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ter la décision, on cherche des moyens de la reculer sous prétexte des communications qu'on demande au Pape promptement. Pour moi, je n'ai rien à communiquer : M. de Cambrai n'a ni partie ni accusateur, ni dénonciateur que luimême la seule pièce nécessaire au jugement qu'on attend avec respect, c'est le livre des Maximes des Saints en original, et bien distingué de sa version infidèle et de ses interprétations captieuses et après coup (1). J'écris ceci pour le peuple, ou pour parler nettement, afin que le caractère de M. de Cambrai étant connu, son éloquence, si Dieu le permet, n'impose plus à

personne.

S. V. Sur la comparaison de Priscille et de Montan.

9. M. de Cambrai en revient à toutes les pages à cette comparaison, comme si elle étoit trop odieuse. Priscille étoit une fausse prophétesse; Montan l'appuyoit. On n'a jamais soupçonné entre eux qu'un commerce d'illusions de l'esprit. M. de Cambrai demeure d'accord que son commerce avec madame Guyon étoit connu, et rouloit sur sa spiritualité, que tout le monde a jugée mauvaise je n'ai donc rien avancé qui ne soit connu ; rien qui ne soit assuré : et renfermant ma comparaison dans ces bornes, je ne dis rien que de juste.

(1) Voy. ci-dessus, art. 1x, n. 4 et suiv.

S. VI. Sur les trois écrits publiés à Rome au nom de M. de Cambrai.

10. Un des endroits les plus essentiels de la Relation (1), est celui où je rapporte les écrits qu'on a présentés à Rome au nom de M. de Cambrai. Par ces écrits, ce prélat nous fait Jansénistes contre sa conscience. Il se fait le seul défenseur des religieux, comme si nous en étions les oppresseurs, nous qui en sommes les pères. Il s'offre au saint Siége contre les évêques de France, par lesquels il est important de ne le pas laisser opprimer. Ce ne sont pas là seulement des bruits qu'on répande: les écrits latins et italiens remplis de ces calomnies, sont présentés partout à Rome au nom de M. de Cambrai, en si grand nombre, qu'ils sont venus jusqu'à nous, et nous les avons en main. Pour excuser ce prélat, j'avois espéré qu'il pourroit désavouer ces écrits scandaleux contre sa nation, contre les évêques ses confrères, et autant contre l'Etat que contre l'Eglise. Il falloit parler sur des faits si essentiels et si bien articulés M. de Cambrai ne dit mot, et laisse par son silence toute la France chargée de ces reproches odieux. Saint Paul envoyé à Rome, y déclare publiquement aux Juifs qu'il ne vient point accuser sa nation (2): il épargne un peuple perfide, et il en ménage la réputation un archevêque de France sacrifie à sa passion la gloire de sa patrie, et de ses confrères. (1) Relat. x. sect. n. I.- (2) Art. xxvi. 19.

CONCLUSION.

§. I. Récapitulation: où est démontré le caractère de la Réponse, et des autres écrits de M. de Cambrai.

1. Si quelqu'un à pu douter jusqu'à présent, que madame Guyon, avec ses livres et sa doctrine, fût l'unique objet que M. l'archevêque de Cambrai ait donné à ses éloquens et inépuisables discours, il en doit être convaincu par sa Réponse. C'est là qu'il a inventé, en faveur de cette femme, le nouveau secret de séparer le sens véritable, propre, unique et perpétuel d'un livre dans toute sa suite, et dans la juste valeur des termes, d'avec tout le dessein du livre même, et d'avec l'intention de son auteur. Par-là il a trouvé le moyen de contenter à la fois, le monde qui ne peut lui pardonner de ce qu'il recule tant à condamner des livres pernicieux, et sa propre inclination qui l'oblige à les défendre. On a vu, par cette adresse, que sans avoir besoin de la vérité, sans autre secours que celui de ses tours habiles, de ses belles expressions, et de l'étonnante facilité de son génie (1), il pouvoit persuader tout ce qu'il vouloit à un certain genre d'hommes, et leur laisser pour démontré, qu'on a tort de l'avoir pressé d'approuver la condamnation de livres trèscondamnables dans leur vrai, perpétuel et unique sens. Avec un aveu si clair, il sait établir que ce (1) Ci-dessus, art. 1v, p. 65 et suiv.

Dessein de ce prélat pour

sauver mada

me Guyon et

ses livres.

Sur l'approbation de mon livre.

Dessein

d'éluder les

qu'on a repris dans ces livres n'est plus que des équivoques, d'innocentes exagérations, un langage mystique, et enfin un sens rigoureux qu'on donne à ses expressions, et auquel l'auteur n'a jamais pensé (1). Bien plus, encore qu'on ait raison de les censurer, il a néanmoins raison de scandaliser toute l'Eglise plutôt que d'en approuver la censure. Voilà le nouveau paradoxe qu'un archevêque est venu proposer à l'univers. C'est là, je l'avoue, un des plus grands efforts d'esprit qu'on ait jamais vu; mais en même temps, il est le plus malheureux et le plus coupable, puisqu'il pousse à bout toutes les décisions de l'Eglise, contre les mauvais livres et leurs auteurs, et qu'il introduit, dans les questions de la foi les plus importantes, un jeu de paroles, où l'on dit ce qu'on veut impunément.

2. Pour parvenir à cette fin, il a pris tous les moyens convenables. Il s'agissoit de couvrir l'obstiné refus d'approuver un livre où madame Guyon, en ne nommant que ses ouvrages, étoit justement condamnée dans sa doctrine. Il a vu les mauvais effets d'un refus si scandaleux, et il n'y a point trouvé de meilleur remède que de décrier l'auteur de ce livre. Parlons nettement : cet auteur c'étoit moi-même : c'étoit en moi-même qu'il falloit montrer tous les procédés les plus odieux pourquoi? parce que le service et la défense de madame Guyon le demandoit.

:

3. Il y avoit encore un autre dessein. Pour XXXIV Arti- défendre madame Guyon, il falloit tourner, élu

(1) Mém. de M. de Cambrai. Relat. 17. sect. n. 11.

cacher de

der, détruire trente-quatre Articles qu'on avoit cles, et de se souscrits avec nous. Ces Articles étoient posés moi pour cepour servir de fondement aux justes censures des la. livres de cette femme, comme ces mêmes censures le déclarent en termes exprès (1); qu'on remarque cette circonstance : ainsi, pour sauver madame Guyon, il falloit éluder la force des articles. On prépare pour cet effet un livre mystérieux, où pour mieux faire couler les maximes qu'on méditoit contre ces Articles, on travaille à désunir les prélats qui les avoient dressés ensemble, et par de longues finesses on se cache de celui qui par son antiquité étoit à la tête de ceux qui les avoient formés : c'est moi-même encore dont je parle. On a poussé la chose plus loin, et pour faire accroire qu'on agit encore de concert avec ces prélats dans l'impression des Maximes des Saints, on déclare, à la tête du livre, qu'on ne fera autre chose que de donner plus d'étendue à leurs principes; ce qui obligeoit à un concert avec eux: cependant on n'en a point de véritable avec M. de Châlons, à présent M. de Paris, puisqu'il condainne le livre: on n'en a aucun avec moi, et on ne songe qu'à se cacher. Honteuse pratique, où l'on se cache d'un évêque pour expliquer sa doctrine! Il faudroit donc que je parlasse, quand je serois seul, pour ne point laisser abuser de mon témoignage. C'est ce qu'a fait inventer le désir de défendre madame Guyon, et d'en pallier la défense.

(1) Censure de M. de Meaux et de M. de Chalons. Voy. l'Ordonn. sur les Etats d'Or, tom. xxv11, p. 3 et suiv,

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