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Jefus-Chrift. Cette fainte pratique a duré durant les premiers fiécles de l'Eglife, où le Chriftianifme s'eft confervé dans fa pureté.

Les Saints exhortent beaucoup à la communion de chaque jour, ils appellent pour, cet effet le corps de Jefus-Chrift le pain de chaque jour, qui doit tous les jours nourrir nos ames, qui doit tous les jours les purifier des fautes où l'on tombe par fragilité & par furprife: ils difent que tous les vœux des Chrétiens doivent le porter vers ce divin aliment, & que toute leur douleur doit être d'en être privés. Tous les jours l'on donne au corps la nourriture qui Lui est néceffaire; pourquoi ne pas se met, tre en état d'en ufer de même envers notre ame? Tous les jours la manne, figure du corps de Jefus-Chrift tomboit, & fe ramaf foit dans le défert: cependant ces mèmes Saints qui invitent fi fort à la fréquente communion, à la communion de chaque jours, font plus réservés à l'approuver dans le détail & dans le particulier : ils difent que dans cet état ils ne la louent ni ne la blâment, que cela dépend des difpofitions qu'on y apporte, & qu'il y a des régles à fuivre : ·les voici,

I. On ne doit pas engager dans le fré quent usage de la fainte communion, de perfonnes qui commencent à fe convertir: il y a d'autres pratiques à leur prefcrire. A proportion du progrès qu'elles feront dans la vertu, on doit leur faire recevoir ce pain

des forts, dont l'ufage fréquent ne doit pas être la récompense d'une vertu naiffante mais d'une vertu avancée & d'une piété folidement établie.

II. Les perfonnes dont la vie imite celle des premiers Chrétiens, peuvent s'en approcher tous les jours; mais il n'eft pas ordinaire d'en trouver d'affez mortes à ellesmêmes, au péché & au monde, qui foient d'une oraifon continuelle d'une charité fans bornes, d'une mortification parfaite, & d'une humilité profonde: car tels étoient les premiers Chrétiens.

III. Pour les perfonnes qui ne font pas 'dans cette haute perfection, mais dont la vie cependant eft exemte de péché mortel, qui n'ont point d'affection au péché véniel, & qui vivent dans la pratique fidelle des devoirs du Chrétien, qui s'appliquent aux bonnes œuvres, & qui rempliffent fur-tout les devoirs de leur état, on doit leur permettre la communion tous les huit jours, & plus fouvent à proportion qu'elles travaillent à la mortification de leurs paffions & qu'elles font du progrès dans les vertus & fur-tout dans l'humilité, qui eft le fondement de toutes les vertus & la moins équivoque.

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IV. En un mot, il faut fuivre l'avis d'un fage & prudent Directeur, sur la connoiffance qu'on lui donne de fon intérieur, & felon l'expérience qu'il a de l'avancement qu'on fait dans la piété chrétienne.

Il faut que les personnes à qui l'on per

met

met l'ufage fréquent de la communion, ne fe donnent pas la liberté de condamner leurs freres, lorfqu'ils fe retirent de la communion: : car il fe peut faire qu'ils le faffent par respect pour ce Sacrement, prenant du tems pour le recevoir avec plus de refpe&t. Zachée honora Jefus-Chrift en le recevant chez lui; & le Centenier ne s'étant pas trouvé digne de le recevoir dans fa maison, mérita de le recevoir dans fon cœur. Et quand on ne reçoit pas le corps de JefusChrift facramentellement, foit qu'il foit à propos qu'on s'en éloigne par respect, comme les Saints l'ont quelquefois pratiqué, foit que des occupations trop diffipantes ne permettent pas de le recevoir, en doit alors tâcher de communier fpirituellement; c'eft ce qu'on peut faire à toute heure, rempliffant fon efprit & fon cœur de la penfée & de l'amour de Jefus-Chrift, & defirant ardemment d'être dans un état digne de le recevoir : cette maniere de communier eft très-utile, puifqu'on communie ainfi à l'efprit & à la grace des Myftéres qui eft la fin de la communion.

Il eft vrai que les libertins ne doivent point fe prévaloir de cette régle; púisqu'on fçait bien que ce n'eft point par respect pour ce Sacrement qu'ils s'en éloignent; mais pour pouvoir vivre avec plus de li cence, & n'être pas obligés de changer de vie & de mœurs. Les perfonnes timorées ne doivent pas auffi s'en retirer par fcrupule; & elles doivent prendre garde que ce I. Partie. * I

refpect qui naît en elles de la grandeur de Dieu & de la vue de leur baffefle, n'affoi bliffe point la confiance qu'elles doivent avoir en la bonté infinie de Dieu, qui les invite à s'en approcher.

EFFETS DE LA BONNE
Communion.

I.

1. Quoique ce foit le propre effet des

Sacremens du Batême & de la Pénitence de remettre les péchés mortels; il eft vrai cependant que la rémillion du péché mortel eft un effet de la manducation dų corps de Jefus-Chrift par la foi & par le defir; car tous les Sacremens empruntent tou te leur force & toute leur efficace du Sacrement de l'Eucharistie, dont il eft la fin & la confommation.

II. L'Euchariftie remet les péchés véniels qui font comme des affoibliflemens & des diminutions de la grace en nous; de même que l'on répare dans les corps par les alimens, les pertes que l'activité de la chaleur naturelle y avoit caufées: il eft vrai que cela doit s'entendre des fautes dont le cœur eft détaché; car Dieu ne remet point des of fenfes aufquelles on fe plaît encore.

III. L'Euchariftie écarte les tentations. ou elle nous en rend victorieux : elle réprime les mouvemens de la colere, de l'envie & des autres paffions: elle foutient contre les attaques du monde & du démon. C'est pourquoi les Saints ont dit, qu'une

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amequi a bien communié, eft comme un lion qui refpire le feu, & qui devient terrible au démon. Quand les premiers Chrétiens étoient conduits devant les Tribunaux des Payens pour confeffer le nom de Jefus-Chrift dans les tourmens, les Evêques leur donnoient l'Euchariftie pour les foutenir dans ces combats contre la crainte de la mort. L'Euchariftie a une vertu particuliere pour nous délivrer & pour nous rendre victorieux des tentations contre la pureté la préfence de la chair de Jefus Chrift arrête les mouvemens déréglés qui s'excitent dans la nôtre, & elle éloigne de nous les imaginations corrompues.

:

IV. L'’Euchariftie laiffe dans nos corps un germe d'immortalité, & y imprime une vertu fecrette qui doit y opérer à la fin du monde la réfurre&tion. Auffi Jefus-Chrift a t-il dit de celui qui mange fa chair & qui boit fon fang, qu'il le reffufcitera au dernier jour; & les Saints ont appellé l'Eucha riftie, le reméde de l'immortalité, & l'antidote contre la mort, pour vivre en Dieu par Jefus-Chrift.

V. L'Euchariftie opére bien d'autres mer-veilles dans les ames: car outre celles qui font marquées ci-devant, elle y produit des effets femblables à ceux que le pain produit dans nos corps. 10. Elle y conferve la vie de l'ame. 2. Elle augmente la grace & fait paffer dans l'état de la perfection, & dans la plénitude de l'âge de Jefus Chrift.

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