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avec da papier, des alimens de tout, et l'on prolonge à force de privations la douloureuse existence d'une garnison exté→ nuée. (1)

DE BONALD.

(1) En 1777, l'Académie de Marseille proposa au concours cette question : « Quelle a été dans tous les temps l'influence du commerce sur l'es» prit et sur les mœurs des peuples? » Le sujet fut traité, et le prix remporté par un compatriote de l'auteur, M. Liquier *, négociant de Marseille, où il étoit universellement considéré pour ses vertus et ses talens, mort en 1790, à l'assemblée constituante, où il avoit été nommé député. Il oșa se décider contre le commerce, et prouva que le commerce extérieur né tend qu'à accroître sans mesure les deux maux extrêmes de la société, l'opulence et la misère, et à consommer les richesses naturelles pour les remplacer par des richesses artificielles. C'est principalement au commerce et à ses innombrables besoins, qu'il attribue le dépérissement des bois, premier besoin des hommes civilisés. En effet, le défaut de combustible est une cause bien plus prochaine de dépopulation, que la rareté même de comestible, parce que l'un se transporte de loin, et non pas l'autre. La révolution a fait dans ce genre des maux incalculables, et peut-être sans remède. Deux systèmes d'économie politique ont régné en France le système de Sully, système agricole, et par conséquent producteur et conservateur des richesses naturelles; le système de Colbert, système commercial et manufacturier, consommateur des richesses natuelles, et producteur des richesses artificielles. Le premier est plus favoTM rrable aux mœurs, à la force politique d'un Etat continental, et ajoute à l'aisance générale, parce qu'il alimente les petites manufactures de produits indigènes, et le trafic intérieur qui sert à les faire circuler. Le second est plus favorable aux arts, à la force maritime d'un Etat insulaire; et il élève de grandes fortunes par les fabriques d'objets de luxe, et de productions étrangères, que le commerce extérieur importe brutes et exporte manufacturées. La France ne peut pas balancer entre ces deux systèmes; car les mener de front paroît impossible, comme il le seroit à un particulier d'exploiter une grande métairie, et de suivre en mêmna temps de grandes opérations de commerce.

*Discours imprimé à Marseille chez F. Brebion, 1778.

MODES du 25 octobre.

Les redingotes de drap, faites nouvellement, ne sont pas encore trèscommunes; mais en revanche, presque toutes offrent un singulier contraste avec les robes qu'elles remplacent. Très-peu amples du devant, asséz serrées sur les hanches, les robes avoient, en général, un faisceau de plis par derrière; Is redingotes, au contraire, grimacent des côtés, bâillent par devant, et ne forment pas un pli à la chute des reins,

Les collets de toutes les redingotes sont amples, et les manches comme aux redingotes d'hommes, descendent quelquefois jusqu'à l'extrémité da ponce.

Sur le modèle des petits chapeaux de paille jaune, qui n'avoient presque pas de bord, et dont la calotte ou forme étoit haute, presque toutes les modistes font des chapeaux de velours noir, gros vert, rose, bleu de ciel ou vert tendré, avec une grosse touffe ou une fleur sur le devant.

Pour les capotes, on a conservé les passes sáillantés ét là formé carréé. Celles de velours noir sont souvent doublées de taffetas blanc on rose. Lès capotes blanches ont des liserets et des coques rosé, ponceau, óu jaune d'ot. Quoique les schalls façon de cachemire soient d'une belle apparence et d'an prix modique, quelques élégantes, pour varier, mettent dés tricots à jour, fort grossiers, et qui coûtent fort cher. Il y en a én poncéïù et en blanc.

NOUVELLES POLITIQUES.

Berlin, 18 octobre.

Les courriers se succèdent, et n'apportent que des nouvelles désastreuses; de courtes proclamations instruisent les citoyens de la situation de l'armée, ét leur recommandent la tranquillité. La princesse héréditaire de Saxe-Weimar es partie d'ici hier, se rendant à Saint-Pétersbourg : le consétller intime de cabinet, M. Lombard, est parti le même jour pour Stettin, où l'on croit que se rendra le roi. S. M. est en ce moment à Charlottembourg. La reine n'a fait que passer dans nos murs; arrivée hier au soir, elle est repartie ce matin. On assure qu'elle a plusieurs fois couru le danger d'être cnlevée par les Français. On emballe et on fait partir tous les effets précieux du château, le trésor, les archives, pour Stettin. on croit qu'ils seront transportés plus loin encore.

Londres, 20 octobre.

On continue à prétendre que Miranda obtient de grands succès; et l'on cite de lui une proclamation datée de Coro, 3 août, dans laquelle il promet à ses concitoyens l'indépendance, sous les auspices de l'Angleterre, et sous la protection de la marine anglaise. Voici l'ordre qui accompagnoit sa pro

clamation :

«Tous les officiers exerçant des charges au nom de la cour de Madrid, sont suspendus de leurs fonctions. Les cours ecclé, siastiques et judiciaires resteront provisoirement en exerciée. Tous les citoyens âgés de 16 à 55 ans, se réunirons à l'armée. Ceux qui feront cause commune avec les agent espagnols, seront punis comme traîtres. Ceux qui exercent des emplois et qui se joindront à l'armée, recevront des honneurs proportionnés à leur zèle. Pour prévenir toute insulte ou agression de la part des soldats, les magistrats feront arborer au haut des clochers, l'étendard national; il sera respecté, comme signe d'union. »

Madrid, 20 octobre.

PROCLAMATION.

« Dans des circonstances moins dangereuses que celles où nous nous trouvons aujourd'hui, les bons et loyaux sujets se sont empressés d'aider leurs souverains par des dons volontaires et des secours proportionnés aux besoins de l'Etat. C'est donc dans la situation actuelle qu'il est urgent de se montrer généreux envers la patrie Le royaume d'Andalousie favorisé par la nature, dans la reproduction des chevaux propres à la cavalerie légère; la province de l'Estramadure, qui rendit en ce genre des services si importans au roi Philippe V, verroient-ils avec indifférence la cavalerie du roi d'Espagne réduite et incom plète, faute de chevaux ? Non, je ne le crois pas; j'espère, au contraire, qu'à l'exemple des illustres aïeux de la génération présente, qui servirent l'aïeul de notre roi actuel, par des levées d'hommes et de chevaux, les petits-enfans de ces braves s'empresseront aussi de fournir des régimens ou des compagnies d'homines habiles dans le maniement du cheval, pour être employés au service et à la défense de la patrie, tant que durera le danger actuel. Une fois passé, ils rentreront pleins de gloire, au sein de leurs familles. Chacun se disputera l'honneur de la victoire; l'un attribuera à son bras le salut de sa famille, l'autre, celui de son chef, de son parent ou de son ami; tous, enfin, s'attribueront le salut de la patrie. Venez, mes chers compatriotes, venez vous ranger sous les bannières du meilleur des souverains; venez, je vous accueillerai avec reconnoissance; je vous en offre dès aujourd'hui l'hommage, si le Dieu des victoires nous accorde une paix heureuse et durable, unique objet de nos vœux. Non, vous ne céderez ni à la crainte ni à la perfidie; vos coeurs se fermeront à toute espèce de séduc tion étrangère. Venez; et si nous ne sommes pas forcés de croiser nos armes avec celles de nos ennemis, vous n'encourrez pas le danger d'être notés comme suspects, et d'avoir donné une fausse idée de votre loyauté, de votre honneur, en xefu, cant de répondre à l'appel que je vous fais.

» Mais si ma voix ne peut réveiller en vous les sentimens de votre gloire, soyez vos propres instigateurs; devenez les pères du peuple au nom duquel je parle; que ce que vous lui devez vous fasse souvenir de ce que vous vous devez à vous-mêmes, à votre honneur, et à la religion sainte que vous professez. » Au palais royal de Saint-Laurent, le 6 octobre 1806. Signé, le PRINCE DE LA PAIX Bamberg, 23 octobre.

Un ordre du jour, publié le 19, a fait une grande impression sur toute l'armée, puisqu'il exprime le mécontentement de S. M. I. sur la conduite du général de division Klein, et du général de brigade Lasalle, qui ont laissé passer deux colonnes ennemies qui étoient coupées, ayant l'un et l'autre ajouté foi à l'assurance qui leur a été donnée par le général prus sien Blucher, qu'il y avoit un armistice de six semaines. Le regret qu'ont éprouvé ces deux braves militaires en appre nanttqu'on avoit abusé de leurs franchise,'ne peut se peindre: il es si cruel de manquer l'occasion d'acquérir de nouveaux droits à l'estime publique, en faisant son devoir! Mais, tout en les plaignant sincèrement, il n'est personne qui n'ait applaudi aux principes suivans, contenus dans l'ordre du jour: «Depuis quand est-ce par le canal de l'ennemi que »S. M. fait passer ses ordres? L'EMPEREUR se flatte que » pareilles erreurs ne seront plus commises. Les lois mili>> taires prononcent les plus grandes peines contre les offi » ciers dans un pareil cas; mais la peine la plus sensible pour » un officier de la Grande-Armée, est de n'avoir pas con» couru en tout point à l'entier succès des opérations. »

PARIS, vendredi 31 octobre.

Un décret rendu par S. M. l'EMPEREUR, au quartiergénéral impérial de Halle, le 19 octobre 1806, contient les dispositions suivantes :

M. Daru, conseiller d'Etat, intendant-général de notre maison, est nommé intendant-général de l'armée. L'intendantgénéral de l'armée organisera et dirigera l'administration des pays conquis. Il nous présentera des sujets pour remplir les fonctions d'intendant des provinces.

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La cour de cassation a décidé récemment, 1°. que dans l'anciecne législation, le marirge contracté à l'extré mité de la vie n'étoit pas nul, lorsque les parties, après avoir manifesté l'intention de s'épouser, en avoient été empêchés

par des obstacles considérables; 2°, que la preuve de ces obstacles étoit admissable.

N. B. Vendredi, 51 octobre, au soir.-Quoique nous soyons certains que les bulletins de l'armée sont déjà connus de tous les lecteurs du Mercure, cependant nous avons cru devoir donner en entier des pièces historiques d'une importance et d'un intérêt aussi grand. Le 16 bulletin, que l'on trouvera à la fin de ce numéro, est le dernier qui ait été publié jusqu'à

ce moment.

V BULLETIN DE LA GRANDE-ARMÉE.

Jena, 13 octobre 1806. La bataille de Jena a lavé l'affront de Rosbach, et décidé, en sept jours, une campagne qui a entièrement calmné cette frénésie guerrière qui s'étoit emparée des têtes prussiennes. ' Voici la position de l'armée, au 13:

Le grand-duc de Berg et le maréchal Davoust, avec leurs corps d'armée, étoient à Naumbourg, ayant des partis šur Leipsick et Halle.

Le corps du maréchal prince de Ponte-Corvo étoit en marche pour se rendre à Dornnbourg.

Le corps

du maréchal Lannes arrivoit à Jena. Le corps du maréchal Augereau étoit en position à Kahla, Le corps du maréchal Ney étoit à Roda.

Le quartier-général, à Gera.

L'EMPEREUR, en marche pour se rendre à Jena.

Le corps du maréchal Soult, de Gera étoit en marché pour prendre une position plus rapprochée, à l'embrancheent des routes de Naumbourg et de Jena.

Voici la position de l'ennemi :

Le roi de Prusse voulant commencer les hostilités au g octobre, en débouchant sur Francfort par sa droite, sur Wurtzbourg par son centre, et sur Bamberg par sa gauche toutes les divisions de son armée étoient disposées pour exécuter ce plan; mais l'armée française tournant sur l'extrémité de sa gauche, se trouva en peu de jours à Saalbourg, à Lobenstein, à Schleitz, à Gera, à Naumbourg. L'armée prus sienne, tournée, employa les journées des 9, 10, 11 et 12, à rappeler tous ses détachemens; et le 13, elle se présenta en bataille entre Capelsdorf et Auerstædt, forte de près de 150,000 hommes.

Le 15, à deux heures après midi, l'EMPEREUR arriva à Jena; et, sur un petit plateau qu'occupoit notre avant-garde, il aperçut les dispositions de l'ennemi, qui paroît manoeuvrer pour attaquer le lendemain, et forcer les divers débouchés de la Saale. L'ennemi défendoit en force, et par une position inexpugnable, la chaussée de Jena à Weimar," et paroissoit penser que les Français ne pourroient déboucher a la plaine sans avoir forcé ce pass ge. Il ne paroissoit

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