 1893 (article 8 no 3 nouveau Code civil), en ce sens que si c'était la mère seule qui était née en France, l'individu en question aurait la faculté de décliner la qualité de Français dans l'année de sa majorité. Des réclamations diplomatiques d'ordres divers, mais fondées notamment sur la part trop grande laissée au hasard dans ce dernier cas, motivèrent cette limitation (2).

(1) Art. 9 du Code civil. « Tout individu né en France d'un étranger et qui « n'y est pas domicilié à l'époque de sa majorité, pourra, jusqu'à l'âge de vingt« deux ans accomplis, faire sa soumission de fixer en France son domicile et « s'il l'y établit, dans l'année à compter de l'acte de soumission, réclamer la « qualité de Français par une déclaration qui sera, à peine de nullité, enregis«trée au ministère de la justice... » (Loi du 26 juin 1889).

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(2) Art. 8 no 3 du Code civil (Loi du 26 juin 1889 modifiée par la loi du 22 juillet 1893)... (est Français) 3° « Tout individu né en France de parents étran«gers dont l'un y est lui-même né, sauf la faculté pour lui, si c'est la mère qui est née en France, de décliner dans l'année qui suivra sa majorité, la « qualité de Français, en se conformant aux dispositions du paragraphe 4 ciaprès». Voir ci-dessus ce paragraphe note 1. — Citons un passage intéressant du rapport de M. le sénateur Thézard : « Il nous a été signalé des faits assez « suggestifs à cet égard: un personnage étranger considérable qui, accidentelle«ment était né en France, était venu passer une saison dans une de nos sta«<tions balnéaires avec sa femme enceinte; on attendait là paisiblement la nais«<sance de l'enfant quand, tout-à-coup, on s'avisa que si l'enfant naissait en << France, il serait Français sans possibilité de répudiation : le mari s'empressa « de faire repasser la frontière à sa femme. Un autre, dans un cas semblable, << dut renoncer à faire venir à Paris sa femme qui aurait désiré avoir pour sa a grossesse et son accouchement l'assistance de nos sommités médicales... Nous << sera-t-il permis de rappeler que grâce à une particularité de ce genre, la Tou«raine a ravi à la ville de Rennes, il y a trois siècles, l'honneur de voir naître le « grand Descartes? Le père du philosophe était conseiller au titre français dans « le Parlement mi-parti de Bretagne et ne pouvait être remplacé que par un « Français. S'apercevant que sa femme promettait de lui donner un héritier, « le prudent conseiller l'envoya faire ses couches

<< bretonne, afin que l'enfant un jour, fût apte charge ». (Rapport de M. Léopold Thézard.

en terre française et non

à obtenir la survivance de sa

Sénat, session de 1893 annexe

Ainsi, la distinction faite par la loi du 7 février 1851 et maintenue par celle du 16 décembre 1874, entre les enfants nés en France d'un étranger qui lui-même y était né, et ceux, nés en France d'un étranger né lui-même à l'étranger, subsistait entièrement; mais l'application pratique de cette distinction a subi des modifications juridiques considérables: tandis en effet que les lois de 1851 et de 1874 considéraient comme Français sous condition résolutoire tout individu né en France d'un étranger qui lui-même y était né, la loi de 1889, modifiée par celle de 1893 (article 8 n° 3 nouveau, C. C.) regarde maintenant cet individu comme définitivement Français, sans distinction d'abord (loi de 1889), puis ensuite si c'est le père qui est né en France (loi de 1893); si c'est la mère qui est née en France, l'enfant est, depuis 1893, sans distinction de domicile, assimilé, suivant les termes de l'article 8 n° 4, à l'individu né en France d'un étranger (qui lui-même n'y est pas né) et qui est domicilié en France à l'époque de sa majorité tous deux peuvent en effet décliner la qualité de Français dans l'année qui suit cette époque. Il est remarquable, d'autre part, que c'est la même condition, déterminée jadis par la loi du 7 février 1851 pour l'individu né en France d'un étranger qui lui-même y était né, qui actuellement, suivant le nouvel article 8 n° 4, est celle de l'individu né en France d'un étranger qui lui-même n'y est pas né, à condition qu'il soit domicilié en France à l'époque de sa majorité l'article 8 n° 4 déclare en effet ce dernier Français sous condition résolutoire au moins à l'époque de sa majorité (1).

« au procès-verbal de la séance du 29 juin 1893 no 236, p. 27). V. aussi sur la loi « de 1893, l'article de M. Surville : « De la nationalité des enfants nés sur le « sol français de parents étrangers. » (Journal du droit international privė, 1893, p. 673 et s.).

(1) L'article 1er de la loi du 7 février 1851 disait, il est vrai : « à moins qu'il

A la distinction du lieu de naissance en France ou à l'étranger des parents étrangers, créée par la loi de 1851, et maintenue et modifiée avec la réserve de la loi de 1893, par la loi de 1889, cette dernière en a donc ajouté une autre qui est celle du domicile à l'époque de la majorité, de l'individu né en France d'un étranger qui, lui-même, n'y est pas né. Nous savons que si l'individu en question est domicilié en France à l'époque de sa majorité, il est Français sous condition résolutoire.

Quant à celui qui, né en France d'un étranger qui lui-même n'y est pas né, n'a pas son domicile en France à cette époque, la loi du 26 février 1889, dans l'article 9 du Code civil modifié, lui permettait, comme l'ancien article 9, de faire sa soumission de fixer son domicile en France, et, s'il l'y établissait dans l'année à compter de l'acte de soumission, de réclamer la qualité de Français. Le nouvel article supprimait d'ailleurs toute controverse au sujet de la loi applicable à la détermination de l'âge de la majorité, en décidant que ce serait jusqu'à vingt-deux ans accomplis que l'option pourrait être faite; c'était régler les conditions de la majorité d'après la loi française: - cette disposition, consacrant la théorie de la jurisprudence, érigeait en même temps en règle cette contradiction que nous avons signalée plus haut, et qui consistait à faire de la loi française, sur ce point particulier, le statut personnel d'un étranger.

La loi de 1889, tout comme le Code Civil, considérait donc comme un droit absolu pour cet étranger celui de réclamer la qualité de Français et de l'obtenir : elle faisait cependant une distinction basée sur le domicile, nécessitée par le fait qu'elle

« ne réclame la qualité d'étranger, » tandis que le § 4 de l'article 8 dit : « à « moins qu'il n'ait décliné la qualité de Français, » Les deux expressions n'en sont pas moins synonymes en droit.

considérait dans le nouvel article 8 n° 4, comme Français sous condition résolutoire, l'individu né en France d'un étranger, et qui était domicilié en France à l'époque de sa majorité. Sous cette réserve et avec la nécessité nouvelle, sans peine de nullité d'ailleurs, de l'enregistrement de la déclaration au ministère de la justice, l'article 9 nouveau selon la loi de 1889, était conforme à l'article 9 ancien du Code civil. Le nouvel article, supprimant une controverse et introduisant une distinction et une modification dans la loi n'en restait pas moins, sur ce point, basé sur les mêmes principes que celui de 1804: aucun contrôle du gouvernement, aucun refus ne pouvaient. empêcher, si elle se produisait, l'option expresse, résultant de la déclaration, ou tacite, venant d'une formalité relative au service militaire, faite par l'étranger en question; - s'il était mineur, la loi de 1889 autorisait enfin ceux qui ont qualité pour le représenter, à faire en son nom la déclaration d'option: c'était là incontestablement une disposition malheureuse et d'une exagération évidente: la volonté, en matière d'option de nationalité doit, en effet, pour être libre, être personnelle; elle ne saurait, sous aucun prétexte, même surtout sous celui de la minorité, être suppléée par personne.

Quoiqu'il en soit, par une contradiction assez bizarre de cette loi de 1889, qui, tout en accordant une si large part au jus soli, ne renfermait pas moins beaucoup de dispositions, inspirées par le désir de supprimer l'heimathlosat, l'article 9, modifié par elle, laissait le gouvernement désarmé devant l'inertie d'un étranger, excipant au besoin de la nationalité d'origine qu'il avait d'ailleurs perdue d'après sa loi propre, pour se refuser à subir une charge due par tous les Français. Une modification était nécessaire et la réforme attendue, qu'est venue apporter la loi du 22 juillet 1893, est des plus importantes. Aux termes du nouvel article 9 modifié par cette

loi (1), l'enregistrement de la déclaration, qui doit être désormais opéré au ministère de la justice, sous peine de nullité, peut être refusé non seulement lorsque le réclamant ne se trouve pas dans les conditions requises par la loi, mais

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(1) Pour le premier paragraphe de l'article 9, voir ci-dessus p. 25, note 1. Le texte de 1889 comprenait trois alinéas. Le premier ne différait de l'alinéa ler du texte actuel (ci-dessus rapporté) que par les mots : « à peine de nullité » ajoutés en 1893. Les alinéas 2 et 3 sont devenus les alinéas 10 et 11 du nouvel article; sont donc nouveaux les alinéas 2 à 10 du texte actuel. Loi de 1893, art. 9 du Code Civil, alinéa 2 « L'enregistrement sera refusé s'il résulte des pièces produites que le déclarant n'est pas dans les conditions requises par la loi, sauf à lui à se pourvoir devant les tribunaux civils, dans la forme prescrite par les articles 855 et suivants du Code de Procédure Civile. · La no«tification motivée du refus devra être faite au réclamant dans le délai de « deux mois à partir de sa déclaration. L'enregistrement pourra en outre « être refusé, pour cause d'indignité, au déclarant qui réunirait toutes les con«<ditions légales, mais dans ce cas, il devra être statué, le déclarant dûment avisé, par décret rendu sur l'avis conforme du Conseil d'Etat, dans délai de « trois mois à partir de la déclaration, ou, s'il y a eu contestation, du jour où « le jugement qui a admis la réclamation est devenu définitif. Le déclarant « aura la faculté de produire devant le Conseil d'Etat des pièces et des mé« moires. A défaut des notifications ci-dessus visées dans les délais susindiqués, et à leur expiration, le ministre de la justice remettra au déciarant,

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« sur sa demande, une copie de sa déclaration, revêtue de la mention de l'enre◄gistrement. La déclaration produira ses effets du jour où elle aura été faite << sauf l'annulation qui pourra résulter du défaut d'enregistrement. Les rè«gles relatives à l'enregistrement prescrites par les paragraphes 2 et 3 du « présent article, sont applicables aux déclarations faites en vue de décliner

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-

« la nationalité française, conformément à l'article 9, paragraphes 3 et 4, et aux articles 12 et 18. Les réclamations faites, soit pour réclamer, soit pour dé«cliner la qualité de Français, devront, après enregistrement, être insérées au a Bulletin des lois. Néanmoins l'omission de cette formalité ne pourra pas pré« judicier aux droits des déclarants. Si l'individu qui réclame la qualité de Français est âgé de moins de vingt et un ans accomplis, la déclaration sera << faite en son nom par son père; en cas de décès, par sa mère; en cas de décès

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« du père et de la mère ou de leur exclusion de la tutelle, ou dans les cas prévus

par les articles 141, 142 et 143 du Code Civil, par le tuteur autorisé par déli

« bération du conseil de famille. Il devient également Français, si, ayant été

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« porté sur le tableau de recensement, il prend part aux opérations de recrute«ment sans opposer son extranéité. » — (Les deux derniers alinéas 10 et 11, constituaient ainsi les alinéas 2 et 3 de l'article 9 modifié par la loi du 22 juillet

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