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de législation, justice et affaires étrangères; section du contentieux; section de l'intérieur, de l'instruction publique et des cultes; section des travaux publics, de l'agriculture et du commerce; section de la guerre et de la marine; section des finances. Cette division pouvait être modifiée par décret du pouvoir exécutif.

Chaque section était présidée par un conseiller d'Etat en service ordinaire nommé, par le président de la République président de section.

Les attributions du Conseil d'Etat étaient profondément augmentées en matière législative; d'après la Constitution. de 1852, tous les projets de loi étaient soumis au Conseil d'Etat, y compris les lois de finances. Les députés n'avaient pas l'initiative des lois, et leurs amendements ne pouvaient être admis en discussion que s'ils avaient été adoptés par le Conseil. Les projets de loi étaient tous présentés et soutenus par des conseillers d'Etat. A cet effet, l'empereur désignait trois conseillers d'Etat pour soutenir la discussion de chaque projet de loi présenté au Corps législatif ou au Sénat. L'un de ces conseillers pouvait être pris parmi les conseillers en service ordinaire hors sections.

Cette organisation fut modifiée dans quelques points secondaires par des décrets divers. Un décret du 10 décembre 1852 créa une présidence du Conseil d'Etat; un décret du 6 novembre 1858 porta de 15 à 18 le nombre des conseillers en service ordinaire hors sections, nombre qui fut élevé à 19 le 16 mai 1863, et à 20 le 4 novembre 1865. Le nombre des auditeurs fut porté, en 1853, de 40 à 80, divisés, le 1er octobre 1860, en deux classes. Le nombre des vice-présidents fut porté à trois le 18 octobre 1863.

Mais les attributions du Conseil ne furent sérieusement modifiées que par le sénatus-consulte du 8 septembre 1869, qui rendit au Corps législatif l'initiative des lois, et qui soumit les amendements présentés par les députés à un simple avis du Conseil.

29. Le 15 septembre 1870, tous les membres du Conseil d'Etat de l'Empire furent suspendus de leurs fonctions, par un décret du gouvernement de la Défense nationale, jusqu'à

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ce que le Conseil fût réorganisé par l'Assemblée nationale; en même temps une commission provisoire fut chargée d'expédier les affaires administratives et contentieuses urgentes. Et le 19 septembre le personnel de cette commission fut constitué.

Elle fonctionna jusqu'au 24 mai 1872, où l'Assemblée nationale vota la loi réorganisant d'une façon régulière le Conseil. L'Assemblée s'était réservé la nomination des conseillers d'Etat, conformément aux dispositions de la loi de 1848; mais les fonctions qu'elle attribuait au Conseil n'étaient pas celles que la Constitution du 4 novembre lui avait données; elles se rapprochaient sensiblement de celles qui avaient été déterminées par la loi du 19 juillet 1845. Le Conseil était formé de 22 conseillers d'Etat en service ordinaire et 15 conseillers en service extraordinaire. Il était partagé en quatre sections, dont trois d'administration pure et une du contentieux.

30. La loi du 24 mai 1872 est encore en partie en vigueur; mais la loi constitutionnelle du 25 février 1875 a rendu au pouvoir exécutif la nomination des conseillers d'Etat, et une loi du 17 juillet 1879 a modifié la composition du Conseil en augmentant le nombre des conseillers en service ordinaire et extraordinaire, et en créant une section de législation. La loi du 13 juillet 1879 a été complétée par un décret en date du 2 août 1879, qui a réglé le service intérieur de l'assemblée générale et des assemblées des sections du Conseil. Elle a été modifiée en outre, en ce qui concerne les auditeurs, par une loi du 6 juillet 1887, qui a porté de quatre années à huit années la durée possible des services de l'auditorat de seconde classe.

Enfin la loi du 26 octobre 1888 et un règlement d'administration publique du 12 novembre 1888 ont créé au Conseil d'Etat une section temporaire du contentieux pour le jugement des affaires de contributions et d'élections.

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CHAPITRE II.

FONCTION GÉNÉRALE ET HIERARCHIQUE DU CONSEIL D'ÉTAT.

31. Le Conseil d'Etat ou les Conseils du roi, dans l'ancienne monarchie, étaient les conseils particuliers du roi; celui-ci détenant entre ses mains tous les pouvoirs, exécutif, législatit et judiciaire; les conseils attachés à sa personne n'avaient pas d'attributions propres, ou plutôt avaient toutes les attributions que le roi leur confiait. Ils gouvernaient, administraient, légiféraient et jugeaient, mais avec la fiction que c'était le roi qui gouvernait, administrait, légiférait et jugeait. On exprimait cette pensée par la forme même des édits, des ordonnances et des jugements, qui était, en général, l'une des suivantes : Le roi s'étant fait représenter en son Conseil; ou Sur la requête présentée en son Conseil, le roi, etc.; ou Le roi, étant en son Conseil, a ordonné et ordonne, a cassé et casse, etc.

Lorsque le roi était réellement présent, les membres du Conseil opinaient, mais ne délibéraient pas; ils délibéraient, au contraire, et l'avis passait à la majorité des voix lorsque le roi était absent.

Le Conseil suivait le roi partout où il allait et n'avait d'autre résidence que celle du roi. Partout où il tenait ses séances, il était censé siéger en la chambre du roi.

32. On comprend que le Conseil du roi ait éternellement disparu avec les principes et les règles de l'ancien régime.

La Constitution du 22 frimaire an VIII, en établissant le Conseil d'Etat, en a fait un corps ayant une existence distincte, des attributions spéciales, une composition propre, en rapport avec les lois générales de gouvernement et d'administration consacrées par la Révolution française.

33. Nous savons que de la base au sommet de la hiérarchie administrative nos institutions ont placé, auprès des agents principaux qui ont la responsabilité de la direction des affaires, des conseils chargés d'éclairer leurs décisions. Le Conseil d'Etat représente la plus haute application de ce principe. D'une façon générale, il est le conseil du gouvernement central, comprenant le chef du pouvoir exécutif, les ministres et les chambres législatives. Il est, en outre, le régulateur de la juridiction administrative, le contrôle de la gestion de tous les dépositaires des pouvoirs ou des intérêts publics, et enfin le gardien de la liberté religieuse et de la liberté de conscience.

34. Comme conseil de gouvernement, le Conseil d'Etat n'a pas d'autorité qui lui soit propre; il n'agit que sur l'initiative et sous l'autorité du chef de l'Etat et des ministres responsables (1). On retrouve cette initiative dans la manière dont il est saisi, dans le mode de ses délibérations, dans le caractère de ses actes. Le Conseil, en effet, n'est saisi que par le président de la République ou par les ministres, et dans chaque affaire il faut un renvoi spécial. Cette nécessité d'une délégation est même rappelée dans chacun des projets et des avis que le Conseil arrête et qui commencent tous ainsi : Le Conseil qui, sur le renvoi ordonné par....., a pris connaissance, etc.

35. Le Conseil, ainsi saisi par un ordre du président de la République ou des ministres, ne peut étendre la mission qui lui a été donnée au delà de ses termes sans le consentement du gouvernement, et le résultat de ses délibérations est adressé au ministre responsable par l'intermédiaire ou les ordres de qui le Conseil a été consulté.

36. Enfin l'avis du Conseil n'est pas obligatoire pour le gouvernement; celui-ci peut le rejeter absolument ou n'en accepter que certaines parties.

37. Le Conseil, dans les limites qui viennent d'être déter

(1) L. 24 mai 1872, art. 8. Locré, p. 17.

minées, peut être consulté sur toutes les questions que le gouvernement veut bien lui soumettre, que la matière soit législative, administrative ou judiciaire (1).

38. Nous avons dit que le gouvernement a le droit absolu de ne pas déférer aux délibérations du Conseil. S'ensuit-il que le gouvernement peut toujours se dispenser de consulter qu'on là seil? La négative n'est pas douteuse. Si le Conseil d'Etat n'est pas un pouvoir, il n'est pas cependant un Conseil privé d'administration, il est une institution, et sa délibération préalable est réclamée par les lois dans un très grand nombre de matières (2).

39. Comme régulateur de la juridiction administrative, le Conseil d'Etat a un pouvoir propre. Ce pouvoir, ainsi qu'on l'a dit supra, no 38, a été contesté. On a longtemps décidé que le droit suprème qu'il exerçait, il ne l'avait que comme Conseil du souverain représenté par l'empereur ou le roi, dont il n'était, en quelque sorte, que l'inspirateur juridique. Mais cette doctrine, compatible avec le régime monarchique, et comme telle acceptée de l'an VIII à 1848 et de 1851 à 1870, a été repoussée sous le régime républicain de 1848, et sous celui des constitutions postérieures au 4 septembre 1870.

Le Conseil, en tant que régulateur de la justice administrative, agit en certaines matières comme juge définitif d'appel; en d'autres, comme juge de cassation.

40. Comme contrôleur de la gestion de tous les dépositaires des pouvoirs ou des intérêts publics, le Conseil est tantôt l'aide ou le délégué du chef de l'Etat, et tantôt le juge des recours divers adressés contre les actes de ces dépositaires. Dans le premier cas, et quelque obligatoire que soit son concours aux termes des lois spéciales, il n'émet cependant qu'un avis qui ne lie pas le chef d'Etat; dans le second, il est, au contraire, l'arbitre unique et suprême, chargé de statuer sur la validité de l'acte attaqué et d'en prononcer la

(1) L. 24 mai 1872, art. 8. (2) L. 24 mai 1872. art. 8.

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