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une cabale irritée, dont les ressorts se découvrent dans tout le royaume, ne s'appliquoit pas à surprendre les infirmes, et qu'il ne fallût pas leur donner des précautions salutaires contre les piéges les plus fins qu'on ait jamais tendus aux ames simples. Puisque ce dernier parti est visiblement celui de la charité, j'y donne les mains. Pour éluder des faits convaincans, M. de Cambrai a fait les derniers efforts, et a déployé toutes les adresses de son esprit. Dieu l'a permis pour me forcer à mettre aujourd'hui en évidence le caractère de cet auteur; afin que la vérité, s'il se peut, n'ait plus rien à craindre de son éloquence. Je ne pourrai éviter un peu de longueur dans le dessein que je me propose d'insérer ses propres paroles et de longs passages dans ce discours. Je voudrois, malgré ses redites continuelles, pouvoir ici rapporter toute sa Réponse et le suivre page à page: l'étendue démesurée d'un tel ouvrage m'en a seule détourné : mais je choisirai tous les endroits importans; et le livre de M. de Cambrai étant entre les mains de tout le monde, je ferai si bien, que tout équitable lecteur me rendra le témoignage d'avoir rapporté au long ce qu'il contient de plus fort.

On verra, dans les articles suivans, qu'il m'insulte perpétuellement sur des faits sans preuve, pendant que je prouve le contraire par lui-même, et par actes; que sa réponse se dément partout; qu'il défend plus que jamais madame Guyon; qu'il change l'état de la question, et me fait

dire à chaque page tout le contraire de ce que je dis. Commençons: et dès l'avertissement voyons ses vains avantages et ses vains triomphes.

ARTICLE PREMIER.

Sur l'Avertissement.

§. I. Du recours aux procédés, et s'il est vrai que je n'aie point répondu aux dogmes. ¿

M. DE CAMBRAI.

1. « AVANT que d'éclaircir à fond l'histoire de » madame Guyon, dont on m'accuse sans fonde» ment de ne condamner pas les livres, je ne de» mande au lecteur qu'un moment de patience, » pour lui faire remarquer quel étoit l'état de >> notre dispute, quand M. de Meaux a passé » de la doctrine aux faits (1) ». C'est ainsi que commence l'avertissement de M. de Cambrai, et il suppose ces faits comme constans : « J'ai prouvé » à ce prélat, dans ma Réponse à la Déclaration, » et dans mes dernières lettres, qu'il avoit altéré » mes principaux passages pour m'imputer des >> sentimens impies, et il n'a vérifié aucun de » ces passages suivant ses citations. J'ai mon» tré des paralogismes qu'il a employés pour » me mettre des blasphêmes dans la bouche, et » il n'y répond rien ». C'est là qu'il rapporte (1) Rép, à la Relat. Avert. p. 3.

au long toutes ses demandes et toutes ses objections; et il suppose, comme si c'étoit un fait avéré, que je n'y ai fait aucune réponse. Après quatre pages de cette sorte, où il allègue sans aucune preuve tout ce qu'il lui plaît sur mon impuissance à répondre, il conclut en cette sorte: << Dans cet embarras, l'histoire de madame Guyon » paroît à M. de Meaux un spectacle propre à » faire oublier tout-à-coup tant de mécomptes » sur la doctrine (1) ». Et un peu après : «< Mais » est-il juste de croire qu'il parle sans préven» tion sur des choses secrètes, et qu'il n'allègue » que quand il manque de preuves pour les pu» bliques? Avant que d'être reçu à alléguer des » faits secrets, il doit commencer par vérifier >> toutes les citations de mon texte, que je soutiens » dans mes réponses qu'il a altérées (2) ». Et enfin : « Voilà, conclut-il, le point de vue, d'où >> le lecteur doit regarder cette nouvelle accu» sation (3) ».

RÉPONSE.

2. J'arrête dès ce premier pas un sérieux lecteur, pour lui demander s'il croit que cette dispute soit un jeu d'esprit, où il soit permis de dire tout ce qu'on veut, pourvu qu'on ait de belles paroles. On diroit, à ces beaux discours, que M. l'archevêque de Cambrai n'a jamais parlé des procédés: qu'il n'a pas dit, que le nôtre

(1) Rép. à la Relat. Avert. p. 6. (2) Ibid. p. 8.

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(3) Ibid.

:

étoit si étrange et si odieux, que le récit n'en trouveroit aucune créance parmi les hommes (1) : que ce n'est pas lui qui nous a pressé le premier, par cent reproches amers, à répondre aux faits qu'il nous objecte. Mais encore que je doive bientôt relever cette circonstance (2); pour commencer maintenant par quelque chose de plus décisif, s'il est vrai, comme on le suppose, que je sois passé aux faits et aux procédés, avant que d'avoir satisfait aux dogmes, je veux bien que l'on accorde à M. de Cambrai tout l'avantage qu'il demande mais si au contraire il est évident que je ne suis venu aux procédés, qu'après avoir établi les dogmes par mes écrits précédens; si ma Relation sur le quiétisme n'est qu'une suite de la Réponse à quatre lettres de ce prélat; réponse qu'il a vue, qu'il a citée; que j'ai finie, en lui déclarant qu'après avoir traité tout le dogme par principes démonstratifs, « je n'avois plus à le >> satisfaire que sur les faits et les procédés, puisqu'il le demandoit avec tant d'instance (3) » : peut-on dire avec la moindre couleur, que je ne viens aux procédés que par impuissance de répondre aux dogmes?

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S. II. Sur les altérations du texte, etc.

M. DE CAMBRAI.

3. « J'ai prouvé à M. de Meaux, qu'il avoit » altéré mes principaux passages, pour m'impu(1) Rép. à la Déclar. à quatre Lett. tom. xxix, p. 88.

6. p. (2) Ci-dessous, n. 17, 18. — (3) Rép.

» ter des sentimens impies: il n'a vérifié aucun » de ces passages. J'ai montré des paralogismes

qu'il a employés pour me mettre des blasphêmes >> dans la bouche, et il n'y répond rien. Je l'ai » pressé, mais inutilement, de répondre sur des » questions essentielles et décisives pour mon » systême. Il s'agit, si Dieu par les promesses » gratuites a été libre, ou non, de nous donner » la béatitude surnaturelle (1). Si Dieu ne l'eût » pas donnée, n'auroit-il pas été aimable pour sa * créature? Quand je le presse de me répondre » sur des dogmes fondamentaux de la religion, il » se plaint de mes questions, et ne veut point s'expliquer. Ce n'est pas que ces questions lui » aient échappé : aù contraire, il les rapporte » presque toutes, et prend soin de n'en expliquer » aucune (2) ».

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4. Cet argument est répété à toutes les pages (3). M. de Cambrai suppose partout, que depuis longtemps « je cite mal son texte, et que j'explique » mal toutes ses paroles. Il ne sert de rien, dit» il (4), de montrer à M. de Meaux les altérations » les plus évidentes; M. de Meaux compte pour » rien ce que j'ai vérifié, et il commence du ton » le plus assuré comme si je n'avois osé rien répondre ».

RÉPONSE.

5. C'est lui-même qu'il a dépeint dans ces dernières paroles. Il est sans doute bien aisé de s'ad

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