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Mais la lettre de S. M. l'exprime avec plus de force et de dignité que je ne pourrais le faire. S. M., qui si elle n'avait pas comme attribut de sa couronne le titre de roi catholique l'aurait acquis par son zèle et ses vertus, vénérait le souverain pontife comme le chef visible de l'Église, et entretenait avec Sa Sainteté une affectueuse correspondance dans laquelle elle trouvait la consolation et les conseils dont les souverains ont un si grand besoin à l'époque présente. Heureusement la nation magnanime confiée par la Providence au gouvernement de S. M. Catholique est, comme elle l'a été dans tous les âges, ferme et invariable dans sa loyauté, et aussi prodigue de la vie pour maintenir intacte la sainte religion qu'elle professe que pour défendre les droits de son roi, ou augmenter le riche trésor de gloire dont elle a hérité de ses ancêtres. Au milieu de son affliction, S. M. C. tourne ses regards vers la capitale du monde chrétien, et voit dans le sénat des princes de l'Église le prompt remède de la calamité dont souffre l'Église. Vos Éminences ne tarderont certainement pas à la réparer, en nommant un pontife qui joigne aux vertus du suprême pasteur les qualités d'un souverain qui dans le gouvernement de ses États puisse servir de modèle aux autres souverains, et qui, facile à céder ce qu'il est possible de céder, oppose en même temps avec sa fermeté évangélique une digue insurmontable au torrent des mauvaises doctrines qui sous le faux nom d'idées généreuses sapent dans leurs fondements les trônes de l'Europe, pour les précipiter avec les nations dans l'ignominie et dans le sang, où périt une autre partie du monde, heureuse tant qu'elle conserva pures la religion et la fidélité, qui sont un produit naturel du sol espagnol, et qui seules pourront sauver ces régions de l'abîme de révolutions continuelles.

Cérémonial suivi pour la remise au roi des Belges des insignes de la Toison d'Or.

Des voitures de la cour se rendirent à l'hôtel de la légation d'Espagne et y prirent M. le chevalier d'Argaiz, délégué par Sa M. la reine d'Espagne pour la remise des insignes, et les autres membres de la légation, pour les conduire au palais. M. d'Argaiz fut reçu au bas du grand escalier par des officiers de la maison du roi, et introduit dans un des grands salons du palais.

Dans le salon voisin se trouvait Sa Majesté à qui M. d'Argaiz fit parvenir le message suivant:

La reine régente d'Espagne, au nom de Son Auguste fille la reine Dona Isabelle II, a nommé Votre Majesté chevalier-confrère de l'insigne Ordre de la Toison d'Or, et, à cet effet, Elle en a commis le cérémonial au chevalier d'Argaiz, son chargé d'affaires près de Votre Majesté, qui fait demander si Votre Majesté en admet la nomination.

Sa Majesté répondit qu'elle l'admettait et la recevait, et passa dans le salon où se trouvait le commissaire espagnol. Le chevalier d'Argaiz fit donner lecture de sa commission que voici:

Mon bon frère et cousin, afin d'effectuer l'élection que j'ai faite de votre personne pour vous associer en l'amiable compagnie de mon très-noble et ancien Ordre de la Toison d'Or, j'ai fait dresser mes lettres-patentes de procure en vertu desquelles j'ai requis Monsieur d'Argaiz (Pierre d'Alcantara), mon chargé d'affaires près de votre personne, de vous recevoir en mon nom dans le dit Ordre, et vous délivrer le collier avec les cérémonies accoutumées. Et de tout ce qu'il vous dira de ma part à cette occasion, vous en ferez le même état que s'il vous était déclaré par ma

propre personne. Je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte et digne garde.

A Madrid, ce 17 février 1853.

MARIE-CHRISTINE.

Le Greffier de l'Ordre, Antoine-Hermandez d'Alcantara.

Il ajouta:

La Reine Catholique, Chef et Grand-Maître de l'insigne Ordre de la Toison d'Or, et, en son auguste nom, la ReineRégente, comme un témoignage de l'estime qu'elle a pour Votre Majesté, et se flattant, Sire, de vous voir contribuer au plus grand éclat et à l'élévation de cet insigne Ordre, vous en fait chevalier-confrère.

Le chevalier d'Argaiz demanda ensuite à S. M. si le serment de l'Ordre lui était connu, si elle l'acceptait et le jurait1).

S. M. répondit affirmativement.

Le Roi reçut alors les insignes de l'Ordre des mains. de M. d'Argaiz, qui s'exprima ainsi :

L'Ordre reçoit Votre Majesté dans l'amiable compagnie, en signe de quoi, Sire, ce collier vous est posé. Dieu veuille que V. M. le porte pendant longues années pour son honneur et sa gloire.

1) Voici la formule du serment:

Je jure de soutenir les droits du chef souverain de l'Ordre; de contribuer à maintenir cet insigne Ordre dans le même état et le même éclat où il se trouve, sans permettre qu'il souffre jamais atteinte; de supporter avec patience les peines et corrections que le chef de l'Ordre pourrait m'imposer; de concourir aux assemblées ou chapitres ou bien d'y envoyer des commissaires et enfin de garder et remplir toutes les constitutions et tous les décrets de l'Ordre.

«Au nom du Père, du Fils et du St. Esprit.»>

Il fut dressé un procès-verbal de la cérémonie, lequel est déposé dans les archives de la chancellerie de l'Ordre. S. M. remercia la reine d'Espagne par la lettre dont le texte suit:

Madame ma sœur et cousine, le chevalier d'Argaiz m'a remis la lettre par laquelle Votre Majesté a bien voulu me faire connaître, qu'afin d'effectuer mon admission dans l'amiable compagnie de l'Ordre illustre de la Toison d'Or, elle avait fait choix de son chargé d'affaires près de ma personne, pour me remettre les insignes du dit Ordre, selon les cérémonies accoutumées. Les formalités d'usage étant remplies, je m'empresse d'adresser à Votre Majesté l'expression de la vive gratitude avec laquelle j'ai reçu ce témoignage de son amitié, et c'est avec un véritable plaisir que je saisis une occasion aussi agréable pour renouveler à Votre Majesté les assurances de la haute estime et de l'inviolable attachement avec lesquels je suis

Discours de congé et Lettres pour prendre congé1).

La mission du ministre public terminée, après la remise de la lettre de rappel, l'Envoyé qui se retire prend congé du souverain ou du chef de l'État auprès duquel il était accrédité, et lui adresse à cette occasion quelques paroles respectueuses dans l'audience qu'il en reçoit avant son départ.

Ce discours de circonstance énonce le motif qui a donné lieu au rappel et réitère, selon la situation des affaires, les assurances (plus ou moins sincères) que ce

1) Voy. T. I, § 56.

rappel ne change rien aux dispositions amicales du souverain qu'il cesse de représenter; il renouvelle l'expression de la reconnaissance du ministre pour les bontés ou les grâces dont il a été l'objet pendant sa mission, et qu'il a pu considérer comme un témoignage de satisfaction; il exprime le désir qu'elles se reportent sur son successeur, qui ne négligera rien pour s'en rendre digne dans l'exercice de ses fonctions.

Si le ministre n'a pu réussir dans l'objet de sa mission, il exprime le regret qu'en éprouve son souverain et qu'il en ressent lui-même; il affirme que les bonnes dispositions de son gouvernement n'en seront point pour cela altérées, et il prie le monarque ou le chef de l'État dont il s'éloigne de partager ces mêmes dispositions.

Il est d'usage que l'agent diplomatique rappelé sollicite également une audience de congé des membres de la famille du souverain qui l'ont gracieusement accueilli pendant son séjour; il les remercie respectueusement des bontés qu'ils ont eues pour lui, et les assure des sentiments d'amitié qu'a pour eux le prince à qui il va rendre compte de sa gestion.

Dans le cas où le ministre rappelé se trouverait absent de son poste au moment du rappel, l'usage admet, et de hautes convenances exigent, qu'il remplace par une lettre de congé l'audience qu'il n'a pu demander.

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