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l'utilité de ces subsides qui nous a été prouvée par l'expérience d'une année. La Suède a fourni le nombre complet de troupes auquel, elle s'étoit engagée; ces troupes, avec celles du général Wallmoden que l'Angleterre soudoie, ont procuré à la cause commune un renfort de cinquante mille hommes. Comme le Prince Royal a déclaré qu'il oublioit l'intérêt particulier de la Suède en faveur de la cause commune; comme il remplit cette promesse dans toute son étendue; que dans les glorieux événemens qui se sont passés sur le continent, son nom a été couvert d'un éclat brillant; comme il s'est engagé à faire tous ses efforts pour faire exécuter le plan convenu, quel qu'il fût; comme il en a lui-même dressé trois, dont chacun étoit de nature à être adopté ; comme avec une armée telle que la sienne, composée en grande partie de recrues ou de troupes de diverses nations, il a eu de grands succès contre les meilleures troupes françoises, je ne doute pas que tous les membres ne souhaitent que les rapports avec la Suède soient renouvelés. Avec cette armée, et soutenu par le général expérimenté dont le nom ne peut jamais être prononcé qu'avec gloire (je parle de Blücher), le Prince Royal, avant de passer l'Elbe, a déjà fait beaucoup de mal à l'ennemi. Il ne lui a pas été possible de tour

ner ses forces vers Hambourg; mais il ne faut pas oublier qu'en combinant ses marches avec celles des alliés, au lieu de diviser ses forces, le Prince Royal a essentiellement contribué aux

succès.

Je dois fixer maintenant votre attention sur la Russie et sur la Prusse, les deux puissances à l'égard desquelles il faut que nous fassions les plus grands efforts. On leur a accordé cinq millions de livres sterling: comme c'est d'elles que dépend surtout le résultat de la guerre actuelle, le gouvernement a cru devoir leur allouer cette. somme. Il est vrai qu'avant l'armistice les troupes de ces deux puissances paroissoient n'être pas au complet; mais la marche accélérée des Russes et les fatigues qu'elle occasiona ne permirent pas à tous les renforts d'arriver à temps. La forte armée de réserve ne peut être sur-le-champ transportée sur un théâtre si éloigné. Mais la Russie a fait tout ce qui étoit possible. Aussi l'Empereur Alexandre, en signant l'armistice, a eu les plus grands égards pour notre pays et pour d'autres puissances. Il n'a rien négligé pour porter le dominateur de la France à des conditions de paix équitables. Cette démarche étoit nécessaire pour convaincre son propre peuple, et surtout l'Autriche, qu'il n'étoit pas possible d'a

voir la paix sans faire de nouveaux et de plus grands sacrifices. Le résultat de cette sage conduite fut que l'Autriche se détermina à prendre part aux efforts nécessaires pour obtenir une paix juste. Dans l'intervalle, la Russie employa la plus grande activité et promptitude, et fit arriver son armée de réserve dans le moment où elle devint décisive. Depuis, elle a remplacé cette réserve sur ses frontières par de nouvelles levées qu'elle a faites. Après avoir sauvé son empire, l'Empereur de Russie étendit sa sollicitude sur les pays voisins, et donna ses généraux et ses troupes pour les délivrer; libre de toute méfiance et de tout orgueil, il renonça généreusement au droit de les diriger, et les subordonna aux généraux de ses alliés, pour coopérer à la grande

cause.

La gloire de la Prusse n'est pas moins grande. Lorsqu'on commença à négocier avec cette puissance, on ne crut pas qu'elle pourroit fournir des forces considérables; mais ce qui caractérise cette guerre, c'est que le pays qui y avoit le plus souffert s'est relevé avec le plus d'éclat. L'esprit de la nation s'est éveillé; il sut triompher de toutes les difficultés, renouvela l'époque la plus glorieuse de l'histoire de la Prusse, et fit naître une armée qui sut se placer à côté de celles des plus

puissans empires. Il est de mon devoir de déclarer. que dans ce moment la Prusse fournissoit plus de deux cent mille hommes. Je dois en même temps rendre justice aux talens et aux services signalés du général Scharnhorst, qui a été tué dans la bataille de Lutzen. C'est à ses efforts infatigables qu'on doit en grande partie le réveil de l'énergie prussienne. Après sa mort, sa place a été supérieurement remplie par le général Gneisenau (1); l'un et l'autre ont prouvé ce que eur pays pouvoit effectuer, et le dernier a fait voirqu'on n'a pas négligé de mettre à profit le temps de l'armistice. Pendant sa durée il a formé soixante-dix bataillons, dont cinquante ont combattu glorieusement sous le général Blücher. Je puis affirmer que, même dans les plus beaux temps du grard Frédéric, l'armée prussienne n'a jamais été plus

(1) Nous devons rectifier ici une erreur que nous avons commise, tome II, page 289 de ce Recueil, en attribuant à M. de Gneisenau le Précis de la campagne de 1813 jusqu'à l'époque de l'armistice, que nous y avons inséré. Nous l'avons fait d'après l'opinion qui nous avoit paru généralement adoptée; mais nous avons été détrompés par M. le général de Gneisenau lui-même, qui nous a déclaré que ce Précis est de M. de Clausewitz, colonel dans la légion russe-germanique, et que ce général appelle un officier très-distingué.

nombreuse, mieux disciplinée et mieux dressée à des opérations militaires que dans le moment actuel. En effet, l'armée prussienne, proprement dite, n'a jamais été si forte; quoique nouvellement levée, elle a combattu et vaincu les troupes exercées de la France. Je suis très convaincu qu'on voudra soutenir de tels efforts.

Quant à la réunion de l'Autriche à la cause de la liberté, il ne peut régner à cet égard qu'une seule opinion. On croit peut-être que les subsides que nous lui avons payés ont été proportionnés à la grandeur du service qu'elle a rendu en se déclarant pour la cause commune; mais les efforts que nous avions faits ne nous ont pas permis de rendre toute la justice à l'importance de la démarche de l'Autriche. La somme par laquelle cette puissance doit être soutenue est d'un million avec cent mille fusils et différentes munitions; si la guerre se prolongeoit au-delà du 1er mars 1814, une nouvelle convention sera arrêtée.

No CVII.

Déclaration du Grand-Duc de B de, du 23 novembre 1813.

CONFORMÉMENT à l'exemple de mon illustre aïeul qui m'a précédé dans le gouvernement,

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