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au-dedans, de leur caractère et de leurs délibérations. Cette idée est aussi noble que populaire. On aime à voir le vainqueur de l'Europe honorer le peuple avec lequel il a triomphe de tous les autres.

Ce goût des monumens publics, cet esprit de magnificence nationale caractérisa toujours les héros et les grands princes. Ils consacrent à cette occupation vraiment royale les jours de leurs repos et de leurs plaisirs. Mais celui qui nous gouverne sait mêler aux soins de la guerre, ces travaux ordinairement destinés aux loisirs de la paix. Un jour, l'histoire observera qu'au moment même où les souverains étrangers, poursuivis par nos armées victorieuses, abandonnoient leurs capitales envahies, nous embellissions tranquillement la nôtre, qui désormais sera moins celle de la France que du monde civilisé. Une grande partie de l'Europe est bouleversée, et jamais la France ne fut plus tranquille, grace à ce génie prodigieux qui veille aujourd'hui pour nous du sein de la Prusse, comme naguère du sein de l'Autriche, et qui, à deux cents lieues de ses frontières, semble n'avoir pas quitté le centre de son Empire. L'année dernière l'a vu dicter des lois dans le palais de MarieThérèse; l'année suivante, même avant d'être révolue, l'a vu maître du palais de Frédéric-le-Grand, et les soldats français ont manœuvré sur les places d'armes de Postdam et de Berlin. Il n'est plus besoin d'aucun effort et d'aucun talent pour bien louer l'auteur de si grandes choses; il ne faut que dire avec simplicité ce qu'il a fait. Plus on sera vrai en parlant de lui, et plus sa vie paroîtra merveilleuse aux regards de la postérité.

Son nom sera gravé sur la nouvelle façade de ce palais dont je viens consacrer avec vous la fondation, et tous les arts n'y pourroient placer un plus bel ornement. Ils représenteront quelques-uns de ses exploits, mais à côté des prodiges de la victoire, ils peindront les bienfaits de la puissance législative. La justice et la religion, en montrant le Code civil et le Concordat, diront comment on arrache les Empires aux désordres de l'anarchie. Des statues placées d'intervalle en intervalle, retraceront le souvenir des grands hommes français dont nous devons étudier la conduite ou les écrits.

On y contemplera ceux dont le génie créateur perfectionnera l'art social, en répandant de nouvelles vues sur le système entier de la législation (1), et ceux dont la vaste doctrine embrassa toutes les parties de la jurisprudence (2), et les ministres des finances qui surent ménager avec soin la fortune

(› L'Hô ̧·ital et Montesqui u.

(2) Cujas et Damoalin.

publique dont l'emploi nous touche de si près (1), et sur-tont les magistrats courageux et fidèles qui n'abandonnèrent jamais la cause des peuples devant le monarque, et qui, dans des jours de foiblesse, soutinrent les droits du monarque contre les peuples révoltés (2).

Ces exemples parleront à tous les cœurs, et l'aspect d'un tel monument doit attester que sous le règne du plus illustre des conquérans, les vertus civiles seront honorées comme les vertus militaires, et que la puissance du glaive ne sera jamais taire celle des lois. »>

Au Rédacteur du MERCURe de France.

en

Le 10 novembre, M. Pons a découvert à Marseille une petite comète; c'est la 97°. que nous aurons connue, suivant le catalogue qui est dans mon Astronomie et les supplémens que j'ai donnés dans la connoissance des temps.

M. Thulis, directeur de l'Observatoire de Marseille, a déterminé leg, à 17 h. 24 m. temps moyen, l'ascension droite 181 d. 39°, et la déclinaison 2 d. 37' boréale. Le lendemain elle étoit de 7 plus occidentale et de 17 plus méridionale. Cette comète n'est point visible à la vue simple, elle est informe, gans noyau sensible; c'est la sixième que M. Pons ait découverte depuis le 11 juillet 1801, mais cette fois il est le seul que je sache; sans son courage et le beau ciel de la Provence, cette comete nous eût totalement échappé.

DE LALANDE.

MODES du 25 novembre.

Les redingotes de drap, que l'on faisoit, il y a quinze jours, à rotonde tantôt flottante, tantôt colante, et pour lesquelles beaucoup de tailleurs avoient imaginé des rotondes postiches, laissent aujourd'hui voir le dos. La mode veut qu'elles pressent la taille comme un corset, et la marquent fort bas. Leurs manches ont toutes un bourrelet, tantôt plissé à soufflet, tantôt coupé par intervalles avec une petite Lande différente.

Les redingotes, comme les douillettes, montent tout droit et sont sans revers. On a fait, ces jours derniers, beaucoup de douillettes en croisé de diverses couleurs, et en velours bleu : ces dernières avoient pur les manches des crevés blancs.

(1) Sully et Colbert.

(2) Molé et d'Ague seau.

Les robes, toujours très-peu amples du devant, et rondes, c'està-dire sans queue, se lacent dans le dos, au lieu de se froncer à l'enfant. Les pattes, toujours pointues, sont très-petites au bas de la taille. On met sur ces robes des garnitures bouffantes, composées de rubans et de crêpe. Les manches, gonflées à l'espagnole, n'ont, au bas, qu'une simple coulisse.

NOUVELLES POLITIQUES.

Gênes, 19 novembre.

Quelques lettres de Marseille annoncent qu'un bâtiment arrivé du Levant, a apporté la nouvelle que la Porte ottomane a déclaré la guerre à l'Angleterre et à la Russie. Cette nouvelle se trouve confirmée par des lettres de Livourne, où elle est également parvenue par un vaisseau qui a fait la traversée de Constantinople en seize jours. Les ambassadeurs de Russie et d'Angleterre avoient déjà quitté cette capitale.

PARIS, vendredi 28 novembre.

La corvette la Créole est arrivée de l'Isle-de-France après 33 jours de traversée; et a apportée les dépêches du général Decaen, capitaine-général de la colonie. Les deux Isles-deFrance et de la Réunion avoient éprouvé deux ouragans violens, le 21 février et 10 mars. Leur effet le plus fâcheux a été de détruire les récoltes de bled et de maïs : heureusement que les soins et l'activité de l'administration sont parvenus à introduire dans ces colonies, une quantité surabondante de riz. La récolte nouvelle présente les plus belles espérances; et on est dégagé de toute inquiétude à cet égard. Le général Decaen avoit reçu les nouvelles garnisons parties de France au commencement de l'année; elles n'avoient pas perdu un seul homme dans la traversée. Les bâtimens de Sa Majesté se sont emparés dans les mers de l'Inde de plusieurs bâtimens ennemis, qui sont heureusement arrivés dans les colonies. Du nombre de ces prises est le Warren-Hastings, vaisseau de la compagnie des Indes, venant de Chine avec un chargement complet. Un extrà schip de la compagnie anglaise, du port de 800 tonneaux, dont le nom est encore inconnu, venoit de mouiller avec un chargement complet de coton et bois de sandal; ce dernier avoit été pris par la Sémillante, capitaine Motard, ainsi qu'un autre nommé le Janus- Demont, du même port et de la même capacité, qui n'étoit pas encore

arrivé. Quatre autres bâtimens de l'Inde avoient été brûlés ou coulés par cette frégate. Des corsaires ont aussi amené dans la colonie diverses prises, savoir: le Manchot : les navires le Henri-Addington et le Kebles, capturés sur la rade de Bancoul, et dont les cargaisons sont estimées 500,000 fr.; le Napoléon: l'Expériment, de 660 tonneaux, avec un chargement de thé; la Bellone: deux baleiniers; la Henriette : la Vipère, port et chargement non indiqués, et le Phoenix, de 600 tonneaux, évalué 700,000 fr. Dans les trois mois précédens, sont arrivées les prises dont les noms suivent, et ayant divers chargemens.

Le Henry, venant de Liverpool, de 200 tonneaux; Melville, de Calcutta 800; l'Endeavour, de Bassora, 300; la Princesse de Galles, de Cancoul, 200; le Diamant, de Londres, 460; Hercule, de Bombay, 500; le Wuldegrave, de Chine, 600; le Robuste, de Calcutta, 330; le Commerce, de Calcutta, 580; la Betzi, du Pegu, 600. (Journal officiel.) - Des lettres de Mayence assurent que S. M. l'Impératrice part pour se rendre à Berlin.

-Le Moniteur du 26 a donné, en trois supplémens, toutes les pièces de la dernière négociation entre la France et l'Angleterre. Nous regrettons que le défaut d'espace ne nous permette pas de les insérer dans le Mercure.

XXXII BULLETIN DE LA GRANDE-ARMÉE.

Berlin, le 16 novembre 1806.

Après la prise de Magdebourg et l'affaire de Lubeck, la eampagne contre la Prusse se trouve entièrement finie. Voici quelle étoit la situation de l'armée prussienne en entrant en campagne. Le corps du général Ruchel, dit de Westphalie, étoit composé de 33 bataillons d'infanterie, de 4 compagnies de chasseurs, de 45 escadrons de cavalerie, d'un bataillon d'artillerie et de 7 batteries, indépendamment des pièces de régiment. Le corps du prince d'Hohenlohe étoit composé de 24 bataillons prussiens et de 25 bataillons saxons, de 45 escadrons prussiens et de 36 escadrons saxons, de 2 bataillons d'artillerie, de 8 batteries prussiennes et de 8 batteries saxonnes. L'armée commandée par le roi en personne, étoit composée d'une avant-garde de 10 bataillons et de 15 escadrons, commandée par le duc de Weimar, et de trois divisions: la première, commandée par le prince d'Orange, étoit composée de II bataillons et de 20 escadrons; la seconde division, commandée par le général Wartensleben, étoit composée de 11 bataillos et de 15 escadrons; la troisième division, commandée par le général Schmettau, étoit composée de 10 ba

taillons et de 15 escadrons. Le corps de réserve de cette armée, que commandoit le général Kalkreuth, étoit composé de deux divisions, chacune de 10 bataillons des régimens de la garde ou d'élite, et de 20 escadrons. La réserve, que commandoit le prince Eugène de Wirtemberg, étoit composée de 18 bataillons et de 20 escadrons.

Ainsi le total général de l'armée prussienne étoit de 160 bataillons, et de 236 escadrons servis par 50 batteries; ce qui faisoit présens sous les armes 115,000 hommes d'infanterie, 130,000 de cavalerie, et 800 pièces de canon, y compris les canons de bataillon. Toute cette armée se trouvoit à la bataille du 14, hormis le corps du duc de Weimar, qui étoit encore sur Eisenach, et la réserve du prince de Wirtemberg; ce qui porte les forces prussiennes qui se trouvoient à la bataille, 126,000 hommes. De ces 126,000 hommes, pas un n'a échappé. Du corps du duc de Weimar, pas un homme n'a échappé. Du corps de réserve du duc de Wirtemberg, qui a été battu à Halle, pas un homme n'est échappé. Ainsi ces 145,000 hommes ont tous été pris, blessés ou tués. Tous les drapeaux et étendards, tous les canons, tous les bagages, tous les généraux ont été pris, et rien n'a passé l'Oder. Le roi, la reine, le général Kalkreuth, et à peine dix ou douze officiers, voilà tout ce qui s'est sauvé. Il reste aujourd'hui au roi de Prusse un régiment dans la place de Gros-Glogau qui est assiégée, un à Breslau, un à Brieg, deux à Varsovie, et quelques régimeus à Koenigsberg; en tout à-peu-près 15,000 hommes d'infanterie, et 3 ou 4,000 hommes de cavalerie. Une partie de ces troupes est enfermée dans des places fortes. Le roi ne peut pas réunir à Koenigsberg, où il s'est réfugié dans ce moment, plus de 8000 hommes.

Le souverain de Saxe a fait présent de son portrait au général Lemarois, gouverneur de Wittemberg, qui, se trouvant à Torgau, a remis l'ordre dans une maison de correction, parmi 600 brigands qui s'étoient armés et menaçoient de piller la ville.

Le lieutenant Lebrun a présenté hier à l'EMPEREUR quatre étendards de quatre escadrons prussiens que commandoit le général Pelet, et que le général Drouet a fait capituler du côté du Lauenbourg. Ils s'étoient échappés du corps du général

Blucher.

Le major Ameril, à la tête d'un escadron du 16o de chasseurs, envoyé par le maréchal Soult le long de l'Elbe, pour ramasser tout ce qui pourroit s'échapper du corps du général Blucher a fait un millier de prisonniers, dont 500 hussards, et a pris une grande quantité de bagages.

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