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SEPTIÈME REMARQUE.

Proposition de foi que M. Dupin taxe d'excès.

LE second chef d'accusation est d'avoir mis ces propositions: Le Verbe est mort, Dieu est mort, et les autres de cette nature, au rang des excès que la postérité n'a pas suivis (1). Voici ce qu'il répond (2): « On ne trouvera pas que >> M. Dupin condamne absolument ces expres»sions: LE Verbe est né, IL EST MORT, etc. Il > remarque seulement qu'elles ont été rejetées » de quelques Catholiques, aussi bien que cette >> expression qui est semblable: UN DE LA TRI» NITÉ EST MORT ». Jamais il ne parlera correctement. M. Dupin ne condamne pas absolument ces expressions : c'est de même que s'il disoit, je ne condamne pas absolument cette proposition: Jésus-Christ est Dieu, ou celle-ci: Ce qu'on reçoit dans l'Eucharistie est le corps de JésusChrist: ce qui veut dire qu'on les condamne à la vérité, mais non pas absolument, et qu'elles peuvent se soutenir en quelque façon. C'est encore une autre erreur à M. Dupin de dire que quelques Catholiques ont rejeté ces propositions : UN DIEU EST MORT, etc.; car ces prétendus Catholiques ne sont que les partisans de Nestorius, qui n'auroient jamais été reçus dans l'Eglise s'ils avoient persisté à les rejeter.

Quand notre auteur compare ces expressions (1) Pag. 783. — (2) Rép. p. 7.

à celles de cette proposition: Un de la Trinité est mort, il ne songe pas que ce qui souleva d'abord quelques esprits contre cette proposition, c'est qu'elle parut nouvelle dans sa forme; mais que les propositions dont il s'agit: Un Dieu est né, un Dieu est mort, ont toujours été en ces mêmes mots dans la bouche de tous les fidèles, comme l'unique fondement de leur espérance, et qu'on n'en a non plus été surpris que de celle-ci : Un Dieu est homme, sans laquelle il n'y a point de christianisme.

Voilà donc non-seulement dans la Bibliothèque de l'auteur, mais dans ses dernières réponses, de nouvelles matières de censures, et ses défenses sont des erreurs. Mais après tout et dans le fond, il donne le change ce qu'il veut maintenant avoir dit, c'est que quelques Catholiques ont rejeté ces propositions: ce qu'il a dit en effet dans son Histoire du concile d'Ephèse, c'est qu'elles sont excessives, et qu'on ne les a pas suivies depuis. Ces deux choses n'ont rien de commun entre elles, sinon qu'elles sont mauvaises et insoutenables toutes deux, mais la dernière beaucoup plus, puisqu'elle est formellement hérétique.

Et pour montrer que notre auteur ne s'en peut laver, songeons seulement au dessein qu'il s'étoit proposé. Il entreprenoit de faire voir la cause des différends entre les Orientaux et les Egyptiens et il la fait consister en ce que les Orientaux ne comprenoient pas « comment on >> pouvoit attribuer à Dieu les qualités de la nature

» humaine, et qu'au contraire les Egyptiens pous>> soient cette communication d'idiomes à des » excès qu'on n'a pas suivis depuis ». C'est ce qu'il avoit à expliquer; et pour le faire, il ajoute : << Nestorius rejetoit ces expressions, un Dieu est » NÉ, IL EST MORT: les évêques d'Orient avoient >> aussi quelque peine à les admettre, et ils vou» loient qu'on y ajoutât quelques modifications: » Saint Cyrille et les Egyptiens s'en servoient en >> toutes sortes d'occasions : ils ne faisoient point » de difficulté de dire, L'IMMORTEL EST MORT, UN >> DIEU EST CRUCIFIÉ ». C'étoient donc là ces excès des Egyptiens qu'il nous vouloit expliquer, et que la postérité n'a pas suivis. Ces excès étoient de dire en toutes sortes d'occasions, UN DIeu est NÉ, UN DIEU EST MORT (1): il ne le falloit pas dire si souvent, pour épargner les oreilles des amis de Nestorius saint Cyrille et les Egyptiens y devoient trouver la même difficulté qu'y trouvoient les Orientaux. C'est à quoi tendent tous les discours de M. Dupin. Encore à présent et dans sa réponse au Mémoire, il ne sait presque quel parti prendre sur ces propositions, quoiqu'elles soient aussi certaines que celle-ci : Un Dieu est homme: elles peuvent être vraies, il ne les condamne pas absolument: quelques Catholiques les ont rejetées: chacun avoit ses raisons: ce sont là des questions de subtilité, sur lesquelles on ne s'entend pas, tant la matière est abstraite. C'est le langage que les Sociniens tâchent de mettre à la mode, quand

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(1) Pag. 784.

ils parlent des grands mystères qui font l'objet de notre foi. M. Dupin n'est pas de leur sentiment, je le crois; mais c'est toujours trop à un Catholique et à un docteur d'en avoir pris une si forte teinture.

C'est encore un manifeste affoiblissement de la saine doctrine, que de ranger, comme il a fait (1), ces propositions: Un Dieu est né, un Dieu est mort, parmi celles que l'usage de l'Eglise a introduites (2). Car c'est avoir oublié que l'Eglise même a démontré aux Nestoriens, par la bouche de saint Cyrille et de ses autres docteurs, que ces propositions, qu'on prétend introduites par l'usage, sont de l'Ecriture, et formellement les mêmes que celle-ci de saint Paul: Celui qui est sorti des Juifs selon la chair, est Dieu béni audessus de tout (3), et que celle-ci du même apôtre: Celui qui étoit en la forme de Dieu et égal à Dieu, a été obéissant jusqu'à la mort (4), et que celle-ci encore du même saint Paul : Dieu manifesté en chair (5), qui constamment étoit dès-lors dans le texte grec, et cent autres de cette force, pour ne point parler de celle-ci de saint Jean: Le Verbe est Dieu, et ce même Verbe, qui est Dieu, a été fait homme (6).

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(1) Pag. 151. (2) Rép. p. 3. (3) Rom. ix. 5. —

1.6 et seq.

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(5) I. Tim. 111. 16. — (6) Joan. 1. 2, 14.

(4) Philip.

CHAPITRE QUATRIÈME.

Les sentimens de l'auteur sur saint Cyrille, Nestorius, et les partisans de Nestorius.

PREMIÈRE REMARQUE.

L'auteur en général peu favorable aux écrits de saint Cyrille contre Nestorius.

Si notre auteur a osé excuser les dogmes de Nestorius, il ne faut pas s'étonner qu'il ait un si grand penchant à favoriser sa personne. C'est l'esprit qu'on voit régner dans tous ses écrits; et qu'au contraire il se plaît visiblement à charger sur saint Cyrille.

L'un et l'autre paroît à l'endroit où en parlant des cinq livres de ce Père contre Nestorius, encore que ce Traité soit un des plus convaincans contre cet hérésiarque, M. Dupin toutefois évite de dire qu'il l'ait convaincu en effet, et se réduit à dire, « qu'il veut le convaincre d'erreur en ce qu'il divise Jésus-Christ en deux (1) ». C'est là sa perpétuelle imagination. On a vu, et on verra dans la suite, qu'il ne veut jamais avouer que Nestorius ait été bien convaincu sur ce point; en quoi il tâche d'affoiblir, non-seulement l'autorité de saint Cyrille, mais encore la cause même de l'Eglise.

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(1) Tom. II, part. II. p. 111.

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