Page images
PDF
EPUB

des cultes reconnus; mais ils ne sont pas atteints, en général du moins, par les incapacités ou incompatibilités qui frappent ces derniers, notamment au point de vue des fonctions électives. Certains cultes non reconnus obtiennent cependant du Gouvernement une autorisation générale toujours révocable qui met leurs membres à l'abri des articles du Code pénal relatifs au délit d'association : tel le culte catholique gallican autorisé par décret du 3 décembre

1883.

35. (N° 190.) Nous traiterons successivement, ainsi que l'a fait M. Dufour, de l'organisation des cultes et du recours pour abus.

SECTION I

ORGANISATION DES CULTES RECONNUS1

(Duf., t. V, nos 191-224, t. VI, nos 226-228, 232-238.)

Article I. Culte catholique.

(Duf., t. V, nos 191-217, t. VI, nos 226-228, 232-238.)

[ocr errors]

36. (Nos 191-193.) Les règles générales sur l'organisation du culte catholique sont résumées dans la loi du 18 germinal an X. La première partie de ladite loi est constituée par le texte approuvé du concordat conclu le 26 messidor an IX entre

1. Pour nous conformer à l'ordre adopté par M. Dufour, nous aborderons seulement ici les questions relatives au culte dont s'est occupée la législation concordataire, faisant ainsi abstraction de tout ce qui a trait aux congrégations religieuses. Nous renvoyons d'autre part au chapitre des Fabriques nos développements sur la propriété ecclésiastique.

par

l'Église et l'État et la seconde les articles organiques, œuvre du seul État qui a toujours déclaré, malgré les protestations de l'Église, avoir exercé ainsi son droit de souveraineté inaliénable et imprescriptible. M. Dufour, invoquant le témoignage de Portalis, affirme que, s'il est de son devoir de protéger la religion, l'État a le droit de maintenir l'indépendance du pouvoir temporel dans sa sphère; le principe est certain, mais aussi il ne faut pas hésiter à dénier à l'État la faculté de s'immiscer dans le gouvernement de l'Église, soit pour en entraver le libre développement, soit pour s'en faire un instrument de pouvoir. Or, les articles organiques outrepassent incontestablement les droits de la société civile. Constituant un véritable code de discipline ecclésiastique, prescrivant même dans les séminaires un enseignement condamné par l'Église, ils ont un double tort: celui de violer la convention synallagmatique dont ils sont l'accessoire et qu'ils contredisent au besoin 2; celui aussi de faire revivre une législation surannée qu'expliquait, sans la justifier, sous l'Ancien Régime, l'existence d'une religion d'État, mais qui devenait incompatible avec l'état social moderne issu de la Révolution. Le Concordat du 26 messidor an IX établit l'union de l'Église et de l'État sur des bases absolu

1. Les 4 articles de la célèbre déclaration de 1682 (Art. 24). 2. Confer, par exemple, les art. 9 du Concordat et 69 des organiques, 12 du Concordat et 75 des organiques, 15 du Concordat et 73 des organiques, 16 du Concordat et 23, 25 des organiques. D'autres dispositions des organiques, notamment les art. 6-8, 24-26, 39, ajoutent au texte du traité.

ment nouvelles, puisque la religion catholique n'est plus religion d'État; les articles organiques s'inspirent des principes du gallicanisme parlementaire et confèrent au pouvoir civil désormais laïcisé, non seulement une liberté sans contrôle en matière temporelle, mais encore la faculté, dont se prévalaient les rois en qualité d'évêques du dehors et de défenseurs nés de la foi, de maintenir, fût-ce contre une décision du pape, les règles de doctrine religieuse admises en France, les libertés, franchises et traditions gallicanes. Il est donc impossible d'affirmer qu'il y ait entre les deux parties de la loi du 18 germinal an X unité de conception. En présence des principes nouveaux posés par le Concordat, les articles organiques constituent un véritable anachronisme et l'on conçoit parfaitement que l'Église catholique les ait toujours réprouvés comme l'œuvre subreptice d'une partie contractante seule, allant d'ailleurs parfois à l'encontre de ses droits certains.

D'après les articles organiques, en somme, l'État s'est attribué un rôle prépondérant de surveillance dans l'organisation et l'exercice du culte. Il a trouvé dans leur texte, habilement interprété au besoin, des armes précieuses contre l'Église catholique au jour où les idées religieuses ont été vues avec défaveur par les gouvernants. Cette persécution administrative plus ou moins masquée a rendu la situation délicate pour l'Église; mais l'État en souffre plus encore à raison du trouble profond et des divisions qu'elle a jetés dans les esprits.

37. — Pour justifier l'élaboration par le seul État

des articles organiques contrariant sur certains points le concordat, on a dénié à celui-ci le caractère d'un véritable traité : le pape, dit-on, parlait au nom des catholiques français, non comme Chef d'État, or une puissance ne traite pas avec ses propres sujets. Il y a là une erreur. Que les concordats ne soient pas des traités internationaux, je l'accorde ', car ils règlent non des relations internationales mais des questions d'ordre intérieur. Ce sont cependant des traités diplomatiques ou tout au moins des conventions publiques obligatoires, car ils sont passés entre deux parties indépendantes, la société religieuse et la société civile, celle-ci ne pouvant entreprendre sur la conscience des citoyens 2. Pour les abroger donc ou les modifier régulièrement, une loi intérieure du pays est insuffisante, il faut. une dénonciation au contractant. L'art. 17 du Concordat de 1801 le dit d'ailleurs formellement.

En tous cas, la situation du culte catholique

1. Et cette conséquence en découle naturellement que, n'ayant pas été conclus à raison de la puissance temporelle du pape, ils ne sont pas atteints par la disparition de cette puissance.

2. Sic Heffter, Le droit international de l'Europe, § 40. Pradier Fodéré, Traité de droit international public, t. III, n° 1028. Bonfils, Manuel de droit international public, p. 488. Hauriou, op. cit., p. 76. Calvo, Droit intern., I, 645. E. Ollivier, Manuel de droit ecclésiastique. Mgr Turinaz, Les concordats et l'obligation réciproque qu'ils imposent à l'Église et à l'tat, 1897.- La question et les problèmes qu'elle soulèves ont largement exposés dans un article de M. G. Cahen, De la nature juridique du Concordat, Rev. du droit publ., t. X, p. 220 et suiv., 1898. Voir aussi abbé Duballet, Cours complet de droit canonique, t. III, nos 1679 et suiv.

en France est encore aujourd'hui, en droit tout au moins, régie par la loi composite du 18 germinal de l'an X.

38.

§ I. Rapports généraux de l'Église

[ocr errors]

et de l'État.

(Duf., t. V, nos 192, 194-196, 198.)

A ce point de vue, le Concordat consacre la situation de fait née de la Révolution. La religion catholique n'est plus déclarée religion d'État, mais seulement religion de la majorité des Français. Le nouveau gouvernement est reconnu par le Saint-Siège qui lui confère les prérogatives diplomatiques accordées à l'ancienne royauté française (art. 16, 17); et tous les deux font alliance pour assurer le rétablissement de la religion (art. 1er). Les ministres du culte catholique devront prêter serment de fidélité au gouvernement établi 2 et réciter à son intention une prière à la fin de chaque office (art. 6, 8). L'Église, en outre, s'engage dans l'intérêt de la paix à respecter les aliénations faites des biens à elle appartenant avant 1789 et à ne pas troubler les consciences des acquéreurs (art. 13). Comme

1. A cela se réduit la portée de l'art. 16 du Concordat. Le Conseil d'État, après un avis contraire donné le 26 avril 1883, l'a reconnu implicitement en n'invoquant pas ce texte dans ses arrêts consacrant au profit du ministre le droit de suspendre le traitement des ministres du culte (Cons. d'État, 1er fév. 1889, Sailhol et Glena).

2. La formalité du serment a été abolie par le décret du 1er mars 1848. Rétablie le 26 nov. 1855 avec une nouvelle formule, elle a disparu depuis le décret du 5 sept. 1870.

« PreviousContinue »