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» primeur pour le payer de ses avances. J'ai donc bien acquis » le droit d'être oublié.

» Si d'autres circonstances me permettoient de me livrer » encore à la poésie, je voudrois du moins choisir des sujets » dont l'importance pût dédommager les lecteurs de la foi» blesse de mes talens.

» Recevez, Monsieur, l'assurance de ma haute estime. »> FONTANES.

Les débuts de Lafond dans la comédie continuent à attirer la foule au Théâtre-Français. Mercredi, il a joué le Misantrope, le rôle le plus difficile peut-être du théatre, et dans lequel Molé lui-même laissoit quelque chose à desirer. Les applaudissemens que Lafond a reçus ne doivent être regardés par lui que comme des encouragemens. Il ne paroît pas avoir bien saisi le caractère d'Alceste, et la nuance délicate qui sépare ce personnage des héros tragiques.

-La reprise de l'opéra comique intitulé le Roi et le Fermier, a obtenu un succès éclatant. La musique charmante de Montsigni a produit tout l'effet qu'elle ne peut manquer de produire toutes les fois qu'elle sera bien exécutée. Ce grand musicien, que Grétry seul, parmi les compositeurs français, a quelquefois égalé, a été demandé à grands cris après la représentation. Il n'a pas jugé à propos de paroître, et, suivant nous, il a bien fait. Cet honneur est devenu trop souvent la récompense d'une mauvaise pièce, d'une musique détestable, ou d'un mauvais acteur.

-On donne en même temps sur le Théâtre de l'Impératrice un des chefs-d'œuvre de la musique italienne. Si à la première représentation la Frascatana n'a pas obtenu tout le succès qu'elle mérite, la faute en est aux acteurs. Depuis, ils out étudié ; et leurs efforts ont été heureux. On leur a fait répéter l'admirable quatuor du second acte.Nous invitons ceux qui pensent que la musique n'est qu'une mode laquelle varie tous les dix ans, à aller voir la Frascatana et le Roi et le Fermier, Nous donnons le même conseil aux compositeurs qui croient que l'art s'est perfectionné depuis vingt ans, et qu'ils seroient sifflés, s'ils faisoient aujourd hui de la musique comme en faisoient alors Monsigni et Paësiello.

La classe de la langue et de la littérature françaises de l'Institut, a élu, mercredi dernier, à la place vacante par la mort de M. Target, M. le cardinal Maury, ci-devant l'un des quartante de l'Académie Française.

Les arts viennent de perdre J. B. C. Jallier, l'un des architectes des bâtimens civils du ministère de l'intérieur, ancien pensionnaire de l'académie de France à Rome. Il devoit

bâtir l'hôtel de la caisse d'escompte en 1788, son projet ayant eu la préférence, à la suite d'un concours public. Il est décédé le 12 du courant, âgé de soixante-neuf ans.

-Les écoles de droit de Toulouse et de Strasbourg, seront ouvertes le 3 novembre. Tous les jeunes gens qui ont seize ans accomplis, et qui se proposeroient de suivre les cours d'une de ces écoles, doivent s'inscrire dans la première quinzaine de chaque trimestre, et représenter leur acte de naissance. -La distribution des prix pour l'exposition des produits de l'industrie française a eu lieu hier à 9 heures du matin, dans une des salles de l'administration des ponts et chaussées. Elle a été faite par S. Ex. le ministre de l'intérieur, assisté de M. Monge, président du sénat, et président du jury national pour l'exposition, en présence de M. le conseiller d'Etat préfet du département de la Seine, et du jury. Le rapporteur dufjury, M. Costaz aîné, a prononcé un discours dans lequel il a annoncé que l'exposition de 1806 a prouvé un développement et des progrès sensibles de l'industrie française, pendant les quatre années qui se sont écoulées depuis l'exposition de l'an 1o; qu'un nombre de fabricans dix fois plus censidérable s'est présenté cette année au concours; que cette louable émulation s'est particulièrement montrée parmi les manufacturiers des départemens, même les plus éloignés de l'Empire. Le rapporteur a fait ensuite l'appel des fabricans qui ont été jugés dignes d'une distinction particulière ; il a rappelé d'abord ceux qui ayant été récompensés dans l'une des précédentes expositions, et ayant paru à celle-ci, y ont été jugés toujours dignes des honneurs qu'ils avoient mérités par la constance de leurs efforts. Les récompenses décernées aux fabricans qui n'avoient point encore été couronnés dans les expositions précédentes, ont été divisées en cinq classes; 1° les médailles d'or, au nombre de 26; 2° les médailles d'argent de première classe, au nombre de 64; 3° les médailles d'argent de deuxième classe, au nombre de 54: 4 les mentions honorables; 5° les citations. Les fabricans proclamés qui se trouvoient à Paris ont été successivement présentés à S. Ex. le ministre de l'intérieur par le président du jury national.

-On écrit de Milan, que la troupe de comédiens français sous la direction de mademoiselle Raucour, a commencé ses représensations le 10 octobre, par la tragédie d'Iphigénie en Aulide, suivie des Fausses Infidélités.

La société libre des arts du Mans a proposé pour sujet des deux prix de l'année prochaine, 1°. d'indiquer dans un mémoire détaillé, quelles sont les meilleures tourbières du

département de la Sarthe, où la tourbe est abondante, où la rareté du bois se fait de plus en plus sentir par sa cherté successive. Le prix est une médaille d'or, ou 300 fr., au choix de celui dont le mémoire aura le mieux rempli les conditions du prospectus; 2°. l'éloge de M. Gaillard, aucien membre de l'académie française, doyen de celle des inscriptions, et correspondant de la société libre des arts du Mans. Le prix sera une médaille d'or, ou 200 f., au choix de celui dont l'ouvrage, en prose ou en vers, aura été jugé digne de le remporter. Les éloges et mémoires seront adressés, francs de port, avaut le 15 avril 1807, à M. de Tournay, secrétaire-général de la société.

Sir Georges Staunton, fils de l'auteur célèbre de ce nom, a établit alternativement son séjour à Canton et à Macao. Il traduit en chinois un ouvrage sur la vaccine, et depuis cette époque, la vaccination est devenue presque générale à Canton. Les Chinois ont vaincu à cet égard leurs préjugés contre toute innovation qui vient de l'étranger. Ils ont rassemblé une somme considérable, à l'effet de fonder un établissement qui doit propager la vaccine dans les provinces voisines de Canton, ét avec le temps, dans le reste de ce vaste empire, où la petitevérole eulève tous les ans un dixième de la population.

-La Gazette de la cour de Russie donne, dans les termes suivans, sous la date de Pétersbourg, 23 septembre, l'itinéraire du voyage autour du monde que viennent de terminer les capitaines Krusenstern et Lisanski :

«Les vaisseaux le Nadeshda et la Newa, destinés à un voyage autour du monde, partirent de Cronstadt, le 26 juillet 1803, sous les ordres du capitaine Krusenstern. Le chambellan Resanow, qui se trouvoit sur le premier de ces bâtimens, étoit chargé de réaliser les vues du gouvernement sous le rapport du commerce. Il y avoit aussi à bord plusieurs savans, tant dans l'astronomie que dans l'histoire naturelle.

» Le 21 décembre, les deux vaisseaux arrivèrent au Brésil, près de l'île Sainte-Catherine; ils remirent à la voile le 25 janvier (4 février), doublèrent le cap Horn, et atteignirent, áu commencement de juin, l'île Owaiga, l'une des Sandwick. De cet archipel, la Newa continua sa route sous les ordres du capitaine Lissanski, avec la cargaison destinée pour nos établissemens d'Amérique, et se dirigea vers l'île de Kadjak, où elle arriva au mois de juin. Le vaisseau le Nadeshda, conduit par le capitaine Krusenstern, entra, au commencement de juillet, dans notre port de Saint-Pierre et SaintPaul. De là, ce dernier vaisseau se rendit sur les côtes du Japon; et à son retour au Kamschatka, le 14 (26) juillet

1705, le chambellan de Resanow passa à bord d'un bâtiment particulier appartenant à la compagnie, et se rendit dans nos établissemens d'Amérique, pour s'occuper des moyens d'améliorer la civilisation de cette contrée.

» Les vaisseaux le Nadeshda et la Newa, qui s'étoient réunis le 20 novembre (2 décembre) 1805, arriverent le 27 du même mois à Canton. Ils y échangèrent sans obstacles leurs marchandises contre des marchandises chinoises; et après s'être vus traités de la manière la plus amicale par les Chinois, ils levèrent l'ancre le 29 janvier (10 février), et passèrent devant les îles de la Sonde. A leur retour, la Newa ne s'arrêta point jusqu'à Portsmouth, et le Nadeshda jusqu'aux îles Sainte-Hélène. Ces deux vaisseaux sont heureusement arrivés à Cronstadt, le premier le 23 juillet, et le dernier le 7 août (4 et 19 août). Ce qui honore particulièrement les commandans, c'est que dans un voyage de trois ans, le Nadeshda n'a pas perdu un seul homme de son équipage, et la Newa n'a eu que deux morts. »>

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Les obsèques de M. Barthez, archi-chancelier de l'uni versité de médecine de Montpellier, médecin consultant de S. M. I. et R., associé de l'Institut, membre de la Légion d'Honneur, ont été célébrées, le 17 courant, en présence d'une députation de l'Ecole de Médecine de Paris, des différens corps académiques, auxquels avoit appartenu ce savant, et du plus grand nombre de ceux des médecins de la capitale qui avoient été ses élèves. M. Desgenettes, inspecteur-général du service de santé militaire, a prononcé le discours suivant sur le lieu même de la sépulture:

« Messieurs, nous venons déposer dans son dernier asyle un savant distingué, un érudit profond, et l'un des plus grands médecins du siècle qui vient de s'écouler.

» Paul-Joseph de Barthez annonça, dès l'enfance, sa pénétration, son goût pour l'étude et la facilité de retenir fortement, et de disposer avec ordre ce qu'il avoit appris.

>> Destiné de bonne heure à l'étude de la médecine, il en prit les premières leçons dans l'Ecole de Montpellier, qui, peu d'années après, devoit le compter parmi ses plus illustres professeurs.

» L'intervalle du temps qui s'écoula entre son doctorat et sa nomination à une chaire de professeur, fut employé par lui à suivre et à recueillir des observations, tant dans la Normandie, alors aux ordres de M. le maréchal d'Estrées, qu'à l'armée d'Allemagne, vers 1757.

» Ce fut dans les hôpitaux militaires qu'il commença à pratiquer notre art. Il se forma sur ce grand théatre de mi

seres humaines, à l'habitude de voir, de comparer, de juger, d'arriver enfin à ces grand résultats qui ne peuvent avoir d'autres bases dans la médecine-pratique, que l'observation cent et cent fois répétée. Barthez poussoit déjà jusqu'à l'austérité l'exactitude dans tous ses devoirs. Assidu, les jours entiers, dans les hôpitaux et aux lits des soldats, il contracta souvent les maladies dont il s'efforçoit de les guérir, et il manqua plusieurs fois d'en être la victime. Tel est le témoignage éclatant que j'ai eutendu rendre de ses services par MM. Poissonier, tous deux premiers médecins des armées, et qui s'honoroient dans leur vieillesse d'avoir en quelque sorte ouvert à Barthez la carrière de la célébrité. Cette assiduité, ce caractère décidé qui ne permettoit jamais à Barthez de montrer de l'hésitation dans les circonstances les plus embarrassantes; cette trempe d'ame vigoureuse dont il étoit doué, et qui plaît tant aux hommes de guerre, avoient subjugué leur confiance.

» Dans les séjours momentanés que Barthez fit à Paris ( et il affectionnoit singulièrement cette capitale), il consacroit tout son temps à l'étude la plus opiniâtre. Sans cesse dans les bibliothèques publiques et particulières, il dévoroit les livres, et commençoit à accumuler ses trésors d'érudition variée et profonde, qu'aucun homme de notre temps n'a depuis égalée (1). La connoissance des langues savantes, anciennes et modernes, fut un des moyens qui lui facilitèrent l'acquisition de tant de lumières ; mais il dut sa prééminence sur les autres érudits, à la dialectique à la fois subtile et robuste qu'il porta dans l'examen et la discussion des auteurs les plus célèbres, comme les plus obscurs, qu'il jugea tour-à-tour, après les avoir cités au tribunal d'une raison supérieure.

» Barthez devint professeur dans l'Ecole de Montpellier; il faut donc maintenant le considérer sous le double rapport de l'instruction qu'il a propagée par ses leçons et par ses écrits.

>> A une époque où Lamure, Leroy'et Venet y répandoient le plus grand éclat, en venant s'asseoir à côté d'eux, il se créa une réputation qui brillant par des talens différens et plus variés, ne fut cependant pas rivale de la leur.

» Il enseigna successivement toutes les branches de la médecine, et il entraîna trente ans la foule des auditeurs par la méthode sévère qui régnoit dans l'exposition de ses doctrines, par sa vaste érudition, par l'abondance et l'éclat de son élocution. Ce ses anciens disciples peuvent que seuls assurer,

(1) M. de Barthez avoit lui-même formé une riche collection de livres, qu'il a léguée dans son testament à l'Ecole de Médecine de Montpellier,

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