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blir ensuite, après enquête, un service de chemin de fer. L'affaire a soulevé de vives réclamations qui se sont manifestées par des procédés que je n'ai pas à juger ici. La ville de Versailles a prétendu avoir un droit de propriété sur les contre-allées de l'avenue de Sceaux, et le juge du référé s'est prononcé dans un sens favorable à ses prétentions. Je me suis soumis à cette décision; les travaux ont été suspendus après deux ou trois heures de travail. Vous voyez qu'on a fait plus de bruit au sujet de cette violation du droit de propriété que cela n'en valait la peine.

La question reste entière; elle est en ce moment renvoyée purement et simplement à la commission que l'Assemblée a chargée d'examiner le projet de concession de chemins de fer à la compagnie de l'Ouest. Elle sera par conséquent discutée devant vous.

En réalité, les deux faits sur lesquels M. de Janzé prétend avoir basé sa proposition n'ont existé que dans son imagination. Je n'ai pas cru devoir m'abstenir de donner ces explications à l'Assemblée, car, enfin, si un ministre fait abus d'une loi, s'il se permet d'en faire un mauvais usage ou une mauvaise application, que M. de Janzé me permette de le lui dire, on ne change pas la loi, messieurs, on change le ministre. (Très-bien! très-bien!)

M. le rapporteur. Je ne veux pas répondre à la dernière partie du discours de M. le ministre; je dirai quelques mots simplement à propos des observations qu'il a faites au sujet de la seconde proposition.

J'en suis d'autant plus étonné, que M. le ministre, si j'ai bonne mémoire, m'avait dit à plusieurs reprises qu'il reconnaissait l'utilité de ces documents pour le Corps législatif et qu'il s'empresserait de les fournir.

M. le ministre. Eh bien, que voulez-vous de plus?

M. le rapporteur. Il avait ajouté : « Oui, ces documents existent et ils seront à votre disposition quand une commission les demandera. Mais je trouve beaucoup plus simple, la commission trouvait beaucoup plus simple qu'ils fussent régulièrement fournis, puisqu'ils sont régulièrement dressés tous les ans. (Mouvements divers.)

M. Rameau. Messieurs, il était tout naturel qu'à l'occasion d'un projet de loi qui a pour objet de retirer au pouvoir exécutif pour la transmettre au pouvoir législatif la faculté de décider ou de statuer sur les chemins de fer de moins de 20 kilomètres, il était naturel, dis-je, que l'incident relatif à la ville de Versailles fût porté à cette tribune.

Je crois qu'il peut résulter - et j'en demande acte - de la déclaration de M. le ministre, qu'il n'a pas l'intention de donner suite aux deux projets de chemins de fer, appelés l'un projet provisoire et l'autre projet définitif, chemins de fer qui traverseraient la ville de Versailles, en vertu d'une simple lettre ministérielle, et alors qu'il n'y a pas eu de décret; on l'a reconnu. Cet incident ne permet pas l'examen des difficultés de détail, mais je suis heureux de prendre acte de la déclaration que ces deux projets ne seront pas suivis d'exécution... (Réclamations.)

Un membre. Vous n'en savez rien !

M. le ministre des travaux publics. Je n'ai pas dit cela!

M. Rameau. J'avais compris ainsi la déclaration de M. le ministre. Si je me suis trompé, je ne demanderai pas à en prendre acte; je me bornerai seulement, parce qu'il ne faudrait pas qu'une pensée contraire existât, à dire que la ville de Versailles ne s'est jamais opposée à ce qu'un chemin de fer parlementaire fût exécuté; et si on nous apporte un projet de loi dans ce sens, nous l'examinerons et nous discuterons les questions techniques qu'il soulèvera. Mais si, aujourd'hui, après qu'on n'a pu réussir à établir un chemin de fer à travers Versailles, en vertu d'une simple lettre ministérielle, on vient déclarer qu'on persistera dans le même projet, je demande acte de cette déclaration, me réservant de combattre ce projet quand il se présentera à la discussion. (Exclamations diverses.)

M. le ministre des travaux publics. L'honorable M. Rameau se trompe ou je me suis mal expliqué.

Je n'ai pas dit que j'avais abandonné l'idée d'établir un chemin de fer parlementaire à Versailles. En y renoncant, je m'écarterais des instructions qui m'ont été données, en quelque sorte, par l'Assemblée et des engagements que j'ai pris vis-à-vis d'elle à la fin de la dernière session. (C'est vrai! Très-bien! à droite.)

J'ai dit seulement qu'en présence des difficultés soulevées par ce projet, difficultés sur lesquelles je ne veux pas revenir, car ce sont des questions de droit ou des questions de fait qu'il serait trop long même de résumer et qui seraient d'ailleurs sans intérêt pour vous,

j'ai dit qu'en présence de ces difficultés, ce n'est pas au régime du décret que je compte recourir pour faire exécuter ce chemin; c'est à la loi.

M. Rameau. Très-bien!

M. le ministre. J'ai transmis à la commission de l'Assemblée le projet que je maintiens, le projet qui part de la gare de la rive gauche, pour aboutir à l'entrée du palais de l'Assemblée, près de la Chambre des députés. Il a moins de 700 mètres de longueur; les rails, comme ceux d'un tramway, seront posés à la surface du sol; les trains marcheront comme les omnibus marchent sur le tramway de Paris à Sèvres et à Versailles; ils seront formés seulement d'un plus grand nombre de voi. tures; ils seront conduits à une vitesse qui ne dépassera pas celle des voitures traînées par des chevaux et seront sans danger pour le public.

Je ne vois réellement pas quelle difficulté pourrait se présenter.

Ce chemin, je le répète, se détacherait de la gare de la rive gauche, à Versailles, et aboutirait dans la rue de la Bibliothèque qui serait convertie en gare. C'est peut-être une gêne pour la ville de Versailles, mais cette gêne n'est pas bien grande, car depuis trois ou quatre mois que durent les travaux de construction de la nouvelle salle des députés, cette rue est encombrée de bois et de pierres et jusqu'à présent personne ne s'en est plaint.

La gare, établie dans la rue de la Bibliothèque, se trouvera placée, ce qui ne fera de tort à

personne, entre deux bâtiments appartenant à P'Etat, l'un qui est le palais de Versailles...

M. Rameau. Ce n'est pas le moment de discuter ce projet de loi!

M. le ministre. ...l'autre qui est l'hôpital militaire.

Ce sont deux bâtiments qui appartiennent à l'Etat. Par conséquent, je le répète, il n'en peut résulter aucun tort pour personne.

D'après un projet très-bien lait et très-ingénieux de M. de Joly, l'architecte de l'Assemblée, on pourra établir un passage voûté sous la rampe qui descend de la cour du château dans la rue de la Bibliothèque et faire ainsi communiquer directement par un escalier la Chambre des députés avec la gare dans la quelle arriveront les députés. (Très-bien! trèsbien 1) Voilà le projet; il est simple, excellent, a peu de longueur et coûte très-bon marché. Aucun, à mon avis, ne lui est comparable, et c'est pour ce motif que j'ai eu l'honneur de le présenter à la commission chargée déjà de l'examen d'une convention avec la compagnie des chemins de fer de l'Ouest, en la priant de vouloir bien le comprendre parmi les lignes qui doivent être concédées.

Ce ne sont pas ces projets qui ont pu soulever tant de difficultés à Versailles; il y a d'autres raisons. On a nié dans un journal publié à Versailles qu'il y ait utilité publique à prolonger un chemin de fer pour l'usage de MM. les députés. (Exclamations et rires sur un grand nombre de bancs.) On a écrit: L'Assemblée nationale pourra-t-elle admettre l'existence de cette utilité publique? Non, puisqu'il ne s'agit, dans la circonstance, que du transport particulier d'un certain nombre de députés. (Nouveaux rires sur les mêmes bancs.) La résidence légale de tous les représentants étant au siége même du Gouvernement où les électeurs les envoient, c'est-à-dire à Versailles, ainsi que la Constitution l'a décidé, tous les représentants doivent demeurer à Versailles.

Quelques membres à gauche. Oui! c'est la vérité !

M. le ministre. Vous voyez, messieurs, que, au fond,'il n'y a aucune difficulté. La seule qui existe, c'est que la ville de Versailles voudrait avoir la faveur de vous posséder tous et désirerait qu'aucun de vous ne résidât à Paris. (Très-bien! très-bien! - Hilarité sur un grand nombre de bancs. Aux voix ! aux voix!) M. Rameau. Le projet n'est pas en discussion en ce moment: je n'ai rien à dire.

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M. le président. Je consulte l'Assemblée sur la question de savoir si elle entend passer à une seconde délibération.

(L'Assemblée, consultée, décide qu'elle passera à une seconde délibération.)

M. le président. L'ordre du jour appelle la deuxième délibération sur le projet de loi relatif à la déclaration d'utilité publique et à la concession d'un chemin de fer de Marmande à Angoulême.

M. Raudot. Messieurs, vous avez voté déjà en première lecture le projet de loi relatif au chemin de fer de Marmande à Angoulême. Je suis chargé par la commission dont j'ai l'honneur d'être le président de vous demander de déclarer l'urgence sur ce projet.

Je vous ferai remarquer que le projet dont

ANNALES. -T. XLIII.

il s'agit actuellement a été déposé depuis bien longtemps par le Gouvernement, que le rapport a été déposé avant la prorogation de l'Assemblée, et que, si vous aviez siégé quelques jours de plus, vous auriez, depuis quatre mois au moins, vidé la question sur laquelle vous êtes appelés à délibérer aujourd'hui.

J'insiste donc sur la demande d'urgence que j'ai l'honneur de vous soumettre et qui, je crois, ne peut souffrir aucune difficulté. La commission, la compagnie et le Gouvernement sont d'accord sur le projet.

Sur un grand nombre de bancs. Appuyé ! appuyé !

M. Tolain. Messieurs, hier, dans une question que l'on croyait devoir passer presque sans difficulté, M. le ministre des travaux publics est venu vous demander le retrait de la déclaration d'urgence que vous aviez précé- demment prononcée sur cette question.

Aujourd'hui, au contraire, on vient vous demander de déclarer l'urgence sur un nouveau projet de chemin de fer.

Eh bien, à l'occasion de cette proposition de déclaration d'urgence, je viens, messieurs, vous demander si vous ne croyez pas naturel, au milieu des préoccupations qui agitent l'Assemblée... (Exclamations diverses et rires à droite et au centre.)

Un membre à droite. Je ne suis pas agité du tout!

M. Tolain. Mon honorable collègue, vous n'êtes pas agité, c'est possible; mais il y a un très-grand nombre de nos collègues qui le sont... (Rires à gauche.), et vous ne pourrez pas vous refuser à reconnaître que, depuis. deux jours, et sur toutes les questions d'affaires particulièrement, l'Assemblée n'est presque jamais en nombre... (Interruptions sur un grand nombre de bancs) de sorte que les questions les plus intéressantes, celles qui engagent les finances du pays, sont discutées au milieu du bruit des conversations particulières. Plusieurs voix. Mais on vous écoute!

M. Tolain. Je vous remercie, mes chers collègues, de vouloir bien m'accorder votre attention; mais, tout à l'heure, il y avait, à cette tribune, une parole assurément beaucoup plus autorisée que la mienne, celle d'un homme éminent et, malgré nos efforts et ceux de notre honorable président, on ne l'a pas écouté.

Voix diverses à droite et au centre. On l'a écouté ! Mais sa voix était trop faible pour

être entendue!

M. Tolain. Quoi qu'il en soit, à l'époque où nous sommes arrivés, alors que la préoccupation de la dissolution agite, je le répète malgré l'observation qui vient d'être faite tout à l'heure, la plupart de nos collègues, je crois qu'il est matériellement impossible de continuer à discuter les questions de che mins de fer qui nous sont soumises. (Dénéga· tions à droite et au centre.)

En ce moment, c'est le chemin de fer d'Angoulême à Marmande qui vient en discussion; tout à l'heure, ce sera une concession qui a une importance considérable, je veux parler de celle qu'on demande pour la compagnie du Midi; plus tard, ce seront les concessions d'un certain nombre de chemins de fer, et pour la compagnie du Nord, et pour la compagnie de l'Ouest

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et pour la compagnie de l'Est. Par conséquent, si vous avez la prétention d'examiner et de vider toutes les questions de chemins de fer, toutes très-graves, vous allez engager les inances du pays et les travaux publics pour un très-long espace de temps, peut-être pour vingt ans.

Je ne puis m'empêcher de remarquer ce fait,

et c'est par là que je termine, en vous demandant l'ajournement, - que c'est à la veille d'élections générales que tous ces projets de concessions sont apportés; de telle sorte qu'il semble, je sais bien que M. le ministre des travaux publics trouvera peut être mon observation un peu vive, mais pourtant je ne puis m'empêcher de la dire, de telle sorte qu'il semble que M. le ministre des travaux publics a fait, en réalité, par les projets qui sont déposés, une distribution de petits chemins de fer à tous les départements de la France, afin que, en intéressant individuellement chacun de ses collègues au vote de son propre chemin de fer, il espère que la totalité sera votée. (Approbation sur divers bancs à gauche. Rumeurs à droite et au centre.)

L'Assemblée est absolument maitresse de savoir ce qu'elle veut faire, et elle sait quelles mesures elle doit prendre pour sauvegarder sa dignité; mais je crois qu'il importe, dans la ituation présente, d'ajourner toutes ces questions, et c'est pourquoi je suis monté à cette tribune pour y justifier l'ajournement que je propose. (Mouvements divers. - Aux voix ! aux voix !)

M. Testelin. D'autant plus que la discussion de tous ces chemins de fer ne nous amènera pas à la discussion à grande vitesse !

M. le ministre des travaux publics. Je demande la parole.

Quelques membres à droite. Ne répondez pas ! M. le président. La parole est à M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics. Messieurs, je vous laisserai le soin de décider la question d'urgence; je vous demande la permission de ne pas m'expliquer sur ce point; mais je m'oppose de la façon la plus absolue à l'ajournement qui vous est proposé. (Trèsbien! très-bien !)

L'honorable M. Tolain vous expose, à l'appui de sa demande d'ajournement, que la discussion actuelle sur le projet de loi relatif au chemin de ter de Marmande à Angoulême, sera suivie de plusieurs autres discussions sur des concessions aux compagnies du Midi, de l'Ouest, du Nord et de l'Est, et sur divers projets de lois de même nature, qui sont soumis, en ce moment, à l'examen de commissions; l'honorable M. Tolain reproche à tous ces projets, d'une part, d'engager les finances de l'Etat pour une période d'une vingtaine d'années, et, d'autre part, d'avoir été présentés à la veille des élections générales, c'est-à-dire en quelque sorte, comme on l'a dit dans certains journaux, de n'être qu'une manœuvre électorale. M. Tolain ne s'est pas servi de l'expression « manœuvre électorale, mais elle était, je crois, dans sa pensée.

Quelques membres à gauche. C'est vrai!

M. le ministre. Il faudrait bien s'entendre. De tous côtés, depuis longtemps, on reproche au Gouvernement, et l'honorable M. Tolain lui

même n'y a pas manqué, de ne pas construire assez le chemins de fer; permettez-moi de dire en passant que, depuis cinq ans, 1,000 kilomètres ont été annuellement exécutés et livrés à l'exploitation, chiffre qui n'a jamais été dépassé dans les années antérieures, cepté en 1867; - depuis longtemps, on se plaint dans des journaux que le Gouvernement ne présente pas de projets de concessions de chemins de fer en assez grand nombre.

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Pour échapper à ce reproche, pour faire cesser ces plaintes, l'administration des travaux publics travaille depuis plus d'un an à la préparation des projets qui vous ont été présentés dans le courant de novembre.

La dernière session a été consacrée, pour une très-grande part, à la discussion de projets de lois de chemins de fer qui vous avaient été soumis, et c'est pendant la prorogation de l'Assemblée que les nouveaux projets ont pu être préparés. Voilà ce qui explique l'heure tardive peut-être à laquelle ils ont été présentés. Mais, il n'en est pas de même du projet de loi actuel, relatif au chemin de fer de Marmande à Angoulême et du projet concernant la compagnie du Midi, qui sont présentés depuis un an; il n'en est pas de même non plus du projet de convention avec la compagnie de l'Ouest, qui a été déposé dès le mois de juillet dernier.

Ainsi, messieurs, pour l'ajournement de ces projets on ne peut pas invoquer les motifs que M Tolain a exposés à cette tribune.

Quant aux autres projets relatifs à la déclaration d'utilité publique d'un certain nombre de lignes, je déclare que, si je les ai présentés, c'est parce que ces lignes devaient être comprises dans une convention, convention préparée avec la compagnie d'Orléans et qui n'a pas pu aboutir. Voilà pourquoi j'ai cru devoir présenter des projets de lois spéciaux.

Un membre. Et le projet des Charentes?

M. le ministre. J'ai oublié dans mon énumération le projet des Charentes; mais je parlais des projets de lois proposant seulement la déclaration d'utilité publique et je disais que, dans le principe, nous avions préparé ces projets en vue de les comprendre dans une convention passée avec la compagnie d'Orléans; cette convention, étudiée depuis plus de sept ou huit mois, n'ayant pu aboutir, j'ai cherché le moyen de commencer néanmoins les travaux et d'en assurer l'exécution. (Très-bien ! très bien !)

Aux chemins qui devaient être concédés à la compagnie d'Orléans, j'ai joint ceux qui devaient entrer plus tard dans d'autres conventions, soit avec la compagnie du Nord, soit avec la compagnie de l'Est.

On me reproche d'avoir présenté des projets intéressant tous les points de la France, après avoir défendu devant vous, au mois de juin dernier, le projet de convention avec la compagnie Paris-Lyon-Méditerranée.

Je crois que je ne fais là qu'une chose naturelle, utile, je ne fais que me conformer à vos désirs. (Approbation sur plusieurs bancs.) Enfin, on a parlé de manœuvres électorales. Puisque le mot a été dit et répété, non pas à cette tribune, je le reconnais, M. Tolain n'est pas allé jusque-là, mais dans les bureaux et ailleurs; il est bon d'y répondre.

La manœuvre électorale consisterait bien

plutôt, après avoir étudié ces lignes de chemins de fer, à laisser leur exécution en sus. pens qu'à vous demander, d'ores et déjà, d'en prononcer la déclaration d'utilité publique.

Je demande quel moyen d'action restera à l'administration, une fois la déclaration d'utilité publique prononcée ?

On me reproche de faire à la veille des élections ce qu'on a fait, en 1868, à la veille des élections générales de 1869.

J'admire, et j'ai souvent exprimé, à cet égard, mon opinion à la tribune, la manière dont les questions de chemins de fer ont été menées depuis 1859 sous l'Empire. Ce n'est pas parce que c'est l'Empire qui en a donné l'exemple que je m'abstiendrai de l'imiter s'il est bon. Je trouve, pour ma part, la loi de 1868 excellente. C'est elle, en effet, que j'ai prise pour modèle dans la proposition que je Vous ai faite. Cette loi de 1868 a déclaré d'utilité publique seize ou dix-huit lignes de chemins de fer. Cette déclaration s'appliquait à des chemins qui se présentaient dans des conditions analogues; elle a été efficace; presque toutes ces lignes, sauf deux, sont exécutées, et la plupart sont livrées à l'exploitation.

S'il y a manoeuvre électorale de ma part elle consiste simplement à avoir recherché les besoins du pays, à avoir étudié les moyens de leur donner satisfaction en même temps qu'à donner au commerce et à l'industrie les voies ferrées qui leur manquaient. Si c'est là une manoeuvre électorale, je m'applaudis de l'avoir faite et je suis tout disposé à la renouveler toutes les fois que, pour servir mieux les intentions de l'Asseinblée nationale et du Gouvernement, je trouverai l'occasion de contribuer en étendant les voies de communication au développement de la prospérité publique. (Approbation sur plusieurs bancs. Aux voix aux voix!)

M. Tolain. Je n'avais pas prononcé le mot de manœuvre électorale, mais enfin, comme j'ai l'habitude de dire toute ma pensée, j'avoue que peut-être aurais-je bien pu le dire et j'ajouterai même que je l'avais pensé. (Ah! ah!)

M. le ministre vous disait tout à l'heure : Non, il n'y a pas de manoeuvre électorale puisque, au contraire, quand vous aurez décidé qu'il y a utilité publique, par cela même toute manoeuvre électorale deviendra de ce chef impossible.

Je réponds à M. le ministre: Non, car vous n'avez pas les fonds nécessaires pour commencer des chemins de fer, et, quant à présent, votre déclaration est purement platonique; ce n'est que sur le budget de 1877 que, au moyen d'une ouverture de crédit, vous pourrez commencer les travaux; et comme vous ferez la plupart de ces lignes en vertu de la loi de juin 1842, tous les ans, dans la loi de finances, vous demanderez la somme dont vous aurez à disposer pour ces travaux et vous indiquerez la répartition à faire par départements. Puisqu'on parle de manœuvre électorale, je puis bien croire qu'elle est ici possible et facile, car il sera loisible de dire à beaucoup de départements: Selon que vous voterez bien ou mal, vous aurez une bonne ou une mauvaise répa ratition des fonds. (Exclamations à droite. Très-bien! à gauche. Aux voix ! aux voix ! M. Léopold Faye, rapporteur. Je désire

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rais beaucoup que le débat qui vient de s'élever entre M. le ministre des travaux publics et l'honorable M. Tolain ne fit pas perire de vue à l'Assemblée (On sourit ) l'objet spécial de la question qui lui est soumise. On s'est opposé à l'urgence, on a demandé l'ajournement. Je crois que la question d'ajournement est maintenant vidée, après les explications qui ont été présentées; permettez-moi donc, messieurs, de dire un mot sur la question d'urgence.

M. le ministre des travaux publics vous faisait remarquer, avec raison, que le projet de chemin de fer dont vous avez à vous occuper n'était pas un de ces projets improvisés à la dernière heure. Le dépôt de ce projet do loi remonte, en effet, à deux années, et le rapport a été déposé il y a plus de six mois.

M. le ministre avait raison d'ajouter que si la pro ogation était arrivée quelques jours plus tard, ce projet de loi aurait déjà reçu probablement, je l'espère du moins, la sanction de l'Assemblée. (Marques d'approbation sur plusieurs bancs.)

Mais M. Tolain, au point de vue de la question d'urgence, a fait une observation à laquelle je désire répondre. Il a dit que l'Assemblée était liée, pour ainsi dire, par le précédent de la séance d'hier. Je ne crois pas qu'il y ait une assimilation quelconque à établir entre une question qui portait sur un point de la législation toujours très-grave quand il s'agit d'apporter des modifications quelconques à un état légal qui existe depuis longtemps, et un projet absolument isolé (Très-bien!), car ce projet ne contrarie pas les grandes compagnies, et s'il fallait le dire, et il est peut-être utile de le dire, c'est une heureuse innovation introduite dans un système qui, jusqu'ici, avait paru prévaloir, puisque c'est pour la première fois depuis bien longtemps que nous voyons une petite compagnie recevoir de M. le ministre des travaux publics, et je l'en remercie, le concours qu'il doit à toute entreprise d'intérêt général. Par conséquent, il y a une sorte de faveur qui s'attache à l'inauguration de ce système nouveau. (Nouvelle approbation.)

J'espère donc que l'Assemblée voudra bien voter l'urgence. (Très-bien ! très-bien !) Quelques membres. La clôture!

M. Wilson. Messieurs, je ne veux pas rentrer dans le débat qui s'est engagé entre M. Tolain et M. le ministre des travaux publics; mais il y a une observation spéciale à présenter à l'Assemblée sur la question même du chemin de fer de Marmande à Angoulême...

Plusieurs membres. La clôture!
Autres membres. Parlez! parlez !

M. le président. Persiste-t-on à demander la clôture?.. (Oui! oui ! Non!)

M. Wilson. Je demande la parole contre la clôture.

M. le président. M. Wilson a la parole contre la clôture.

M. Wilson. Je voudrais faire remarquer que le débat qui s'est engagé entre M. le ministre et M. Tolain n'a pas eu trait à la question d'urgence proposée par M. Faye. J'ai, quant à moi, une observation spéciale à présenter sur cette question d'urgence, observation qui, je crois, est de nature à deter

miner l'Assemblée à repousser la proposition qui été faite par MM. Raudot et Faye.

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Si l'Assemblée le permet, je n'ai qu'un mot à dire. (La clôture! la clôture! Non! non! Parlez!)

M. le président. Persiste-t-on dans la demande de clôture? (Oui! oui! - Non! non !) Les avis étant partagés, je vais consulter l'Assemblée.

(L'Assemblée, consultée, ne prononce pas la clôture)

M. le président. L'orateur ayant déclaré qu'il voulait parler surtout sur la question d'urgence, je vais d'abord mettre aux voix l'ajournement demandé par M. Tolain.

(L'Assemblée, consultée, repousse l'ajournement.)

M. le président. L'ajournement étant repoussé, la discussion continue sur l'urgence. M. Wilson a la parole.

M. Wilson. Messieurs, je ne retiendrai que quelques instants seulement l'attention de l'Assemblée.

Je dois vous rappeler que la ligne qui s'appelle aujourd'hui ligne d'Angoulême à Marmande devait, d'après le projet du Gouvernement, se détacher à Montmoreau de la ligne d'Angoulême à Bordeaux.

La commission des chemins de fer a pensé que, pour assurer l'indépendance de cette ligne, et lui permettre de vivre au milieu du réseau de la grande compagnie d'Orléans, il fallait prendre le point de départ, non à Montmoreau, mais bien à Angoulême, où aboutit le réseau de la compagnie des Charentes.

Ce changement a été approuvé par le Gouvernement, et c'est sur le projet ainsi modifié que vous êtes appelés à délibérer. Ainsi, de l'aveu de tous, il y aurait un intérêt considérable à mettre la nouvelle ligne en rapport direct avec le réseau des Charentes. Mais ne convient-il pas de faire plus, et ne serait-il pas désirable de concéder la ligne d'Angoulême à Marmande à la compagnie des Charentes. C'est ce que je pense pour ma part, et c'est en tout cas une question qui mérite examen. Or, nous sommes saisis en ce moment d'un projet de convention avec la compagnie des Charentes. Dans l'intérêt même de la ligne d'Angoulême à Marmande, qui aura sans doute beaucoup de peine à vivre si elle est abandonnée à ellemême et qui est une ligne extrêmement utile, que je voudrais voir construire le plus tôt possible, je crois qu'il est indispensable que la commission, que vous venez de nommer pour étudier ce projet de convention, examine d'urgence avec le Gouvernement s'il ne serait pas plus utile de rattacher la ligne d'Angoulême à Marmande au réseau des Charentes que de la concéder à une compagnie particulière. Au point de vue des intérêts du Trésor, le système que je propose serait préférable.

On vous demande, en effet, d'allouer 12,750,000 fr. de subvention à la ligne d'Angoulême à Marmande : je crois que si on concédait cette ligne à la compagnie des Charentes, en maintenant cette subvention, on rendrait la situation de la compagnie des Charentes infiniment meilleure, et on n'aurait pas besoin de venir par la suite à son secours dans une aussi large proportion.

En résumé, en concédant la ligne d'Angou

lême à Marmande à la compagnie des Charentes, on assurerait l'existence de cette ligne et on ferait ainsi une chose utile aux intérêts. de l'Etat qui seraient ménagés, et aux intérêts des populations qui attendent la construction. de ce chemin de fer avec une légitime impatience.

Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu, selon moi, à prononcer la déclaration d'urgence; car dans l'intervalle entre la seconde et la troisième lecture, la commission chargée d'examiner la convention avec la compagnie des Charentes aurait le temps d'examiner s'il n'y a pas lieu de rattacher la ligne de Mar"mande à Angoulême à la compagnie des Cha

rentes.

Je ne crois pas, messieurs, que la proposition que je fais soit combattue par M. le ministre des travaux publics qui, je le ferai remarquer à l'Assemblée, ne s'est prononcé en aucune façon en faveur de l'urgence que je vous prie de ne pas déclarer. (Mouvements en sens divers.)

M. le rapporteur. Un seul mot pour répondre à l'observation qui vient d'être présentée par M. Wilson. Elle repose sur une erreur de fait. Le projet de loi et le projet de convention ont parfaitement prévu l'alternative dans laquelle il s'est placé il y a un instant. Nous ne demandons pas en effet que le chemin de Marmande à Angoulême se soude nécessairement à la compagnie d'Orléans, nous ouvrons une faculté qui permettra au Gouvernement ou plutôt au ministre d'étudier dans la mesure des intérêts généraux quel doit-être le point d'attache. Je regrette d'entrer dans le fond de la question, car c'est le fond qu'on a discuté. Voici, messieurs, ce qu'il y a dans l'article 1er:

Est déclaré d'utilité publique l'établissement d'un chemin de fer qui, se détachant de la ligne de Bordeaux à Cette, à ou près la station de Marmande, passera par Miramont, Eymet, Falguerat, Bergerac où elle se raccordera avec le chemin de fer de Libourne au Buisson; Mussidan, où elle se raccordera avec le chemin de Périgueux à Coutras; Ribérac, à ou près Verteillac, Gouts, et se rapprochant autant que possible de la Rochebeaucourt, se raccordéra à Angoulême, soit avec le chemin de Tours à Bordeaux, soit avec celui des Charentes. »

Par conséquent, notre honorable collègue me paraît devoir trouver dans le projet de loi et dans la convention une satisfaction entière. (Très-bien! très-bien ?)

M. Wilson. Je me permettrai de faire remarquer que ce que vient de dire l'honorable M. Faye vient précisément à l'appui de ma proposition. En effet, que vous a-t-il dit? Que la ligne aboutit à Angoulême et que, dans cette ville, elle pourra se relier soit à la compagnie d'Orléans, soit à celle des Charentes. Eh bien, je vous demande précisément de la relier à la compagnie des Charentes.

La ligne d'Angoulême à Marmande, si elle reste isolée, n'est pas viable; elle sera forcément absorbée un jour par la compagnie d'Or léans. C'est pour éviter ce danger que je voudrais la voir rattacher de suite à une compagnie ayant déjà des éléments sérieux d'existence, telle que la compagnie des Charentes.

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