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crire au rétablissement de la paix et de l'équilibre de l'Europe (1). »

L'article 2 de ce traité indiquait comme résultats à poursuivre par l'alliance :

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» B. L'établissement de l'indépendance des républiques de Hollande et de Suisse.

» C. Le rétablissement du roi de Sardaigne en Piémont avec un arrondissement aussi considérable que les circonstances le permettront.

» D. La sûreté future du royaume de Naples et l'évacuation entière de l'Italie, y compris l'île d'Elbe, par la force française. >> E.

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L'établissement d'un ordre de choses en Europe qui garantisse efficacement l'indépendance des différents Etats et présente une barrière solide contre des usurpations futures. >>

Le texte de l'article 2 ne parlait que de l'indépendance de la Hollande; mais un article 3 séparé était plus explicite et contenait la disposition suivante :

« Les hautes parties contractantes sont convenues qu'il entre dans le but du présent concert de procurer à la Hollande et à la Suisse, d'après les circonstances, des arrondissements convenables tels que les ci-devant Pays-Bas autrichiens en tout ou en partie à la première, l'État de Genève et la Savoie à la seconde.

» Elles entendent également que les arrangements qui

(1) Voy. F. DE MARTENS, Recueil des traités et conventions conclues par la Russie avec les puissances étrangères, t. II, pp. 433 et suiv.

seront faits en Europe, à la suite de la guerre, comprendront en faveur de l'Autriche une augmentation de territoire comme elle se l'est réservée par sa convention avec S. M. l'Empereur de toutes les Russies, et en faveur d'autres États qui coopéreront au but du présent concert des acquisitions proportionnées à leurs efforts pour la cause commune et compatibles avec l'équilibre de l'Europe. »>

Des négociations préliminaires avaient précédé à Londres la rédaction de l'instrument de Saint-Pétersbourg, et c'est là que William Pitt avait réussi à transformer en plan de coalition contre la France l'« alliance de médiation pour la pacification de l'Europe » dont l'Empereur de Russie voulait prendre l'initiative.

En somme, les coalisés divisaient en deux classes les territoires qu'on enlèverait à la France: les territoires à rétablir dans leurs anciens rapports, tels que la Hollande, la Suisse, les États du roi de Sardaigne, et les territoires à annexer à d'autres, comme les Pays-Bas autrichiens et l'État de Gênes. « M. Pitt, nous dit Thiers, trouvait lumineuse et profonde l'idée de construire autour de notre sol des royaumes capables de nous résister : un royaume des Deux-Belgiques et un royaume subalpin; l'un pour la maison d'Orange, protégé par l'Angleterre, l'autre pour la maison de Savoie, protégé par la Russie. Mais il voulait qu'au lieu de séparer la l'russe et la France par le Rhin, on les mît au contraire en contact immédiat, et il proposa d'accorder à la Prusse, si elle se prononçait pour la coalition, tout le pays compris entre la Meuse, la Moselle et le Rhin, ce que nous appelons aujourd'hui les provinces rhénanes... Il sortit de ces conférences une nouvelle idée destinée à compléter la création d'un royaume des Deux-Belgiques : ce fut de construire une

ceinture de forteresses à l'image de celles que Vauban avait élevées autrefois pour couvrir la France, dans ce pays sans frontières, et de construire ces forteresses aux frais de l'alliance (1). »

Bientôt après, Napoléon écrasait la coalition à Austerlitz, et, arrivé à l'apogée de sa gloire, déposait les anciennes dynasties, distribuait les couronnes, transformait la République batave en royaume et proclamait, à Saint-Cloud, le 5 juin 1806, Louis Bonaparte roi de Hollande, en lui adressant les paroles suivantes :

<< Régnez sur ces peuples. Leurs pères n'acquirent l'indépendance que par les secours constants de la France. Depuis, la Hollande fut l'alliée de l'Angleterre; elle fut conquise elle dut encore à la France son existence. Qu'elle vous doive donc des rois qui protégent ses libertés, ses lois et sa religion. Mais ne cessez jamais d'être Français. La dignité de connétable de l'Empire sera conservée pour vous et vos descendants; elle vous retracera les devoirs que vous avez à remplir envers moi et l'importance que j'attache à la garde des places fortes que je vous confie et qui garantissent le nord de mes États (2).

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Quelques années plus tard, le 9 juillet 1810, un décret impérial réunissait le nouveau royaume à l'Empire français, et l'Empereur disait en signant ce décret que la Hollande ne pouvait avoir d'indépendance après la réunion de la Belgique à la France.

William Pitt n'avait pas survécu à la catastrophe où

(1) THIERS, Histoire du Consulat et de l'Empire, livre XXI. (2) Voy. JUSTE, Le soulèvement de la Hollande en 1813 et la fondation du royaume des Pays-Bas, p. 9.

avait sombré la troisième coalition. Mais sa pensée n'avait pas laissé un instant de demeurer vivante dans l'esprit du Gouvernement britannique. Au milieu de tous les insuccès, l'Angleterre poursuivait avec ténacité le but final la défaite complète de Napoléon, le cantonnement de la France avec une solide barrière, et la conservation d'une partie des colonies dont les flottes britanniques s'étaient emparées en cours de guerre.

Après la défaite de la Grande Armée en Russie et l'accession de l'Autriche et de la Prusse à l'alliance anglo-russe, l'Angleterre se préoccupa sans cesse de tenir unis et de soutenir de son or le faisceau de la coalition en même temps que de préparer, à son point de vue, la solution des questions territoriales en perspective. Dès 1813, elle avait fait des ouvertures en vue d'un nouveau traité général d'alliance de toutes les puissances de l'Europe contre la France. Et lorsque les alliés, par la note de Francfort du 9 novembre 1813, proposèrent à Napoléon, sans grande sincérité, il est vrai (1), de lui laisser le Rhin, les Alpes et les Pyrénées, s'il consentait à reconnaître l'indépendance de l'Allemagne, de la Hollande et de l'Italie, le cabinet de Londres crut devoir s'élever contre toute tendance à conclure un <<< arrangement imparfait ». « Vous ne serez pas surpris d'apprendre, >> écrivait lord Castlereagh, le 13 novembre 1813, au comte d'Aberdeen, ambassadeur britannique près la cour d'Autriche, «< que l'Angleterre, après des succès aussi grands, verrait avec défaveur une paix qui ne ramènerait pas strictement la France dans ses anciennes limites... Nous sommes disposés à courir avec nos alliés les hasards de

(1) Albert Sorel, Essais d'histoire et de critique: Metternich, p. 50.

la paix, si la paix peut être faite d'après la base proposée et exécutée d'une manière satisfaisante; et nous n'avons pas l'intention d'intervenir dans le gouvernement intérieur de la France, malgré notre vif désir de le voir placer dans des mains plus pacifiques. Mais il ne faut pas encourager nos alliés à conclure un arrangement imparfait; s'ils veulent agir ainsi, nous devons nous soumettre; mais, en ce cas, ce sera leur œuvre et non la nôtre. Je dois particulièrement vous recommander de fixer votre attention sur Anvers. La destruction de cet arsenal importe à notre sûreté. Laisser Anvers entre les mains de la France, c'est, ou peu s'en faut, nous imposer la nécessité d'un état de guerre perpétuel. Après tout ce que nous avons fait pour le continent, nos alliés nous doivent et ils se doivent à eux-mêmes d'éteindre cette source féconde de périls pour eux comme pour nous. J'oubliais de répondre à votre question concernant la Hollande. La ligne du Wahal réduirait la Hollande à rien, la priverait de ses meilleures défenses, et laisserait Anvers entre les mains de l'ennemi. Nous ne voulons pas imposer à la France des conditions déshonorantes, comme serait la limitation du nombre de ses vaisseaux, mais il ne faut pas la laisser en possession de cette place. C'est là un point que vous devez considérer comme essentiel par-dessus tous les autres, en ce qui concerne les intérêts britanniques (1). »

Parmi les arrangements secrets de l'époque visant la réunion de la Belgique à la Hollande, il en est deux que nous devons signaler.

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(1) Correspondence, dispatches and others papers of viscount Castlereagh, 3e série, t. I, pp. 73 et suiv. Voy. aussi Memorandum concernant la Hollande adressé en 1813 aux monarques alliés par le Cabinet de Saint-James, MURHARD, N. S., t. I, p. 326.

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