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animée d'une ame raisonnable et intelligente. M. Dupin en convient encore (1); et je ne sais, après cela, dans quel endroit il peut, ou trouver ce mauvais sens des paroles de saint Cyrille, ou en marquer aucun qui ne soit l'effet d'une haine aveugle, telle qu'étoit celle de Nestorius et de ses amis, contre saint Cyrille.

En effet, nous venons de voir, par des faits constans, que Jean d'Antioche et les évêques d'Orient, loin d'avoir aperçu d'abord dans les chapitres de saint Cyrille tout cet amas d'hérésies qu'ils y condamnèrent après, eurent besoin d'être excités pour les y voir, et ne les ont condamnées qu'en haine de la condamnation de Nestorius. Aussi est-il arrivé que visiblement tous les reproches de Théodoret, grand homme d'ailleurs, mais en cet endroit trop passionné pour être cru, ne sont que chicane. Ainsi tous ces mauvais sens de saint Cyrille sont l'effet de l'entêtement de ses adversaires, et de la préoccupation de M. Dupin, qui les favorise autant qu'il peut, comme la suite le fera paroître encore plus clai

rement.

QUATRIÈME REMARQUE.

Suite de cette matière: fausse imputation faite à saint Cyrille.

Voici le comble de l'injustice dans notre auteur. Pour obliger son lecteur à croire que saint Cyrille

(1) Pag. 777

a excédé, et que ses chapitres ont un mauvais sens, il met en fait que saint Cyrille en est luimême convenu (1). Cet aveu de saint Cyrille m'est inconnu : il est de l'invention de M. Dupin, qui aussi n'ose rien citer pour le prouver. Jamais saint Cyrille n'a rien affoibli dans ses anathématismes, qui n'étoient pas tant les siens que ceux d'un concile de toute l'Egypte; et loin d'y trouver de l'obscurité ou de l'équivoque, il déclare, dans sa réponse à Théodoret, qu'il n'y a rien d'embarrassé, ni de difficile à entendre (2). S'il en a publié une explication pour fermer la bouche à ses ennemis, ç'a été avec cette Préface (3) : « Quel» ques-uns prennent mal ce que j'ai écrit, ou » par ignorance, parce qu'ils n'entendent pas » véritablement la force de mes paroles, ou parce qu'ils veulent défendre les impiétés de Nesto>> rius; mais la vérité n'est cachée à aucun de » ceux qui sont accoutumés à bien penser ».

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Il écrit dans le même sens à Donat, après l'ac cord (4): « Tout ce que nous avons écrit est con» forme à la droite et irrépréhensible croyance, » et nous ne désavouons aucun de nos ouvrages. >> Car nous n'avons dit quoi que ce soit sans y » bien penser »; ou, comme porte l'ancienne version de cette lettre, « nous n'avons rien dit » de trop, ou avec excès, comme les Orientaux >> nous le reprochent; mais tout est écrit correc

(1) Pag. 780. (2) Adv. Theodor. III part. Præf. (3) Erplan. xi, x1 cap. III part. Conc. Eph. Præf. — 4 Ep. ad Donat. Conc. Eph. III part. cap. xxxvII. Coll. Lup. cup. CCIV.

>>tement en tout et partout, et s'accorde avec » la vérité » : ce qu'il confirme en un autre endroit (1): « par le témoignage de l'Eglise romaine, >> et par celui que lui a rendu tout le concile, » de ne s'être éloigné en rien du droit et im>> muable sentier de la vérité; et cela par écrit, » après avoir lu ses écrits à Nestorius »; ou, comme porte plus expressément une autre leçon, après avoir lu les lettres qu'il avoit écrites à Nestorius, où il comprend manifestement la lettre qui contenoit les douze chapitres. Voilà comment saint Cyrille avoue que ses anathématismes peuvent avoir un mauvais sens. C'est ainsi que les meilleurs livres, et l'Ecriture elle-même en peuvent avoir.

CINQUIÈME REMARQUE.

Si les douze chapitres de saint Cyrille ont été approuvés par le concile d'Ephèse : erreur de M. Dupin.

« ILs furent lus, poursuit notre auteur, dans » le concile d'Ephèse; mais ils n'y furent pas » nommément approuvés, comme la seconde >> lettre (de saint Cyrille) à Nestorius ». Ce nommément est une chicane. M. Dupin veut insinuer que la troisième lettre de saint Cyrille, où les anathématismes étoient renfermés, n'a pas été expressément acceptée ni autorisée par le concile; mais qu'on en lise les Actes, on n'y verra pas plus de marque d'acceptation pour la lettre de saint

(1) Apol. ad Imper. III part. cap. xì.

Célestin, qu'on convient être authentique, que pour celle de saint Cyrille où étoient les douze chapitres. Au reste, ces deux lettres sont si approuvées, qu'elles sont, comme on a vu, le fondement de la procédure du concile. Celle de saint Célestin contenoit la commission que ce pape adressoit à saint Cyrille contre Nestorius, et celle de saint Cyrille en contenoit l'exécution. Aussi le concile les fit lire ensemble comme deux pièces connexes (1); et puisque notre auteur ne veut rien voir ni rien remarquer, il faut, encore une fois, lui faire lire dans les actes du concile, qu'après qu'on eut fait la lecture de ces deux lettres, Pierre, prétre d'Alexandrie, qui étoit comme promoteur du concile, dit : « Non-seule>>ment la lettre de Célestin à Nestorius, mais » encore celle de Cyrille et du concile d'Egypte >> au même Nestorius (qui étoit nommément celle » où étoient les douze chapitres) lui ont été ren>> dues par les évêques Theopemptus et Daniel » (qui en étoient chargés;) et puisqu'ils sont ici présens, je demande qu'ils soient interrogés ». Alors il fut ordonné « que ces deux évêques ex

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poseroient s'ils avoient rendu ces deux lettres, » et si Nestorius y avoit satisfait. Les deux évêsy » ques répondirent que les lettres avoient été » rendues, et que Nestorius n'y avoit pas satis» fait »; ce qui ne seroit pas si criminel, si l'une de ces deux lettres eût été regardée comme ambiguë et pleine de mauvais sens; mais c'est à

(1) Act. 1, col. 452 et seq.

quoi l'on ne songeoit pas; de sorte que ces deux lettres, tant celle de saint Cyrille où les anathématismes étoient prononcés, que celle de saint Célestin, sont considérées comme juridiques et authentiques. On fait un crime à Nestorius de n'y avoir pas déféré; et faute de l'avoir fait, on passe outre au jugement, et l'on prononce la sentence. Elles sont donc approuvées et plus qu'approuvées, si je puis parler de la sorte; puisque le concile les autorise par toute sa procédure.

Aussi ont-elles toujours passé pour approuvées : elles, sont rapportées ensemble dans le cinquième concile (1), comme également approuvées dans le concile d'Ephèse : le même concile cinquième condamne d'impiété et frappe d'anathême ceux qui improuvent les douze chapitres de saint Cyille: Facundus reconnoît aussi, non-seulement que les chapitres de saint Cyrille ont été approuvés dans le concile d'Ephèse, mais encore qu'on l'a ainsi présupposé dans le concile de Chalcédoine (2).

Nous venons aussi de voir (3) un passage de saint Cyrille lui-même, dans son Apologétique à l'empereur Théodose, où il dit que tous ses écrits, qui ont été lus dans le concile d'Ephèse, y ont été approuvés: ce qui est expressément confirmé par le concile même dans sa relation à l'Empereur (4), où il est porté que « le concile a conféré » les épîtres que Cyrille avoit écrites sur la foi, » avec le symbole de Nicée : qu'elles s'y sont en >> tout point trouvées conformes, et que sa doc(1) Col. vi, viù. Anath. XIII. ~◄◄ (2) Facund. l. v11, p. 296. — (3) Sup. Rem. II. — 4) Act. 1.

BOSSUET. Xxx.

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