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MÉMOIRE

DE CE QUI Est a corrigeR

DANS LA NOUVELLE BIBLIOTHÈQUE

DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES

DE M. DUPIN.

Les erreurs contenues dans cette Bibliothèque ont paru principalement depuis la Réponse aux Remarques des Pères de Saint-Vannes, que M. Dupin a publiée; parce qu'après avoir été averti de ses erreurs, loin de se corriger, il les a non-seulement soutenues, mais encore augmentées, comme on va voir.

Sur le péché originel.

VOICI Comment l'auteur rapporte lui-même sa doctrine dans sa Réponse, p. 50. « J'ai remarqué, » touchant le péché originel, que tous les Pères >> des trois premiers siècles ont reconnu les peines » et les plaies du péché d'Adam; mais qu'ils ne » semblent pas être demeurés d'accord que les » enfans naquissent dans le péché, et dignes de » la damnation; que c'étoit cependant le senti» ment commun, comme il paroît par saint Cy» prien. J'ai dit encore, en parlant de saint Cy

» prien, qu'il est le premier qui ait parlé bien » clairement sur le péché originel (1) ».

Voilà en effet ce qu'avoit écrit notre auteur dans son Abrégé de la Doctrine (2), et par-là il renverse manifestement la tradition du péché originel.

Selon lui (3), la véritable tradition de l'Eglise est celle que décrit Vincent de Lérins : Quod ubique, quod semper, quod ab omnibus. Or, est-il que, selon lui-même, la tradition du péché originel n'est pas de cette nature, puisque les Pères des premiers siècles n'en demeuroient pas d'accord: par conséquent il n'y a point de véritable tradition sur le péché originel.

Si l'on disoit, avec les Sociniens, que les anciens nient la divinité de Jésus-Christ, ou du moins, qu'ils n'en demeurent pas d'accord, on ne seroit pas souffert, parce qu'on renverseroit la tradition d'un article si nécessaire; on ne doit pas non plus souffrir ceux qui disent qu'on a nié le péché originel, ou qu'on n'en est pas demeuré d'accord; puisque la tradition de l'article du péché originel, sans laquelle on n'entendroit pas que Jésus-Christ est Sauveur, ne doit non plus être affoiblie que celle de sa divinité.

Cela se confirme encore, parce que l'auteur ayant rapporté divers sentimens de l'antiquité sur le divorce pour cause d'adultère, conclut de cette diversité de sentimens, qu'il n'y a point sur cela

() Voyez Suppl. in Psal. tom. 11, p. 610 et suiv. — (2) Bibliot, tom. 1, p. 611 de la prem. édit. · (3) Rép. p. 144.

de tradition apostolique. Or est-il qu'il prétend montrer la même chose, ou une plus grande diversité de sentimens dans la matière du péché originel (1): il ne laisse donc plus aucun lieu à la tradition apostolique de ce dogme.

L'auteur demeure d'accord «< qu'il y a quelques » erreurs assez communes dans les premiers siè»cles de l'Eglise, qui depuis ont été rejetées; » mais qu'elles ne concernent pas les principaux » articles de notre foi (2) ». Il en est de même du doute que de l'erreur, et l'Eglise n'a non plus douté qu'erré sur ces principaux articles. Si donc on avoit douté du péché originel, et que les Pères n'en fussent pas demeurés d'accord, comme l'assure notre auteur, il s'ensuivroit que cet article ne seroit pas un des principaux.

Il est vrai que notre auteur dit, en parlant du dogme du péché originel, que c'étoit le sentiment de l'Eglise, comme il paroit par saint Cyprien (5); mais il explique lui-même, en rapportant ce passage, que c'étoit le sentiment commun et la doctrine commune; et c'est ce qui le condamne, parce que, pour exprimer un dogme certain et une tradition constante, ce n'est pas assez de dire que c'étoit le sentiment commun et la doctrine commune, si l'on ne tranche le mot, que c'étoit constamment la foi de l'Eglise : ce que l'auteur a toujours évité de dire; et bien loin de le croire, il a osé dire, « que saint Cyprien est le premier qui

(1) Rép. aux Rem. p. 75, 76. — (2) Abrégé de la Doctrine, tom. 1, p. 606. — (3) Abrégé, tom. 1, p. 611. Rép. aux Rem. p. 50.

>> ait parlé bien clairement du péché originel, et » de la nécessité de la grâce de Jésus-Christ (1) ». Ce qui rend sa faute plus grande, c'est qu'après avoir été averti de son erreur par les Pères de Saint-Vannes, non-seulement il y persiste, mais encore il enchérit dessus, puisqu'en discutant l'affaire dans le détail, il ne donne à un dogme si important, aucun auteur qui soit clair, avant saint Cyprien; et quant à ceux qu'on produit pour le soutenir, non content d'éluder le témoignage des uns, comme de saint Justin et de saint Irénée, il compte les autres pour contraires, comme Tertullien, Origène, et saint Clément d'Alexandrie. C'est ce qu'il s'efforce de prouver depuis la p. 50 jusqu'à la 60 de sa Réponse aux Remarques. Ainsi, la foi du péché originel n'est qu'un sentiment commun, une doctrine commune du temps de saint Cyprien; et devant, ce n'est qu'obscurité et incertitude dans quelques auteurs, et opposition manifeste dans la plus grande partie. Voilà à quoi se réduit la tradition du péché originel, selon notre auteur.

Et ce qui marque l'excès de sa prévention contre la doctrine catholique, c'est qu'il n'y a en ce point aucune difficulté, ni aucune partie de la tradition qui soit plus claire que celle-ci, comme on le fera voir par un mémoire particulier; de sorte que s'en éloigner, c'est vouloir gratuitement favoriser les érétiques. Ainsi, on n'a pas pu s'empêcher de s'élever contre lui, surtout après qu'on (1) Tom. 1, sur S. Cyprien, p. 475.

a vu, par sa Réponse, non-seulement qu'il persistoit dans son erreur, mais encore qu'il insultoit à ceux qui l'en reprenoient, et s'emportoit à de plus grands excès.

Sur le Purgatoire.

Dans l'Abrégé de la Discipline (1), notre auteur est tombé dans plusieurs fautes. C'en est une assez considérable d'avoir dit généralement,

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qu'on ne donnoit point le nom d'autel à la ta» ble sur laquelle on célébroit l'Eucharistie (2) ». C'est une prévention qui n'a pu venir à notre auteur, que du langage des hérétiques, le contraire paroissant partout, et surtout dans saint Cyprien, à toutes les pages.

La faute de notre auteur est encore plus grande, lorsqu'après avoir parlé de la discipline comme d'une chose variable selon les temps et selon les lieux (3), à l'opposite de la foi, qui ne varie jamais, il range parmi ces articles de discipline variable, « qu'on prioit pour les morts, qu'on » faisoit des oblations pour eux, qu'on célébroit » le sacrifice de la messe en leur mémoire, qu'on » prioit les saints, et qu'on étoit persuadé qu'ils >> prioient Dieu pour les vivans (4) » : comme si toutes ces choses étoient d'une discipline variable et indifférente.

Mais ce qu'il y a de plus remarquable, c'est d'avoir entièrement passé sous silence la doctrine

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