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CHAPITRE V.

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par

Fin des hostilités avec l'Autriche.-Mission du prince de Lichtenstein auprès de l'empereur.-Entrevue des deux empereurs. Missions de Savary auprès de François II et d'Alexandre. - Traité de Presbourg. Le roi d'Italie non enchaîné par les promesses de l'empereur des Français. La Bavière et le Wurtemberg érigés en royaumes. M. d'Haugwitz à Schoenbrunn. - Hauteur et sévérité de Napoléon. Traité conclu M. d'Haugwitz sans pouvoirs. Second traité de la Prusse conclu à Berlin avec les Anglais. Gruelle position du roi de Prusse et son mécontentement de la conduite de M. d'Haugwitz.-Titre d'empereur refusé par Alexandre à Napoléon.-Empire de Napoléon sur luimême.Itinéraire de Rapp après Austerlitz. - Conso lations données à Marmont. L'empereur à Munich et mariage d'Eugène.

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Rapp n'était pas venu immédiatement de Vienne à Hambourg, aprés la bataille d'Austerlitz. Napoléon l'avait envoyé au château même d'Austerlitz,

reçu

pour se faire guérir du coup de lance qu'il avait à la tête, blessure qui heureusement ne fut pas dangereuse. La guerre était terminée avec l'Autriche, mais elle ne l'était pas encore avec la Russie qui avait encore assez de ressources, sinon pour prendre une revanche complète contre les armées françaises, du moins pour se soustraire à la honte de solliciter la paix immédiatement après une défaite.

Le lendemain de la bataille, l'empereur étant encore au château d'Austerlitz, reçut dans la soirée une visite du prince Lichtenstein, le même que Mack lui avait envoyé en parlementaire sous les murs d'Ulm. Cette fois, il était chargé d'une mission de l'empereur François II, mission qui, comme on le sut bientôt, avait pour objet de demander une entrevue à Napoléon. La demande fut acceptée, et l'on régla, sur-le-champ, le cérémonial qui serait observé le lendemain. Le 4 décembre, Napoléon se rendit à cheval au lieu convenu, c'est-à-dire à un moulin, situé à trois lieues d'Austerlitz. Napoléon se trouva le premier au rendez-vous, où il ne tarda pas à voir arriver l'empereur d'Autriche en calèche. Dès que Napoléon l'aperçut, il mit pied à terre et s'avança à sa rencontre, entouré de ses aides-de-camp. Lauriston,

de qui je tiens ces détails, l'accompagnait, ayant eu, me disait-il, le bonheur d'arriver à la grande armée, assez à temps pour prendre part à la ba-taille d'Austerlitz. Napoléon embrassa François II en l'abordant. Pendant leur entrevue, Napoléon n'eut auprès de lui que Berthier, et l'empereur d'Autriche que le prince de Jean de Lichtenstein, de sorte que les aides-de-camp ne purent rien entendre d'une conversation qu'il est facile de se figurer. Il me semble voir Bonaparte s'efforçant de séduire son ennemi vaincu, par ses paroles insinuantes dont il possédait le secret à un si haut degré, et tâchant, en quelque sorte, de se faire pardonner sa gloire par les dehors d'une modestie affectée; et l'on peut également se peindre l'humiliation du futur beau-père de Napoléon, forcé d'obéir à l'impérieuse loi de la nécessité. Quelle position pour l'héritier du trône de Charles-Quint! Les empereurs restèrent ensemble près de deux heures, et s'embrassèrent encore avant de se quitter. L'empereur revenant doucement vers son armée devait intérieurement se complaire dans son orgueil satisfait; mais ne perdant jamais de vue un seul instant les intérêts de sa politique, il interrompit les méditations dans lesquelles, me dit Lauriston, il semblait absorbé, pour envoyer

un aide-de-camp auprès de l'empereur d'Autriche.

Ce fut Savary que Bonaparte chargea de cette mission : elle avait pour but de faire connaître à l'empereur François qu'en le quittant il allait se rendre, par ordre de Napoléon, au quartiergénéral de l'empereur Alexandre, pour y attendre son adhésion à ce qui pouvait le concerner des conditions convenues dans la conférence des empereurs de France et d'Autriche. Alexandre consentit à tout, disant que, puisque le roi des Romains se trouvait satisfait des promesses de Napoléon, et qu'il n'était venu que pour ce monarque, il se trouvait dégagé, n'ayant aucun vœu à former pour lui-même. Ainsi se terminèrent les hostilités de cette campagne, dont le résultat éleva la gloire de Napoléon au plus haut degré de splendeur.

Les chancelleries de France et d'Autriche, se réunirent à Presbourg, et les négociations n'y furent pas bien difficiles, puisque l'un des deux partis pouvait tout demander, et que l'autre ne pouvait presque rien refuser, aussi ces négociations ne furent-elles pas de longue durée, et dès le 25 décembre, c'est-à-dire trois mois, jour pour jour, après le départ de Paris de Napoléon, ses plus hautes espérances étaient réalisées. La

n'en prit

Russie, qui avait pris part à la guerre, aucune aux négociations; les hostilités cessèrent entre elle et la France, mais sans conclusion de traité de paix.

L'empereur avait annoncé solennellement au Sénat qu'il ne voulait aucun agrandissement pour la France, et en ce moment il tint parole, mais voici comment: jugeant apparemment que les promesses de l'empereur des Français n'engageaient point le roi d'Italie, il fit céder, par le traité de Presbourg, non point à la France, mais au royaume d'Italie, les anciens états de Venise, la Dalmatie et l'Albanie vénitienne. En vertu du même traité, l'électeur de Bavière reçut, avec le titre de roi, la principauté d'Eichstett, une partie du territoire de Passau, le Tyrol, et l'importante ville d'Augsbourg. L'électeur de Wurtemberg fut aussi élevé à la dignité royale, et toutes les possessions autrichiennes dans la Souabe, le Brisgaw et l'Orteneau, furent partagées entre ce prince, le nouveau roi de Bavière et l'électeur de Bade, créé grand duc de Bade. Pour avoir l'air de concéder à l'Autriche quelques dédommagemens, on lui donna Salzbourg et Berchtolsgaden. La principauté de Wurtzbourg, érigée en grand-duché, fut promise à l'évêque de Salzbourg, en échange

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