tout se réunit. On a droit d'en conclure qu'un cas qui n'est pas réservé dans un diocèse ne l'est point à l'égard d'un confesseur qui y administre le sacrement de pénitence: d'où l'on doit également conclure que, dès qu'une censure n'est point réservée dans le lieu où le pénitent se confesse, tout confesseur approuvé peut en absoudre. Toute la différence que trouvent les auteurs qui nous sont contraires, c'est que la censure est attachée à la personne du pénitent, et le suit partout, et que la réserve ne regarde que le confesseur. Mais il nous paraît qu'ils ne touchent point l'état de la question, et qu'on peut faire aisé ment disparaître cette prétendue différence; car il ne s'agit pas de savoir si la censure suit partout le pénitent, et si elle est attachée à sa personne; tout le monde en convient; on ne dispute que sur la réserve. La réserve ne le suit point par rapport au péché, pourquoi le suivrait-elle par rapport à la censure? Tout est égal de part et d'autre. La censure suit partout le pénitent, le péché le suit aussi; mais la réserve le suit-elle également? Elle ne le suit point dès qu'il ne s'agit que d'un péché; pourquoi veut-on qu'elle le suive lorsqu'il s'agit d'une censure? Ce raisonnement est de l'auteur du Traité des Dispenses que nous avons déjà cité. Il nous a paru naturel, décisif et sans réplique.» 3 Des censures ab homine.-28. Il y a une espèce de censure sur l'absolution de laquelle nous devons nous arrêter un instant; je veux parler des censures ab homine. Il y en a de deux sortes; car elles sont portées ou par manière de statut, ou par forme de sentence. Celles-ci sont encore de deux sortes elles peuvent avoir été portées par une sentence particulière contre telle personne en particulier, nommément désignée. Elles peuvent être portées par une sentence générale sans designation de personne. Cette censure n'est en réalité qu'un statut. Lorsqu'une censure a été portée nommément contre une personne, il n'y a que le supérieur qui l'a prononcée, ou son vicaire général, ou son successeur, ou son délégué à qui il en a donné le pouvoir, ou son supérieur en cas d'appel, qui puisse en absoudre. Tous les canons renvoient l'excommunié à celui qui a prononcé l'excommunication pour en recevoir l'absolution (1). Telle était la pratique de l'Eglise primitive, qui ne permettait pas de recevoir à la communion un clerc ou un laïque excommunié, sans le consentement de celui qui avait prononcé l'excommunication. Ainsi l'ont décidé les conciles d'Elvire, can. 54; le premier d'Arles, can. 16; celui de Nicée (2); celui d'Antioche, de l'an 341, can. 6; enfin le premier d'Orange (3). Cette même doctrine est consignée (1) Cap. Prudentiam, de Offic. et pot. jud. deleg., § Cæterum. Cap. Ad reprimend., de Öffic. jud. ordin. Cap. Nuper et can. Sacro, de Sent. excom. (2) De his qui communione privantur... ab aliis non recipiantur, can. 5. (3) Placuit in reatum venire episcopum qui admonitus de excommunicatione cujusque, sine reconciliatione ejus DICTIONN. DE Théol. morale. I, dans la 36 lettre du vir livre du Registre de saint Grégoire. L'évêque qui aurait osé enfreindre ces dispositions devait rendre compte de sa conduite dans un coneile et aurait risqué d'y être déposé (4). D'après cette discipline, encore enseignée dans l'Eglise, un prêtre interdit dans un diocèse ne peut donc être relevé par l'évêque d'un autre diocèse. La justice et le bon ordre demandent qu'on en use ainsi; autrement l'ordre des jugements serait confondu, les crimes continueraient sans qu'on pût y apporter de remède. 29. Quant aux censures ab homine portées par une sentence générale ou par forme de statuts, ce qui arrive lorsqu'elle est portée sans désignation do personne contre les auteurs d'un crime qui a été commis, ou de tel péché dont on se rendra coupable, les docteurs conviennent communément qu'il faut en juger comme des censures a jure. Voy. ci-dessus, nos 25 et suiv. 30. La première condition essentielle, c'est le pouvoir d'absoudre. Sans pouvoir, l'absolution est nulle. De là il suit, 1° que celui qui aurait encouru une censure portée par plusieurs supérieurs, pour plusieurs crimes, doit se faire absoudre par chacun d'eux, à moins qu'ils n'en délèguent un pour absoudre en leur nom; 2° que le pouvoir d'absoudre des censures étant divisible, celui qui n'a le pouvoir d'absoudre que d'un certain nombre de censures, peut en délier, eu laissant subsister les autres. Conséquemment une sentence générale d'absolution des censures donnée sans limitation est valide à l'égard des censures dont on peut absoudre, elle est invalide à l'égard des autres. C'est pourquoi, avant d'absoudre d'une censure, il faut bien s'enquérir de la nature de celles dont le coupable est lié, afin de le renvoyer, pour l'absolution des censures sur lesquelles on n'a pas de pouvoir, au supérieur qui peut en délier. 31. La deuxième condition essentielle c'est qu'il faut exposer à celui qui doit ab. soudre, les motifs pour lesquels la censure a été portée. Une absolution obtenue par un faux exposé serait donc nulle. C'est la décision d'Innocent III (5). 32. La troisième condition nécessaire pour être absous de toutes ses censures, c'est de les exposer toutes au supérieur à qui on en demande l'absolution: autrement on ne serait délié que de celles qu'on aurait exposées. Car le pouvoir du supérieur se serait qui etiam excommunicav't, ei communicars præsumpserit, can. 11. (4) Quod si fecerit (ut excommunicato communionem indulgeat alienus episcopus) sciat se convocalis episcopis causas esse dicturum. Conc. Arausic. can. 16.-Le concile d'Elvire, can. 53, parle dans le même sens (5) Cap. Cum pro causa, de Sent. excom. 3 exercé sur celles-là seulement, puisqu'un juge n'accorde pas ordinairement plus qu'on ne lui demande. Ainsi un homme qui, après avoir encouru plusieurs excommunications, n'aurait reçu l'absolution que d'une seule, ne serait pas rétabli dans la communion de l'Eglise; par conséquent, il ne serait pas capable de recevoir les sacrements, ni de participer aux prières, ni aux autres biens spirituels. L'effet des autres excommunications subsistant, il demeurerait toujours séparé de l'Eglise, et, s'il avait été dénoncé, à raison de l'une de ces censures dont il n'aurait pas reçu l'absolution, on ne pourrait communiquer avec lui. 33. Toutefois, si le supérieur avait une parfaite connaissance des censures non déclarées, et qu'il accordât l'absolution en termes généraux, elle s'étendrait à toutes les censures dont la personne est liée. Bien plus, si le supérieur déclarait qu'il veut donner l'absolution de toutes les censures dont le sujet est lié, le coupable en serait réellement délié. 34. Telles sont les conditions rigoureusement nécessaires pour la validité de l'absolution des censures. Celui qui la donnerait à un coupable qui ne témoigne aucun regret de son crime ferait un usage illicite, mais valide de son pouvoir, si ce pouvoir est ordinaire. S'il était délégué, l'absolution serait très-probablement invalide, parce qu'on doit présumer que l'intention du supérieur n'a pas été de donner un pouvoir pour en abuser. § 2. Des conditions nécessaires pour la licité de l'absolution des censures. • 35. On ne doit point absoudre des censures celui contre qui elles ont été portées, qu'il n'en demande l'absolution, qu'il ne paraisse véritablement converti, qu'il n'ait satisfait, ou au moins qu'il n'offre de satisfaire, et qu'il ne se soumette à l'autorité de l'Eglise, offrant d'accomplir tout ce que le supérieur ecclésiastique lui ordonnera de faire (1). En agir autrement, c'est avilir les censures, entretenir l'insolence des pécheurs, exposer au mépris de l'autorité de l'Eglise et tenir une conduite opposée aux démarches qu'elle fait envers ceux contre qui elle a sévi. Elle les presse, elle les exhorte, elle les menace, afin de les obliger à se soumettre. Ce serait donc alier contre son esprit que de donner l'absolution à celui qui n'aurait rien fait pour l'obtenir. 36. Le rituel romain exige même qu'on leur fasse promettre avec serment, lorsqu'il s'agit de grands crimes, qu'ils ne retomberont pas dans leurs péchés. 38. Les rituels tracent une règle de conduite aux confesseurs qui sont dans la nécessité de donner l'absolution des censures en danger de mort. Si la censure a été publique, ils demandent que le pénitent témoigne publiquement du regret de son crime; qu'il restitue, si la censure a été portée à cause de ses injustices; s'il est dans l'impuissance de le faire, qu'il en prenne l'engagement par écrit, ou au moins qu'il en fasse la promesse en présence de témoins; enfin qu'il s'oblige à se présenter au supérieur ou à son délégué, s'il revient en santé. Si la censure est secrète, on exigera une réparation compatible avec son étal et avec les saintes lois de la charité. Si la censure était cum reincidentia, on lui imposera l'obligation de se présenter après sa guérison au supérieur ou à son délégué. 39. Quoique l'absolution sacramentelle ait seulement le pouvoir de délier des censures in foro interno, et qu'on ne puisse la faire valoir au for extérieur, il ne faudrait cependant pas refuser la sépulture chrétienne à un excommunié dénoncé qui l'aurait reçue (2). Voy. SEPULTURE. ART. V. Des formalités dont doivent être revêtues les différentes espèces d'absolutions des cen sures. 40. L'absolution des censures peut se donner au for de la conscience ou au for extérieur. Les formalités ne sont pas les mêmes pour ces deux espèces d'absolutions. 41. 1° Lorsqu'un confesseur donne l'absolution des censures au tribunal de la pénitence, il n'est pas tenu d'employer d'autre formule que celle de l'absolution employée au tribunal de la pénitence. Elle contient en effet l'absolution expresse de l'excommunication, de la suspense et de l'interdit. Nous observerons que l'Eglise la fait précéder celle des péchés, parce que celui qui est lié par l'excommunication ne peut recevoir de sacrement. Si un confesseur se contentait de dire Absolvo te a peccatis tuis... et qu'il prononçât ensuite l'absolution de l'excominunication, il devrait donc absoudre de nouveau les péchés soumis aux clefs. Au reste l'ordre naturel est suivi dans la formule de l'absolution sacramentelle. Il suffit donc de réciter cette formule. Si l'absolution devait être conditionnelle ou cum reincidentia, il ne serait pas nécessaire d'exprimer la condition, il suffirait qu'elle fût mentale. 42. 2o Il n'y a aucune formule déterminée pour donner l'absolution des censures au for extérieur. Toute parole ou signe extérieur qui exprime sans ambiguïté l'intention d'absoudre de telle ou telle censure, suffit pour en recevoir validement l'absolution. Nous observerons seulement que si la censure avait été portée par écrit ou publiée solen. nellement, il serait de l'intérêt du censur que l'absolution fût écrite ou publiée solen. 37. Cependant saint Thomas pense que si le supérieur juge qu'il est plus utile, soit pour le coupable, soit pour la socié é chrétienne, de donner l'absolution à un excommunié, qui par honte ou par quelque autre motif ne deinande pas à en être relevé, il peut la donner au for extérieur. On doit comprendre qu'il faut des circonstances extraordinaires pour en agir ainsi; car, au lieu de se montrer plus indulgents avec le temps, la plupart des rituels augmentent la peine dans la proportionnellement pour que son existence soit condu retard que le coupable met à se faire délier. (1) Cap. Per tuas, de Sent. excom. statée publiquement, et qu'on ne puisse plus (2) Voy. Rituel de Toulon, des Censures, etc. DE L'ABSOLUTION SACRAMENTELLE. 1. Après le pouvoir de faire descendre Jésus-Christ du ciel sur la terre, il n'en est pas de plus étonnant que celui de remettre les péchés, d'ouvrir les portes du ciel et de fermer celles de l'enfer. Quelques paroles mystérieuses prononcées sur un pécheur repentant produisent ces effets merveilleux. Connaître les paroles essentielles de l'absolution, la manière d'en faire l'application, les personnes sur lesquelles on doit les prononcer, le ministre qui a le pouvoir de les appliquer, les effets admirables qu'elles peuvent produire, ce doit être un des objets principaux des recherches du théologien. Toutefois, ce n'est pas ici le lieu de traiter toutes ces questions. Les effets de l'absolution sont les mêmes que ceux du sacrement de pénitence, l'étude en sera mieux placée au mot PÉNITENCE, n° 12 et suivants. Le confesseur est le ministre de l'absolution, il y a un article spécial qui lui est consacré. Voy. CONFESSEUR. Nous n'avons donc, 1° qu'à étudier la formule J'absolution en elle-même et dans son mode d'application; 2 qu'à rechercher les personnes sur lesquelles elle peut être prononcée avec succès. ARTICLE PREMIER. De la formule de l'absolution considérée en ellemême et dans son mode d'application. 2. L'absolution est la partie essentielle du sacrement de pénitence. Toutes les peines, toutes les œuvres satisfactoires auxquelles se soumettent tous ceux qui veulent rentrer en grâce avec Dieu ne tendent qu'à obtenir la réconciliation qui se fait par l'absolution. Tout ce qui la concerne est donc bien digne de lixer notre attention. Les différentes formules qui ont été employées dans tous les siècles, les expressions employées aujourd'hui, le mode d'application; il n'y a rien en elle qui ne puisse nous porter à de graves considérations. 1° Histoire de la formule d'absolution. 3. Les savants des derniers siècles out feuilleté tous les sacramentaires, les anciens et les nouveaux, les grecs et les romains, les hérétiques et les catholiques, pour y recueiliir les différentes formules d'absolution employées à tous les âges de l'Eglise. Jusqu'aux XII et XIII siècles, la formule de l'absolution était déprécatoire. Le P. Morin, dans un savant ouvrage, où sont recueillies une multitude de formules, a démontré cette vérité jusqu'à l'évidence. La rémission des péchés se faisait par l'imposition des mains et la prière. Feuilletez les ouvrages des Pères, Vous ne verrez pas autre chose (S. Ambr. lib. I de Spiritu sancto, c. 18; S. Léon, epist. 83; S. Aug., lib. 11 de Bapt.; S. Optat, lib. 11). Le P. Morin résume à peu près en ces termes l'absolution déprécative employée alors: Absolve, quæsumus, Domine, hunc hominem a (1) Tourney, t. II, q. 9, art. 1. peccatis suis; ou bien Absolvat te Dominus a peccatis tuis. (Voy. le P. Morin, Screment de Pénit., liv. vii, chap. 8, 10, 11; Chardon, Hist. des sacrements).-4. Les formules d'absolution que les savants des derniers siècles ont recueillies chez les Orientaux prouvent que la forme déprécatoire existe encore chez les Grecs. Le tome V, liv. Iv, ch. 3, de la Per pétuité de la foi, contient plusieurs de ces for mules; et Renaudot assure qu'il n'a pas trouvé une seule formule d'absolution indicative. Elles étaient alors toutes déprécatoires et probablement le sont encore aujourd'hui. Les Orientaux sont trop stationnaires pour avoir fait un pas même en liturgie. 5. Pierre le Chantre, qui vivait à la fin du formule dans sa Somme des sacrements et XII siècle en Occident, n'indique pas d'autre des conseils des âmes. Guillaume de Paris, qui vivait environ trente ans plus tard, ne parle encore que d'une prière pour l'absolution. A cette époque on voit la forme indicative se mêler à la forme déprécatoire, et bientôt la supplanter. Un demi-siècle plus tard, elle n'était plus employée; on révoquait en doute son efficacité, parce qu'elle n'indique pas assez la fonction du prêtre qui est juge. Depuis cette époque la forme indicative a toujours été employée en Occident. Les assertions que nous venons d'émettre ont été combattues par quelques docteurs, sans doute parce qu'elles sont une très-forté objection contre ceux qui prétendent que la forme indicative est seule valide. 6. Laissant à de plus savants que nous d'entrer dans tous les détails de cette discussion, nous nous contenterons d'observer avec Tournely (1) que la forme sacramentelle de l'absolution, suivant l'institution de JésusChrist et la nature du sacrement, est un acte judiciaire. Mais le Sauveur n'a pas déterminé en quels termes on doit l'exprimer, absolus ou déprécatoires; il en a laissé la détermination à son Eglise. Ainsi, quant à la substance du sacrement, c'est la même chose, soit que la forme de l'absolution soit déprécatoire ou indicative, selon qu'il plaît à l'Eglise de le déterminer. L'Eglise a usé du pouvoir qu'elle a sur ces matières en définissant au concile de Trente, sess. 14, cap. 3, que les paroles essentielles de l'absolution sacramentelle sont celles-ci : Ego te absolvo, etc., et que les prières qui les accompagnent sont bonnes et louables, mais qu'elles ne sont point la forme essentielle de ce sacrement. Un prêtre ne pourrait donc, sans péché mortel, employer dans l'Eglise d'Occident la forme déprécatoire. 2. De la formule en elle-même. 7. Les paroles de la forme devant désigner ce que le sacrement opère, il n'y en a pas de plus propre que ces paroles: Ego te absolvo a peccatis tuis, pour signifier tout ce que JésusChrist a donné de pouvoir à ses apôtres, quand il leur dit: Ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel; et elles signifieut clairement le propre effet du sacrement de pénitence, qui est de remettre les péchés, qui sont comme des liens qui tiennent nos âmes resserrées. 8. Tout est-il absolument nécessaire dans les paroles sacramentelles que nous venons d'énoncer? Y en a-t-il qu'on puisse omettre sans nuire à la validité du sacrement, ou au moins sans péché? Le concile de Trente et le pape Eugène IV ont ajouté etc. après ces mols: Ego te absolvo. Est-ce parce qu'ils sentaient que ces paroles employées dans la formule de l'absolution, a peccatis tuis, in nomine Patris, et Filii, et Spiritus sancti, fussent de l'essence du sacrement? ou est-ce une simple abréviation? Les théologiens ne sont pas d'accord sur ce point. Pour dire toute notre pensée sur la nécessité et la valeur de chacun des mots de la formule que nous employons, nous allons en prendre chacun des termes et dire notre opinion sur leur nécessité pour la validité ou la licité du sacrement. On pense communément que l'omission du ot Ego ne nuirait point à la validité du sacrement, parce que le verbe absolvo signifie l'action et désigne suffisamment celui qui l'opère. Il y aurait péché véniel à l'omettre sans nécessité et par négligence. 9. Le mot absolvo est de l'essence du sacrement, parce qu'il signifie principalement la grâce du sacrement. Faut-il en dire autant du mot te? Quelques théologiens le croient, parce qu'il détermine le sujet; d'autres le nient, parce qu'ils pensent que le sujet est suffisamment déterminé par l'action du prêtre qui parle au pénitent, étend la main sur lai, et par ces autres mots : peccatis tuis. Quoique cette dernière opinion nous paraisse la plus fondée en raison, nous jugeons que ce serait une grande témérité d'omettre le pronom te. En matière de sacrement, on ne doit pas se conduire par la probabilité; mais il faut prendre le certain lorsqu'on peut l'avoir. 10. Il y a plus de doute sur la nécessité de ces mots a peccatis tuis. Les uns croient qu'ils sont de l'essence du sacrement, parce que Jésus-Christ, en l'instituant, les a employés Quorum remiseritis peccata. Les autres disent que les circonstances déterminent suffisamment la matière de l'absolution. Cette dernière opinion nous paraît assez fondée en raison; mais, par le motif énoncé dans le paragraphe précédent, nous jugerions coupable de péché mortel celui qui les omettrait volontairement. 11. Quant à ces mots : In nomine Patris, et Filii, et Spiritus sancti, on pense généralement qu'ils ne sont pas de l'essence du sacrement. Quelques théologiens font un péché mortel de leur omission; quelques autres n'en voient point du tout; le plus grand nombre juge qu'il y a un péché véniel: c'est aussi notre opinion. à les omettre, à moins que ce ne soit par mépris, nous recommandons vivement aux confesseurs de se conformer à ce que les rituels prescrivent à cet égard. La plupart disent que dans les confessions plus fréquentes et plus courtes, surtout quand il y a un grand nombre de pénitents à entendre, ou lorsque le confesseur est pressé par la nécessité de remplir quelque autre devoir, il peut omettre Misereatur et Indulgentiam, et se contenter de prononcer la formule: Dominus noster Jesus Christus. 13. Si le pénitent était sur le point de mourir, et qu'il n'y eût pas assez de temps pour prononcer en entier la formule ordinaire d'absolution marquée ci-dessus, il faudrait se contenter de dire, en tenant la nain droite étendue et levée sur le pénitent: Ego te absolvo ab omnibus censuris et peccatis. In nomine Patris, et Filii, et Spiritus sancti. 14. Nous venons de voir les changements qu'on peut apporter à la formule de l'ab-olution par retranchement; on peut y en apporter aussi par addition. Les additions dont s'occupent les théologiens sont les conditions; ils demandent si on peut donner une absolution conditionne.le. La formule d'absolution conditionnelle a rencontré beaucoup d'adversaires. Selon ses ennemis, elle a été inconnue à toute l'antiquité; ce n'est guère que dans le xv siècle qu'elle a commencé à paraître. Le motif de nouveauté serait suffisant pour la condamner. Mais elle a un très-grand inconvénicut : c'est celui de fausser les consciences, de jeter dans une sécurité trompeuse, d'introduire le relâchement et de favoriser la paresse des confesseurs. Un pénitent se croit absous, il est en sécurité; mais la condition ajoutée par le prêtre a annulé l'absolution: il est donc sous l'empire du péché lorsqu'il se croit jus. tifié. Le confesseur doute des dispositions de son pénitent; pour ne pas se donner la peine de travailler à le disposer complétement, il lui donne une absolution conditionnelle en ces termes: Si tu es dispositus. Il n'a pas sur la conscience une absolution sacrilége. 15. Tous les docteurs conviennent aujour d'hui qu'une absolution donnée sous une condition qui regarde le présent ou le passé peut être valide; que celle qui regarde l'avebir est absolument aulle. La première n'empêche ni ne suspend l'action du sacrement; la seconde est suspensive. On ne peut se persuader que l'action du sacrement demeurera suspendue jusqu'à l'arrivée d'une condition dont le terme est peut-être fort éloigné. Saus nous arrêter à discuter les raisons des conditionnalistes et des non-conditionnalistes (1), nous disons que, quoique l'absolution conditionnelle soit valide quand elle est de præsenti vel præterito, cependant on doit toujours se renfermer dans les limites tracées par les rituels. Lorsqu'elles y sont défendues, il ne faut pas les employer, même tacitement. Il y a un grand principe de sécu rité à suivre les principes d'autorité dans les matières discutées et qui n'appartiennent pas 12. Par une louable coutume de l'Eglise, ou joint à la forme essentielle quelques prières; mais elles ne regardent pas l'essence du sacrement. Quoiqu'il n'y ait pas de péché (*) Voyez sur cette matière Benoît XIV, de Synodo diœcesana (Curs. compl. Theol., t. XXV, col. 1069). à l'essence des choses: on grave ainsi dans son esprit et dans son cœur les sentiments de profond respect que nous devons toujours porter à l'autorité dont on suit les lois avec une grande fidélité. Ce respect rejaillit aussi sur le sacrement, dont on ne veut pas de soi-même changer le mode d'administration prescrit par l'Eglise. Nous nous dispenserons donc de rapporter ici les cas particuliers où les auteurs tolèrent l'emploi de l'absolution conditionnelle. Ceux qui voudront les connaître pourront consulter Liguori, lib. vi, no 432. Mais nous recommandons avant tout de consulter le Rituel diocésain. - 3. Du mode d'application de la formule de l'absolution. — 16. Plusieurs anciens casuistes on! enseigné qu'on peut donner validement l'absolution sacramentelle par lettre à un absent. Ils prétendent qu'autrefois cette pratique était assez ordinaire. « Pour la prouver, disent les Conférences d'Angers, ils rapportent divers exemples, par lesquels il paraît, à ce que croient ces casuistes, que les papes et les évêques ont donné par écrit l'absolution à des pénitents qui étaient absents et leur avaient envoyé leur confession par écrit. Les plus célèbres de ces exemples Sont ceux de Robert, évêque du Mans; de Hildebaud, évêque de Soissons; de Remédius, évêque de Lincoln; et de saint Thomas, archevêque de Cantorbéry. Le P. Sirmond, dans le troisième tome des Conciles de France, rapporte une lettre de Robert, écrite en 872, aux évêques de France qui étaient à la cour de Charles le Chauve, au siége de la ville d'Angers, dont les Normands s'étaient emparé. Robert s'y accuse d'avoir commis une infinité de crimes, sans en exprimer aucun en particulier; il en demande l'absolution à ces évêques, qui la lui donnèrent dans la réponse qu'ils lui firent. Le même Père Sirmond, au même tome, dans les notes sur le concile de Douzy, cite une lettre d'Hincmar de Reims à Hildebaud, par laquelle il lui donne l'absolution qu'il lui avait demandée étant malade. Parmi les lettres de Grégoire VI, nous en trouvons une écrite à l'évêque de Lincoln, par laquelle ce pape lui donne l'absolution. Matthieu Paris, en sa Chronique de l'année 1164, nous apprend que saint Thomas de Cantorbéry demanda à Alexandre III l'absolution d'une faute qu'il s'accusait d'avoir commise, en défendant avec trop peu de fermeté les droits de la juridiction ecclésiastique, et que ce pape la lui donna par un rescrit. << Quoi qu'en disent quelques savants du dernier siècle, nous avons peine à croire que ces confessions et ces absolutions fussent sacramentelles il y a beaucoup plus d'apparence que c'étaient des confessions, des absolutions cérémonielles et générales, telles que celles du jeudi absolu. Robert n'était (1) Ut præter illam generalem confessionem, quæque ab ineunte ætate usque ad hanc in qua nunc degis, te commisisse cognoscis, spiritualiter ac sigillatim Deo et sacerdoti satagas confiteri. Hincmar. Rhemens. epist. ad Hildebaidum apud Sirmundum, l. III Concil. Gallia. descendu en aucun détail de ses fautes. Hincmar recommanda à Hildebaud, qu'outre la confession qu'il lui avait faite, il eût so n de se confesser à Dieu et à un prêtre des fautes qu'il savait avoir commises depuis sa jeunesse (1). Alexandre III donna le même conseil à saint Thomas, et le dispensa d'un serment qu'il avait fait (2). Quant à Grégoire VIII, il n'accorda à l'évêque de Lincoln qu'une simple indulgence ou relaxation des peines canoniques, comme l'a remarqué Baronius. « Quoi qu'il en soit de ces faits, nous estimons qu'on ne peut se confesser par lettre à un prêtre qui est absent, ni en recevoir de la même manière l'absolution. C'est le sentiment de saint Thomas sur le quatrième des Sentences, distinct. 17, question 3, article 4, quest. 3. Clément VIII, par un décret du 20 juin 1602, a condamné le sentiment contraire, comme faux, téméraire et scandaleux, et a défendu, sous peine d'excommunication qu'on l'enseignât même comme probable en certains cas. En effet, les paroles de l'absolution marquent la présence de la personne à qui elle est donnée, comme celles de la consécration marquent la présence de la matière qui doit être consacrée. » 17. D'après cela, l'une des conditions essentielles de l'absolution, c'est donc qu'elle soit donnée de vive voix et en la présence même du pénitent. Ici les casuistes examinent à quelle distance le confesseur doit se trouver du coupable. Tous conviennent que la distance d'une conversation ordinaire n'est point trop grande pour la validité de l'absolution. Nous pensons que celui qui est à une distance qui n'est pas trop grande pour être entendu du pénitent peut lui donner validement l'absolution. Notre opinion est fondée sur ce que, dans toute espèce de tribunal, la sentence serait valablement pronon cée à une semblable distance. D'ailleurs, dans ce cas, les paroles sacramentelles conservent toute leur signification. Toutefois il est bon d'observer qu'il n'est nullement nécessaire que le pénitent entende les paroles sacramentelles. Il n'y a rien qui le prescrive. 18. Jésus-Christ a donné au prêtre un double pouvoir, celui de lier et de délier. Or, ce double pouvoir s'exerce en donnant l'absolution ou en la refusant. On convient que le confesseur doit avoir plus de disposition à délier les pécheurs qu'à les lier, et qu'il est mieux de rendre compte à Dieu de quelque excès de miséricorde que d'une trop grande sévérité. C'était une maxime de saint Odilon, abbé de Cluny, qui, au rapport de Pierre Damien, se disait à lui-même: «Si je dois être damn (2) Si igitur aliquid te recolis commisisse, de quo propria te deleat conscientia remordere, quidquid sit, sacerdoti qui discretus et providus habeatur, tibi consulemus per poenitentiam confiteri. Alexander 111, apud Matthæum Paris. in Chronic. |