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pable. Il suit encore de là qu'en cas d'inconduite, de désobéissance, ou d'inexécution des engagements de l'apprenti, le maître est bien fondé à lui adresser des représentations, des reproches même, et à lui demander toutes les réparations que la justice et l'équité ad

mettent.

>> Mais ces droits du maître ont des limites.

» Les travaux et services qu'il a le droit d'exiger de l'apprenti doivent se renfermer dans les pratiques et les besoins de la profession, sauf quelques exceptions introduites par l'usage, et qui consistent dans l'ouverture, la fermeture et le rangement de l'atelier, du magasin et de la boutique, la préparation et le rangement des outils. Quelques maîtres exigent de leurs apprentis et de jeunes filles particulièrement, qu'ils leurs rendent certains services de ménage. Pour notre compte, nous croyons qu'il y a là une déviation du contrat. Le maître obtiendra facilement de la complaisance de l'apprenti ce qu'il pourrait être dangereux d'ériger en droit, et de son côté, celui-ci y trouvera d'utiles compensations en égards et en petits profits.

» Des courses pour commissions d'ateliers ou ports de matières, d'objets fabriqués, etc., entrent aussi dans la profession; mais il ne faut pas que les courses soient trop longues et les fardeaux trop lourds, car

l'apprenti n'apprendrait rien et sa santé pourrait en souffrir. Parmi ces courses obligées, l'usage général a placé quelques actes de complaisance envers les ouvriers de l'atelier, tels que l'achat de leur déjeuner, de rafraîchissements, etc. Et, du reste, ceux-ci reconnaissent souvent ces petits services en leur donnant eux-mêmes des services et des soins.

>> Le maître doit user du droit coercitif avec une grande réserve. S'il peut infliger à l'apprenti de légères punitions, telles que des retenues dans les jours de sortie, il lui est défendu d'user envers lui de mauvais traitements, de le frapper, de lui refuser une partie de sa nourriture ordinaire, de lui en donner une moins substantielle, de lui retirer une portion des heures destinées au sommeil ou au repos, d'employer, en un mot, des moyens de correction qui pourraient nuire à son caractère autant qu'à sa santé. Les moyens de répression doivent s'arrêter là, par deux raisons sans réplique l'humanité le veut; et il reste toujours au maître une autre voie qui est encore plus sûre, celle du recours à la justice.

» Avant de recourir aux moyens sévères, le maître doit provoquer l'intervention des père et mère, tuteur ou patron de l'apprenti: ceux-là, et surtout les père et mère, ont en main une autorité plus puissante.

» L'apprenti répond envers le maître des détériorations 'qu'il a causées à la matière première ou à la pièce d'ouvrage que celui-ci lui a confiée, s'il y a malveillance ou même faute et négligence impardonnable de la part de l'apprenti.

» Le maître peut être lui-même responsable des faits de son apprenti envers les tiers (art. 1384, Code Napoléon, § 4), et dans ce cas encore il a son recours contre ce dernier, suivant le principe que nous venons d'indiquer.

» Il en serait autrement dans ces deux hypothèses, si le fait de l'apprenti pouvait s'excuser par son inhabileté ou par une étourderie naturelle à son âge. Le maître aurait à se reprocher alors d'avoir imprudemment placé en lui trop de confiance.

» L'apprenti répond envers son maître et sans excuse possible, de ses infidélités, parce qu'elles constituent un véritable délit.

>> Lorsqu'il se rend coupable d'un manquement grave envers lui, l'apprenti pourra être traduit en simple police et puni d'un emprisonnement.

>> Lorsque le maître s'est engagé à loger et à nourrir l'apprenti, il est tenu de le coucher sainement et seul, de lui fournir une nourriture substantielle et suffisante.

» S'il s'est engagé à le blanchir, il doit lui remettre du linge blanc une fois par semaine au moins.

» Si l'apprenti tombe malade et que l'indisposition dure quelques jours seulement (trois ou huit jours au plus), nous croyons que le maître est obligé de le faire soigner chez lui; mais les dépenses de médicaments et de médecin sont à la charge de l'apprenti, s'il n'y a convention contraire.

» Si le maître a des apprentis des deux sexes, il doit les tenir dans des ateliers séparés, et, à plus forte raison, éloigner les filles apprenties des hommes ouvriers.

» Lorsque le maître ne loge point l'apprenti, on conçoit que ses obligations sont moins étroites sous les rapports moraux, puisqu'il ne se trouve plus à portée de le surveiller en dehors de sa maison ou de ses ateliers. Il est de son devoir au moins de le guider par ses conseils et d'avertir ses parents, si la conduite de l'apprenti inspire quelques inquiétudes.

» En résultat, il est très-important, pour prévenir les difficultés et assurer d'autant mieux la bonne exécution du contrat, que tous les droits et obligations respectifs des parties soient stipulés substantiellement dans le contrat. Il ne restera que trop d'incidents imprévus et impossibles à prévoir1. >>

Mollot, de la Justice industrielle (le contrat d'apprentissage).

LOI SUR LES CONTRATS D'APPRENTISSAGE

Promulguée le 4 mars 1851.

TITRE Ir. DU CONTRAT D'apprentissage.

SECTION 1re. De la nature et de la forme du contrat.

Art. 1er. Le contrat d'apprentissage est celui par lequel un fabricant, un chef d'atelier ou un ouvrier s'oblige à enseigner la pratique de sa profession à une autre personne qui s'oblige en retour à travailler pour lui, le tout à des conditions et pendant un temps con

venus.

Art. 2. Le contrat d'apprentissage est fait par acte public ou par acte sous seing privé.

Il peut aussi être fait verbalement; mais la preuve testimoniale n'en est reçue que conformément au titre du Code civil Des contrats ou des obligations conventionnelles en général.

Les notaires, les secrétaires des conseils de prud'hommes et les greffiers de justice de paix peuvent recevoir l'acte d'apprentissage.

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