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des liens opérés par le mariage, doivent avoir une habitation commune, sous la direction de l'usager qui en est le chef: d'où il résulte qu'il serait contraire au texte même du code d'en étendre le prescrit aux autres parens et aux alliés.

CHAPITRE LXIV.

Des Charges inhérentes au droit d'ha

bitation.

2818. CELUI qui a un droit d'habitation doit d'abord fournir caution avant de pouvoir entrer en jouissance; mais, attendu que la règle est ici la même que pour l'usufruit (626), nous devons en conclure que cette obligation ne pèse point sur l'usager qui en a été dispensé par l'acte constitutif du droit d'habitation, non plus que sur le vendeur ou le donateur de la maison, avec réserve du droit de l'habiter, attendu que, dans tous ces cas, l'usufruitier ne doit point de cautionnement (601.)

Nous croyons encore que la femme à laquelle la loi accorde un droit d'habitation durant les trois mois pour faire inventaire et les quarante jours pour délibérer (1465), si elle a été mariée sous le régime communal, ou pendant l'année du deuil, si elle s'est mariée avec adoption du régime dotal (1570), ne doit point fournir de cautionnement pour la jouis

sance de ce droit momentané; soit parce que c'est ici un droit d'habitation légale, comparable à l'usufruit légal des père et mère à raison duquel on ne doit point de caution; soit parce que la veuve se trouvant de plein droit et par le fait, en possession de cette habitation, n'est point littéralement dans le cas prévu par le code lorsqu'il dit que l'usager doit préalablement ́et avant d'entrer en jouissance, donner caution; soit parce qu'au titre du contrat de mariage, où ce droit est établi au profit de la veuve, le code ne lui impose pas cette obligation, sans doute par le motif que le cautionnement serait ici de trop peu d'importance pour les héritiers, et que, d'autre part, la veuve est digne de trop d'égards dans la position où elle se trouve, pour lui imposer une charge à raison d'un bienfait si peu considérable et qui ne lui est accordé que par principe d'humanité. 2819. Enfin celui qui aurait acquis un droit d'habitation, par un contrat commutatif, comme un bail à vie, au moyen d'un intérêt annuel, ou d'un capital une fois payé, ne devrait point fournir de cautionnement s'il ne s'y était soumis par son contrat, et cela par deux raisons:

La première, parce que l'obligation qui pèse sur l'usager ou l'usufruitier, de donner caution pour la garantie du propriétaire, est une charge purement légale, décrétée par la loi seule, dans le silence des parties; charge que le législateur a pu imposer pour l'exécution des libéralités, comme étant une condition tacite de la donation, sans que le donataire ou le légataire ait le

droit de s'en plaindre; mais on ne pourrait l'étendre de plein droit également à l'exécution des contrats commutatifs, lorsque les contractans ne l'ont pas stipulé, parce qu'ici toutes les conditions et les charges du contrat ne dépendent que de la volonté des parties (1163), la loi ne peut vouloir dans l'intérêt réciproque des contractans, que ce qu'ils ont voulu eux-mêmes, et l'on ne peut pas dire qu'ils aient voulu cette charge quand ils ne l'ont pas stipulée.

La seconde, parce que la nécessité du cautionnement, en matière d'usufruit ou d'usage, n'a été introduite par les lois que dans l'intérêt de l'héritier ou du légataire de la propriété; c'est pour lui que la loi stipule cette garantie dans les legs de cette espèce, parce qu'il n'est pas présent pour veiller personnellement à ses intérêts; mais lorsqu'un droit d'usage ou d'usufruit est constitué par un contrat commutatif, toutes les parties intéressées étant présentes et participant toutes à la négociation, il n'est pas de l'office de la loi d'intervenir dans la convention pour imposer à l'un ou à l'autre des traiune obligation qu'ils ne jugent pas à propos de stipuler eux-mêmes.

tans,

Ainsi, l'usufruitier ou l'usager par contrat commutatif, ne peut être tenu à donner caution qu'autant que l'obligation en a été stipulée à sa charge dans le contrat.

2820. Le droit d'habitation assuré dans un con

trat de mariage au profit de l'époux survivant, est-il aussi soumis à l'obligation du cautionnement?

La

La raison de douter, c'est que le contrat de mariage est une convention synallagmatique, faite à titre onéreux de part et d'autre, d'où l'on pourrait être porté à conclure qu'on doit étendre à ce cas, la décision que nous venons de porter sur celui du droit d'habitation acquis par contrat commutatif; tel était aussi le sentiment le plus commun des auteurs (1), qui ne voulaient pas que l'époux survivant fût obligé de donner caution, même à raison de l'usufruit qui lui avait été assuré par son conjoint dans leur traité nuptial; mais cette doctrine, fondée sur une simple argumentation, et portée déjà hors des bornes prescrites par la loi romaine, doit-elle encore être suivie aujourd'hui ?

Nous ne le pensons point, et nous croyons, au contraire, qu'on doit soumettre à l'obligation du cautionnement ordinaire, celui des époux auquel on a assuré soit un droit d'usufruit, soit un droit d'habitation, par son contrat de mariage.

L'opinion contraire n'est que la suite d'une erreur de principe sur la nature de diverses conventions qu'il ne faut pas confondre ce n'est qu'en attribuant au contrat synallagmatique les effets qui ne sont propres qu'au contrat commutatif, qu'on a pu, par une fausse argumentation, conclure que le droit d'usufruit ou d'usage, donné par un traité nuptial, n'était pas soumis à l'obligation du cautionnement.

(1) Voy. dans l'ancien répertoire, au mot habitation tom. 8, pag. 378.

ΤΟΜ. VI.

6

Lorsque ce droit est établi par contrat.commutatif, exiger de l'usager ou de l'usufruitier un cautionnement qu'il n'aurait pas expressément promis dans l'acte, ce serait lui imposer une obligation qui ne peut dériver ni du contrat, ni de la loi.

Et d'abord celui qui acquiert un droit d'usage ou d'usufruit, par contrat commutatif, ne recoit aucune libéralité susceptible d'être grevée d'une charge qu'il ne s'est point ne s'est point imposée, puisqu'il rend l'équivalent de ce qu'on lui donne (1104). Une fois qu'il a payé le prix de la chose, il ne doit rien de plus; par conséquent exiger une caution de sa part, ce serait lui imposer une obligation qui ne dérive pas du con

trat.

Ellene dérive pas non plus de la loi qui n'exige le cautionnement que dans l'intérêt de l'héritier ou du légataire de la propriété, car les effets du contrat commutatif ne sont pas renvoyés après le décès de celui qui aliène par cette voie, un droit d'usage ou d'usufruit : c'est sur lui-même que son contrat s'exécute; c'est donc à lui à exiger la promesse du cautionnement, s'il veut en faire une condition de son traité; mais s'il ne le fait pas, la loi n'intervient point dans son administration privée, pour exi ger, en sa faveur, ce qu'il ne veut pas lui-même,

Mais toutes ces conséquences, qui dérivent de la nature particulière du contrat commutatif, sont étrangères à la disposition par laquelle l'un des époux assure à l'autre, en cas de survie, un droit d'usage ou d'usufruit, dang

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