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1795. elle sont les ministres; inaccessibles aux passions que leur devoir est de réprimer, elles assureront, par une fermeté impartiale, l'effet des sentimens que la clémence nous inspire. » Cette noblesse, qui n'a quitté sa patrie que pour la mieux défendre; qui n'a tiré l'épée que dans la ferme persuasion qu'elle s'armait pour la France, et non contre elle; qui vous tend une main secourable, alors même qu'elle est obligée de vous combattre, qui, aux fureurs de la calomnie, oppose sa constance dans l'adversité, son intrépidité dans les combats, son humanité dans la victoire, son dévouement à l'honneur; cette noblesse qu'on s'efforce de mettre en butte à votre haine, n'oubliera pas que le peuple doit trouver en elle sa lumière, son secours, son appui. Elle mettra sa gloire dans la magna. nimité; elle illustrera tant de sacrifices qu'elle a faits, par le sacrifice de tous ses ressentimens; et cette classe d'émigrés qui sont ses inférieurs par la naissance, mais ses égaux par la vertu ; ces hons Français, dont la fidélité est d'autant plus recommandable à nos yeux, qu'ils avaient plus de séductions à vaincre, témoins non suspects de ses sentimens généreux, en seraient, s'il était nécessaire, les garans auprès de vous..... Qui ose

rait se venger, quand votre roi pardonne?» 1795. De telles dispositions de la part d'un prince qui, avec un cœur moins généreux, aurait eu tant de vengeances à exercer

'eussent

mérité un prompt couronnement. S. M. Louis XVIII devait néanmoins tarder longtemps à régner de fait, comme elle régnait déjà de droit. La chance, à cette époque, semblait, de toutes parts, tourner entièrement contre la royauté.

J'ai laissé les Poitevins obtenant leurs pre- 1793. miers avantages sur les troupes de la convention. Bientôt une partie des habitans de l'Anjou s'étaient associés à leurs nobles projets; les Bretons eux-mêmes essayaient de résister an joug affreux que les factieux, entiè rement maîtres à Paris, depuis la journée du 10 août, voulaient appesantir sur la France entière. Les Vendéens (ainsi nomma-t-on' en général ceux des habitans de l'ouest de la France, qui tentèrent alors de relever le trône et l'autel,parce que leurs premiers mouvemens se firent dans le département de la Vendée) n'avaient pas été longtemps réduits à tendre des piéges à leurs adversaires, et à les vaincre par surprise : bientôt on les vit en état de livrer des batailles rangées, dans lesquelles ils purent mettre trente et quarante pièces de

.

1793. canon en batterie. Cette artillerie était devenue le prix de leur intrépidité: ils l'avaient, dans les premières affaires, arrachée des mains de leurs ennemis, quoique n'étant armés eux-mêmes que de fusils de chasse, de faulx et même de bâtons. On les présenta dans le temps au reste de la France, comme des brigands qui, sans organisation militaire, égorgeaient et pillaient tout ce qu'ils trouvaient d'hommes et de hameaux sans défense on les calomnia. Il se commit dans leurs armées des excès tels que ceux qui se commettent dans toutes les armées, surtout lorsqu'elles sont occupées d'une guerre civile mais le meurtre et le pillage n'y furent jamais des principes professés; et s'ils donnèrent la mort à des prisonniers, ce fut, hélas! quoiqu'à tort, en représailles de l'exécution des décrets positifs par lesquels la convention avait ordonné qu'ils seraient eux-mêmes fusillés aussitôt que pris, et qu'on incendierait les hameaux, les villages, les bourgs, les. villes et même les forêts du pays qu'ils occupaient. Ils obéissaient à des chefs véritables, et plusieurs de ces chefs, qui savaient leur communiquer leurs sentimens, et les plier, jusqu'à un certain point, sous les règles de la discipline, furent des héros.

Ces prétendus brigands ne se croyaient 1793. que fidèles à Dieu et aux antiques lois de leur pays factieusement renversées, et ils mouraient sans regret pour la cause qu'ils avaient embrassée: il n'en fut pas de même. de tous les hommes que la convention employa contre eux...... Le prince de Talmont, l'un des chefs vendéens, dit aux républicains qui le menaçaient après l'avoir fait prisonnier: Je devais servir mon roi, et je ferai voir par ma mort que j'étais digne de défendre le tróne.... Le général républicain Biron, condamné par le tribunal révolutionnaire pour n'avoir pu venir à bout de terminer la guerre de la Vendée, s'écria douloureusement en montant à l'échafaud : J'ai été infidèle à mon Dieu, à mon ordre et à mon roiz je meurs plein de foi et de repentir.

Les prêtres aidèrent à l'armement des royalistes de l'Ouest, et soutinrent plusieurs fois leur constance. On les accuse de les avoir rendus impitoyables et barbares pour les hommes du parti opposé qui tombaient entre leurs mains : il est possible que parmi les prêtres vendéens il se soit trouvé des monstres indignes de leur caractère sacré ; mais il est certain aussi qu'il s'y trouva de saints ministres des autels, qui mirent tous

1793. leurs soins à adoucir les horreurs de la guerre civile, et se servirent même pour cela du penchant que ceux qui les entouraient montraient à la superstition. Dans le commencement de l'insurrectiou, les Vendéens voulaient massacrer tous les républicains dont ils parvenaient à se saisir, pour venger les royalistes et les prêtres égorgés dans les prisons de Paris, ou périssant sur l'échafaud révolutionnaire : la voix des chefs n'était point écoutée. Le vicaire Priou fit allumer des cierges autour de la tombe d'une sainte ; puis posant la main sur la pierre tombale, il s'écria qu'il la sentait se soulever, feignit un moment d'inspiration et défendit aux Vendéens, au nom de la sainte et sous peine d'encourir son ressentiment, de tuer ailleurs que dans les

combats.

Des prêtres, a-t-on dit, ne doivent jamais exhorter à la guerre : les ministres de la Divinité sont les protecteurs nés du pacte social; et ils doivent appeler les gens de bien à sa défense, quand les factieux essaient de le renverser et de le détruire, en même temps que la religion, qui est la base de la morale publique.

Les meilleures troupes de la convention succombèrent dans la guerre civile de l'ouest.

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