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AMÉRICAINES ET FRANÇAISES

SUIVIES

D'UN RÈGLEMENT PARLEMENTAIRE, DES TRAITÉS DE 1814 ET 1815,
DES CAUSES DE LA RÉVOLUTION DE 1848,
DES DERNIÈRES SÉANCES DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS,
DES DÉCRETS DU GOUVERNEMENT PROVISOIRE,
DE LA SITUATION FINANCIÈRE,

DE LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE, ETC.

précédées

DE CONSIDÉRATIONS SUR L'ÉTAT SUCCESSIF DES PERSONNES
ET DES PROPRIÉTÉS,

SUR LES RÉVOLUTIONS ET CONSTITUTIONS NATIONALES,
D'UN RÉSUMÉ DES CONSTITUTIONS SUISSES,
DE QUESTIONS SOUMISES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE, ETC.

PAR J.-B.-J. PAILLIET

Conseiller à la Cour d'appel d'Orléans, auteur du Manuel du Droit français.

Legum, idcircò, omnes servi sumus ut liberi
esse possimus. (Cic. Or. pro A. Cluentio.)

PARIS

ALPHONSE DELHOMME, LIBRAIRE

RUE DU PONT DE LODI, 3

-

KC 3690

HABYARD COLLEGE LIBRARY

BY EXCHANGE

Jul, 271942

PARIS.

IMPRIMERIE CLAYE ET TAILLEFER,

Rue Saint-Benoît, 7.

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La conquête introduisit parmi les hommes la confiscation et l'esclavage. Dépouiller et asservir les vaincus, fut trop longtemps reconnu comme le droit du plus fort. Consolider la spoliation et l'asservissement fut,, dans l'antiquité, la base de toutes les institutions. La violence disposa des destinées humaines. L'histoire nous présente, chez tous les peuples anciens, la minorité de la race, libre, jouissant de tous les avantages de la société; la majorité, esclave, faisant partie des choses, travaillant pour le compte d'un maître, sans pouvoir acquérir. Cette odieuse inégalité dura. des milliers d'années et n'est pas encore partout détruite. Des républiques américaines ont des esclaves comme la vieille Grèce et l'ancienne Rome; l'Inde a ses parias, la Russie et l'Allemagne ont des serfs. Les castes privilégiées et les droits exclusifs forment encore la législation d'une grande partie de l'Europe.

Depuis l'établissement du christianisme, toutes les révolutions qui agitèrent le monde, tendirent à l'amélioration de la condition de la majorité humaine. Tout concourut à ce grand résultat un culte qui procla→

mait l'égalité des hommes devant Dieu, et faisait de l'amour du prochain son principal commandement; l'intérêt des grands possesseurs de terres et d'esclaves; l'intérêt des rois qui souvent eurent besoin de l'appui des masses populaires; le mouvement social qui, progressivement, révélait à ces masses opprimées, la dignité et les droits de l'homme.

Elles eurent d'abord à conquérir les avantages matériels de la vie que l'esclavage leur refusait. Elles les obtinrent en partie par la propagation des mœurs chrétiennes qui améliorèrent l'existence des esclaves et multiplièrent les affranchissements, surtout par la féodalité qui institua le servage, servitude moins pesante.

On concéda précisément aux serfs des portions de terre, à condition, tantôt de rendre une portion de fruits au seigneur, tantôt de travailler un certain nombre de jours par semaine à la culture de ses champs. Plus tard, on observa qu'à surface égale, les terres des serfs rapportaient plus que celles des seigneurs. On en trouva la cause dans la puissance de l'intérêt privé, et l'on établit la culture à moitié fruits. Alors de nombreuses portions de terre furent réparties entre les familles serves. Les propriétaires firent des avances en bétail, en chevaux, en instruments aratoires, et demandèrent une quantité déterminée de fruits.

Ces conventions conservaient au seigneur la propriété du fonds. Les serfs attachés à la terre, regardés comme en faisant partie, mis au nombre des possessions féodales, revendicables lorsqu'ils s'établissaient

ailleurs, ne pouvaient disposer que des fruits qui leur étaient abandonnés pour soutenir leur existence et élever leur famille. A leur mort, la totalité ou partie de leur succession qui ne pouvait être que mobilière, appartenait au seigneur.

Les besoins ou la bienveillance des seigneurs ayant multiplié les affranchissements qui se vendaient, les affranchis devinrent une classe intermédiaire entre le serf et le seigneur. Libres, ils travaillèrent pour euxmêmes, purent acquérir, conserver et transmettre. De nouveaux contrats s'établirent; l'ouvrier reçut un salaire qui paya son travail, récompensa son activité, encouragea son intelligence; des terres furent aliénées, moyennant des redevances en nature ou en argent. Le salaire et le contrat de rente foncière rendirent les affranchis propriétaires; les métiers exercés et les terres cultivées par des mains libres, répandirent sur le pays une prospérité inconnue. La petite et la moyenne propriété s'élevèrent à côté de la grande. Elles étaient, à la vérité, grevées comme les personnes de charges multipliées, lourdes, humiliantes; mais elles parurent alors tolérables à des hommes récemment affranchis, qui en avaient supporté de plus dures. La liberté est un bien si précieux qu'on ne dispute pas sur le prix.

Une révolution nouvelle se prépare. Une grande partie de la population serve est affranchie. De riants villages se groupent autour du château ou du monastère seigneurial; plus loin, des cités laborieuses s'élèvent. Le commerce rapproche, éclaire les hommes, ajoute à leur bien-être. Les lumières ét l'aisance se

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