Page images
PDF
EPUB

sont survenus depuis y ont apporté des changements considérables: d'anciens titres ont disparu, de nouveaux ont pris place, de sorte que cette question n'est guère mieux fixée actuellement que ne l'est celle de la préséance.

On distingue quatre espèces de titres dont les souverains font usage aujourd'hui: les titres désignant les dignités, les titres de possession, les titres de parenté et les titres religieux.

Des titres désignant les dignités.

Titres d'empereur, de roi, de grand-duc, d'électenr, de duc, de landgrave, de margrave, de prince, etc.

C'est sans doute le pouvoir prédominant des anciens empereurs de Rome et de Bysance 1) (qui comptaient même des rois parmi leurs sujets) qui a le plus contribué à faire considérer le titre d'Empereur comme étant le plus élevé pour les souverains. Avant et depuis le moyen âge, ce titre seul leur conférait des droits d'hommage et des prérogatives que plusieurs princes commencèrent à leur refuser vers la fin du Bas-Empire. Depuis longtemps ce titre n'a plus de supériorité réelle sur celui de roi.

Après les empereurs d'Allemagne, on a vu les sou

avaient refusé de recevoir des communications du gouvernement italien.

1) Ce titre (Imperator, Cæsar) a été porté d'abord par les anciens empereurs romains, puis par ceux de Bysance ou Constantinople, et plus tard par les empereurs d'Allemagne. Cf. § 60.

verains de Russie [1721]'), de France [1804-1814] 2), d'Autriche [1805] 3) du Brésil en 1822, s'attribuer successivement la dignité impériale. En 1852 l'Empire fut rétabli en France et en 1863 l'Archiduc Maximilien accepta la couronne du Mexique comme Empereur 4).

1) Ce fut en 1721, que Pierre-le-Grand changea le titre de Tzar en celui d'empereur, prétendant que cette qualification n'était que la traduction du mot slave Czar ou Tear. Ce titre fut successivement reconnu par la Prusse, les Provinces Réunies et la Suède en 1723, par le Danemarc en 1732, par la Sublime Porte en 1739, par l'Empereur d'Allemagne et la France en 1745, par l'Espagne en 1759 et par la Pologne en 1764. Dans la reconnaissance de la France il fut expressément stipulé que ce titre n'aurait aucun effet sur les relations du cérémonial entre les deux cours à l'avènement de l'impératrice Catherine en 1762, cette princesse refusa de renouveler cette stipulation sous la même forme, mais déclara que le titre Impérial ne changerait rien aux cérémonials à observer entre les deux pays. La Cour de Versailles répondit par une contre-déclaration. (WheatonLawrence, p. 300.)

2) La proclamation de Napoléon comme empereur des Français eut lieu le 20 mai 1804; on sait que ce nouveau titre cessa d'être celui du souverain de la France au retour de la maison de Bourbon, en 1814.

3) Ce fut le 4 août 1805 que l'empereur d'Allemagne François II se déclara empereur héréditaire d'Autriche.

4) Quelquefois aussi les rois d'Angleterre se sont attribué le titre d'empereur dans les actes publics concernant l'intérieur de leur royaume, par exemple, en 1603, en 1604 et en 1727; et jusqu'à nos jours même, la couronne d'Angleterre est qualifiée dans tous les actes publics imperial crown. Les rois de France ont toujours pris le titre d'empereur dans leurs négociations avec la Porte et les États Barbaresques; la Porte s'engagea même formellement, par le traité de 1740, à leur accorder ce titre dans toutes les occasions. Voy. WENCK, Codex juris gent., T. I, p. 558. (On trouve une dissertation sur les rois qui se qualifient d'empereur, dans STECK, Essais sur divers sujets intéressants pour l'homme d'État.)

Le Sultan a pris également ce titre, comme correspondant à celui de Padischah; il lui est accordé par toutes les cours qui concluent des traités avec la Porte; mais plusieurs d'entre elles, tout en qualifiant ce prince d'empereur des Ottomans, ne lui donnent point le titre de majesté impériale, mais seulement celui de Hautesse. La Porte, de son côté, n'accorde le titre de Padischah qu'aux empereurs d'Autriche et de Russie, ainsi qu'aux rois de France et d'Angleterre 1).

Le titre roi, considéré comme le plus élevé après celui d'empereur, fut conféré autrefois par les empe-. reurs romains et par ceux de Bysance, et dans des temps plus récents par les empereurs d'Allemagne et par les papes 2). Plus tard, plusieurs princes souverains s'attribuèrent la dignité royale et ceignirent eux-mêmes la couronne 3).

Après les titres d'Empereur et de Roi, suivent ceux d'Électeur, de Grand-Duc, de Duc, de Landgrave, de

1) A la France, depuis ses premiers rapports avec la Porte ottomane, les rois de France ayant toujours pris avec elle le titre d'empereur; à la Russie, depuis la paix de Kaïnardgi; à l'Autriche, depuis 1806; à l'Angleterre, depuis l'ambassade récente de lord Strangfort. Les rois d'Espagne, de Naples, de Prusse, etc., sont tous appelés krals, mot qui dans les langues illyriennes signifie rois.

2) Voy. RÉAL, Science du gouvernement, T. V, p. 837 et 842; KAMPTZ, Neue Literatur des Völkerrechts, § 141.

3) En 1701 l'électeur de Brandebourg prit avec le consentement de l'empereur le titre de roi de Prusse. Les électeurs de Saxe et de Bavière, ainsi que le duc de Wurtemberg prirent le titre royal en formant la Confédération du Rhin avec le consentement de Napoléon. L'électeur de Hanovre adopte le titre de roi sur l'invitation du congrès de Vienne.

Margrave 1), de Prince, qui sont portés par divers princes souverains.

Des titres de possession.

Il dépend de la volonté de chaque souverain d'énoncer tous ses titres en énumérant tous les noms des

différents États qu'il possède. Quelques-uns réunissent dans ce grand titre une si longue série de possessions, que pour faciliter l'expédition des pièces de chancellerie ils ont adopté un titre moyen, et un petit titre pour les affaires ordinaires 2).

Comme quelques souverains conservaient (et con

1) Le titre d'Électeur, n'ayant plus de sens pratique après la dissolution de l'Empire, n'est porté que par le souverain de Hesse-Cassel. Celui de grand-duc fut conféré pour la première fois par Pie V à Cosmo de Medici, souverain de la Toscane; parmi les grand-duchés actuels, ceux de Darmstadt et de Bade datent de la Confédération du Rhin, ceux de Mecklembourg, d'Oldenbourg, de Saxe-Weimar et de Luxembourg du Congrès de Vienne. Le titre de margrave n'est plus porté actuellement par aucun prince comme titre unique de souveraineté.

2) Le grand titre embrasse tous les titres de possessions réelles et ceux de possessions fictives (et parfois usurpatrices), dont la longue nomenclature ne saurait ajouter à la dignité du prince qui se les attribue: en voici quelques exemples: N., par la grâce de Dieu, roi de Sardaigne, de Chypre et de Jérusalem; duc de Savoie, de Gênes, de Monferrat, d'Aoste, du Chablais, du Gènevois et de Plaisance; prince de Piémont et d'Oneille; marquis d'Italie, de Saluces, d'Ivrée, de Suze, de Cève, du Maro, d'Oristan, de Cézane et de Savone; comte de Maurienne, de Genève, de Nice, de Tende, de Remont, d'Asti, d'Alexandrie, de Gociano, de Novare, de Tortone, de Vigevano et de Bobbio; baron de Vaud et du Faucigny; seigneur de Verceil et de Pignerol, de la Tarentaise, de la Lomelline et du val Sesia, etc., etc.

N., par la grâce de Dieu, roi des Deux-Siciles et de Jérusa

servent encore) des titres de possessions qu'ils n'avaient plus, et sur lequelles ils avaient même tout à fait cessé de soutenir des prétentions; et que, d'un autre côté, plus d'une puissance, en réservant ses titres, élevait des prétentions sur des États qu'un autre souverain possédait réellement, on vit souvent ces rivalités allumer des guerres ou faire échouer des négociations. Pour lever toute difficulté et tout embarras, on introduisit l'usage d'insérer dans les traités un article séparé de non præjudicando, par lequel on se prémunissait réciproquement contre toutes conséquences à tirer des titres employés de part et d'autre 1).

lem; duc de Parme, de Plaisance, de Castro; grand-prince héréditaire de Toscane, etc.

N., par la grâce de Dieu, empereur d'Autriche, roi de Hongrie et de Bohême, roi de la Lombardie et de Venise, de Dalmatie, de Croatie, de Slavonie, de Galicie, de Lodomérie et d'Illyrie; roi de Jérusalem; archiduc d'Autriche; grand-duc de Toscane; duc de Lorraine, de Salzbourg, de Styrie, de Carinthie, de Krain; grand-prince de la Transylvanie; margrave de Moravie; duc de la haute et basse Silésie; duc de Modène, de Parme, de Plaisance et de Guastalla, d'Auschwitz et de Zator, de Teschen, de Frioul, de Raguse et de Zara; comte princier de Hapsbourg, de Tyrol, de Kibourg, de Gorz et de Gradiska; prince de Trente et de Brixen; margrave de la haute et basse Lusace et d'Istrie; comte de Hohenembs, Feldkirch, Bregenz, Sonnenberg; seigneur de Cataro et de Windisch-Mark, etc.

Le titre moyen comprend quelques titres de possession réelle: roi, archiduc, grand-duc, prince, margrave, etc.

Le petit titre, qui est le plus usité et n'entraîne aucune difficulté diplomatique, est le titre même de la dignité suprême sous lequel chaque souverain est habituellement désigné.

(On trouve les armoiries des souverains, reproduites par la gravure, dans l'ouvrage publié, à Rostock, par Tiedmann, sous ce titre: Wappen-Almanach der souverainen Regenten Europa's.) 1) Après la cession de la Norvége au roi de Suède, en 1814,

« PreviousContinue »