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les pairs de France; les Parlemens de France, par Bernard de la Roche-Flavin; les Variations de la monarchie française, par Gautier de Sibert; l'Histoire de l'Église, par l'abbé Fleury; la Théorie des lois des Français, par mademoiselle Lalézardière, etc.

CHAPITRE II.

HISTOIRE DES GAULES DANS LE CINQUIÈME SIÈCLE.

POUR connaitre le véritable esprit des révolutions qui occupèrent le cinquième siècle, il faut les étudier à leur point de départ dans le siècle précédent. C'est surtout par leur but moral, que les révolutions des Gaules se rattachent à l'histoire de l'humanité.

Dès le commencement du quatrième siècle, le Christianisme était devenu le centre de toute l'activité politique de la société romaine. Constantin l'avait fait asseoir avec lui sur le trône, ou plutôt, le parti chrétien avait conquis l'empire.

Ce grand empereur n'adopta pas seulement la doctrine nouvelle, parce qu'elle lui donnait une nombreuse population pour appui. Il voulut plus, et tout le prouve: il voulut rendre l'unité de croyance et de volonté à cette grande société qui tombait en ruine depuis trois siècles, et qui en était arrivée à ce point de dissolution, qu'elle ne pouvait plus fournir un soldat pour la défendre, ni un empereur pour la gouverner. Aussi, en même temps qu'il fondait une capitale nouvelle, et qu'il organisait un nouveau système d'administration, il s'occupa de créer un centre de doctrines, de fonder un catholicisme. C'est dans ce but que fut assemblé en 525, le concile de Nicée. Ce fut la première fois que l'on vit des députés de toutes les nations réunis sans distinction de naissance ni de, race, pour représenter seulement l'intelligence. C'est aussi le premier exemple d'une assemblée représentative telle à peu près que nous la concevons aujourd'hui. Après quatre mois de délibération, ils mirent au jour ces actes fa

meux, fondemens du Catholicisme, qui furent la première constitution politique du Christianisme, et qui étaient, pour ce temps, ce que serait pour le nôtre une nouvelle sanction des devoirs et des droits de l'homme. Aussi, dès ce moment, il n'y eut plus de troubles sérieux dans l'empire, qui n'émanât d'une hérésie; car il ne fut plus possible à personne de s'isoler des destinées communes, sans blesser la loi religieuse.

Parmi les questions qui furent décidées au concile de Nicée, il en est une qui eut plus tard les suites politiques les plus graves. Arius vint soutenir qu'il n'y avait qu'une seule nature en Jésus Christ, ou, en d'autres termes, qu'il était seulement homme, et non pas Dieu. Cette objection fondamentale était celle par laquelle, depuis trois siècles, les payens avaient repoussé l'autorité et la sévérité des doctrines nouvelles. Elle devait donc se présenter avec tout l'appareil de la science, le jour où l'Évangile était déclaré loi organique de l'Empire. L'Arianisme fut examiné', discuté, condamné, frappé d'Anathème. Il est facile d'apprécier les motifs de l'excommunication qui fut lancée sur lui. Cette hérésie, en niant la divinité de Jésus, remettait en délibération et en doute tous les dogmes qui étaient consacrés aux yeux des peuples, par le caractère divin de l'autorité dont ils émanaient; par suite, elle ajournait les conséquences politiques et civiles du Christianisme. Or, à ce moment, dans l'intérêt de la conservation sociale, aussi bien que dans l'intérêt de l'amélioration des mœurs et des conditions civiles, il fallait agir, et pour agir, il fallait croire à l'infaillibilité des Évangiles. C'était l'égoïsme qui avait tué la société romaine; c'était le dévouement qui devait la reconstruire: or, pour se dévouer, il ne faut pas douter du but même de ses efforts. Les Pères du concile de Nicée condamnèrent donc avec raison l'Arianisme comme attentatoire au nouveau principe social; et le pouvoir impérial, imbu de la même conviction, s'opposa par la force à son extension. Cependant il ne périt pas; il se cacha sous une métaphysique obscure et difficile, et par ce moyen il se soutint comme école. Il eut d'ailleurs, dès son premier jour, pour partisans avoués ou secrets, tous ceux qui

conservaient quelque chose de l'incrédulité payenne, ou de la fausse science des gnostiques, et ceux-là étaient très-nombreux. Aussi, on peut dire que dès ce moment le monde romain fut partagé par deux doctrines: la Catholique et l'Arienne. Dans la première se trouvaient tous les hommes qui faisaient l'œuvre nouvelle; dans la seconde étaient ceux qui tenaient aux choses anciennes, et qui préféraient leurs intérêts propres à ceux de l'humanité. La plupart des Ariens étaient des hommes des hautes classes, soit parcequ'ils se sentaient menacés dans leurs habitudes, et dans leurs intérêts, soit parce qu'ils purent s'instruire des subti-* lités de l'Arianisme par la lecture: car la puissance impériale ne pouvait faire plus contre cette hérésie, que d'en défendre la prédication publique. Au contraire, le peuple resta catholique, c'est un fait dont l'histoire de ce temps offre de fréquentes preuves. Toujours on trouve les Ariens parmi les puissans et les riches, et les Catholiques parmi les pauvres.

D'ailleurs, diverses circonstances favorisèrent les progrès de lagrande hérésie. Après Constantin, il y eut un empereur Arien; comme après Constance il y eut un Julien l'apostat. L'Arianisme était un quasi-christianisme, une sorte de prétendue doctrine gouvernementale, qui se prêtait à tous les rôles : c'était le refuge de tous les incrédules. Il était donc tolérant pour toutes les hérésies et tous les paganismes, intolérant avec la scule croyance catholique. En effet, au quatrième siècle et au commencement du cinquième, l'histoire nous le montre mêlé, uni, tantôt au paganisme, tantôt au manichéisme, dans les mêmes intrigues et dans le même but: aussi, les Catholiques de cette époque durent appeler Ariens tous ceux qui firent œuvre d'égoïsme.

Ce n'est pas ici le lieu de raconter comment il contribua à détruire l'Empire Romain. Il est facile de comprendre cependant, que, lorsque, dans un même pays, deux croyances hostiles partagent la population, l'ambition des hommes incrédules spéculera sur les doctrines, afin de s'en faire un instrument de fortune. C'est, en effet, ce qui arriva, dans les luttes auxquelles donnaient lieu les succcessions, toujours si douteuses et si embarrassées, au trône

impérial. Le Catholicisme n'était pas d'ailleurs pour les hommes de peu de foi, une doctrine facile et commode. Dans ces temps de ferveur, elle était exigeante pour les grands, aussi bien que pour les simples particuliers. Qui ne connait la pénitence qu'elle imposa au plus puissant des Empereurs après Constantin, à Théodosele-Grand, pour une colère de prince qui avait eu les suites ordinaires à cette époque? L'Arianisme était moins rigoureux : aussi convenait-il à tous ceux qui ne cherchaient dans la possession du pouvoir, qu'une jouissance personnelle. Par la même raison, ce furent les Ariens qui pactisèrent les premiers avec les Barbares. La meilleure preuve que nous puissions en offrir, c'est que parmi çes derniers, lors des invasions, il y avait au moins autant d'Ariens que de payens, et qu'au milieu d'eux, on rencontre toujours quelques noms d'Évêques Ariens. Il est vrai, aussi, que les lois de bannissement qui, à divers temps, furent prononcées contre les professeurs et les magistrats de cette doctrine, jetèrent parmi les peuplades barbares un grand nombre de ces ennemis de la foi catholique; ajoutons que les premiers apôtres chrétiens qui leur furent envoyés, sous le règne de l'empereur Valens, étaient des prêtres ariens.

Il y avait alors plusieurs siècles que les extrémités de l'Empire Romain étaient pressées par des flots de peuples barbares, avides d'y pénétrer. L'illustration militaire de tous les Empereurs, depuis Tibère, avait été fondée par des succès remportés sur ces limites toujours menacées. Sauf quelques guerres civiles, depuis trois cents ans il n'y avait eu que des guerres défensives sur les frontières. Le premier effet des disputes de Religion, ou des intrigues qui en prenaient le prétexte, fut d'affaiblir ces lignes défensives, en détournant les armées de la garde de ces points, pour les employer à des guerres intérieures. Ensuite, on pactisa avec les Barbares. Enfin, il arriva dans le cinquième siècle, que les ambitions rivales, et les empereurs eux-mêmes, ne combattirent plus, ainsi qu'autrefois, avec ces armées qui, bien que composées en grande partie de soldats étrangers, étaient Romaines cependant par la discipline, les armes et le commandement : ils soudoyèrent des nations barbares, et livrèrent à ces bandes no

mades, le territoire à parcourir. Il serait trop long d'entrer dans le détail des intrigues et des circonstances de toute nature qui amenèrent successivement sur le sol de l'Empire Romain, tant de peuplades sauvages; il suffit de rappeler que presque tous les chefs des envahisseurs avaient servi l'Empire à un titre quelconque, et qu'ils étaient en général Ariens. Les historiens se sont trop attachés à chercher dans des événemens propres aux sociétés barbares, la cause de la grande invasion du cinquième siècle. Il est évident que le secret de ces puissans mouvemens réside tout entier dans les troubles intérieurs de l'Empire.

La Nationalité Française sortit du sein de ces troubles. Elle fut instituéc autant dans le but de protéger les populations Gauloises, que dans celui de défendre et de fortifier le Catholicisme. La nar ration suivante va nous en offrir la preuve.

Dans les premières années du cinquième siècle, les habitans des Gaules commencèrent à sentir la nécessité d'un centre militaire, indépendant et national. Cette pensée leur fut évidemment inspirée par les événemens qui se pressèrent à cette époque, et par le peu de confiance que devait leur inspirer un pouvoir impérial, constamment ballotté entre des partis contraires. On avait appris en 400, qu'Alaric, roi des Goths, était entré en Italie, et qu'on ne l'avait arrêté qu'en lui promettant le gouvernement des Gaules et de l'Espagne. En 406, une multitude de barbares, Alains, Vandales, Suèves, Bourguignons, après avoir vaincu les Francs, passèrent le Rhin, et vinrent inonder le pays. Mayence, Worms, Reims, Amiens, Arras, Tournai, Spire, Strasbourg, Langres, Trèves, Toulouse, les provinces d'Aquitaine, la première Lyonnaise, les Narbonnaises furent saccagées, et l'on disait que ces barbares avaient été appelés par le principal ministre, le favori de l'Empereur d'occident, Stilicon, un Vandale arien. C'était lui qui avait dégarni les frontières; et son but, en introduisant les payens dans l'empire, était de se faire une armée qui le portât sur le trône à la place de son maître. Il leur avait promis la destruction du Catholicisme, et il avait, en garantie de ces promesses, fait élever

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