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CHRONIQUE BIBLIOGRAPHIQUE

Un canton du Bocage vendéen. Souvenirs de la grande Guerre. 1891, Melle, Lacuve, 1 vol. in-18 carré.

L'auteur de Henri de la Rochejaquelein et la Guerre de la Vendée, d'après des documents inédits, intéressant ouvrage dont nous rendions compte ici-même il y a un an, vient de faire paraître un nouveau volume. Celui-ci contient l'histoire, pendant la Révolution, du canton de Châtillon-sur-Sèvre, situé sur la limite du département de Maine-et-Loire. C'est surtout un monument élevé à la mémoire de ces paysans héroïques, dévoués à la religion et à la royauté, qui prirent part à la grande guerre ou périrent pendant les troubles.

La première partie de ce livre contient un exposé des événements dont le canton de Châtillon-sur-Sèvre fut le théâtre pendant la Révolution, de 1789 à 1800. Mais l'auteur, pour compléter son récit, a dû y joindre un précis de la guerre, dont quelques épisodes seulement se sont passés sur le territoire des communes dont il s'occupe, et mentionner les combats auxquels ont pris part les soldats vendéens du canton de Châtillon. Les lecteurs angevins y rencontreront donc de nombreux détails concernant leur département et plus particulièrement les paroisses des marches du Poitou détachées de cette province pour former le département de Maine-elLoire.

La seconde partie contient les listes des personnes de chaque commune du canton de Châtillon qui ont pris part à la guerre ou ont été les victimes de leur dévouement, d'après les archives communales, celles des tribunaux révolutionnaires d'Angers, de Nantes, du Mans, etc., et les états fournis à l'époque de la Restauration pour l'obtention de pensions. ou de secours.

De nombreuses notes complètent ce volume, dans lequel on retrouve les qualités de style et de consciencieuse exactitude que l'on avait remarquées dans Henri de la Rochejaquelein et la Guerre de la Vendée. Nous sommes heureux de signaler ce nouvel ouvrage aux lecteurs de la Revue de l'Anjou, tout en exprimant encore une fois le regret que la modestie excessive de l'auteur ne nous permette pas de dévoiler son incognito. Q.-L.

L'Œuvre scolaire de la Révolution (1789-1802), études critiques et documents inédits, par M. l'abbé E. Allain, archiviste du diocèse de Bordeaux. Paris, Firmin-Didot. Un vol. in-8° de VII-436 pages.

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M. l'abbé Allain, archiviste du diocèse de Bordeaux, justement apprécié déjà par ses savantes recherches sur l'Instruclion primaire en France avant la Révolution et la Question d'enseignement en 1789, d'après les Cahiers, vient de faire paraître, à la librairie Firmin-Didot, un important travail sur TOEuvre scolaire de la Révolution (1789-1802).

L'histoire de l'enseignement national pendant la Révolution a été fort étudiée depuis plusieurs années. MM. Albert Duruy, Liard, Victor Pierre, Babeau et Sicard - pour ne parler que des plus connus ont publié, sur la question, des travaux de première valeur. Mais, il faut l'avouer, les uns et les autres se sont attachés plus particulièrement à tel ou tel point du problème historique; M. l'abbé Allain, au contraire, l'aborde dans son ensemble, pour le traiter à fond.

Voici, en quelques lignes, le résumé de cette étude, l'une des plus remarquables qui aient été publiées depuis plusieurs

années.

Dans un rapide tableau, l'auteur dépeint, tout d'abord, l'état de l'enseignement en 1789. Les petites écoles, fondées et entretenues par le clergé, sont nombreuses. Dans tous les diocèses, les maîtres sont placés sous la juridiction immédiate de l'autorité ecclésiastique. Si les locaux sont modestes, le mobilier sommaire et les programmes restreints, l'enseignement est éminemment pratique : on apprend aux enfants le catéchisme, la lecture, l'écriture, le calcul et les éléments de l'orthographe. Malgré le coup porté à l'enseignement secondaire par la suppression des jésuites, les collèges sont fréquentés par un grand nombre d'élèves. Les universités, qui représentent l'enseignement supérieur, languissent et s'étiolent: la faculté des arts est souvent réduite à une seule chaire; les cours de médecine n'ont presque plus d'auditeurs; la faculté des sciences n'existe que de nom.

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Le savant archiviste du diocèse de Bordeaux rappelle ensuite, dans des pages pleines d'intérêt, l'oeuvre de destruction accomplie par la Constituante et la Législative et les efforts stériles de la Convention pour la réorganisation de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire. A la suite de la suppression des dimes et des communautés religieuses, les collèges et les écoles disparaissent. Les maîtres qui refusent presque partout de prêter le serment civique sont obligés de fuir pour échapper à la persécution. Nulle part les résultats ne répondent aux ambitions et à la jactance des réformateurs.

Puis, avec l'esprit d'impartialité qui distingue l'historien consciencieux, M. l'abbé Allain montre sous son vrai jour ce

qu'il appelle l'œuvre utile de la Révolution, c'est-à-dire l'établissement des Ecoles de santé, qui serviront de noyau aux futures facultés de médecine; la création du Muséum d'histoire naturelle, de l'Ecole polytechnique, du Conservatoire des Arts-et-Métiers, de l'Institut du Collège de France, de l'Ecole des langues orientales et du Bureau des longitudes.

Enfin, dans les deux derniers chapitres de son livre, l'auteur résume les débats des conseils du Directoire et les nombreuses enquêtes ordonnées par le Consulat : ces dernières - pour le dire en passant - réclament franchement le retour aux vieilles méthodes et la restauration des anciens établissements.

Pour mener à bonne fin une pareille entreprise, il fallait de longues et minutieuses recherches, non seulement dans les monographies déjà publiées sur plusieurs points de la France, mais encore dans les précieux dépôts de la Bibliothèque et des Archives nationales. Ce travail n'a point effrayé notre savant ami; et l'on peut recommander son livre à tous ceux qui s'intéressent à l'histoire de l'enseignement en France: c'est un modèle de clarté et d'érudition.

Pour lire en express, par Maxime Juillet.

Ch. U.

1891, Paris, Retaux et fils. Un vol. in-12 de 144 pages.

D'abord, le titre est joli. On peut dire qu'il est justifié par l'allure rapide des nouvelles que nous conte M. Maxime Juillet, un observateur de la vie et un romancier qu'on connait. Un mot qu'il a entendu, un type dont l'originalité l'a séduit, une émotion fugitive dont il retrouve l'accent, et c'est assez pour crayonner deux ou trois pages, cinq ou six au plus, parmi lesquelles j'indiquerai surtout celles qui se nomment marchands ambulants, le journal m'sieu et le retour. Celles-là et d'autres, je puis assurer à l'auteur qu'elles seront lues, non seulement en express, mais par des gens qui ne prennent pas le chemin de fer et, doucement, posément, devant le premier feu d'hiver, ouvrent le dernier livre de l'automne.

Ilios et Iliade. Les ruines de l'Ilios. La formation de l'Iliade. Essai de restauration de l'Iliade primitive. L'Olympe et l'art homériques, par Gaston Sortais, S J.. Paris, Émile Bouillon, 67, rue Richelieu. Un vol. in-8 orné d'une carte, xv-418 pages. Prix fort : 5 francs.

L'auteur, à la suite de Schliemann, reconstitue la scène où se déroulèrent les dramatiques événements de l'Iliade. Puis il établit, sur des preuves solides, le système qui paraît le mieux rendre compte de la formation de l'Iliade. Un essai de reconstruction de l'Iliade primitive est placé en regard. Au

milieu de l'Iliade actuelle, œuvre successive de plusieurs aèdes, il essaie de retrouver la part qui revient à Homère. Enfin, les quatre derniers chapitres sont consacrés à la religion et à l'art homériques.

Les professeurs, les candidats à la licence, et ceux qui s'intéressent encore aux lettres antiques trouveront, rassemblés dans ce travail, des renseignements utiles, qu'il leur faudrait à grand'peine glaner çà et là.

Nous ajouterons que l'auteur, le R. P. Sortais, a fait ses études de licence ès-lettres à notre Faculté libre d'Angers. De ce côté, il nous appartient un peu, et nous nous en félicitons. Son excellent ouvrage vient augmenter la série des arguments sérieux, élégants et reliés, qui prouvent la valeur de l'enseignement angevin.

R. B.

L'Agence Spirite, par André Godard. Paris, Retaux Un vol. in-12.

On se souvient de l'étrange procès dit des Photographies Spirites, qui émut si vivement l'opinion il y a quelques années. C'est une histoire analogue qui sert de point de départ au nouveau roman que M. André Godard vient de publier. Cet ouvrage est fort différent de Bébé-Rose, du même auteur, qui parut l'an passé chez Ollendorff et dans l'Indépendance Belge. L'Agence Spirite est une réfutation du spiritisme au profit de la philosophie religieuse. A côté d'études dramatiques de la peur, d'une passionnante histoire d'amour, de portraits très neufs de médiums et de brasseurs d'affaires, on rencontre des pages mystiques où l'auteur soutient cette thèse que rien de nos pensées ou de nos affections ne saurait périr, et que les formes mêmes de l'univers physiques seront sauvées de l'oubli. L'Agence Spirite est un roman parisien que tout le monde peut lire, et qui consolera les âmes atteintes de l'effroi du néant et de la nostalgie du passé.

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