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prendre un commandement dans les armées autrichiennes.

Aussitôt que les corps de Murat et Lannes eurent pris possession de Vienne, l'empereur donna l'ordre à toutes les divisions de l'armée de se diriger sur cette capitale, qui devint en quelque sorte la capitale de l'armée française, et l'empereur, comme s'il eût habité Saint-Cloud, établit son quartier-général à Schoenbrunn, d'où il traça les opérations qui restaient à exécuter, tant pour forcer le corps du prince Charles à se jeter sur la Hongrie, que pour faire marcher l'armée à la rencontre des Russes. Il ne laissa à Vienne et dans les environs que quatre divisions, sous le commandement du maréchal Mortier et du général Marmont, et suivit la route de Znaim, point sur lequel on savait, d'après les rapports adressés à l'empereur, que se concentrait le gros de l'armée russe; mais cette armée ayant fait un mouvement vers Brunn, et Napoléon en ayant été informé, se dirigea de ce côté; ainsi, les deux armées se cherchant mutuellement, la question ne pouvait rester long-temps indécise.

Murat et Lannes commandèrent constamment l'avant-garde pendant ces marches forcées et pour ainsi dire miraculeuses; la haute prévision de

l'empereur sembla s'accroître encore pendant les opérations qui précédèrent la bataille d'Austerlitz; il est certain, et tant d'officiers qui en ont été témoins. me l'ont si bien assuré, que je ne puis en douter, il est certain qu'il désigna lui-même à l'avance le terrain sur lequel il lui convenait d'attirer l'armée russe, et qu'il recommanda à ses généraux d'en bien examiner les sinuosités, leur assurant qu'ils auraient un rôle à y jouer.

Cependant, afin de mieux persuader aux peuples que son désir était de conclure la paix aussitôt qu'on lui ferait des propositions raisonnables, Napoléon s'était fait suivre de près par son ministre des relations extérieures, qui déjà était installé à Vienne avec la chancellerie française. Clarke fut nommé gouverneur général de cette capitale. L'empereur avant d'en venir aux mains chargea le général Savary d'une mission auprès de l'empereur Alexandre; j'eus dans le temps connaissance de cette mission, mais seulement comme d'un fait que dans ma position je ne pouvais ignorer; je n'en ai connu les détails circonstanciés que par le récit qu'en a fait le duc de Rovigo dans ses mémoires apologiques. Quelque soin qu'il se soit donné pour faire croire à la sincérité de Napoléon dans ses propositions pacifiques, les faits

mêmes sur lesquels il appuie ses conclusions, conduisent, en les examinant bien, à des conclusions toutes contraires. Napoléon voulait dicter ses conditions, avant l'issue d'une bataille dont le succès pouvait sembler douteux au jeune empereur de Russie, et ces conditions étaient déjà celles qu'il put imposer quand la victoire se fut prononcée en faveur de nos aigles. Il est clair, pour quiconque réfléchit, qu'en proposant toujours ce à quoi il savait bien qu'on ne pouvait consentir sans déshonneur, il se donnait l'air d'un pacificateur et s'assurait le plaisir de la guerre. Le duc de Rovigo prouve sans le vouloir ce que je dis, quand il rapporte ces paroles de l'empereur Alexandre: « Il faudrait que <«<les propositions qui l'ont précédée fussent con<< formes aux sentimens qui ont dicté la démarche « de votre maître auprès de moi. Elle fait le plus «<< grand honneur à sa modération; mais est-ce << vouloir la paix que de proposer des conditions << aussi désastreuses pour un état, que celles qui << sont offertes au roi des Romains 1? »

L'empereur Alexandre ne se trompait pas non plus, quand le duc de Rovigo lui ayant, pour

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C'est ainsi que l'empereur Alexandre désignait l'empereur François II.

bonne raison, dit qu'il était naturel de chercher à diminuer la puissance de son ennemi, il lui répondit : « C'est précisément cette disposition à di<< minuer la puissance de ses voisins et à augmen<< ter la sienne, qui lui suscite continuellement « des guerres. Vous êtes déjà une nation si forte par vous-mêmes, par votre réunion sous les « mêmes lois, par l'uniformité de vos habitudes « et de votre langage, que vous inspirez naturel«lement de l'effroi. Qu'avez-vous besoin de vous "" agrandir continuellement ? »

La raison n'était-elle pas du côté du jeune prince qui s'exprimait de la sorte? et qu'aurait-t-on pensé de lui, si, traitant séparément, abandonnant son allié, il avait, pour éviter une bataille que l'on se flatte toujours de gagner, il avait laissé l'Autriche envahie à la discrétion d'un vainqueur exigeant.

mêmes sur lesquels il appuie ses conclusions, conduisent, en les examinant bien, à des conclusions toutes contraires. Napoléon voulait dicter ses conditions, avant l'issue d'une bataille dont le succès pouvait sembler douteux au jeune empereur de Russie, et ces conditions étaient déjà celles qu'il put imposer quand la victoire se fut prononcée en faveur de nos aigles. Il est clair, pour quiconque réfléchit, qu'en proposant toujours ce à quoi il savait bien qu'on ne pouvait consentir sans déshonneur, il se donnait l'air d'un pacificateur et s'assurait le plaisir de la guerre. Le duc de Rovigo prouve sans le vouloir ce que je dis, quand il rapporte ces paroles de l'empereur Alexandre: « Il faudrait que <«<les propositions qui l'ont précédée fussent con«< formes aux sentimens qui ont dicté la démarche << de votre maître auprès de moi. Elle fait le plus grand honneur à sa modération; mais est-ce « vouloir la paix que de proposer des conditions « aussi désastreuses pour un état, que celles qui <<< sont offertes au roi des Romains 1? >>

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L'empereur Alexandre ne se trompait pas non plus, quand le duc de Rovigo lui ayant, pour

'C'est ainsi que l'empereur Alexandre désignait l'empereur François II.

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