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Le Gouvernement monarchique est un principe restaurateur pour les nations épuisées par les discordes civiles. Rome, la France, l'Angleterre n'ont pas de plus belles époques que les règnes d'Auguste, de Charles VII, d'Henri VII, d'Henri IV, et les premières années de Louis XIV et de Charles II. Quel autre Gouvernement auroit assez de force et de vigueur, pour contenir les factions? Quel autre qu'un monarque seroit assez puissant, pour oser pardonner à tant de coupables, pour prendre confiance dans leur repentir, et leur en faire prendre dans sa clémence? Quelle autre main, que la main paternelle d'un roi, peut toucher à des plaies si profondes et si douloureuses? Et pour me servir d'une belle expression de l'Ecriture sainte, comment l'ordre et la paix se rétabliront-ils, dans un Etat bouleversé de fond en comble, sans l'intervention d'une providence royale? Videbat enim sine regali providentia impossibile esse pacem rebus dari.

De quelque manière que se modifient les principes de la Révolution, on ne peut jamais en attendre la paix domestique. La République française sera toujours déchirée par deux partis irréconciliables, la faction

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réguante, qui s'efforcera d'anéantir cette souveraineté du peuple, ce droit d'insurrection. qui peuvent la renverser du trône, encore plus facilement qu'ils ne l'y avoient placée, et le parti de l'opposition qui ne cessera d'invoquer ces principes désorganisateurs, pour s'emparer de la puissance publique, S'il arrivoit que, dans une société composée d'élémens si discordans, il s'établît un état de calme et de repos, ce seroit le repos de l'abattement et du désespoir. Ce seroit la paix que donnent les tyrans. Ubi solitudi nem faciunt, pacem appellant. (*) Robes pierre, après avoir décimé la Convention, les Triumvirs, après avoir détruit le corps législatif, se vantoient d'avoir pacifié la France.

Tant que subsistera le gouvernement actuel, la France ne doit pas espérer de paix avec les nations étrangères. Une rcpublique puissante, fût-elle sagement constituée, et solidement affermie, ne peut conserver la paix domestique, que par des guerrés extérieures. Le Sénat romain" ne connoissoit d'autre moyen de prévenir, ou de calmer les séditions, que de proposer une guerre. Quand elle n'eut plus d'ennemis ** Tacite.

combattre, Rome se déchira de ses propres mains.

Mais, ce n'est pas seulement comme république que la France est condamnée à des guerres éternelles. Les principes avoués, et l'intérét de ceux qui la gouvernent la mettent en état de guerre permanent avec toutes les nations de l'univers. La République française se croit appelée à étendre, par la force de ses armes, l'empire de la liberté et de la philosophie, comme Mahomet se disoit envoyé du ciel, pour propager la religion des croyans; et le fanatisme musulman n'étoit ni plus ardent, ni plus redoutable que le fanatisme jacobin. Il n'est plus besoin de conjectures et d'inductions, pour pressentir les vues du Gouvernement français: il les a révélées lui-même à toute l'Europe, il les a notifiées à toutes les Cours. Le langage diplomatique du Directoire, les réponses de ses ministres, les harangues de ses ambassadeurs sont des manifestes contre tous les Souverains, et contre tous les Gouvernemens. Le Directoire se proclame hautement l'ennemi de touto nation, qui ne recevroit pas de sa main une Constitution dótestée dans le pays qui l'a vu naître, et qui en a fait le premier eesai. Bien autrement

dangereuse que ces princes que l'on accusoit de prétendre à la monarchie universlle, la République française n'aspire à rien moins qu'à fonder l'anarchie universelle sur les ruines de l'ordre social.

A l'influence des principes et du fanatis'me, se joint l'intérêt des chefs. Tout démontre que le Directoire ne veut point la paix. Plus d'une fois il a pu terminer glorieusement une guerre encore plus funeste à la France victorieuse, qu'à ses ennemis. Jamais il n'a voulu se prêter à une paix générale, et il n'a consenti à des traités séparés, que pour tromper les puissances, et se ménager des moyens et des occasions de les détruire, après les avoir affoiblies. Le Directoire a besoin de la guerre. Elle lui fournit un prétexte de dilapidations, de vexations, de mesures révolutionnaires: elle détourne l'attention des Français de ce qui se passe au milieu d'eux, et par un sentiment peu raisonné d'honneur national, elle forme une sorte de ralliement autour de ceux qui en préparent les succès: elle retient chez l'Etranger ces armées qui, de loin, protégent par l'éclat de la victoire le Gouvernement qui les soudoie, qui, de près, l'inquiéteroient

à

par les prétentions des soldats, par l'am-bition des généraux. Que n'auroit pas craindre le Directoire, si, rendus au repos et à la réflexion, si, mêlés à leurs concitoyens et témoins de leur misère, ces braves militaires venoient à reconnoître que, sous les drapeaux de la liberté, ils n'ont combattu que pour la tyrannie?

Le gouvernement monarchique est donc le seul qui puisse délivrer la France des guerres domestiques, et des guerres étrangères. Mais, si l'on veut enfin mettre un terme aux révolutions, si l'on veut asseoir la tranquillité publique sur une base solide et éprouvée, il ne suffit pas de relever le trône, il faut y placer celui que la loi y appelle. Son droit incontestable et universellement reconnu let désigne à la France et à l'Europe, écarte tous les compétiteurs, éteint toutes les espérances, et jusqu'aux désirs de l'ambition. Lui seul n'a pas besoin d'élection pour régner: il est élu depuis plus de huit cents ans.. Tout autre choix ne seroit que l'ouvrage `d'une faction, l'époque d'une révolution nouvelle, le signal de la guerre civile. Il est prouvé par les principes, il est démontré par les faits, que les Français ne peuvent se

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