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vient pas dans la fixation de l'indemnité à peine d'excès de pouvoir, il ne doit pas même manifester son opinion personnelle sur les faits de la cause et la façon dont ils sont discutés (Cass., 25 mars 1873, D. 73.1.179). Il a seulement la police de l'audience et la direction des débats qu'il clôturera quand le jury le demandera; c'est lui enfin qui donne force exécutoire à la décision fixant l'indemnité.

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(No 82.) Doivent être mises par ses soins sous les yeux des jurés toutes les pièces propres à les éclairer, spécialement (L. 1841, art. 37), le tableau des offres et des demandes ainsi que les plans parcellaires et les titres ou tous autres documents produits par les parties, à peine de nullité du règlement de l'indemnité (Cass., 5 août 1889, D. 91.1.87; 8 fév. 1897, D. 97.1.222). Le moment de cette remise n'est pas fixé par la loi, mais elle doit évidemment, pour être utile, précéder la discussion à l'audience (Cass., 13 août 1889, D. 91.1.40) et il en sera fait mention au procès-verbal.

302. (Nos 83, 84.) Le jury joue le rôle d'un tribunal d'arbitrage forcé. Il rendra un jugement,

par la loi du 21 mai 1836, qui associe le magistrat aux travaux du petit jury.-De son côté, M. Ducrocq, t. III, nos 1256, 1268, 1270, juge sévèrement la procédure de fixation de l'indemnité et même l'institution du jury en la matière. Il cite un certain nombre de projets et de propositions de lois, déposés en 1886, 1888, 1890, 1891, 1895, très dissemblables d'ailleurs, mais s'accordant en ce point qu'ils réclament tous, les uns à titre obligatoire, les autres à titre facultatif, une expertise contradictoire entre l'expropriant et l'exproprié pour éclairer le jury.

1. Les opérations du jury doivent être annulées si l'un de ses membres fait connaître son opinion au cours de l'instance (Cass., 8 mars 1897, D. 97.1.415).

donc il va y avoir discussion publique. Mais ce sera un arbitrage, d'où les règles ordinaires de la procédure sont écartées. Le débat a lieu entre l'expropriant d'une part, et d'autre part les intéressés qui se sont fait connaître en temps utile, même s'il ne leur a pas été fait d'offre ou si l'administration conteste leurs droits; dans la dernière hypothèse, le magistrat directeur ne peut connaître de la difficulté, le jury règlera hypothétiquement l'indemnité, sauf aux tribunaux judiciaires à en vérifier plus tard le bien fondé. Les parties interviennent en personne ou par un mandataire quelconque, homme d'affaire, avocat, avoué; mais l'intervention des avoués en cette qualité n'est pas admise. Jusqu'à la décision du jury, les conclusions peuvent être modifiées, les offres de l'administration restreintes, comme la demande de l'exproprié changée ou augmentée. Seulement si, par suite des dénonciations et déclarations de l'expropriant relativement à certaines éventualités, il n'est plus possible de maintenir les bases déterminées pour l'indemnité par le jugement d'expropriation, le magistrat directeur renverra l'affaire. à une session ultérieure.

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(Nos 85, 86.) Toutes mesures d'instruction utiles sont ordonnées souverainement par le jury à un moment quelconque des débats 2. Non qu'il

1. A l'exception toutefois d'un propriétaire exproprié, car la loi l'autorise par ailleurs à poursuivre le règlement de l'indemnité dans les six mois du jugement si l'administration reste inactive (Cass., 1er juill. 1884, D. 86.1.15).

2. Jamais deux jurys constitués pour statuer sur des affaires différentes ne peuvent délibérer ensemble, fût-ce pour prescrire une mesure d'instruction comme une visite de lieux,

les

puisse prescrire une expertise ou une enquête conformément au texte du Code de procédure civile, car ce serait revenir aux coûteuses lenteurs de la loi de 1810. Mais il peut prendre des renseignements où il veut, consulter des personnes ayant des connaissances spéciales, entendre des témoins, faire une visite des lieux expropriés ou déléguer à cet effet quelques-uns de ses membres (L. 1841, art. 37, § 4 et 5); les parties doivent, à peine de nullité, être avisées d'une telle visite et mises ainsi à même d'y assister, les jurés désignés pour la faire (tous, s'il n'y a pas eu délégation de quelques-uns seulement) y seront présents. Les mesures d'instruction étant décidées par le jury, c'est le magistrat qui rend la décision exécutoire, mais il n'est nullement tenu, pas plus que le greffier, d'assister à la visite des lieux (Cass., 21 mars 1877, D. 78.1.437); s'il peut au reste inviter les jurés à recourir à un tel procédé, il excèderait ses pouvoirs en le prescrivant de lui

même.

(No 87.) -Toutes les opérations du jury sont publiques ainsi que la discussion, et le procès-verbal doit, à peine de nullité, faire mention de cette publicité (Cass., 12 juin 1883, D. 83.1.400). Il n'y a pas d'ailleurs de termes sacramentels imposés et cette constatation résultera au besoin de l'ensemble des énonciations dudit procès-verbal, alors surtout qu'il emploie le mot audience et que les débats ont eu lieu dans une salle où se rend d'ordinaire la

immeubles étant contigus. L'acte accompli en commun serait nul, d'une nullité d'ordre public insusceptible d'être couverte par le silence des parties (Cass., 5 avr. 1885, D. 86.1.470).

justice. La Cour suprême trouve par exemple une preuve suffisante de la publicité des débats dans ces deux énonciations que les débats ont eu lieu à l'audience et que la séance publique a été reprise pour la lecture de la décision du jury (Cass., 21 mars 1887, D. 88.1.276); cette publicité ne se déduirait pas au contraire de la constatation que le jury s'est réuni dans la salle des délibérations du conseil municipal ou de la mairie (Cass., 12 juin 1883, D. 83.1.400).

Les observations présentées par les parties ou leurs fondés de pouvoirs seront sommaires et dégénèreront le moins possible en véritables plaidoiries. Néanmoins, l'affaire ne se terminera pas toujours en un jour. En principe, elle devra être alors reprise à la plus prochaine séance dont le jour et l'heure sont indiqués aux parties et mentionnés au procèsverbal. Parfois même, les besoins de l'instruction, la nécessité d'une visite des lieux par exemple, exigent l'ajournement d'une instruction commencée quand cela devient nécessaire, rien n'empêche le jury de procéder dans l'intervalle à l'examen et au jugement d'autres affaires (Cass., 11 août 1891, D. 92.1.535).

303. (N° 88.) Quand le jury estime que la cause est entendue, le magistrat directeur prononce la olôture des débats (L. 1841, art. 38). Les jurés ont la faculté (mais non l'obligation) de poser des questions, et il résulte des travaux préparatoires à la loi du 3 mai 1841 qu'ils sont invités à en user toutes les fois que la complication d'une affaire le demande. En tous cas, les parties ont le droit de discuter

la formule des questions et de prendre des conclusions pour que telle ou telle soit posée. Qu'il y ait ou non position de questions, le jury doit statuer sur tous les chefs de demande qui lui sont soumis et ne statuer que sur ceux-là.

(N° 89.) Immédiatement après la clôture prononcée, les jurés se retirent dans leur chambre et délibèrent << sans désemparer 1, sous la présidence de l'un d'eux qu'ils désignent à l'instant même » (ibid., art. 38, § 2), s'ils ne l'ont fait déjà plus tôt, au moment de prendre une décision préparatoire par exemple. Aucune forme particulière n'est prescrite pour la désignation du président, qui n'exige pas une délibération proprement dite (Cass., 25 mai 1881, D. 84.5.262) et peut même, d'après la jurisprudence, se faire à l'audience.

(Nos 90-92.) La délibération relative à l'indemnité doit être secrète. Ont seuls qualité pour y prendre part les jurés portés sur la liste de jugement qui ont assisté à tous les actes de l'instruction; la décision serait frappée d'une nullité d'ordre public, à laquelle aurait participé une personne étrangère au jury, le magistrat directeur (Cass., 1er août 1888, D. 89.1.160), ou un juré n'ayant pas assisté à toutes les opérations (Cass., 5 avr. 1886, D. 86.1. 470). Toute communication avec les tiers est entre temps interdite aux jurés soit donc qu'ils sortent de la salle des délibérations pour chercher

1. Néanmoins la délibération peut être suspendue pour un motif légitime, un repos par exemple après une très longue séance, s'il n'y a aucune communication des jurés avec les parties ou leurs conseils (Cass., 25 août 1884, D. 85.1.468).

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