Tu répands ton enthousiasme Tu demandes à l'âpre étude Tu veux voler où vont tes rêves, Et tu te sens, quand tu t'enlèves, Ta bouche abhorre le mensonge, Ton cœur timide aime en silence, Tu souffres d'un mal qui t'honore, Mais vois tes mains, tes pieds, ton flanc : Tu n'es pas un vrai Christ encore, On n'a pas fait couler ton sang; Tu n'as pas arrosé la terre LES DANAÏDES TOUTES, portant l'amphore, une main sur la hanche, Théano, Callidie, Amymone, Agavé, Esclaves d'un labeur sans cesse inachevé, Courent du puits à l'urne où l'eau vaine s'épanche. Hélas! le grès rugueux meurtrit l'épaule blanche, Et le bras faible est las du fardeau soulevé : 46 Monstre, que nous avons nuit et jour abreuvé, O gouffre, que nous veut ta soif que rien n'étanche ?" Elles tombent, le vide épouvante leurs cœurs; Tels sont l'œuvre et le sort de nos illusions: Elles tombent toujours, et la jeune Espérance Leur dit toujours: "Mes sœurs, si nous recommencions!" UN SONGE E laboureur m'a dit en songe : LE Je ne te nourris plus, gratte la terre et sème.' Et seul, abandonné de tout le genre humain Je connus mon bonheur et qu'au monde où nous sommes LE RENDEZ-VOUS Lest tard; l'astronome aux veilles obstinées, Sur sa tour, dans le ciel où meurt le dernier bruit, Les mondes fuient pareils à des graines vannées; Il le somme, et lui dit : Reviens dans mille années." Et l'astre reviendra. D'un pas ni d'un instant Il ne saurait frauder la science éternelle; D'un œil changeant, mais sûr, elle fait sentinelle; LA VOIE LACTÉE AUX étoiles j'ai dit un soir : 'Vous ne paraissez pas heureuses; Vos lueurs, dans l'infini noir, Ont des tendresses douloureuses; "Et je crois voir au firmament "Êtes-vous toujours en prière ? "Vous, les étoiles, les aïeules Vous avez des pleurs dans les yeux . Elles m'ont dit : "Nous sommes seules... "Chacune de nous est très loin Des sœurs dont tu la crois voisine; Dans sa patrie est sans témoin; "Et l'intime ardeur de ses flammes Je leur ai dit: "Je vous comprends! “Ainsi que vous, chacune luit Loin des sœurs qui semblent près d'elle, Brûle en silence dans la nuit." REPENTIR 'AIMAIS froidement ma patrie, J'AIMAIS ma p De son grand renom mérité Je m'écriais avec Schiller: 66 'Je suis un citoyen du monde ; En tous lieux où la vie abonde, Le sol m'est doux et l'homme cher ! "Des plages où le jour se lève "Où règne en paix le droit vainqueur, Où l'art me sourit et m'appelle, Où la race est polie et belle, Je naturalise mon cœur ; "Mon compatriote, c'est l'homme!" Naguère ainsi je dispersais Sur l'univers ce cœur français : J'oubliais que j'ai tout reçu, Et que j'ai goûté dès l'enfance, Dans les yeux qui m'ont caressé, Dans ceux mêmes qui m'ont blessé, L'enchantement du ciel de France! Je ne l'avais pas bien senti; Ces tendresses, je les ramène |