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II. PASSAGE.

« L'ame en cet état peut aussi peu de chose >> que celui qui est dans un cachot obscur, les >> fers aux mains et aux pieds, sans se pouvoir

remuer »>>.

RÉPONSE.

Je ne sais pas comment l'auteur ne sent point ici cette impuissance réelle, mais divine, où l'ame se trouve, sans que les paroles des hommes puissent mettre fin à l'opération de Dieu, mais seulement soutenir les ames pendant qu'elle dure.

III. PASSAGE.

« Il lui semble clairement que Dieu l'aban» donne c'est une peine lamentable de croire » que Dieu l'ait abandonnée (1) ».

RÉPONSE.

Tout ceci regarde le sensible. « L'ame, pour» suit-il, sent fort au vif l'ombre de la mort..... » elle consiste à se sentir sans Dieu, car tout cela se sent ici..... Elle sent aussi le délaissement » des créatures dont elle se sent méprisée »: et ailleurs (2) : « Il est besoin qu'elle se voie et se »sente éloignée de tout bien ». Voilà ce qui se trouve dans tout le sensible; mais tout cela n'est suivi d'aucun effet réel: point de sacrifice ab

(1) Princ. prop. p. 57. Obsc. nuit, liv. n, ch. v1, p. 279. (2) Princ. prop. p. 55 et 124. Obsc. nuit, liv. 11, ch. 1x, p. 291.

solu; point d'acquiescement simple, et quoique l'ame ne sente pas qu'elle doive jamais sortir de cette peine, elle demeure en son fond dans une pleine sécurité, pour les raisons qui ont été dites, et pour celles qu'on verra bientôt.

IV. PASSAGE.

« Elle ne trouve aucune consolation ni aucun >> appui en aucune doctrine, en aucun maître >>> spirituel (1) ».

RÉPONSE.

Aucune consolation ni appui sensible: car c'est ainsi qu'il faut entendre ce bienheureux, qui ne se seroit pas donné la peine d'écrire tant d'instructions pour les ames de cet état (2), s'il n'eût été assuré qu'elles y trouvoient de solides quoique peu sensibles soutiens.

Au surplus, elles ne sont pas si destituées de toute sensible consolation, qu'il ne «< leur semble » qu'elles aiment Dieu, et qu'elles donneroient » mille vies pour lui, comme c'est la vérité; » parce que ces ames aiment Dieu en ces travaux » avec vérité et grande efficace (3) ». Voilà donc deux choses: l'une, qu'elles aiment Dieu avec efficace l'autre, qu'au fond elles sentent bien qu'elles l'aiment jusqu'à donner pour lui mille vies. Mais ce qu'il y a ici de particulier, c'est que, dans les temps d'épreuves, leur amour bien éloi

(1) Princ. prop. p. 61. Obsc. nuit, liv. 11, ch. v11, p. 283. (2) Prolog. — (3) Obsc. nuit, liv. μ, ch. vii, sur la fin, p. 285.

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gné de les consoler, leur tourne en affliction, quand elles croient voir en elles-mêmes des » causes d'être délaissées et rebutées de celui

qu'elles aiment et qu'elles désirent si passion» nément (1) » : et tout cela, je vous prie, qu'est-ce autre chose, qu'un jeu merveilleux de l'amour et de ces excès, tranchons le mot après tant de saints auteurs, de ces sages folies qu'il inspire?

V. PASSAGE.

« L'ame connoît en elle deux parties, la su» périeure et l'inférieure, si distinctes qu'il lui » semble que l'une n'a rien de commun avec » l'autre, en étant très-éloignée et très-séparée: » et il est ainsi en un sens, parce que selon l'o» pération qu'elle fait pour lors, qui est toute spirituelle, elle ne communique point avec la » partie sensitive (2) ».

RÉPONSE.

A cause que Dieu opère « dans l'ame à l'obscur » et au désu des sens et puissances (3) », comme le bienheureux l'explique lui-même : c'est-à-dire selon son style, qu'il la saisit indépendamment des images et des fantômes, de toute impression qui vient des sens, et même du discours, qui selon lui en dépend naturellement en sorte que Dieu seul, et l'ame dans sa partie la plus spiri

:

(1) Obsc. nuit, liv. 1, ch. vi, sur la fin, p. 285. (2) Princ. prop. p. 65, 66. Obsc. nuit, liv. 11, ch. xx111, sur la fin, p. 344. (3) Ibid. Obsc. nuit, liv. 11, ch. xxi, au comm. p. 340.

pous

tuelle, connoissent ce qui se passe, sans que les sens y puissent rien pénétrer. Telles sont les dernières bornes où puisse être poussée la séparation des deux parties. Mais d'entreprendre de la ser jusqu'au sacrifice absolu, jusqu'au simple acquiescement par l'avis d'un directeur (1), jusqu'à donner ce remède à la tentation du désespoir, et la vaincre en y succombant; c'est de quoi on n'a vu ici aucun vestige, et par conséquent l'auteur du systême jusqu'ici n'a rien dit du tout pour le soutenir. Voyons les autres passages.

CHAPITRE XIX.

PASSAGES SPECULATIFS.

Sur les suppositions impossibles.

Je prendrai ici une autre méthode que dans les chapitres précédens, et je rapporterai tout de suite les passages de comparaison, priant le lecteur attentif de penser s'il y trouvera la moindre parole qui revienne à l'entière incapacité de profiter de la raison et des dogmes de la foi, à l'acquiescement simple et au sacrifice absolu; et si cet acquiescement n'est pas au contraire manifestement éloigné par la condition ou supposition impossible le plus souvent énoncée et toujours sous-entendue, selon le principe premier et troisième (2).

(1) Max. p. 90.- (?) Ci-dessus, ch. iv, 1 et 1 princ.

I." auteur:

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« Si quelqu'un, par supposition impossible, » demandoit au gnostique (à l'homme spirituel) » ce qu'il choisiroit, ou de la gnose de Dieu (de » la connoissance pratique accompagnée d'un >> amour parfait,) ou du salut éternel: et que » ces deux choses, qui sont la même, fussent sé» parées, il choisiroit sans hésiter, la gnose de » Dieu, ( cette connoissance pratique) comme » celle qui surpasse la foi par la charité (1) ».

II. PASSAGE.

« Si par supposition il recevoit de Dieu la li» berté de faire, sans être puni, les choses défen» dues, quand il sauroit même qu'en les faisant » il auroit la récompense des bienheureux, et qu'il seroit assuré que Dieu ne sauroit pas ses » actions, ce qui est impossible, il ne voudroit jamais rien faire contre la droite raison, choisis>> sant le beau pour lui-même (2) ».

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II. auteur: saint Chrysostome.

III. PASSAGE.

« Il faudroit être bon, quand même il n'y au» roit point de récompense promise (3) ».

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BOSSUET. XXX.

(3) Ibid.

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