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>> M. le maréchal duc de Wellington, ayant été chargé de la part du Gouvernement britannique, ainsi que de celui des Pays-Bas, de surveiller l'exécution du système des fortifications des Pays-Bas, a déclaré pouvoir certifier à la Conférence que la quantité de travail exécuté était immense, et qu'un résultat utile pour la défense du pays pouvait en être attendu pour l'année prochaine, si le cas l'exigeait. Le duc s'est réservé de communiquer, dans une autre occasion, aux ministres des Puissances alliées, des détails à l'appui de son opinion.

» Les plénipotentiaires d'Autriche et de Prusse ont également annoncé leur intention de communiquer aux ministres des hautes puissances alliées, les informations qu'ils pourraient posséder sur les nouveaux ouvrages défensifs, en état de construction ou à construire dans les autres pays limitrophes de la France, dans lesquels la surveillance desdits ouvrages se trouve confiée à leurs cours.

» Messieurs les plénipotentiaires ont discuté ensuite les

A cet effet, Messieurs les Ministres sont convenus :

Que le Gouvernement Britannique se réunira avec celui des PaysBas pour déterminer conjointement l'emploi spécial à faire des sommes destinées à la fortification de ce pays.

Que, relativement au système défensif de l'Allemagne, les Cours d'Autriche et de Prusse, etc.....

Et comme il a paru indispensable à LL. EE. que les opérations qui vont être projetées et exécutées se rattachent à un système général et soient, autant que possible, liées entre elles, on est convenu encore que des communications fréquentes auront lieu entre les Cabinets, afin de porter à leur connaissance respective les différentes mesures qui auront été adoptées pour assurer le succès des dites opérations et l'emploi le plus avantageux des sommes qui y sont consacrées.

Le présent procès-verbal servira uniquement à constater l'unanimité d'avis de Messieurs les Ministres sur le principe de la question qui y est traitée, et à former la base des instructions qui seront données à cet égard aux membres des différentes Cours.

moyens de fournir à ces forteresses les garnisons nécessaires, le cas de guerre échéant et la guerre se portant dans les Pays-Bas et, vu que les établissements militaires de ce royaume n'ont jamais pu être formés pour la défense exclusive d'un pays dont la conservation intéresse à un si haut degré toutes les Puissances et qu'outre les forteresses en construction, il s'en trouve plusieurs à occuper en seconde ligne, sur l'ancienne frontière de la Hollande, il a été convenu de recommander à Sa Majesté le Roi des Pays-Bas, de faire occuper, le casus fœderis ayant été déclaré, les forteresses d'Ostende, Nieuport, Ypres et celles situées sur l'Escaut, à l'exception de la citadelle de Tournai et la place d'Anvers, par les troupes de Sa Majesté britannique, et les citadelles de Huy, Namur et Dinant, ainsi que les places de Charleroi, Mariembourg et Philippeville, par les troupes de Sa Majesté prussienne.

» Le présent protocole militaire, bien qu'il n'ait pas été expressément mentionné au susdit protocole réservé, n'en sera pas moins regardé comme partie intégrante de celui-ci, compris dans la sanction de cet acte et signé en outre par les plénipotentiaires des quatre Puissances.

>> METTERNICH, CASTLEREAGH, WELLINGTON, HARDenberg, BOMSTORFF, NESSELRODE, CAPODISTRIA. >>

C'est ainsi qu'après avoir assigné au royaume des Pays-Bas sa mission internationale et lui avoir donné une consolidation matérielle en rapport avec cette fin, les cours du Nord s'attachèrent à assurer son mode de fonctionnement. Instrument de défense élevé contre la France, le nouveau royaume devait se tenir prêt à remplir sa tâche éventuelle et se trouver, le cas échéant, rapidement et sûrement sous la main des alliés.

Le duc de Wellington fut promu au grade de feldmaréchal de l'armée néerlandaise.

Il n'est pas étonnant que la Révolution belge éclatant comme une bombe au milieu de ce bel et habile assemblage ait été signalée d'abord au futur fondateur de la dynastie nationale comme une « diablement mauvaise affaire » (1).

Nous n'avons pas ici à refaire l'histoire interne du royaume des Pays-Bas, au début de laquelle se place, comme un sinistre éclair précurseur, le rejet de la Loi fondamentale par les provinces belges, et à la fin de laquelle éclate au ciel, comme la flamme longtemps contenue d'un immense brasier, la Révolution belge, ardente, populaire, auréolée des vieilles couleurs brabançonnes, faisant courir et bouillonner dans toutes les veines comme un sang nouveau, le sang de la nationalité reconquise.

La réunion forcée des deux peuples était facile, la fusion était œuvre de grande difficulté. Cette fusion ne fut pas commencée, elle ne fut pas continuée dans des conditions favorables au résultat définitif. Dans cette combinaison, où les puissances avaient disposé de la Belgique comme d'une conquête, la Belgique demeura trop, à divers points de vue, le fond servant, la Hollande, le fond dominant.

La politique d'«<< amalgame » imposée par les puissances au prince d'Orange était d'un maniement fort difficile et la main du Prince n'était pas précisément appareillée à cette tâche.

Il n'est pas sans intérêt d'ailleurs de constater qu'en Hollande même, l'idée de la réunion n'avait pas été accueillie avec un bien grand enthousiasme.

« Le spectacle qui se déroulait sous les yeux des diplomates accrédités à Bruxelles leur donna bientôt la

(1) Propos de Wellington. (La princesse de Lieven au prince Léopold Souvenirs tirés des papiers du baron de Stockmar, p. 159.)

conviction que l'œuvre du Congrès de Vienne n'était pas
née viable. Dès les commencements de la réunion, ils
prévirent la catastrophe finale et ils l'indiquèrent comme
devant être la suite de la première commotion révolu-
tionnaire qui viendrait à ébranler la France (1). »

Au point de vue international, le nouveau royaume,
après sa constitution définitive, ne fut point mis à
l'épreuve par quelque grande crise européenne. Mais il
avait en quelque sorte reçu le baptême du feu à son
entrée dans la vie internationale.

Le Congrès de Vienne avait décidé, dans sa séance du
12 février, la formation définitive du nouveau royaume
sous la dénomination du Royaume des Pays-Bas. Guil-
laume en avait reçu à La Haye la nouvelle le 22 et l'avait
transmise à Bruxelles, où elle était arrivée le 24. Au
moment où le drapeau orange venait d'être arboré en
Belgique, Napoléon avait quitté l'île d'Elbe, reparaissait
au golfe de Juan et commençait cette marche qui, de
triomphe en triomphe, devait le conduire des rives de la
Provence au palais des Tuileries.

Les événements se précipitaient. Le 13 mars, le
Congrès de Vienne déclarait solennellement que Napo-
léon Bonaparte s'était placé hors des relations civiles
et sociales, et que, comme ennemi et perturbateur du
repos du monde, il s'était livré à la vindicte publique.
Le 15, le Prince-Souverain, prenant conseil de son énergie
en présence d'événements qui semblaient compromettre
sérieusement l'œuvre du Congrès de Vienne, et consi-
dérant << l'urgence qu'il y avait de constituer l'État dont
la politique de l'Europe entière avait considéré l'exis-

(1) PROSPER POULLET, Les premières années du royaume des Pays-
Bas, p. 5.

tence comme nécessaire à la sûreté et à la tranquillité générales », - c'étaient les termes qu'il devait employer dans ses lettres patentes du lendemain, — communiquait aux ministres étrangers à La Haye sa résolution de se déclarer sur-le-champ roi des Pays-Bas. Le 17, son avènement était proclamé à Amsterdam et à Bruxelles. Le 18, le prince héréditaire réunissait les troupes nationales sur la place Royale à Bruxelles pour recevoir leur serment de fidélité au roi des Pays-Bas. Le 20, le jour même où Napoléon rentrait «< dans son palais des Tuileries »> (1), lord Castlereagh prononçait au sein de la Chambre des Communes les paroles que nous avons rapportées précédemment, annonçant que les puissances sauraient défendre et consolider leur œuvre. Le 30, le jour même où Louis XVIII arrivait à Gand, LL. MM. le Roi et la Reine des Pays-Bas faisaient leur entrée solennelle à Bruxelles.

La situation était critique. Pressentant le péril. Guillaume ne négligea rien pour mettre la patrie à l'abri d'une invasion étrangère : interdiction d'exporter des armes, de la poudre et des munitions de guerre; approvisionnement des forteresses; organisation de la défense de l'Escaut; ordres pour la mobilisation des troupes; création d'un corps de milice nationale de vingt-cinq mille hommes et de compagnies d'élite, formées de volontaires; promulgation du Code pénal militaire. Des sollicitations diverses, publiques et secrètes, ne manquèrent pas sans doute d'assaillir le nouveau souverain. C'est pour se prémunir contre les alarmistes et les « partisans ou instruments d'une puissance étrangère » que Guillaume édicta le célèbre arrêté du 20 avril 1815, qui, appliqué plus tard en pleine paix, en dépit de son caractère exceptionnel

(1) Moniteur universel du 20 mars.

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