Page images
PDF
EPUB

ques et particulières, en jardins, en troupeaux, en pépi nières, est incalculable.

Beaucoup de fugitifs lui doivent, sans peut-être le savoir, ce qu'ils ont retrouvé de leurs fortunes, et nul ne sait ce que seroient devenus les parcs et les maisons royales si, au moment où ils étoient les plus menacés, ils n'eussent été mis sous la garde d'une commission dont il étoit membre. Qui ne sait qu'on ne remplissoit alors des commissions semblables qu'au péril de sa vie? Le seul motif qui ait jamais pu déterminer ce caractère inflexible, à dévier un peu de son attachement rigoureux à la règle établie, c'est lorsque, dans ces temps affreux où l'assassinat avoit le nom de justice, il y avoit quelqu'espoir de sauver une des victimes désignées par les bourreaux qui gouvernoient. Le célèbre botaniste l'Héritier étoit de ce nombre, et comme ancien magistrat, et comme académicien, et comme passant pour jouir de quelque fortune on imagina de le cacher dans le jardin Marboeuf, en qualité de garde-bosquet; mais il falloit que M. Cels consentit à la fraude, et ceux qui ne con→ noissoient pas son cœur craignoient sa rigidité. Il se prêta avec la plus grande joie à prendre sur lui toute la responsabilité d'une bonne action, alors si dangereuse. Les hommes qui ont su, comme lui, résister aux pouvoirs oppresseurs ou imprudens qui se sont élevés successivement pendant nos troubles, et qui ont conservé pour des temps plus heureux, soit des hommes précieux aux sciences el à l'Etat, soit quelque portion importante de la fortune publique, méritent plus d'estime que ceux qui ont fui chaque fois que leurs principes ne prévaloient plus, et doivent sur-tout être soigneusement distingués de ceux qui ont fait varier les leurs au gré de chacun des dominateurs du

moment.

:

Lorsqu'une suite d'événemens presque miraculeux eut ramené la France, après des malheurs dont l'histoire n'offre guère d'exemples, à un degré subit de splendeur et de puissance dont elle en offre peut-être encore moins, M. Cels fut continué dans les fonctions qu'il avoit si honorablement remplies, sous tant de régimes divers. Toutes les branches de l'administration se régénérant avec rapidité, les campagnes attendoient aussi leur police particulière; le conseil d'agriculture fut chargé d'en préparer le Code, et M. Cels eut une grande part à la rédaction. Ce travail étoit immense; il falloit s'instruire des usages de chaque canton, de leurs avantages, de leurs inconvéniens, des rèmèdes

possibles. M. Cels s'étoit procuré ces renseignemens au moyen de questions rédigées avec soin, et adressées par tout l'Empire.

Il falloit ensuite discuter les dispositions projetées, avec des collègues et devant ses chefs, et ici se déployoit mieux encore que dans toute autre occasion la fermeté de son caractère e; et avec raison sans doute, car l'influence d'une mauvaise loi est bien plus funeste que celle d'un mauvais systeme dont peu de gens sont dupes, ou d'une déprédation qui n'a qu'un effet local ou momentané. Il donnoit pour base principale à ses projets de réglemens, l'extension la plus illimitée possible du droit de propriété, et c'étoit à la défendre qu'il mettoit le plus de chaleur. Il falloit, selon lui, donner au propriétaires tous les moyens de s'instruire, et leur laisser ensuite tirer parti de leurs biens par tous les moyens qui ne nuisent point à leurs voisins; mais non prétendre ériger l'instruction en loi, et vouloir être sage pour tout le monde, en faisant dans le cabinet des réglemens généraux qui ne manquent jamais d'être impraticables en beaucoup de lieux.

On pourroit presque dire qu'il a été le martyr de sa doctrine; car il prit sa dernière maladie en retournant à son jardin, un jour qu'il avoit mis toute la chaleur de son esprit à soutenir une disposition importante à l'agriculture, contre laquelle on apportoit des motifs tirés d'autres parties du service public.

Cette maladie fut violente comme son tempérament, et le mit en peu de jours au tombeau le... . de mai dernier, La nouvelle de sa mort nous arriva presque aussitôt que celle de sa maladie, et toutes ces circonstances étoient faites pour augmenter notre surprise et notre douleur.

Parmi tant de vieillards d'un tempérament foible; parmi tant d'hommes livrés aux méditations sédentaires et à la vie mal-saine du cabinet, il en étoit un robuste de corps, s'exercant aux travaux champêtres, vivant dans l'air pur de la campagne, et c'étoit lui que la mort étoit venue choisir dans nos rangs; elle l'avoit atteint au moment de l'année le plus heureux pour lui, lorsque les seules richesses qu'il connût se renouveloient dans tout leur éclat.

Ce jardin, son plus bel ouvrage, d'où il fallut enlever son corps; cette verdure, ces fleurs, ce luxe de végétation, ces paysans du voisinage qui croyoient venir aux obsèques d'un de leurs camarades, et se trouvoient mêlés à quelques-uns de nos magistrats, de nos savans les plus illustres; ce simple discours d'un bon curé de campagne, déplorant un parois

sien vertueux, suivi de harangues qui préconisoient un digne membre de notre première institution littéraire; enfin, cette famille en larmes, tout cet appareil de deuil et de douleur, au milieu de la pompe naturelle de la plus riche cam→ pagne et du ciel le plus pur; cet ensemble et ces contrastes produisirent sur nous une impression dont le souvenir ne sffacera point, et que je ne me reproche pas d'exprimer encore, parce que je sens que ses amis, ses collégues, ceux qui viennent d'être entretenus de ses services, doivent les partager.

VARIÉTÉ S.

LITTÉRATURE, SCIENCES, ARTS, SPECTACLES, ET NOUVELLES LITTÉRAIRES.

L'exposition publique des produits de l'industrie française s'est ouverte le 26 à midi, par un temps favorable, avec un ordre parfait et un concours brillant de spectateurs. La partie de l'exposition renfermée dans les bâtimens de l'administration des ponts et chaussées (autrefois l'école polytechnique) offre un coup-d'œil aussi riche que nouveau. La sont développées les productions de nos plus précieuses manufactures; les chefsd'œuvre de l'orfévrerie, de la bijouterie, les porcelaines, les cristaux, les bronzes, les dentelles, les broderies, couvrent les tables prolongées en perspective, pendant que les tapisseries des Gobelins, de la Savonnerie, de Beauvais, etc., des étoffes de soie servent de tentures; que des meubles magnifiques, des instrumens forment les ornemens de ce vaste local.

Une semblable suite de salles couvertes, réunies dans le même édifice, avoit manqué aux précédentes expositions, et cette circonstance suffiroit pour donner à l'exposition de cette année un intérêt nouveau. Elle a permis de recevoir un grand nombre d'objets précieux qu'on avoit peine à placer dans les portiques ouverts; elle a permis de les rapprocher de manière. à ce qu'ils puissent être comparés. Quelques autres caractères distinguent essentiellement cette exposition des précédentes: elle est beaucoup plus complète, et présente un concours de près de cinq mille fabriques; les départemens y ont pris la part qu'ils devoient occuper, et le spectateur y trouve en abrégé le tableau presqu'entier des manufactures françaises. Aussi le public continue à s'y porter en foule. Les fabricans

qui exposent sont autorisés à vendre les objets qui ne seroient pas nécessaires pour motiver les décisions du jury. Les échantillions envoyés des départemens avoient d'abord été classés par geures, afin qu'on pût d'un coup-d'œil comparer les qualités. Maintenant on les distribue par départemens; chaque département aura son portique ou du moins son panneau dans un portique. On suivra l'ordre alphabétique observé dans la Notice; en sorte que la notice à la main, on pourra successivement connoître les genres principaux de fabrication, les fabriquans les plus distingués de chaque partie de l'Empire. On aura sous les yeux un tableau de notre géographie industrielle. Cette distribution offrira un nouveau sujet d'instruction et de curiosité pour les spectateurs. L'ordre le plus parfait regne au milieu de cet immense concours; les agens du ministre de l'intérieur veillent la nuit à la conservation des objets. Les fabricans mettent la plus grande complaisance à montrer leurs productions. Le terme de l'exposition n'est pas encore fixé.

-La classe des beaux-arts de l'Institut impérial, ayant jugé le prix de composition musicale dans sa séance du 24 septembre, le grand prix a été remporté par M. Bouteiller fils, de Paris, âgé de 18 ans, élève de M. Tarchi, d'après un rapport fait par M. Méhul, et rempli des expressions les plus flatteuses pour le second candidat. Le second prix a été accordé à M. Gustave Dugazon, âgé de 25 ans. Nous avons donné à l'article Poésie, la cantate proposée par l'Institut, et exécutée par les deux aspirans couronnés.

—S. Exc. M. le grand-chancelier de la Légion-d'Honneur est allé, le 28 septembre, voir les travaux qu'il fait faire, d'après les ordres de S. M. l'EMPEREUR et Roi, au château d'Ecouen, l'un des domaines de la Légion d'Honneur, et destiné à l'éducation des filles des membres de la Légion. Ces travaux sont dirigés par M. Peyre, membre de l'Institut et de la Légion d'Honneur, et architecte du palais de la Légion. S. Exc. lui a témoigné toute la satisfaction que lui inspiroit le zèle si actif et si éclairé avec lequel il restaure un monument aussi intéressant pour les arts que le château d'Ecouen, donne à ce bâtiment les dispositions les plus convenables pour sa nouvelle et importante destination, et accélère les travaux de manière que le 1 janvier prochain, on puisse commencer d'y remplir les intentions paternelles de S. M. I. et R., pour les jeunes filles des membres de la Légion-d'Honneur.

Conformément aux intentions de S. M. l'Empereur et roi, le grand-maréchal Duroc a fait remettre à M. Simon graveur du cabinet, les pierres fines brutes qui se trouvent

à la bibliothèque impériale, afin d'exécuter les ouvrages que S. M. lui a commandé. S. M. a daigné en même tempsentretenir cet artiste sur des objets relatifs à son art, et à la manière de graver la pierre fine.

— Un arrêté du ministre de l'intérieur du 16 juin dernier, porte l'établissement, dans l'école impériale vétérinaire d'Alfort, d'une chaire d'économie rurale, M Yvart, propriétaire et cultivateur, membre de la société d'agriculture de Paris, et connu par divers ouvrages estimés, et notamment par l'amélioration remarquable qu'il a introduite dans le vaste domaine qu'il cultive à Maison-Alfort, est nommé professeur. Ce cours commencera le premier novembre prochain; il aura pour objet, les notions élémentaires de botanique économique et de physique végétale appliquées à l'agriculture, la théorie et la pratique des engrais, celles des assolemens, des irrigations, des défrichemens et des desséchemens, l'art des constructions rurales, la connoissance et l'emploi des produits de l'agriculture, l'arpentage, les prairies naturelles et artificielles, les plantations et la culture des arbres, la tenue des registres ruraux, les principes du code rural, et en général toutes les connoissances relatives à l'économie rurale. Les leçons de pratique se donneront sur le domaine cultivé par le profes eur, à Maison-Alfort. Les élèves qui se destineront à suivre ce cours, seront assimilés aux élèves civils, à leur frais, dans l'école impériale vétérinaire d'Alfort; ils auront gratuitement le logement et l'instruction, et n'auront à payer que 24 fr. 80 cent. par mois pour leur nourriture. Les candidats pourront s'adresser au ministère de l'intérieur, pour obtenir leur admission à l'école; ils devront savoir lire et écrire correctement, et fournir à l'appui de leur demande un certifcat de bonne vie et mœurs, délivré par les autorités locales de leur domicile.

- On emploie depuis quelque temps à la décharge et au chargement des diverses marchandises dans les bateaux, une machine fort ingénieuse; elle est montée sur un bateau placé sur la rive de la Seine qui borde le quai Voltaire en face de la ci-devant église des Théatins; elle est mise chaque jour en mouvement. Elle est construite à l'instar des grues qu'on voit dans les ports maritimes; elle présente dans le haut de sa construction deux becs semblables à ceux des grues, mais elle anticipe de beaucoup sur les avantages de ces dernières. Le travail en est aussi prompt que facile L'auteur de cette nouvelle invention a trouvé les moy ens d mettre en pratique ce qu'on appelle la quintessence du lé

« PreviousContinue »