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et que « c'est, en effet, au préjudice du Trésor public, qu'à l'aide de ces pièces de comptabilité, contenant une fausse qualité prise par écrit, on a reçu des vivres, des fourrages et des appointements auxquels on n'avait aucun droit (1). »

2o Les faux commis sur des certificats de payement délivrés pour les brigades de gendarmerie (2);

3o Les faux consistant en fausses signatures sur des bons de vivres, attendu que les réquisitions des officiers de semaine, faites en exécution des pouvoirs à eux confiés, ont un caractère authentique et obligent le Trésor public (3).

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M. V. Foucher fait remarquer que l'article 257 ne prévoit pas l'usage des faux qu'il réprime, de sorte que pour le fait d'usage il y aura lieu de recourir au Code pénal ordinaire; « mais, dit-il, les actes prévus par l'article 257 constituant généralement des crimes commis par des officiers publics, et l'article 148 du Code pénal ordinaire punissant de la peine des travaux forcés à temps l'usage des faux commis par des officiers publics, la pénalité encourue pour cet usage se trouve en concordance avec celle édictée par le Code militaire; et comme, en cas d'admission de circonstances atténuantes, la peine peut être également celle de la reclusion ou d'un emprisonnement de deux à cinq ans, sous ce rapport encore l'assimilation est complète; toutefois, au cas de condamnation à l'emprisonnement, si le coupable qui a seulement fait usage est officier, on ne pourra le condamner en outre à la destitution, puisque la peine sera prononcée en vertu des dispositions du droit commun (4). »

Il a été jugé que, dans le cas où l'arrêt qui renvoie devant la cour d'assises le complice non militaire d'un faux commis sur ses livres par un comptable militaire, a visé par erreur l'article 147 du Code pénal au lieu de l'article 146, le président a pu, sans commettre de nullité, rectifier cette erreur et poser au jury la question de culpabilité dans les termes de cet article 146; et qu'en tout cas l'accusé est sans intérêt à se plaindre, s'il lui a été fait application, non de cet article 146 du Code pénal, mais de l'article 257 du Code de justice militaire, qui prononce la même peine que l'article 147 du Code pénal (5).

On comprend la répugnance que le juge doit éprouver à appliquer au complice l'article 146 du Code pénal; cet article prononce la peine des travaux forcés à perpétuité, tandis que l'article 257 du Code de justice militaire ne prononce contre le comptable militaire que les travaux forcés à temps, en permettant d'abaisser la peine jusqu'à deux ans de prison en cas de circonstances atténuantes. Par exception, pour ce cas de faux, le droit commun, auquel le complice non militaire se trouve forcément soumis, se trouve être plus sévère que la loi militaire (6).

(4) Cass. crim., 21 avril 1808, affaire Ramé.
(2) Cass. crim., 20 mai 1808, affaire Thévenín.
(3) Cass. crim., 42 juillet 4844, affaire Ligié.
(4) Commentaire, p. 823.

(5) Cass. crim., 46 juillet 4868, affaire Amans.

(6) Dalloz, Répertoire, vo Organisation militaire, no 793, t. XXXIV, p. 2034.

ART. 258.

Est puni d'un an à cinq ans d'emprisonnement tout militaire, tout administrateur ou comptable militaire qui fait sciemment usage, dans son service, de faux poids ou de fausses mesures.

Il faut entendre par faux poids et fausses mesures les instruments de pesage ou de mesurage qui sont, non pas seulement irréguliers, mais inexacts. L'usage de faux poids et de fausses mesures comprend nécessairement une fraude. Il n'en est pas nécessairement de même de l'usage de mesures et de poids anciens cet usage peut, en effet, ne pas être accompagné de fraude, et si la fraude n'existe pas, ce n'est pas un délit, d'après le droit commun: c'est une contravention.

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L'article 258 punit l'administrateur ou le comptable militaire qui fait sciemment usage, dans son service, de faux poids ou de fausses mesures. Il faut donc, pour tomber sous le coup de cet article:

1° Etre administrateur ou comptable militaire;

2o Avoir fait usage de faux poids ou de fausses mesures;

3o En avoir fait usage sciemment;

4o En avoir fait usage dans son service.

L'article 258 doit être appliqué d'une manière tellement restrictive,comme toute disposition pénale, d'ailleurs, — qu'il serait impossible de l'invoquer contre l'administrateur ou comptable militaire qui aurait trompé sur la qualité de la marchandise à l'aide de sacs, par exemple, ou de tons autres objets qui, n'étant ni poids ni mesures, serviraient cependant, par leurs indications frauduleuses, à induire l'acheteur en erreur sur la quantité. Un sac n'est pas, en effet, un appareil servant à mesurer ou à peser.

Les individus qui auront pratiqué cette fraude, s'ils sont administrateurs ou comptables militaires, et ceux qui,n'étant ni administrateurs ni comptables militaires, sont cependant justiciables des conseils de guerre, et ont fait usage de faux poids ou de fausses mesures, seront punis conformément à la loi pénale ordinaire, c'est-à-dire à l'article 423 du Code pénal, ainsi remplacé par la loi du 13 mai 1863: « Quiconque aura trompé l'acheteur sur le titre des matières d'or ou d'argent, sur la qualité d'une pierre fausse vendue pour fine, sur la nature de toute marchandise; quiconque, par usage de faux poids ou de fausses mesures, aura trompé sur la quantité des choses vendues, sera puni de l'emprisonnement pendant trois mois au moins, un an au plus, et d'une amende qui ne pourra excéder le quart des restitutions et dommages-intérêts, ni être au-dessous de cinquante francs.

Les objets du délit, ou leur valeur, s'ils appartiennent encore au vendeur, seront confisqués; les faux poids et les fausses mesures seront aussi confisqués, et de plus seront brisés.

« Le tribunal pourra ordonner l'affiche du jugement dans les lieux qu'il désignera, et son insertion intégrale ou par extrait dans tous les journaux qu'il désignera, le tout aux frais du condamné (1). ›

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(4) Loi des 27 mars-1er avril 1854, tendant à la répression plus efficace de certaines fraudes dans la vente des marchandises :

La tromperie sur la quantité des choses vendue n'existe, dans le droit commun, que par le concours des trois conditions suivantes : il est nécessaire que le vendeur ait eu l'intention de tromper; que la tromperie ait porté sur la quantité des choses vendues; que le moyen employé pour la consommer ait été ou l'emploi de faux poids ou de fausses mesures, ou des manœuvres tendant à fausser l'opération du pesage ou du mesurage, ou des indications frauduleuses tendant à fausser l'opération du pesage ou du mesurage, ou des indications frauduleuses tendant à faire croire à un pesage ou mesurage antérieur et exact. La loi exige formellement l'intention de tromper; elle ne punit que celui qui a trompé l'acheteur. Il faut que l'acheteur ait été trompé par la quantité des choses vendues c'est là le préjudice matériel. Enfin, il faut que la tromperie ait été opérée par l'un des moyens prévus par la loi : c'està-dire par usage de faux poids ou de fausses mesures, ce qui s'entend, ainsi que nous l'avons vu, de tous appareils ou instruments inexacts servant au pesage ou au mesurage. Quant aux manœuvres ou procédés tendant à fausser l'opération, qui sont complétement laissés en dehors de l'article 258 du Code

Art. 4. « Seront punis des peines portées par l'article 423 du Code pénal: 4° ceux qui falsifieront des substances ou denrées alimentaires ou médicamenteuses destinées à être vendues; 2. ceux qui vendront ou mettront en vente des substances ou denrées alimentaires ou médicamenteuses qu'ils sauront être falsifiées ou corrompues; 3° ceux qui auront trompé ou tenté de tromper, sur la quantité des choses livrées, les personnes auxquelles ils vendent ou achètent, soit par l'usage de faux poids ou de fausses mesures, ou d'instruments inexacts servant au pesage ou mesurage, soit par des manœuvres ou procédés tendant à fausser l'opération du pesage ou mesurage, ou à augmenter frauduleusement le poids ou le volume de la marchandise, même avant cette opération, soit enfin par des indications frauduleuses tendant à faire croire à un pesage ou mesurage antérieur et exact. >>

Art. 2. « Si, dans les cas prévus par l'article 423 du Code pénal ou par l'article 4 de la présente loi, il s'agit d'une marchandise contenant des mixtions nuisibles à la santé, l'amende sera de cinquante à cinq cents francs, à moins que le quart des restitutions et dommages-intérêts n'excède cette dernière somme; l'emprisonnement sera de trois mois à deux ans.

« Le présent article sera applicable même au cas où la falsification nuisible serait connue de

l'acheteur ou consommateur. »>

Art. 3. « Sont punis d'une amende de seize francs à vingt-cinq francs, et d'un emprisonnement de six à dix jours, ou de l'une de ces deux peines seulement, suivant les circonstances, ceux qui, sans motifs légitimes, auront dans leurs magasins, boutiques, ateliers ou maisons de commerce, ou dans les halles, foires ou marchés, soit des poids ou mesures faux, ou autres appareils inexacts servant au pesage ou au mesurage, soit des substances alimentaires ou médicamenteuses qu'ils sauront être falsifiées ou corrompues.

«Si la substance falsifiée est nuisible à la santé, l'amende pourra être portée à cinquante francs, et l'emprisonnement à quinze jours. »

Art. 4. Lorsque le prévenu, convaincu de contravention à la présente loi ou à l'article 423 du Code pénal, aura, dans les cinq années qui ont précédé le délit, été condamné pour infraction à la présente loi ou à l'article 423, la peine pourra être élevée jusqu'au double du maximum; l'amende prononcée par l'article 423 et par les articles 4 et 2 de la présente loi pourra même être portée jusqu'à mille francs, si la moitié des restitutions et dommages-intérêts n'excède pas cette somme, le tout, sans préjudice de l'application, s'il y a lieu, des articles 57 et 58 du Code pénal. »

Art. 5. « Les objets dont la vente, usage ou possession constitue le délit, seront confisqués, conformément à l'article 423 et aux articles 477 et 484 du Code pénal.

«S'ils sont propres à un usage alimentaire ou médical, le tribunal pourra les mettre à la disposition de l'administration pour être attribués aux établissements de bienfaisance.

S'ils sont impropres à cet usage ou nuisibles, les objets seront détruits ou répandus aux frais du condamné. Le tribunal pourra ordonner que la destruction ou effusion aura lieu devant l'établissement ou le domicile du condamné. »

Art. 6. Le tribunal pourra ordonner l'affiche du jugement dans les lieux qu'il désignera, et son insertion intégrale ou par extrait dans tous les journaux qu'il désignera, le tout aux frais du condamné. >>

Art. 7. « L'article 463 du Code pénal sera applicable aux délits prévus par la présente loi. » Art. 8. « Les deux tiers du produit des amendes sont attribués aux communes dans lesquelles les délits auront été constatés. »

Art. 9. « Sont abrogés les articles 475, no 44 et 479, no 5 du Code pénal. »
Cette loi a été rendue applicable aux boissons, par la loi du 5 mai 1855.

de justice militaire, il serait difficile de les définir avec précision; le délit se compose de trois éléments: les manoeuvres ou procédés frauduleux employés, l'objet de la fraude qui est de fausser le pesage, et enfin le résultat de la tromperie sur la quantité. Enfin, par les indications frauduleuses faisant croire à un pesage antérieur et exact, il faut entendre des indications matérielles; un chiffre, un signe quelconque, une déclaration verbale ne suffiraient pas.

M. V. Foucher pense, avec raison, qu'on devra appliquer même aux administrateurs ou comptables militaires les dispositions de l'article 5 de la loi du 27 mars 1851, si, par exemple, on trouvait dans leurs magasins de faux poids ou de fausses mesures, ou d'autres appareils inexacts servant au pesage ou au mesurage, alors même qu'ils ne seraient pas convaincus d'en avoir fait usage; car « c'est là, dit-il, une disposition générale applicable à tous ceux qui, dans l'exercice de leur état ou de leur service, peuvent avoir à se servir de ces appareils, et à laquelle les juridictions militaires doivent recourir, en vertu de l'article 267 du Code, à défaut de dispositions spéciales de ce Code (1). »

Il s'agit dans cet article 5 de la loi de 1851, de la confiscation des faux poids et fausses mesures, pour être détruits.

ART. 259.

Est puni de la reclusion tout militaire, tout administrateur ou comptable militaire qui contrefait ou tente de contrefaire les sceaux, timbres ou marques militaires destinés à être apposés, soit sur les actes ou pièces authentiques relatifs au service militaire, soit sur des effets ou objets quelconques appartenant à l'armée, ou qui en fait sciemment

usage.

ART. 260.

Est puni de la dégradation militaire tout militaire, tout administrateur ou comptable militaire qui, s'étant procuré les vrais sceaux, timbres ou marques ayant l'une des destinations indiquées à l'article précédent, en fait ou tente d'en faire une application frauduleuse ou un usage préjudiciable aux droits ou aux intérêts de l'État ou des militaires.

L'article 259 s'applique à la contrefaçon ou à la tentative de contrefaçon des sceaux, timbres ou marques militaires.

L'article 260 punit l'emploi frauduleux de vrais sceaux, de vrais timbres, de marques vraies.

Une remarque général à faire, c'est qu'il ne s'agit, dans cet article, que de sceaux, de timbres ou de marques militaires.

Il faut entendre par ces mots les types ou cachets, ou indications quelconques,

(1) Commentaire, p. 826.

constituant un signe caractéristique, que les militaires apposent dans l'exercice de leurs fonctions, dans leur service, ou dans les opérations auxquelles ils peuvent prendre part. Peu importe comment est faite la marque: qu'elle le soit avec un instrument ou avec la main; la seule chose nécessaire, c'est qu'il y ait un signe servant à caractériser l'objet sur lequel elle est apposée. La contrefaçon des sceaux, timbres ou marques militaires est un crime qui existe par lui-même, par le seul fait soit de la contrefaçon, soit de l'usage des sceaux, timbres ou marques contrefaits, en dehors de tout préjudice ultérieur. Il doit donc être tenu comme indépendant des autres crimes qui pourraient l'avoir accompagné, ou dont il aurait été le moyen; il doit être, en fait et en droit, apprécié, retenu et poursuivi, s'il y a lieu, d'une manière distincte et séparée.

L'article 260 punit de la dégradation tout militaire, administrateur ou comptable militaire, qui, s'étant procuré les vrais sceaux, timbres ou marques, en a fait un emploi frauduleux. Mais, que décider, si cet emploi frauduleux avait été fait par le détenteur légitime du sceau, du timbre ou de la marque? L'article lui serait évidemment applicable, et cela, pour trois raison :

1o La loi a voulu frapper l'emploi abusif du sceau vrai.

2o L'emploi, par le détenteur légitime, du sceau, du timbre ou de la marque, fait au préjudice de l'État ou des militaires, est un emploi abusif, parce que ce n'est point pour cet usage que les sceaux, timbres ou marques ont été remis à ce détenteur légitime.

3o Il y a même une aggravation de culpabilité, puisque le détenteur légitime a commis une fraude précisément à l'aide du moyen qui lui avait été fourni pour prévenir et reconnaître les fraudes d'autrui.

Les articles 259 et 260, enfin, punissent l'administrateur ou comptable militaire qui aura tenté de contrefaire les sceaux, etc., ou qui aura tenté d'en faire une application frauduleuse ou un usage préjudiciable à l'État ou aux intérêts des militaires. Comme il s'agit ici d'une tentative, il faudra poser une question distincte dans les termes exigés par l'article 2 du Code pénal, c'est-à-dire demander s'il y a eu commencement d'exécution qui n'ait manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de l'agent (1).

CHAPITRE X.

Corruption, prévarication et infidélité dans le service et dans l'administration militaire.

ART. 261.

Est puni de la dégradation militaire tout militaire, tout administrateur ou comptable militaire coupable de l'un des crimes de corruption ou

(4) Voir, plus haut, l'article 202 et son commentaire.

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