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>> reçu du même endroit le coup mortel. Ainsi » l'église romaine est toujours vierge; la foi ro» maine est toujours la foi de l'Eglise; on croit » toujours ce qu'on a cru; la même voix retentit >> partout; et Pierre demeure dans ses succes»seurs le fondement des fidèles. C'est Jésus» Christ qui l'a dit ; et le ciel et la terre passe» ront plutôt que sa parole (1) ».

C'est assez sur les quatre articles dont se compose la Déclaration de 1682; il nous reste à parler de ses suites, et des débats auxquels elle donna lieu.

Lorsque la Déclaration de 1682 eut été mise au jour par le clergé de France, XIV, par Louis un édit du 23 mars de la même année, ordonna que les quatre articles fussent enseignés dans les facultés de théologie, et défendit de rien enseigner qui pût y être contraire. Rome en fut alarmée; elle sembla croire que le clergé de France avoit voulu porter un jugement doctrinal, établir une sorte de règle de foi; tandis qu'il n'avoit fait que manifester plus authentiquement ses opinions, sans condamner, comme des erreurs dans la foi, celles des ultramontains. De là, des différends entre le saint Siége et la France, qui ne furent ap

(1) Disc. sur l'Unité de l'Eglise, Ire. partie.

paisés qu'en 1693. Des ecclésiastiques du second ordre qui avoient assisté à l'assemblée du clergé de 1682, et souscrit la Déclaration, furent nommés à des évêchés : Innocent XI et Alexandre VIII refusèrent de leur accorder des bulles; ce refus donna lieu à des plaintes et à des négociations, qui ne se terminèrent que sous le pontificat d'Innocent XII.

Le nouveau Pontife et Louis XIV, également jaloux de mettre un terme à cette funeste division, se rapprochèrent par des concessions mutuelles. Le Pape demanda une satisfaction de ceux qui avoient signé les quatre articles, avant de leur accorder l'institution canonique. Pour cela, on concerta une lettre, qui fut la même pour tous, mais que chacun écrivit en particulier. Sa Sainteté exigeoit une lettre qui contînt au moins des assurances qu'ils n'avoient pas eu intention de rien définir ni régler, dans cette assemblée, qui pút déplaire au saint Siége. Ce sont les propres paroles de d'Aguesseau (1).

Le Roi ne se refusa pas à ce tempérament. La lettre fut écrite le 4 septembre 1693; elle contenoit, non une rétractation de leurs opinions personnelles, mais un témoignage de la douleur

(1) D'Aguess. tom. XIII, in-4°. pag. 419.

qu'ils avoient ressentie en apprenant celle qu'avoit éprouvée à ce sujet sa Sainteté ; ils lui assuroient en même temps que leur intention n'avoit pas été de faire un décret, ni de porter préjudice aux autres églises. « Peut-on dire, écrit Bos» suet (1), qu'Innocent XII, ce pontife plein » de bonté et d'inclination pour la paix, ait » exigé de nos prélats qu'ils rétractassent leur >> doctrine comme étant ou erronée, ou schis>> matique, ou fausse? Non, puisque nos évê» ques lui écrivirent simplement en ces termes : » Nous n'avons eu aucun dessein de faire une dé»cision ».

De son côté, Louis XIV écrivit à Innocent XII, le 14 septembre 1693, une lettre, dans laquelle il lui marque qu'il consent à ne faire observer les choses contenues dans son pas édit, à quoi les conjonctures passées l'avoient obligé. Cela vouloit dire qu'il rendoit aux écoles la liberté qu'elles avoient, avant l'édit confirmatif de la Déclaration, de débattre le pour et le contre sur les questions de la supériorité du concile et l'infaillibilité du Pape. Cette sage condescen

(1) Dissertation préliminaire de la Défense de la Déclaration du clergé, chap. x.

dance

dance eut l'inestimable avantage de tout pacifier, et n'empêcha pas que l'enseignement des quatre articles ne prévalût sur tous les points dans les écoles de théologie (1).

Si, en dernier lieu, quelques-uns de nos prélats les plus révérés, animés d'un esprit de paix et de conciliation, et se conformant aux désirs du saint Père, lui ont écrit au sujet de ce qui s'est passé depuis le Concordat de 1801, ils n'ont fait qu'imiter l'exemple qui avoit été donné sous Louis XIV; même leur lettre à Pie VII est conçue en termes bien plus mesurés et plus radoucis que celle qui fut adressée à Innocent XII.

Revenons à la Déclaration.

Alexandre VIII, par une constitution du 4 août 1690, put bien improuver la Déclaration du clergé de France, la regarder comme nulle et de nulle valeur; Pie VI, dans sa bulle Auctorem fidei, du 28 août 1794, a bien pu paroître offensé de ce qu'un synode, tenu en Italie en 1786, avoit inséré nos quatre articles dans un décret présenté comme appartenant à la foi; mais c'est

(1) Voyez d'Aguess. tom. XIII, pag. 417-426; et l'Histoire de Bossuet, par M. le Cardinal de Bausset, tom. II, liv. VI.

une chose très-remarquable que jamais le saint Siége n'a flétri la doctrine exprimée dans la Déclaration, ne l'a jamais traitée ni d'erronée, ni de scandaleuse, ni de téméraire. Cette attention de sa part à ne pas censurer notre doctrine, nous avertit d'éviter nous-mêmes tout excès, et de ne pas donner aux opinions étrangères ces dures, qualifications qui annoncent moins de lumières que d'emportement.

D'après ce que nous avons rapporté des démêlés de la France avec Rome, et de la pacification qui enfin les termina; avancer, comme le fait d'Alembert, que Louis XIV, à l'instigation de son confesseur le P. Le Tellier, s'étoit déterminé, sur la fin de ses jours, à faire soutenir dans son royaume l'infaillibilité du Pape, c'est commettre une triple erreur. Louis XIV permit tout au plus de la défendre, permission dont certes on abusa si peu, que la doctrine contraire n'a jamais été plus universellement enseignée en France que depuis cette époque. La lettre de Louis XIV à Innocent XII, qui, suivant l'expression de d'Aguesseau, fut le sceau de l'accommodement, est de 1693, et le P. Le Tellier ne devint son confesseur qu'en 1709. Quand il l'écrivit, il n'étoit pas sur la fin de ses jours;

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