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Tout ce que nous savons, par le rapport de plusieurs Cardinaux qui sont venus de Rome à Paris, c'est qu'au moment de l'occupation des Etats Pontificaux par les troupes Françoises, une Congrégation établie par le Pape travailloit avec activité à des projets de Concordat avec les Princes Confédérés de l'Allemagne.

Tant de délais ont été extrêmement préjudiciables à la Religion.

Le Diocèse de Cologne, sur la rive droite du Rhin, n'a plus d'Evêque, ni même de forme diocésaine.

Les Evêchés de Freysingen et de Passau, en Bavière, de Wurtzbourg et de Bamberg, dans la Franconie, sont vacans.

La dispersion des Chapitres de plusieurs de ces grands Evêchés n'a pas même permis de leur donner cette forme d'Administration provisoire qui maintient la subordination, l'ordre ecclésiastique et l'enseignement religieux, pendant la vacance des Siéges Episcopaux.

Les limites que doivent avoir les Diocèses nouveaux n'étant pas encore déterminées, les Souverains méconnoissent celles des anciens Diocèses, que l'autorité de l'Eglise et la sanction légale des Princes auxquels ils ont suc

cédé, avoient réglées d'un commun accord. Ainsi, lorsque des parties des anciens Diocèses s'étendent dans une Souveraineté étrangère, les Princes décident, par voie de fait, que leurs nouveaux Sujets ne peuvent pas être administrés, dans l'ordre spirituel, par des Evêques qui ne résident pas sur leur propre territoire. D'où résulte une sorte d'anarchie ecclésiastique, que n'ont pas entièrement comprimée les voies conciliatrices, proposées provisoirement par le Prince-Primat, pour des portions de la Bohême et de la Westphalie.

Les Fondations pieuses se perdent et se dissipent journellement. Les Souverains ne laissent à l'Evêque ou au Curé aucune influence sur leur administration, et ils en disposent d'une manière absolument contraire à l'intention sacrée des Fondateurs.

Les Cures restent quelquefois vacantes pendant des années entières, et sont à peine administrées provisoirement par des Vicaires. Souvent les Curés sont nommés sans le concours de l'Evêque ou de son Consistoire, à qui les Séculiers ne laissent que le droit d'examiner superficiellement les sujets nommés, et de se faire représenter un de ces certificats que l'usage

fait accorder aux sujets les plus équivoques, lorsque le scandale de leurs mœurs n'a pas porté au plus haut degré.

été

Dans certaines Souverainetés, lé Prince exige qu'un de ses Commissaires soit présent aux Visites Episcopales, et l'autorisé à s'immiscer dans tous les détails de l'administration spirituelle, qui ont lieu entre l'Evêque et les Curés, entre l'Evêque, les Curés et les simples Fidèles; ce qui, non seulement est une entreprise directement contraire à la nature du ministère pastoral, mais, de plus, porte dans les cœurs la crainte et le découragement. On y exige aussi que les rescrits ou instructions de l'Evêque aux Curés, soient exhibés à des Baillis ruraux, même lorsqu'ils sont purement relatifs à la conscience, sans être susceptibles d'aucune exécution extérieure. Quelquefois le Souverain prescrit immédiatement aux Curés, sans l'intervention du Consistoire ou de l'Evêque, non seulement le sujet, mais le texte même de leurs sermons. On seroit tenté de croire que ces Princes considèrent les Pasteurs comme des ennemis dont ils doivent se défier, tandis que les Pasteurs sont l'appui le plus ferme que le Prince puisse avoir dans la conscience des Peuples, lors

qu'il honore et fait respecter leur Ministère.

Ces mêmes Princes étendent leur pouvoir sur les réglemens du Culte, sur l'instruction religieuse de la jeunesse, sur l'administration des biens ecclésiastiques. Leurs Conseils entravent les Evêques dans l'exercice de la jurisdiction spirituelle. Ils surveillent avec une méfiance rigoureuse les Consistoires Episcopaux, et leur défendent de procéder à l'examen des Candidats qui veulent entrer au Séminaire ou dans les Ordres sacrés, sans qu'un Commissaire laïque soit présent. Les Séminaires eux-mêmes, cette institution si purement ecclésiastique, et confiée privativement aux Evêques dans toute l'étendue de la Catholicité, sont placés sous la direction immédiate du Souverain, non seulement pour l'exercice de cette surveillance générale qui lui appartient, mais pour le choix des Supérieurs ou Professeurs, et pour la fixation des réglemens relatifs à l'ordre spirituel qui doivent y être observés.

Enfin, le Prince entreprend de se placer et se place en effet entre la conscience des Peuples et le Chef suprême de l'Eglise, pour la décision des points de morale ou de discipline, pour les dispenses matrimoniales, pour

les cas réservés qui sont du ressort de la Pénitencerie. Il exige que toutes les demandes ou suppliques, relatives à ces objets du for intérieur, soient transmises au Souverain Pontife par ses Ministres Plénipotentiaires, fussent-ils même Protestans, et cette gêne intolérable qu'il impose à la conscience de ses Sujets, est regardée par ses Ministres comme une conséquence légitime de la liberté de conscience ou des Cultes, dont il se glorifie de les faire jouir.

Tel est le Tableau des malheurs qui oppressent plus ou moins les Eglises d'Allemagne, dans les Etats Catholiques ou Protestans qui font partie de la Confédération du Rhin. Nous en avons recueilli les principaux traits dans les pièces officielles que publient les Journaux les plus accrédités, dans les procès-verbaux des Conférences tenues à Ratisbonne, en 1804, et surtout dans les relations confidentielles qu'a daigné nous faire S. A. Em. le PrincePrimat, dont les lumières, l'impartialité et la modération sont un sûr garant de leur exactitude.

Ce Tableau si affligeant n'est que trop conforme à l'énergie des expressions de Sa Majesté Impériale et Royale, lorsqu'Elle nous

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