pas L'é se laisse prendre sa chasse, n'est gal de celui qui l'emporte. (*) " Comme l'état de nature n'admet ni loi positive, ni juge commun, les droits s'y mesurent par les besoins et par les facultés. Des besoins plus nombreux, des facultés plus parfaites donnent des droits plus étendus. J'avoue que la supériorité des forces du corps et des qualités de l'esprit ne constitue pas le droit de commander; mais elle établit un empire de fait, et prépare l'empire de droit, en faisant sentir au plus foible qu'il est de son intérêt de se soumetParmi des êtres libres dont les passions se croisent et se heurtent sans cesse, l'inégalité physique ne produiroit que violence et oppression, si elle ne se convertissoit en inégalité morale et conventionnelle. De là l'institution des sociétés politiques, formées par l'abandon volontaire que chacun a fait d'une partie de ses droits naturels, pour s'assurer la jouissance paisible de ce qu'il s'en réservoit. tre. Mais, avant que des familles et des peuplades se fussent unies sous un Gouvernement comniun, il existoit des conventions (*) Raynal. hist. politiq, et philos. des deux indes. L. 18. expresses ou tacites qui fixoient les droits de chacun, non selon le principe d'une égalité que démentoit la nature, mais d'après l'ascendant que donnent nécessairement la force et le génie, lorsque leur action n'est pas réprimée par l'autorité des lois. J'ai dit que, dans l'état de nature, l'égalité existoit de droit: mais je n'ai pas voulu dire qu'il y eût égalité de droits entre tous les individus. Dans l'état de nature même, et antérieurement à toute convention, il existe une veritable société, la société domestique, laquelle ne peut se maintenir, que par la diversité, et l'inégalité des droits. C'est la nature elle-même qui soumet la femme à l'homme, les enfans aux parens, l'imprudence de la jeunesse, à l'expérience des vieillards. Tous les hommes naissent dans l'état de dépendance. L'obéissance est le besoin encore plus que le devoir du premier âge. Les familles, comme les sociétés politiques, supposent essentiellement autorité et soumission. En deux mots, l'état de nature n'admet pas l'égalité de fait, et il n'admet l'égalité de droit qu'entre les chefs des différentes familles. L'égalité de droit a lieu aussi entre les Souverains, ou les chefs des différentes nations, parce qu'ils sont entre eux dans l'état de nature. Mais il est absurde d'en faire la base de la société civile qui réunit tout un peuple, comme une seule famille, sous l'autorité paternelle du Souverain. Les sociétés politiques n'ont été insti tuées, que pour corriger et amortir cette prodigieuse inégalité qui résulte de la différence des qualités personnelles. Dans l'état de nature, les hommes isolés et abandonnés à leurs propres forces, avoient des droits, sans les moyens de les faire valoir. Dans l'état de société, les droits de chacun sont assurés par la garantie de tous. la garantie de tous. L'établissement des lois et des Gouvernemens a fait disparoître, en quelque sorte, l'inégalité naturelle, en introduisant l'inégalité politique, moins fâcheuse, plus favorable à la liberté de tous, et tendant à établir, parmi des êtres si inégaux, toute l'égalité dont ils sont susceptibles. Je veux parler de l'égalité civile, laquelle s'établit et se maintient par l'inégalité politique. En tout ce qui se rapporte à la sureté personnelle, au droit de propriété, à l'usage innocent et légitime des facultés naturelles, tous les membres de la société sont égaux en droits. Ils ne le sont pas, en ce qui se rapporte à l'organisation et au Gouvernement de la société. Ils sont égaux dans l'ordre civil, inégaux dans l'ordre politique. Une protection égale pour toutes les personnes, et pour toutes les propriétés, voilà le droit qui, dans un Etat constitué, appartient à tout citoyen, Ce droit, en vertu du pacte social, est soutenu par la force publique, et sous ce rapport, l'homme le plus foible devient l'égal du plus fort. Telle est l'égalité civile fondée sur l'universalité et l'impartialité de la loi, qui assure à tous un droit égal à ce qu'ils tiennent ou de la nature, ou de leurs ancêtres, ou de leur industrie, c'est-à-dire, un droit égal à des biens inégaux. L'état de société ne demande rien de plus, à moins que, détruisant tout principe de justice, et toute idée de propriété, pour atteindre à l'égalité absolue, on ne veuille introduire la communauté des biens. Mais ce système que l'on a vu se réaliser dans des corporations peu nombreuses dont les membres, soutenus par une vertu surnaturelle, renonçoient à toutes les affections hu › maines, il seroit insensé de vouloir le transporter dans la société politique, où l'intérêt cominun nait du choc et de la combinaison de tous les intérêts particuliers; où l'on ne parviendroit à l'établir que par la violence et le brigandage; où les passions, l'industrie, la fortune tendroient continuellement à le renverser. L'inégalité des conditions est une suite de l'inégalité des propriétes, et l'inégalité des propriétés dérive de la justice naturelle. Car chacun acquiert en raison de ses forces, de ses talens et de son application. Le travail, l'industrie, le bonheur sont des sources et des titres de propriété que reconnoît le droit naturel, et que le droit civil protège de toute la force publique. S Non-seulement, la loi donne et garantit à tout citoyen la faculté d'acquérir et de conserver: elle veut encore que le droit de propriété puisse s'exercer après la mort du propriétaire. De là le droit de tester, plus ou moins restreint par les lois et les coutumes particulières. De là le droit d'hérédité admis chez toutes les nations policées, quoiqu'il tende visiblement à augmenter de plus en plus l'inégalité des fortunes et des conditions. |