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II. CONDAMNÉS MILITAIRES OU ASSIMILĖS AUX MILITAIRES. Il faut distinguer: Ou bien la peine à leur appliquer est prononcée par la loi pénale ordinaire, ou elle l'est par la loi militaire spéciale.

a. Peine prononcée par la loi pénale ordinaire : Le juge militaire peut admettre des circonstances atténuantes (1).

b. Peine prononcée par la loi militaire spéciale: Ici, il y a une sous-distinction à faire Si l'infraction punie est une infraction grave à la discipline ou au devoir militaire comme l'espionnage, l'embauchage, la trahison, l'abandon du poste, la capitulation, etc., les circonstances atténuantes ne sont pas admissibles (2); pour tous les délits et autres crimes militaires, le juge peut les admettre (3).

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La raison de ces distinctions s'explique d'elle-même rien ne peut atténuer les manquements au devoir militaire. Par sa nature et par son objet, le devoir militaire n'admet pas de distinctions (4).

(4) Voir, plus loin, l'article 267 et son commentaire.

(2) Voir, plus loin, les articles 204 à 246 et leur commentaire. (3) Voir, plus loin, les articles 248 à 266 et leur commentaire.

(4) Il a été jugé, antérieurement au Code de justice militaire, que l'admission des circonstances atténuantes, introduites par la loi du 28 avril 1832, ne s'appliquant qu'aux crimes et délits punis par le Code pénal de 1840, lequel est déclaré rester étranger aux délits militaires, les conseils de guerre n'ont pas le droit, après avoir reconnu coupables les prévenus, de déclarer qu'il existe en leur faveur des circonstances atténuantes et de prononcer, par suite, une peine moindre que celle posée par la loi (Cass. crim., 2 mars 4833, affaire Héraut). Nous reproduisons, du reste, l'arrêt rendu le 2 mars 1833 par la Cour de cassation, et l'instruction du ministre de la guerre, qui en a été la suite, datée du 29 mars de la même année. Mais nous avertissons que depuis le Code de justice militaire, la doctrine de cet arrêt et de cette instruction ne serait plus vraie qu'avec les distinctions et limitations qui ont été expliquées dans notre texte.

ARRET de la Cour de cassation qui fixe la jurisprudence à suivre par les conseils de guerre, relativement à la question des circonstances atténuantes.

LOUIS-PHILIPPE, roi des Français,

A tous présents et à venir, salut.

Paris, le 2 mars 4833.

La Cour de cassation a rendu l'arrêt suivant sur le réquisitoire dont suit la teneur.

A la Cour de cassation, chambre criminelle,

Le procureur général près la Cour de cassation expose qu'il est chargé par le Garde des sceaux, ministre de la justice, de requérir l'annulation, dans l'intérêt de la loi, de trois décisions rendues par des conseils de révision.

La première, en date du 28 août 1832, par laquelle le conseil permanent de révision de la 9 division militaire, a confirmé un jugement rendu le 16 août 1832 par le 2o conseil de guerre permanent de cette division contre le nommé Héraut, fusilier.

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La deuxième, en date du 20 novembre 1832, par laquelle le conseil permanent de révision de la 4 division militaire a confirmé un jugement du 2° conseil de guerre permanent de cette division, rendu le 43 novembre 1832 contre le nommé Toscaut, cuirassier.

Enfin, la troisième, en date du 22 novembre 1832, par laquelle le conseil permanent de révision de la deuxième division militaire a annulé un jugement rendu le 46 octobre 1832 par le 2o conseil de guerre permanent de cette division contre le nommé Lefalhum, tambour.

Ces trois décisions ont jugé que l'on doit appliquer à la juridiction militaire les articles 5 et 94 de la loi du 28 avril 1832, portant modification au Code d'instruction criminelle et au Code pénal ordinaire, articles relatifs à l où il a été déclaré qu'il existe de pareilles circonstances. En conséquence, les deux premiers ont question des circonstances atténuantes, et à la pénalité dans les cas confirmé deux jugements dans lesquels cette application de la loi du 28 avril 1832 avait été faite par les conseils de guerre, et qui étaient attaqués par ce motif par le ministère public; et le troisième a annulé un jugement dans lequel l'application de la loi du 28 avril 1832 n'avait pas eu lieu.

Les moyens indiqués par la lettre du ministre, à l'appui de la demande en cassation, sont qu'on ne peut étendre par « voie d'analogie et de conséquence, à une juridiction spéciale un droit que le législateur paraît avoir réservé à la juridiction ordinaire; car, d'après les expressions mêmes « dont il s'est servi, il semble évident qu'il n'a eu en vue d'autoriser la modification des peines a qu'à l'égard des crimes qui sont jugés suivant les formes qui sont déterminées par le Code d'ina struction criminelle, et qu'il n'a point voulu, puisqu'il ne l'a point formellement exprimé, que ces « modifications fussent failes par les tribunaux jugeant suivant des formes toutes différentes. « Il est même évident que la faculté de déclarer qu'il existe des circonstances atténuantes, telles a que l'exercice en a été réglé par le Code d'instruction criminelle, ne peut, à moins qu'une loi « spéciale ne vienne à la leur conférer, appartenir aux tribunaux militaires, dont les membres « sont chargés de se prononcer sur l'existence du fait ainsi que sur la culpabilité du prévenu, et « d'appliquer la peine prononcée par la loi. Ici, point de jurés auxquels le président soit tenu de « rappeler qu'ils doivent, s'ils le pensent, déclarer qu'il existe des circonstances atténuantes, « formalité prescrite à peine de nullité par l'article 344 du Code d'instruction criminelle, et dont ⚫ l'observation est nécessaire pour que l'article 463 du Code pénal puisse être appliqué. «En conséquence, ces deux décisions paraissant contenir tout à la fois une violation de l'article 5 a du Code pénal, une fausse application de l'article 453 du même Code, ainsi que de l'article 344 du « Code d'instruction criminelle, et une violation de l'article 30 de la loi du 13 brumaire an v, qui « règle la manière de procéder au jugement des délits militaires. »><

Cependant le ministre ne dissimule pas que des raisons puissent être invoquées à l'appui du système adopté par les décisions attaquées.

Le procureur général se réserve d'exposer à l'audience des observations particulières sur la question importante que soulève ce pourvoi.

Et néanmoins, pour se conformer à l'article 444 du Code d'instruction criminelle;

Vu la lettre du ministre de la justice, en date du 44 janvier 4833 et les pièces du procès,

Il requiert pour le Roi qu'il plaise à la Cour casser et annuler, dans l'intérêt de la loi, les trois décisions des conseils de révision susmentionnés, ordonner qu'à sa diligence l'arrêt à intervenir sera imprimé et transcrit sur les registres desdits conseils de révision.

Fait au parquet, le 9 février 1833.

Signé DUPIN.

La Cour, après avoir entendu M. le conseiller Mérilhou en son rapport, et M. Dupin, procureur général en ses conclusions:

Vu l'article 444 du Code d'instruction criminelle;

Attendu que, les lois antérieures ne sont abrogées ou modifiées par les lois postérieures qu'autant que celles-ci ont eu évidemment pour objet de statuer sur les mêmes matières;

Attendu que la loi du 28 avril 1832 porte dans son article 4er que les articles y désignés du Code d'instruction criminelle sont abrogés et remplacés par les articles 2 et suivants de ladite loi; et que la même loi du 28 avril porte, article 12, que les articles y désignés du Code pénal sont abrogés et remplacés par les articles 43 et suivants de la loi précitée;

Attendu que dès lors il est évident par le texte même de la loi du 28 avril 1832, qu'elle n'a eu d'autre objet que de modifier le Code pénal de 4840, et le Code d'instruction criminelle de la même époque, et que la législation militaire n'a dû ni pu, par conséquent, en recevoir aucune atteinte; Attendu que l'article 5 du Code pénal de 4840 déclare explicitement que ces dispositions ne s'appliquent pas aux contraventions, délits et crimes militaires, et que l'article 484 du même Code réserve itérativement d'une manière implicite l'effet et le maintien intégral de la législation militaire; et qu'enfin lesdits articles 5 et 484 du Code pénal ne sont pas du nombre de ceux dont la loi du 28 avril 1832 a prononcé l'abrogation ou la modification;

Attendu que la discussion de ladite loi dans le sein des deux chambres législatives, n'offre aucune trace de l'intention du législateur d'étendre l'application des circonstances atténuantes aux faits militaires; et qu'au contraire, plusieurs amendements ayant pour objet d'étendre cette disposition nouvelle aux délits et contraventions non prévus par le Code pénal de 1840, ont été rejetés, d'où il suit que les circonstances atténuantes n'étant pas admises pour les simples délits militaires, elles ne peuvent pas l'étre davantage pour les crimes militaires;

Attendu que si le § 4er de l'article 94 de la loi du 28 avril qui forme l'article 463 du Code pénal actuel, parle en général de l'application des circonstances atténuantes aux peines prononcées par la loi, cette expression ne peut pas s'entendre en ce sens qu'elles s'appliqueraient aux peines

prononcées par les lois militaires, puisque cette interprétation serait en contradiction formelle avec les articles 2 et 12 de la même loi et avec les articles 5 et 484 du Code pénal de 1840;

Attendu que d'ailleurs les paragraphes 2 et suivants de l'article 463 précité règlent, d'après l'échelle des peines prononcées par le Code pénal ordinaire, l'effet des circonstances atténuantes admises pour chacun des crimes prévus et classés par le même Code, d'où il suit que cette échelle proportionnelle de réduction ne saurait s'appliquer à des peines et à des crimes portés par les lois militaires et qui peuvent y être classés d'une manière tout à fait différente des lois ordinaires;

Attendu que, dès lors, les conseils de guerre et les conseils de révision qui ont appliqué à des faits de leur juridiction l'article 94 de la loi du 28 avril 1832, formant l'article 463 du Code pénal revisé, en ont fait une fausse application;

Attendu que la faculté d'attenuer les peines en certains cas, qui était attribuée aux conseils militaires par l'art. 20 de la loi, deuxième jour complémentaire an III, n'a pas été conférée aux conseils de guerre par la loi de leur institution, qui est en date du 13 brumaire an v, et est d'ailleurs en opposition avec les dispositions combinées des articles 32, 33 et 42 de cette dernière loi; d'où il suit que l'atténuation de peine prononcée par les jugements attaqués constitue un véritable excès de pouvoir;

Par ces motifs, statuant sur la dénonciation faite par M. le procureur général en la Cour, dans l'intérêt de la loi et sur l'ordre formel de M. le garde des sceaux, ministre de la justice :

Casse et annule, dans l'intérêt de la loi seulement : 4° le jugement rendu par le conseil permanent de la 9 division militaire, le 28 août 1832, au sujet du nommé Pierre-Jacques Heraut, fusiher à la compagnie des fusiliers vétérans de l'Hérault; 2° le jugement rendu par le conseil permanent de révision de la 3e division militaire le 20 novembre 1832 au sujet du nommé JacquesFrançois Toscaut, cuirassier au 2 régiment; 3° le jugement rendu par le conseil permanent de la 2e division militaire, le 22 novembre 1832, au sujet du nonfmé Mathurin Lefalhum, tambour au 52e régiment d'infanterie de ligne;

Ordonne qu'à la diligence du procureur général, le présent arrêt sera imprimé et transcrit sur les registres des conseils permanents de révision des 2, 3e et 9e divisions militaires.

Fait et jugé le deux mars mil huit cent trente-trois, en l'audience publique de la chambre criminelle de la Cour de cassation; présents: MM. le comte de Bastard, pair de France, président; Mérilhou, rapporteur; Briere; Thil; Rives; Gilbert des Voisins; Chantereyne; de Ricard; de Crouseilhes; Choppin; Chauveau-Lagarde; Rocher et Isambert, conseillers en la Cour.

Mandons et ordonnons à tous huissiers, sur ce requis, de mettre le présent arrêt à exécution; à nos procureurs généraux et à nos procureurs pres les tribunaux de première instance d'y tenir la main; à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis.

En foi de quoi, ledit arrêt a été signé par le président de la Cour et par le greffier.
Pour expédition conforme délivrée à M. le procureur général.

*...

Le greffier en chef de la Cour de cassation.

Signé M. LAPORTE.

Le Président du conseil, Ministre de la guerre, à MM. les lieutenants généraux commandant les divisions militaires. (Secrétariat général, Bureau de la justice militaire.)

Paris, le 29 mars 1833.

(Instructions relatives à l'arrêt rendu par la Cour de cassation au sujet de la question des circonstances atténuantes dans les causes portées devant les conseils de guerre.)

Général, depuis la promulgation de la loi du 28 avril 1832, qui a introduit des réformes importantes dans la législation pénale ordinaire, de graves difficultés se sont présentées dans les tribunaux militaires au sujet de l'application à la legislation spéciale de l'armée, des dispositions des articles 344 du Code d'instruction criminelle et 463 du Code pénal.

La question des circonstances atténuantes a divisé les conseils de guerre et de révision, et manifesté dans l'administration de la justice une divergence d'opinions et de principes qui aurait amené bientôt une veritable confusion.

Au lieu de n'envisager dans les circonstances atténuantes qu'une éventualité dont il doit être tenu compte et qui peut donner lieu à modification de la peine, dans les cas seulement où la loi présente une pénalité susceptible d'être graduée dans les limites d'un minimum et d'un maximum déterminés, comme par exemple lorsqu'il s'agit d'appliquer, soit l'article 4er de la loi du 45 juillet 1829, où les circonstances atténuantes reconnues motivent une diminution de peine, soit l'article 46 de la loi du 24 mars 4832, sur le recrutement de l'armée; plusieurs conseils de guerre ont cru qu'il était obligatoire, à peine de nullité, de poser explicitement la question des circonstances atténuantes, par analogie avec l'avertissement prescrit par l'article 344 du Code d'instruction criminelle, tandis que d'autres conseils ont considéré comme une cause de nullité le fait de soumettre cette question aux juges militaires.

Il était donc nécessaire, pour dissiper les incertitudes, de recourir à la Cour de cassation qui, par l'arrêt du 2 mars 1833, que vous trouverez ci-joint, a fixé la jurisprudence sur ce point, et prévenu pour la suite toute fausse interprétation de la loi.

Pour les circonstances atténuantes, il n'y a pas de question à poser au conseil par le président. La loi militaire, conforme en cela au droit commun (1), porte que, dans le cas où la loi autorise l'admission des circonstances atténuantes, le conseil de guerre déclare, à la majorité absolue des voix, s'il en existe.

Le jugement constate cette majorité en ces termes : « A la majorité, il y a des circonstances atténuantes en faveur de.... » (2).

Il a été jugé, toutefois, qu'il ne serait pas irrégulier de déclarer l'exis

Vous ferez remarquer aux conseils de guerre de votre division que l'arrêt déclare en principe que la question des circonstances atténuantes ne doit point être posée aux juges des conseils de guerre, soit qu'il s'agisse d'une pénalité purement militaire, soit qu'il y ait lieu d'appliquer une peine empruntée aux lois communes, soit enfin que les conseils de guerre aient à infliger une peine prononcée par une loi militaire ou par le Code pénal ordinaire, dans laquelle la fixation d'un minimum ou d'un maximum admette une graduation.

En effet, dans le premier cas, s'il s'agit de faits purement militaires, prévus et punis par les lois pénales de l'armée, les articles 344 du Code d'instruction criminelle et 463 du Code pénal revisés, ne trouveraient aucune application légale, puisque ne se rapportant qu'à la juridiction commune des Cours d'assises, ces articles sont entièrement étrangers à la juridiction exceptionnelle des tribunaux militaires.

Dans le second cas, c'est-à-dire lorsque les faits soumis aux conseils de guerre ne se trouvent ni prévus, ni punis par les lois militaires, et qu'il y a lieu, en conséquence, à emprunter une disposition pénale aux lois communes, on ne peut pas non plus s'appuyer sur l'article 344 du Code d'instruction criminelle qui ne s'applique qu'aux Cours d'assises. Dans le jugement par jurés, la déclaration du fait et le prononcé de la peine étant confiés à des organes différents, il est naturel que le président du tribunal qui doit appliquer la peine, avertisse le jury de l'obligation de déclarer les circonstances qui doivent guider les juges dans cette application. Mais, dans un conseil de guerre, l'avertissement donné par le président aux juges, de résoudre la question des circonstances atténuantes, serait une véritable anomalie, puisque lui, comme juge, et ceux qui siégent avec lui, ont eux-mêmes à prononcer successivement sur le fait imputé au prévenu, sur les circonstances de ce fait, et sur l'application de la peine.

Enfin, dans le troisième et dernier cas, s'il s'agit de l'application soit d'une peine militaire, ou se trouve un minimum et un maximum, soit d'une peine empruntée aux lois communes et qui présente également la faculté de diminuer ou d'augmenter la rigueur de la pénalité, poser la question des circonstances atténuantes serait toujours adapter à une juridiction spéciale et transférer, par simple analogie, à l'action de la justice militaire, les dispositions d'une loi qui, tout en formant la règle commune, n'en a pas moins maintenu expressément les exceptions faites par les lois qui régissent l'armée. Ce serait, en outre, aller au delà même de ce que prescrit l'article 344 du Code d'instruction criminelle, qui veut que le jury soit averti de mentionner les circonstances atténuantes, s'il pense qu'il en existe; mais qui n'entend point qu'il lui soit posé à cet égard une question formelle.

En résumé, la conséquence qui découle de l'arrêt du 2 mars 1833, c'est que si un conseil de guerre reconnaissait des circonstances atténuantes pouvant donner lieu à une réduction de peine, en raison de l'article de loi qu'il s'agirait d'appliquer (par exemple l'article 4 de la loi du 45 juillet 4829, l'article 46 de la loi du 24 mars 1832 sur le recrutement de l'armée, ou les articles 404 ou 405, ou 406 et 408 du Code pénal ordinaire) la réduction de la peine, opérée dans les limites de l'article appliqué, ne serait pas prononcée en conséquence d'une solution préalable de la question de savoir s'il y a ou s'il n'y a pas de circonstances atténuantes: elle ne le serait que comme l'expression du tribunal, qui reconnaîtrait de lui-même dans les faits des circonstances de nature à motiver, en faveur du coupable, l'application d'une peine plus ou moins éloignée du maximum; et en agissant, ainsi que cela se pratique dans les tribunaux correctionnels ordinaires, le. conseil de guerre ne ferait point usage de l'article 344 du Code d'instruction criminelle.

Je vous invite à prescrire aux conseils de guerre de votre division de se conformer rigoureusement à la jurisprudence établie par l'arrêt du 2 mars 1833, en leur rappelant que la Cour de cassation est le tribunal régulateur qui fixe en dernier ressort, et pour toutes les juridictions, la marche que doit suivre la justice en France.

En m'accusant réception de cette lettre, vous me ferez connaître les dispositions que vous aurez ordonnées pour assurer l'exécution de ce qu'elle prescrit.

(4) CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE. Art. 344: «En toute matière, même en cas de récidive, le président, après avoir posé les questions résultant de l'acte d'accusation et des débats, avertit le jury, à peine de nullité, que s'il pense, à la majorité, qu'il existe, en faveur d'un ou de plusieurs accusés reconnus coupables, des circonstances atténuantes, il doit en faire la déclaration en ces termes « A la majorité, il y a des circonstances atténuantes en faveur de l'accusé. » Ensuite le président remet les questions écrites aux jurés, dans la personne du chef du jury; il y joint l'acte d'accusation, les procès-verbaux qui constatent les délits, et les pièces du procès autres que les déclarations écrites des témoins..... >>

(2) Voir, plus haut, la Circulaire du ministre de la guerre, du 28 juillet 1857.

tence des circonstances atténuantes par voie de réponse à une question spéciale (1).

Dans le droit commun, dit M. Dalloz, le président de la Cour d'assises est tenu de donner au jury un avertissement à cet égard. Cette formalité, qui n'est pas prescrite par la loi militaire, semble inutile pour les conseils de guerre dont les membres sont juges et jurés. On comprend, d'ailleurs, que les questions de circonstances aggravantes doivent être posées formellement au conseil; c'est une garantie pour l'accusé. Mais ce dernier n'a pas besoin de garanties semblables quand il s'agit de circonstances atténuantes.» Cependant, habituellement, le conseil est interrogé par le président sur les circonstances atténuantes, et cette interrogation lui est faite au moment de la délibération sur la culpabilité, après que le conseil s'est prononcé sur chacune des questions qui lui sont posées.

Il a été jugé que l'omission de la question des circonstances atténuantes dans la décision prononcée par un conseil de guerre, pour un crime prévu par le Code pénal ordinaire, en admettant qu'elle fût une irrégularité, ne constitue pas un excès de pouvoir donnant ouverture à cassation de la part d'un non-militaire (2).

M. Foucher fait remarquer que lorsque le conseil reconnaît l'existence des circonstances atténuantes, il faut distinguer, pour leur effet sur l'application de la peine, entre les infractions prévues par le Code militaire et celles à l'égard desquelles la loi militaire renvoie aux dispositions du Code pénal ordinaire. Dans le premier cas, il ne saurait y avoir de difficulté, puisque le Code militaire a soin de déterminer lui-même quelle est la peine applicable; dans la seconde hypothèse, le conseil doit prendre pour point de départ la peine que le coupable aurait encourue s'il n'y avait pas eu de circonstances atténuantes, mettre en rapport cette peine avec l'échelle de gradation établie par l'article 463 du Code pénal ordinaire, et, alors qu'il a constaté la nature et les limites des peines qui doivent être substituées à la première peine par l'admission des circonstances atténuantes, il doit faire porter la délibération sur les peines substituées (3).

Le dernier paragraphe de l'article 134 veut que, si aucune peine ne réunit la majorité de 5 voix, l'avis le plus favorable à l'accusé soit adopté; d'où la conséquence que le président doit mettre successivement aux voix les diverses natures de peines ou quotités de peines qui peuvent être appliquées au fait reconnu constant par le conseil et qui sont proposées par les juges. Si aucune peine ne réunit la majorité au premier tour d'opinions, il doit être procédé à un second tour, et, si aucun avis ne réunit la majorité, c'est la peine la plus faible qui doit être appliquée et devient la sentence du conseil, fût-elle l'opinion isolée d'un membre; mais, comme le bon sens indique que les juges qui ont commencé à voter pour la peine la plus grave se réuniront, si elle n'est pas adoptée, au second ou troisième tour de suf

(4) Cass. crim., 5 juillet 1850, affaire Porchet, Dall. P., 1850, 4, 254.

(2) Cass. crim., 12 juillet 1850, affaire Isery, Dall. P., 4850, 1, 254; 24 sept. 1850, affaire Castera, Dall. P., 1850, 4, 335.

(3) Commentaire, p. 405.

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